|
VERDA Antoine
"Hommes 40 - chevaux 8"
Jean-Marie Buquet
Historique du 62ème B.C.A.
1939 -
1940
Guerre
1939-1945
Avec le
62e Bataillon de Chasseurs Alpins
Postface de Michel EL BAZE
TABLE
Après
avoir quitté son cantonnement en Alsace, le Chef de Groupe
Antoine Verda commence sa guerre le 17 Mai 1940 sur le
Canal de l’Oise à l’Aisne à l’Est de Soupir. Son aventure,
qu’il nous raconte en termes simples mais combien
évocateurs de cette triste période, se termine rapidement
par la retraite de sa Compagnie, le 3e, vers la Marne pour
son dernier combat d’arrière garde, le 13 Juin à Vertus. La
durée de vie du 62e Bataillon de Chasseurs Alpin fut
brève. Créé le 2 Septembre 1939 au Camp de Caïs, près de
Fréjus, il fut dissout le 1er Août 1940 à Millau.
L’historique qu’a écrit et qu’a bien voulu nous confier
l’Adjudant Chef Jean-Marie Buquet, nous permet de placer
le récit du témoin dans l’environnement des actions de ce
bataillon qui fut le bataillon de réserve du 22e Bataillon
de Chasseurs Alpins.
After having left
his camp in Alsace, the Chief of Group Antoine Verda
begins his war it 17 May 1940 on the Canal of Oise to
Aisne to East of Soupir. Its adventure, which he tells
us in simple terms but how much evocative of this sad
period, ends rapidly by the retirement of its Company,
3e, to the Marne for its last combat of rear guards,
13 June to Vertus. The duration of life of 62e
Alpine Hunter Battalion was brief. Created 2 September
1939 to the Camp of Caïs, close to Fréjus, it was
dissolved 1st August 1940 to Millau. The historical
that has written and has well wanted to confide us the
Adjudant Chief Jean Marie Buquet, allows us to place
the account of the witness in the environment of
actions of this battalion that was the battalion of
reserve of 22e Alpine Hunter Battalion.
Nachdem er sein Quartier im Elsass
verlassen hat, fangt der Chef de Groupe Antoine
Verda seinen Krieg am 17. Mai 1940 an auf der Kanal
von der Oise bis an die Aisne im Osten von Soupir.
Sein Abenteuer, das er uns in einfachen aber
anschaulichen Worten von diesem traurigen
Zeitabschnitt schildert, endet schnell durch den
Rückzug seiner Compagnie, der 3., Richtung Marne zu
seinem letzten Rücckzugsgefecht, am 13. Juni in
Vertus. Die Lebensdauer des 62.
Bataillon de Chasseurs Alpin war kurz. Gegründet am
2. September 1939 im Truppenlager von Cais, nahe bei
Fréjus, wurde es am 1. August 1940 in Millau
aufgelost. Die historische Beschreibung, die der
Adjudant Chef Jean-Marie Buquet verfasst und uns
anvertraut hat, erlaubt uns, den Augenzeugenbericht
in den Kontext der Tatigkeit dieses Bataillons zu
bringen, das das Ersatzbataillon des 22. Bataillon
de Chasseurs Alpins war. `
EN GUISE DE PRÉFACE
TABLE
Documents allemands sur les combats des
22° et 62° B.C.A. en Mai et Juin 1940
Journal de Marche de la 5e Infanterie
Division
Le
20 Mai dans l’après-midi, les deux avant-gardes motorisées
de l’Infanterie Régiment 75 prennent contact avec les 22°
et 62° B.C.A. Ce sont des Chasseurs Alpins. Le Régiment
reste au contact tandis que les autres unités de la
Division s’étalent entre Oeuilly et Chevregny. Le front
est relativement calme et ne comporte que des engagements
locaux. Le 1er Juin, la 5° I.D. est transférée dans le
secteur d’Oeuilly à Beaurieux.
20 May in the
afternoon, the two motorized avant-gardes of the
Regiment Infantry 75 take contact with 22 and 62
B.C.A. This are Alpine Hunters. The Regiment remains
to the contact while the other units of the Division
display between Oeuilly and Chevregny. The front is
relatively calm and comprises only local commitments.
1st June, 5 I.D. is transferred in the sector of
Oeuilly to Beaurieux.
Am 20. Mai am Nachmittag nehmen die
zwei motorisierten Soldaten der Vorhut des
Infanterieregiments 75 Kontakt auf mit den 22 und 62
B.C.A. Das sind Chasseurs Alpins. Das Regiment
bleibt in Kontakt wahrend die anderen Einheiten der
Division sich zwischen Oeuilly und Chevregny
ausbreiten. Die Front ist relativ ruhig und enthalt
nur lokale Einsatze. Am 1 Juni wird die 5 I.D. in
das Gebiet von Oeuilly bis Beaurieux verlegt.
Journal de Marche de la 291e Infanterie Division
La
291 Infanterie Division prend position dans le secteur de
Braye à Bourg et Comin les 3 et 4 Juin. Le 4 Juin, ses
unités passent à l’attaque face aux 27° et 47° B.C.A. (qui
ont relevé les 22° et 62° B.C.A. au cours de la nuit du
1er au 2 Juin.) Les 8 et 9 Juin, ses unités se heurtent au
62° B.C.A. Le 10, elles tentent de franchir la Vesle de
part et d’autre de Fismes. Son attaque frontale contre
Fismes (que défend le 22° B.C.A.) est un échec. Le 11
Juin, l’Infanterie Régiment 506 se heurte au 22° B.C.A.
lors de sa tentative de franchissement de la Marne, dont
les reconnaissances aériennes avaient signalé que la rive
sud n’était pas occupée. "...à nouveau, des armes
automatiques habilement installées et une artillerie très
adroite dérangent considérablement les préparatifs de
franchissement de la Marne.
291
Division Infantry takes position in the sector of Braye
to Bourg and Comin them 3 and 4 June. 4 June, its units
pass the attack to face 27 and 47 B.C.A. (that have
raised 22 and 62 B.C.A. in the course of the night of
1st to 2 June.) 8 and 9 June, its units knock to 62
B.C.A. The 10, they tempt to cross the Vesle of share
and other of Fismes. Its frontal attack against Fismes
(that defends 22 B.C.A.) is a failure. 11 June, the
Regiment Infantry 506 knocks to 22 B.C.A. during its
attempt of clearing of the Marne, whose aerial
recognitions had signaled that the south bank was
occupied. ...again, automatic arms cleverly installed
and a very skillful artillery disturb considerably
preparations of clearing of the Marne.
Die 291. Infanterie Division nimmt am
3. und 4. Juni Stellung im Gebiet von Braye bis
Bourg und Comin. Am 4. Juni gehen seine Einheiten
zum Angriff über gegenüber den 27 und 47 B.C.A. (die
die 22 und 62 B.C.A. im Lauf der Nacht vom 1 auf 2
Juni abgelost haben.) Am 8 und 9 Juni stossen seine
Einheiten mit der 62 B.C.A. zusammen. Am 10
versuchen sie die Vesle von beiden Seiten von Fismes
zu überqueren. Ihr Frontalangriff auf Fismes (das
die 22 B.C.A. verteidigt) ist ein Fehlschlag. Amm 11
Juni stosst das Infanterie Regiment 506 mit dem 22
B.C.A. zusammen bei seinem Versuch, die Marne zu
überschreiten, bei dem die Luftaufklarung gemeldet
hatte, dass das Südufer nicht besetzt sei.
"wiederholt storen automatische Waffen geschickt
aufgestellt und eine sehr gewandte Artillerie
betrachtlich die Vorbereitungen zum Überqueren der
Marne."
TABLE
En guise de préface
Journal de marche de la 5e
Infanterie Division
Journal
de marche de la 291e Infanterie Division
Mai et Juin 1940
Adjudant-Chef Jean-Marie
Buquet . Historique du 62ème B.C.A. 1939-1940
Mai et Juin 1940
TABLE
En
cantonnement depuis la mi-Avril en Alsace le 62ème BCA se
prépare dés le I2 Mai à faire mouvement pour opérer une
relève sur la ligne Maginot. Les préparatifs de ce
déplacement sont en cours lorsque parvient du commandement
un ordre différent nous désignant une autre direction.
Notre départ ne traînera pas. Quelques heures plus tard
nous sommes en route, sac au dos. Mais quelque chose a
déjà changé: l’aviation allemande montre une certaine
agressivité alors que jusque là nous avions eu si peu
affaire à elle. Le
soir même la grande aventure qui commence pour nous débute
par notre embarquement dans des "Hommes 40, chevaux 8". Ce
voyage comportera maintes péripéties en ce sens qu’il nous
faudra quelquefois descendre du train, en rase campagne,
marcher quelque peu et nous réinstaller dans un autre
convoi. Cela nous fait supposer l’existence de
bombardements aériens ennemis sur nos voies ferrées. Tant
bien que mal notre train atteint la gare de Vitry le
François où le spectacle est hallucinant: plusieurs
convois sont bloqués, des bâtiments et des wagons sont en
feu, sur la gare s’acharne l’aviation ennemie. Nous
quittons à deux ou trois reprises nos wagons pour nous en
éloigner afin d’éviter si possible le pire. Sur le soir
nous fuyons enfin ce dangereux secteur, mais nous subirons
encore de nombreux arrêts en cours de route. Notre train
stoppera définitivement dans la nuit, en plein champs et
nous en aurons ainsi terminé avec ce moyen de transport.
Il nous restera à marcher jusqu’au lieu des combats. Le
lendemain vers midi nous atteignons la banlieue de Reims
alors que se déroule sur nos têtes un grandiose carrousel
aérien où avions français, anglais et allemands
s’empoignent à mort. Cependant
tout au long de notre marche forcée grande avait été notre
surprise de croiser des quantités importantes de civils,
femmes, enfants et vieillards, encombrés de quelques
bagages et préoccupés de quitter rapidement la zone que
nous traversions. Nous prenions lentement conscience qu’il
se passait quelque chose d’anormal et que le front ennemi
se situait bien moins loin que nous le pensions. La vérité
nous est révélée dans toute sa brutalité lorsque, réunis
dans le hangar d’une immense ferme de cette banlieue
rémoise, notre Commandant de Compagnie nous informe de
quelle manière nos lignes ont craqué vers Sedan, d’où il
résulte que nous ne sommes couverts que par des troupes en
retraite, c’est dire pratiquement pas du tout. Que dire de
notre étonnement et de notre déception! Le Lieutenant
Ciaudo évoque ensuite les situations analogues des
combattants de la Marne en 1914 et de nous-mêmes en I940,
en ce sens que notre mission parait identique à celle
qu’on exigea de nos anciens. Prévoyant ainsi un contact
très prochain et brutal avec l’ennemi, il nous donne ses
dernières directives et nous adjure de ne pas craindre de
nous sacrifier comme le firent nos aînés en pareille
circonstance. Le choc psychologique est immense. Les
hommes sont silencieux, les visages graves. Nous savions
bien que la guerre et ses misères étaient pour bientôt,
mais apprendre tout à coup qu’elle va vous étreindre
incessamment, sans ménagement aucun, ça c’est autre chose.Aussitôt
nous embarquons dans des autocars qui prennent la
direction du Nord. Nous traversons Reims complètement
désert et prenons la route de Laon. Mais des avions
allemands nous prennent en chasse et plusieurs fois nos
bus s’arrêteront en bordure de route. Nous les réintégrons
après les alertes jusqu’au moment où le chef de convoi
décide de ne plus aller de l’avant, car nous dit-il, sa
mission consiste à nous convoyer le plus loin possible
sans pour cela risquer le matériel dont il est
responsable. Les cars font demi-tour. Nous continuons à
marcher une bonne partie de la nuit et, après un sommeil
bien nécessaire et très apprécié, nous avançons encore
vers le front toute la journée du lendemain. Aucun
ravitaillement ne nous parvient. Nous grignotons les
galettes réglementaires de notre réserve accompagnées de
quelques morceaux de sucre. L’exode des habitants continue
de plus belle, leurs maisons et leurs bêtes sont
abandonnées. C’est
alors que nos supérieurs nous informent de l’accession du
Général Weygan au Commandement Suprême des armées, en
place du Général Gamelin destitué. Cette nouvelle nous
réconforte car nous connaissons de réputation le prestige
de ce grand chef. Il nous faudra tenir impérativement une
ligne de défense que le haut commandement a définie et y
parvenir pour s’y fixer avant que ne s’y trouve
l’avant-garde ennemie. Enfin
le I6 Mai au soir nous atteignons la position qui nous est
assignée, à l’Est de Soupir sur le canal de l’Oise à
l’Aisne. Notre section s’installe devant le pont routier
et l’écluse de Moussy avec mission d’en interdire le
passage. Nous y relevons des éléments du G.R.D. Le
Lieutenant d’Allard chef de section se place en retrait de
la position avec le 1Oème Groupe du sergent Menassier ,
tandis que le 11ème Groupe que je commande ainsi que le
12ème provisoirement sous mes ordres se retranchent aux
abords des objectifs à défendre. Nous avons la hantise de
voir apparaître les Allemands sur l’autre rive avant
d’être nous mêmes installés. Pendant la nuit nous nous
activons à créer un embryon de défense. A notre grande
surprise l’emplacement sur lequel nous sommes a déjà été
utilisé pendant la guerre de 14-18. Des tranchées en
partie éboulées et couvertes de ronces se dessinent encore
sur le terrain. En creusant le sol nous mettons à jour,
tels des archéologues, des objets de toutes sortes débris
de fusils, cartouchières, boites de "singe", vides etc ...
ainsi que quelques longueurs de fils de fer barbelé,
lesquelles, bien que rouillées, seront encore utilisables. A
la pointe du jour l’ennemi n’est toujours pas en vue.
Malgré notre fatigue nous travaillons encore durant la
journée à améliorer notre point d’appui, lequel au soir de
cette journée d’attente reste malgré tout sommaire. Nous
abordons la 2ème nuit alors que les hommes qui ont peu
dormi depuis 48 heures sont épuisés. Le repos est
nécessaire à tous. Seuls veillent deux guetteurs que j’ai
placés au débouché de la passerelle de l’écluse, et moi
même en position au FM. La nuit s’écoule d’abord dans un
calme absolu, mais soudain un appel discret des guetteurs
m’avertit de la présence de l’ennemi. Je vois en effet des
soldats de la Wehrmacht profiler leurs silhouettes au
clair de lune sur le coteau qui nous fait face au delà du
canal, à 200 mètres de distance au plus. Il doit s’agir
d’une patrouille de reconnaissance. L’émotion m’étreint
car je réalise que dans les secondes qui vont suivre des
hommes vont probablement mourir. J’ajuste posément et vide
un chargeur complet. Un temps de silence puis l’adversaire
riposte par deux armes automatiques qui tirent
manifestement trop haut. Le FM du 12ème Groupe entre à son
tour en action. Pour nous la guerre est commencée. Nos
deux armes crépitent sans arrêt ripostant aux leurs.
L’ennemi fléchit car la partie est inégale : nous
sommes relativement abrités tandis qu’il est en rase
campagne, le bois nous couvre des rayons de la lune, ce
qui n’est pas son cas. Les Allemands décrochent. On
distingue assez nettement dans ce clair-obscur des hommes
qui s’aident à en porter d’autres, probablement victimes
de nos balles. Notre feu les a surpris et leur a causé des pertes.
Le lendemain matin une patrouille envoyée sur l’autre rive
par le Commandant de Compagnie constate que l’accrochage
de la nuit, s’il avait été court n’en avait pas moins été
meurtrier pour l’adversaire; de larges flaques de sang
marquaient le sol sur lequel étaient abandonnés un casque
transpercé de part en part, un lance grenades, un fusil,
ainsi qu’une binoculaire (française). Ce
premier contact
avec le feu ne fit chez nous aucun blessé. Mais dés le
matin suivant nous faisons connaissance avec les "minens"
qui, passant sur nous leur colère, nous harcèlent par
intermittence. Ces tirs sporadiques continueront pendant
les 8 jours que nous occuperons la position. L’ennemi, qui
ne pouvait se tenir de jour sur les coteaux dénudés nous
faisant face, s’infiltrait la nuit sur la rive opposée du
canal et entamait avec nous des duels d’armes
automatiques. Il essayait même une fois de franchir le
pont routier situé entre notre secteur et celui tenu par
la 22ème BCA à notre droite. Vu la puissance de feu
engagée pour la circonstance la tentative paraissait assez
sérieuse. En peu de temps le front s’embrasait par la
multiplicité d’armes légères. Mais en face, de nouvelles
forces descendaient au combat, ce qui nous fit demander,
par fusée, l’appui de l’artillerie, sans cependant trop y
croire. Mais nos 75 qui étaient parvenu à s’installer sur
leurs positions répliquaient presque aussitôt. Fusants et
percutants miaulaient au dessus de nos têtes et
s’abattaient sur l’assaillant dans un claquement
ininterrompu. Sous cette avalanche, qui avait le pouvoir
de nous réconforter, l’infanterie allemande n’insistait
pas et revenait sur ses positions de départ, c’est à dire
hors de notre vue. Le reste de la nuit se passera dans le
calme. Mais la nuit suivante l’Adjudant chef Ponti et le
Sergent chef Bermont seront abattus par des tireurs
embusqués alors qu’ils commandaient un détachement poseur
de barbelés. De jour en jour la pression de l’ennemi
s’accentuant, le commandement décide de faire sauter le
pont routier qui enjambe l’Aisne, mission qu’exécutera le
génie au cours de la 5ème nuit de notre présence sur la
position. Jusqu’à
notre relève accomplie dans la nuit du 23 au 24 mai, les
heures se suivent et se ressemblent : accrochages
nocturnes de part et d’autre du canal avec grande
consommation de grenades VB et arrosages diurnes de nos
lignes, au couvert trop peu fourni, par les obus de
mortiers allemands qui causent 3 blessés à l’effectif de
la section, dont son chef le Lieutenant d’Allard. C’est le
Sergent-chef Barralis qui en prendra le commandement à
l’approche des terribles heures qui nous attendent. En
semi-repos la 4ème section oeuvrera pendant quelques jours
à renforcer les points d’appui du secteur et à créer
d’autres points de défenses. Nous devenons ensuite réserve
de bataillon et stationnons à l’intérieur de grottes, prés
de Soupir. Mais ce repos bienfaisant dure à peine 36
heures. Commence alors pour nous une période désagréable
pendant laquelle nous changeons de secteur toutes les
nuits. Nous quittons nos emplacements soit à l’aube, soit
dans la journée même, ou la nuit suivante pour en occuper
d’autres. Parfois l’artillerie allemande, ponctuellement
renseignée par son fameux "coucou", nous arrose
copieusement, et, à chaque fois, l’effectif fond un peu
plus. Nous ne dormons presque plus car nous sommes
toujours en mouvement. Ah! Ces marches de nuit que l’on
veut silencieuses, tout prés des lignes ennemies, avec
comme seul guide le ceinturon du chasseur qui vous
précède, qu’on agrippe de toute la force de ses doigts,
mais qu’il arrive de lâcher quelquefois lorsque celui qui
vous précède est arraché lui-même par une force
irrésistible qui vous surprend. Tout cela ponctué de
jurons et d’invectives à l’adresse de celui qui vous a
faussé compagnie. Il faut quand même finir par se
retrouver, en silence, dans la nuit qui n’en finit pas. Ce
périple baladeur se terminera pourtant dans la nuit du 5
au 6 Juin lorsque nous relevons une unité de chasseurs
(peut-être le 27ème) sur une position située à mi-distance
entre l’Aisne, devant nous, et le canal latéral que nous
avons franchi, à l’est immédiat de Pont Arcy. Dans
la journée cependant nous portons notre ligne à même la
rivière car nous ne sommes plus couverts, une section de
notre bataillon partie en reconnaissance au delà de ce
cours d’eau n’a pu revenir à son point de départ, un pont
ayant sauté derrière elle, lui interdisant tout repli. Il
nous faut créer, en hâte, une ligne de défense en bordure
des méandres de la rivière, ce qui n’est pas aisé. Ce qui
reste de la 3ème Compagnie est étiré depuis Pont Arcy vers
l’Est, tenant un front d’une longueur invraisemblable.
Mais le drame c’est que nous ne pouvons assurer la liaison
à la gauche de ce front avec les éléments de la 25ème
Demi-Brigade que nous devrions pourtant y trouver. Le
Sergent Menassier du 1Oème groupe, tenant position à Pont
Arcy même, s’efforcera, progressant le long de l’Aisne sur
deux à trois cents mètres, d’opérer cette liaison, mais il
n’y parviendra pas. C’est par cette faille ouverte dans
notre dispositif que deux jours plus tard les Allemands
pénétreront dans nos lignes qu’ils prendront ainsi à
revers. L’installation
de mon groupe sur la rivière est d’autant plus précaire
qu’une batterie de 77 ennemie installée sur une hauteur
voisine, tirant sur nous de flanc et à vue nous empêche de
creuser nos trous au-dessus de la berge. Nous ne pouvons
que nous installer, assez mal, sur le devers de cette
berge, les eaux étant assez basses et l’ennemi n’ayant pas
encore atteint la rive opposée, ce qu’il ne tardera pas
d’ailleurs à faire, car à la nuit nous sommes en contact. Pendant
la journée qui suit il n’est pas très agressif, il se
tient en retrait de la rivière, laissant le soin à son
artillerie et à
ses stukas de nous harceler. Nous appréhendons son assaut
car notre dispositif est inconstant et démesurément
allongé. Nous ne pouvons compter sur l’appui d’aucune
unité de réserve. Brusquement
le 7 Juin au matin l’adversaire devient mordant, les
échanges d’armes automatiques se font violent tandis que
les artilleries opposées tirent avec intensité et que
l’aviation allemande est partout. Le ravitaillement en
munitions est difficile, les brancardiers et les hommes de
soupe ont l’ordre de ne plus circuler de jour. Les blessés
sont transportés la nuit. La nourriture nous est apportée,
prés de nos trous, dans des marmites que l’homme de corvée
place à notre portée ? Nous devions y plonger nos
mains pour prélever une espèce de mélasse froide ce qui
sera notre subsistance pour 24 heures. Le
lendemain 8 le vacarme s’intensifie, nos oreilles
supportent mal un bruit ininterrompu d’obus de tous
calibres qui éclatent des deux côtés. On entend
distinctement les "gros" qui passent loin sur nos têtes
dans un paisible ronronnement. Des stukas plongent
partout. Nous nous battons à la grenade de part et d’autre
des deux rives de l’Aisne séparées seulement de 20 à 25
mètres. Quelquefois une de ces grenades qui nous est
destinée explose tout prés, après s’être enfoncée dans la
vase, et la secousse molle nous berce. Les Allemands font
beaucoup de bruit, s’interpellent à haute voix. Certains
se jettent à l’eau et nagent afin de pouvoir jeter leurs
grenades avec plus de précision. Notre tireur au FM dont
la visibilité est réduite lâche de temps à autre un
chargeur et s’abrite aussitôt. Heureusement celui du
Groupe Montel qui prend la rivière d’enfilade à 200 mètres
de là cause des pertes à l’assaillant et l’empêche
d’atteindre notre rive. Nous tenons cette position
inconfortable jusqu’en fin d’après-midi. Mais vers les I6
heures la situation a encore empiré : le Groupe
Montel qui s’est probablement replié ne nous soutient
plus, et à notre gauche, vers Pont Arcy c’est la
catastrophe. La Wehrmacht qui a franchi l’Aisne dans
l’espace vide de tout défenseur a porté son effort massif
sur le 1Oème Groupe du Sergent Menassier qui essaie de
tenir sous l’avalanche. Son FM s’enraie, le sergent tente
de le remettre rapidement en état, mais la position est
submergée, Menassier est tué à la grenade. Dans mon groupe
c’est le Chasseur Hermelin qui tombe, mortellement frappé,
le Caporal Pétroni est blessé tandis que je ne revois plus
le chasseur Souchon envoyé en estafette au P.C de la
Compagnie. L’ennemi poursuit sa progression et, remontant
la rive gauche de la rivière essaie de nous prendre à
revers. Nous n’avons que le temps, le tireur, le chargeur
et moi, de sauter de nos emplacements devenus intenables
pour faire face à ce nouveau danger qui nous arrive dans
le dos. Pris alors à partie de tous les cotés à la fois
par de nombreuses armes automatiques nous espérons, leur
opposant notre fusil mitrailleur nous
frayer un chemin jusqu’au canal latéral distant de 300
mètres... où nous pensons retrouver des éléments de notre
compagnie. Nous y parvenons enfin après quelques
engagements brefs et violents avec l’adversaire. Nous
remarquons que l’ennemi axe aussi sa marche vers le canal
latéral que nous espérons atteindre tout de même avant
lui. Enfin nous franchissons ce mince obstacle d’eau sur
une planche flottante pour retrouver derrière la berge une
douzaine de gradés et chasseurs de la 3ème Compagnie, dont
le Sergent Chef Laemmer et le Sergent Montel, lesquels ne
perdaient pas l’espoir de nous récupérer. Quelques morts
et des blessés jonchent le sol dont le Sergent Galtier
qu’on essayera à la fin du jour d’évacuer vers l’arrière
mais qui mourra en chemin. J’apprends là la mort de notre
Commandant de Compagnie, le Lieutenant Ciaudo tué en même
temps que le Caporal Bory et les chasseurs Bringuier et
Planque alors que, FM en mains, tous quatre se portaient
du canal vers l’Aisne pour tenter de redresser la
situation désespérée qui était la nôtre. Durant une heure,
postés le long du canal nous surveillons particulièrement
la planche sur laquelle nous venions de passer tandis que
le soir tombait, estompant toute visibilité. C’est alors
que parvenait à nos oreilles un chant de guerre scandé par
des dizaines de voix que le sort favorable d’une rude
bataille a rendu fanatiques. Cette explosion de joie nous
fait mal. Nous sommes amers, abattus. Un
peu plus tard nous arrive l’ordre de nous replier vers
Longueval. Chemin faisant nous revoyons par la pensée ce
qu’ont été les deux dernières et terribles journées que
nous venions de vivre où le sort nous a placés en témoins
actifs d’un extraordinaire combat. Notre compagnie, la
3ème, venait d’y perdre plus de 20 tués et autant de
blessés, ainsi que quelques prisonniers. Compte tenu des
pertes antérieures, cette unité ne représentait plus
qu’une force de combat très diminuée, au mordant émoussé.
Elle avait vu disparaître tous ses officiers, ses
adjudants chefs et adjudants, ainsi que la plupart des
autres sous-officiers, tués ou blessés depuis son arrivée
en ligne. Le Sergent-Chef Laemmer restait le sous-officier
du grade le plus élevé. Le
dimanche 9 Juin, au lever du jour, ce qui reste du 62ème
BCA est regroupé en ligne dans un champs de blé situé au
nord de la route reliant Dhuizel à Barbonval sous le
commandement de son chef, le Capitaine Ottavi Il
est à remarquer que pendant tout le temps que nous étions
à l’arrière dans l’attente d’aller au feu, notre unité
avait vu succéder à sa tête plusieurs chefs de bataillon à
4 galons, pour finalement être confiée au moment de
combattre à ce capitaine, vétéran de la guerre 1914-1918.
Nous apprenons l’évacuation récente pour blessure grave de
son capitaine adjoint, officier de réserve de valeur en
qui nous avions confiance, et dont nous connaissions par
certaines indiscrétions les démêlés qui l’opposaient à son
supérieur, dont il ne partageait pas entièrement les vues. Alors
que nous nous tenions allongés dans les blés qui nous
cachaient de la vue de l’ennemi dont on attendait le
contact prochain, nous recevions la visite éclair du
Général Boisseau commandant la 44éme D.I ? Notre chef
s’attachait certainement à situer les positions mouvantes
et fluides des divers éléments composant sa division,
chose qui n’était pas tellement facile je suppose ? Enfin
après une attente fébrile qui nous parut longue l’ennemi
débouchait à l’horizon, quelques chars légers précédant
ses troupes à pied. Conformément aux ordres, notre tir
d’arrêt n’est déclenché qu’à courte distance ce qui
surprend l’assaillant et lui provoque quelques pertes. Sa
riposte est immédiate, et particulièrement ses blindés,
désorganise notre défense car nous sommes démunis d’armes
anti-chars, hormis les balles spéciales des FM. Des meules
de paille s’offrent comme abri de tir que nous ne pouvons
utiliser longtemps face à la supériorité de feu dont
dispose l’adversaire. Afin d’éviter l’encerclement nous
replions derrière la position d’arrêt tenue sur nos
arrières par des éléments du 22ème BCA, lesquels
accrochent durement l’assaillant, ce qui permet de nous
dégager. Dans la nuit nous essayons de nous regrouper sur
Bazoches par Vauxcéré et Paars. A
l’aube du 10 nous atteignons Fismes alors que la bataille
y fait rage Nous y prenons part dans des conditions
difficiles qui excluants que le sort nous soit favorable.
C’est ensuite la retraite vers la Marne que nous
franchissons le 11 dans la matinée. On nous apprend que de
fortes unités de l’armée qui fait retraite ont passé aussi
la Marne et qu’ainsi, appuyés par de nouvelles troupes qui
monteraient en ligne, nous allons pouvoir organiser la
résistance sur cette rivière au nom Historique. Tous les
ponts, ou presque, ayant été détruits, la chose parait
vraisemblable et l’espoir renaît. Mais nous ne pourrons
tenir la position que jusqu’au 13 juin. Enfin
notre dernier combat d’arrière-garde se situe à Vertus
(Marne) .
Adjudant-Chef Jean-Marie Buquet
Historique du 62ème B.C.A.
1939 - 1940
TABLE
Le
62ème Bataillon de Chasseurs Alpins est crée, le 2
septembre 1939, au Camp de Caïs, près de Fréjus, par le
Centre Mobilisateur 152, à partir d’un noyau actif du
22ème B.C.A..
L’encadrement
en est le suivant:
Chef de Corps
|
Chef de
Bataillon Louis Brun
|
Capitaine
Adjudant-Major
|
Capitaine P.
Ottavi
|
1ère Compagnie
|
Capitaine
Edmond Griolet
|
2ème Compagnie
|
Capitaine
J.Roumejon
|
3ème Compagnie
|
Capitaine
Simon
|
Cie
d’Accompagnement
|
Lieutenant
Abeille
|
Cie Hors-Rangs
|
Capitaine J.
Collomb
|
Eclaireurs-Skieurs
|
Lieutenant
R.Montel
|
Il
entre, avec les 22ème et 64ème B.C.A., dans la composition
de la 26ème Demi-Brigade de Chasseurs Alpins - 57ème
Brigade - 29ème Division d’Infanterie. Le
6 septembre, le Bataillon quitte le Camp de Caïs pour
Contes et Berre les Alpes, où se poursuit l’instruction. Le
28 septembre, il rejoint la région de Sospel et relève le
9ème B.C.A. dans le saillant Fontan - Saorge. P.C.,
C.A. et C.H.R. à Fontan, de même que la 1ère Compagnie;
2ème Compagnie à Saorge; 3ème compagne à Breil, Madone des
Grâces, La Giandola; S.E.S. à Scarassoui. Outre
l’instruction, les tirs et les marches, le Bataillon
procède à des travaux d’aménagement du terrain. Il
est relevé un mois plus tard, le 27 octobre, par les
105ème B.C.A et rejoint Nice par voie ferrée. La Section
d’Éclaireurs-Skieurs, pour sa part, demeure sur ses
positions. Après
avoir bivouaqué le 27 octobre au 18 novembre dans les
Studios de la Victorine, le 62ème fait mouvement sur
Grasse et arrive le 19 à Peymeinade. Il
y demeure jusqu’au 11 mars 1940, date à laquelle il fait
étape, à pied, jusqu'à la Bocca, où il embarque, le 12,
par voie ferrée. Le
convoi s’arrête le 13 à Rouilly Giraudot. Le Bataillon
rejoint à pied ses cantonnements d’Avant les Ramerupt. La
26ème D.B.C.A. entre alors dans la composition de la 44ème
Division d’Infanterie, récemment formée dans la région
d’Arcis sur Aube. Elle comprend le 6ème R.I., la 26ème
D.B.C.A., la 173ème Demi-Brigade, le 91 R.A., les
compagnies de Génie 44/1 et 44/2 et le G.R.D. 41.Le
Lieutenant Abeille, Commandant la C.A., est détaché comme
Officier de liaison à l’Etat-Major de la Division et
remplacé par le Capitaine Rullier. Le
Chef de Bataillon Brun, promu Lieutenant-Colonel, est
provisoirement remplacé à la tête du 62ème par le
Capitaine Ottavi, Capitaine Adjudant-Major. Le
28 mars, le Chef de Bataillon Monnet prend le commandement
du Bataillon. Le
11 avril le 62ème embarque pour l’Alsace, où il arrive le
12 à Hochfelden, fait étape le 13 à Wiversheim, le 15 à
Wickerskeim. Le P.C. se fixe à Gundershofen du 18 avril au
15 mai. Outre
l’instruction, le 62ème est occupé à des travaux
d’organisation du terrain dans la Zinseltal, au nord-ouest
d’Haguenau. Le
Capitaine Diot est affecté au 62ème dont il prend le
commandement en remplacement du Commandant Monnet, qui
vient de recevoir une autre affectation.Mis
en alerte dès l’annonce de l’invasion allemande en
Belgique, le 62ème B.C.A. embarque par voie ferrée le 15
mai, en gare de Merzwiller.
L’ordre du Bataillon est alors le
suivant :
Chef de Corps
|
Capitaine Diot
|
Capitaine
Adjudant-Major
|
Capitaine
Ottavi
|
Médecin-chef
|
Médecin-Lieutenant
Salvarelli
|
Médecin-Auxiliaire
|
Médecin-Adjudant
Barre
|
Transmissions
|
Lieutenant
Pattus
|
Officier
d’Approvisiont
|
Sous-Lieutenant
Ottavi
|
Officier des
Détails
|
Adjudant-chef
Tristani
|
1ère Compagnie
|
Capitaine
Griolet
|
2ème Compagnie
|
Lieutenant
Lions
|
3ème Compagnie
|
Lieutenant
Ciaudo
|
Cie
d’accompagnement
|
Capitaine
Rullier
|
Cie hors-rangs
|
Lieutenant
Roubaudi
|
Les
ponts et les passerelles d’écluses n’ont pas encore sauté.
Les explosifs ne parviendront que le 21 mai. Dans
l’immédiat, on ne peut qu’élever des barricades sommaires
pour tenter d’enrayer une incursion de blindés ennemis. On
manque également de mines antichars. Le
20 Mai au soir des patrouilles allemandes prennent contact
avec la défense du canal. Des
boyaux, profonds de deux mètres, sont creusés, en lignes
brisées, dans la plaine, en arrière du canal, pour
permettre une liaison abritée avec le P.C., vite envahis
par trente centimètres d’eau. Celle-ci suinte dans les
abris et les tranchées creusés dans le talus du canal. Les
hommes pataugent à longueur de journée dans une boue
liquide, sans jamais pouvoir se déchausser. Au
cours de la nuit du 21 au 22 mai, tandis qu’à l’extrémité
sud du canal, vers Pont Arcy, la 2ème Compagnie du 22ème
B.C.A. repousse une tentative de franchissement, les 2ème
et 3ème compagnies du 62ème B.C.A. sont aux prises avec
des éléments ennemis qui tentent de s’infiltrer, au nord
du canal, entre l’aile gauche du 62ème et le 99ème R.I.. Une
série d’accrochages assez violents permet de les
repousser, au cours desquels tombe, mortellement atteint,
le chasseur Grailhe, premier mort du Bataillon. Les
Lieutenants Lions et Forgues, ainsi que deux chasseurs de
la 2ème Compagnie, blessés, sont évacués. Le
Sous-Lieutenant Garzulino, de la 2ème Compagnie
d’accompagnement, prend le commandement de la 2ème
compagnie. Le
23 mai, le Capitaine Diot, qui commande le 62ème B.C.A.
depuis huit jours seulement, est nommé au commandement du
64ème, en remplacement du Chef de Bataillon Désideri,
appelé à commander la 26ème Demi-Brigade. Le
Capitaine Ottavi se retrouve à nouveau chef de corps par
intérim. Il prend pour adjudant-major le Capitaine
Griolet, de la 1ère Compagnie. Le Lieutenant Andreis prend
le commandement de la 1ère. Les
travaux continuent, de jour comme de nuit, entrecoupés
d’escarmouches par dessus le canal, sous le tir
intermittent de l’artillerie allemande. L’Adjudant Ponti
est mortellement blessé d’une rafale de mitraillette,
alors qu’il dirige, de nuit, le travail d’une équipe de
poseurs de barbelés, sur le chemin de halage. Bermond,
chef-comptable de la 3ème Compagnie, est abattu par un
sniper, alors qu’il effectue une liaison avec les sections
en ligne. Le
29 mai, un très violent tir de minen s’abat sur la 3ème
compagnie. La 4ème section, au centre de la tornade, subit
des pertes. Le Lieutenant d’Allard et le chasseur Peladan
sont blessés et évacués. Le sergent-chef Barralis prend le
commandement de la section. Au
cours de la nuit du 1er au 2 juin, le 62ème B.C.A. est
relevé par le 27ème B.C.A. (25ème Demi-Brigade - 28ème
D.I.) Il s’installe à quelques kilomètres au sud de
l’Aisne Le P.C., la C.H.R., la C.A. et la 2ème Compagnie à
Longueval; la 1ère à Villers en Prayères; la 3ème à
Barvonval. Très
tôt, le matin du 5 juin, des vagues successives d’avions
ennemis bombardent les positions tenues par les 27ème et
47ème Bataillon de Chasseurs, (25ème Demi-Brigade), sur le
canal de l’Oise à l‘Aisne. Vers
7 heures, alors que l’artillerie allemande prend le
relais, l’aviation s’en prend aux villages qui abritent le
62ème, Longueval, Barbonval et Villers en Prayères.
Pendant ce temps, l’attaque de l’infanterie se développe,
à gauche contre les unités de la 28ème Division
d’Infanterie, entre Soissons et Braye en Laonnois. Des
infiltrations se produisent sur les arrières du 27ème
B.C.A. A
14 heures, le Capitaine Ottavi reçût du commandant de la
26ème Demi-Brigade l’ordre de prendre position sur les
arrières du 47ème B.C.A., au point charnière du canal de
l’Oise à l’Aisne avec l’Aisne, face à Bourg et Comin. Dès
le début de la nuit, il transporte son P.C. à La Roche, où
se trouve déjà celui du 47ème B.C.A. La 3ème Compagnie
(Lieutenant Ciaudo) prend position dans la boule de
l’Aisne à Pont Arcy et à l’ouest du village, en liaison
avec la Compagnie Becq du 64ème B.C.A. Le sous-Lieutenant
Garzulino et sa 2ème Compagnie s’installent à l’est du
village, en contact sur la droite avec le 2ème Bataillon
du 6ème Régiment d’Infanterie. La
1ère Compagnie, (Lieutenant Andreis), demeure en seconde
ligne, autour de Vieil Arcy, entre le Moulin du Bas et le
Bois Mayol. Au
cours de la matinée du 6, après une nouvelle et intense
préparation d’artillerie, les Allemands franchissent le
canal de l’Oise à l’Aisne, en face du 27ème B.C.A., à
hauteur de Moussy - Verneuil. Le
P.C. du 47ème se transporte à Saint Mard, et ses éléments
du canal abandonnent celui-ci pour faire face au nord. La
3ème Compagnie replie en arrière de l’Aisne une section
que le Lieutenant Ciaudo avait poussée jusqu'au pont sur
le canal. Le
7, dès le petit jour, l’artillerie ennemie pilonne
systématiquement les positions du Bataillon, tandis que
son infanterie attaque à l’ouest, en face des 27ème et
47ème B.C.A. Les lignes téléphoniques sont déchiquetées
par les explosions; seules, subsistent les liaisons par
coureurs. La 2ème Compagnie subit des pertes sérieuses. Le
Capitaine Griolet et le Médecin-auxiliaire Barre s’y
rendent le soir. A
plusieurs reprises, au cours de la journée, notre
artillerie a efficacement répondu sur des concentrations
d’infanterie allemande autour de Bourg et Comin. Au
petit jour, le 8, le pilonnage reprend avec une intensité
accrue. L’aviation allemande intervient à son tour sur
tous les villages du quartier. De nouveau, des
rassemblements d’infanterie sont signalés autour de Bourg
et Comin. Le sous-Lieutenant Masse, de la 3ème Compagnie,
est blessé au cours de la matinée. A
partir de midi, de demi-heure en demi-heure, des vagues
d’avions attaquent La Roche, Vieil Arcy, Pont Arcy et les
villages voisins. A
14 heures, l’infanterie ennemie tente de forcer le passage
sur l’Aisne, à gauche et en face de la 3ème Compagnie,
tandis que le pilonnage de l’artillerie et de l’aviation
se transporte sur le 2ème Bataillon du 6ème Régiment
d’Infanterie. La
Compagnie Becq, du 64ème B.C.A., est tournée sur sa
gauche, au point de jonction avec le 47ème B.C.A.. Plus à
l’ouest, l’ennemi progresse en direction du sud, refoulant
le 99ème R.I. Le
Capitaine Becq et ses chasseurs se replient en combattant
vers La Roche, où se trouve le P.C. du 62ème, mais ce
repli livre aux Allemands la passerelle récemment posée
par le Génie sur le canal latéral à l’Aisne. Le
point d’appui de Pont Arcy, tenu par la 3ème Compagnie,
est alors débordé et menacé d’encerclement. Le Lieutenant
Ciaudo contre attaque, à la tête de son groupe de réserve.
De cette contre attaque ne reviendra qu’un seul survivant,
le chasseur Taxil, qui devra être amputé d’une jambe. Des
autres sections, une trentaine d’hommes réussit à
décrocher et à se replier sur La Roche. Une trentaine de
chasseurs autour du Sergent-chef Rolland. Tout ce qui
reste de la 3ème Compagnie. La
1ère Compagnie est maintenant en première ligne, en avant
de La Roche. Le Lieutenant Andreis a reçu l’ordre de tenir
à tout prix. A
18 heures, la 4ème section de la Compagnie est submergée
par l’assaut ennemi. Le Lieutenant Andreis tombe, atteint
d’une balle dans la tête. Mais la 1ère tient toujours, en
liaison à droite avec la 2ème, tandis que les Allemands,
qui progressent sur le flanc gauche du Bataillon, arrivent
vers 20 heures à proximité de La Roche. La
défense du P.C. s’organise une section de mitrailleuses,
que commande personnellement le Capitaine Rullier,
commandant la C.A., le groupe franc du sous-Lieutenant
Fritsch, et les hommes du P.C. et de la C.H.R.,
téléphonistes, secrétaires, cuisiniers, ordonnances.
Tandis que le Sergent-fourrier Spinelli conduit une
chenillette chargée de munitions jusqu’aux 1ère et 2ème
compagnies. Le
Capitaine Ottavi reçût à 21 heures l’ordre de replier le
Bataillon du sud de Longueval. Il se rend immédiatement
auprès du colonel commandant le 6ème R.I., son voisin de
droite, pour l’en informer.Tandis que les compagnies décrochent
à la faveur de l’obscurité, le Capitaine Griolet demeure à
La Roche avec le Groupe Franc, pour protéger leur repli et
préparer la destruction du dépôt de munitions, qui saute à
minuit trente. Au
cours de son mouvement, le groupe franc protégera encore
le décrochage d’une batterie d’artillerie, qui n’avait pas
été avisée du repli. Le
62ème B.C.A. va reprendre position sur le Mont de Dhuizel,
entre la Cour des Moines et les lisières ouest de
Longueval, ayant à sa droite le 64ème B.C.A. et à sa
gauche le G.R.D.41, qui tient Vauxtin et Vauxcéré.En
cette soirée du 8 juin, il ne reste au 62ème B.C.A. que
neuf officiers et deux cent quatre-vingt chasseurs sur les
14 officiers et 820 hommes, qui étaient descendus des
positions du canal le 1er juin. Le
nouveau dispositif est mis en place avant six heures du
matin, le 9 juin. La première Compagnie, que commande
maintenant le sous-Lieutenant Bodin, prend position entre
la Cour des Moines et le signal du Mont de Dhuizel, en
liaison sur sa gauche avec le G.R.D., qui tient toujours
Vauxtin. Le sous-Lieutenant Garzulino et la 2ème Compagnie
s’alignent, à la droite de la 1ère, entre le signal de
Dhuizel et le bois au nord de Longueval. Le
Capitaine Ottavi a installé le P.C. du Bataillon à la
corne ouest du Bois de la Ferme Pinçon, au sud-ouest de
Longueval, disposant, en réserve, du groupe franc du
sous-Lieutenant Fritsch, des trois pièces de mitrailleuses
qui restent au Capitaine Rullier, et des trente hommes de
la 3ème Compagnie que le Sergent-chef Rolland a ramené
avec lui. Les mortiers de 81 n’ont plus de munitions. Il
n’en reste d’ailleurs que les tubes. Les plaques de base
n’ont pu être arrachées du sol dans lequel elles s’étaient
enfoncées pendant le tir de la veille, au cours duquel
toute la dotation d’obus a été tirée. Rapidement
on ébauche des trous de tirailleurs et des emplacements
pour les F.M.. Les compagnies ont perdu trop d’hommes
hier, et leurs maigres effectifs ne permettent pas
d’établir un front continu. Un
sous-lieutenant et quelques chasseurs du 47ème, qui
étaient, hier soir, demeurés au P.C. du 62ème, à La Roche,
pour tenter de récupérer au cours de la nuit le corps du
Sous-Lieutenant Faivre d’Arcier, de leur compagnie, resté
dans le no-mans-land, mais n’avaient pu remplir leur
mission par suite du recul du 62, sont employés à boucher
le vide entre les 1ère et 2ème compagnies sur le Mont de
Dhuizel. Sur la gauche, en direction de Vauxtin, la 1ère
Compagnie n’a pas trouvé la liaison avec le G.R.D.. Une
première attaque allemande, sur la gauche du front, est
repoussée par la 1ère Compagnie. Le sous-Lieutenant Bodin
réclame des munitions, qu’il n’est pas possible de lui
faire parvenir, le dépôt constitué à La Roche ayant été
détruit sur place. Le Capitaine Ottavi part lui-même avec
la chenillette chercher des munitions au P.C. de la
Demi-Brigade, à Blanzy les Fismes. Les
trois mitrailleuses du P.C. ne peuvent être mises en
batterie, par manque de profondeur du champ de tir. Elles
ne disposent d’ailleurs que de dix caisses de munitions
pour elles trois. Le
sous-Lieutenant Bodin signale des infiltrations
d’infanterie entre la 1ère Compagnie et le G.R.D.. A 11 H
30, ayant épuisé toutes ses munitions, et les voyant
tournée par le sud-ouest, la 1ère Compagnie se replie vers
le P.C. du Bataillon. La
2ème Compagnie est alors mise en position sur la route
Ferme Pinçon - Vauxcéré. La Ferme elle même est tenue par
un élément mixte du 6ème R.I. et du 64ème B.C.A.. La 1ère
Compagnie s'alignent à gauche de la 2ème jusqu’à Vauxcéré,
que le G.R.D. occupe, après avoir abandonné Vauxtin. De
nouveaux emplacements sont creusés dans le talus de la
route, et les mitrailleuses peuvent enfin se mettre en
batterie. Le Capitaine Ottavi revient avec la chenillette,
chargée de munitions et d’outils de parc. L’avion
d’observation-le mouchard-survole les nouvelles positions,
tandis que les mitrailleuses du Capitaine Rullier ouvrent
le tir-hausse 1,500 mètres-sur l’infanterie allemande qui
progresse au travers des champs de blé. Le
Capitaine Ottavi décide de faire replier les éléments du
P.C/. Bataillon à Vauxcéré. Précédé
d’un barrage roulant d'artillerie, qui encage maintenant
les positions du 62ème, l’infanterie allemande avance
toujours. Les fusils-mitrailleurs entre en action -hausse
800- l’aviation ennemie intervient alors en piqué. A
15 heures, un motocycliste du P.C. vient chercher le
Capitaine Griolet, qui assurait le commandement de la
ligne de feu. Avant de partir, il passe le commandement de
la position au Capitaine Rullier. La moto pénètre dans
Vauxcéré au moment où les Allemands abordent le village
par l’ouest. Le
P.C. du 62ème B.C.A. décroche en direction des positions
des compagnies. Or, celles-ci ont été bouleversées par les
attaques en piqué des stukas. Le Capitaine Rullier a été
très grièvement blessé sur la pièce dont il avait remplacé
le tireur mort. Les sous-Lieutenants Bodin, Lassegue et
Colmas sont blessés, eux aussi. Le sous-Lieutenant Pattus,
chef des transmissions, est porté disparu. Mort, le
courageux Sergent Fourrier Spinelli qui avait ramassé un
F.M. et qui tirait debout, pour mieux voir l’ennemi par
dessus les blés. Mort également, le chasseur Botta, tireur
au fusil-mitrailleur, dressé lui aussi face à
l’assaillant. Partout, de nombreux morts et blessés. Un
flottement se produit parmi les survivants, qui refluent
vers Blanzy les Fismes, où le Commandant Desideri et le
Capitaine Faraut, bientôt rejoints par le Capitaine
Griolet, les reprennent en main et les replacent face à
l’ouest, sous les ordres des sous-Lieutenants Garzulino et
Fritsch, en protection du P.C. de la 26ème Demi-Brigade,
implanté dans le village de Blanzy. Sur
la droite, le 64ème a, lui aussi, durement supporté le
choc. A partir de 17 heures, 62ème et 64ème sont alignés à
l’ouest et au nord, en protection du village. Le
62 est en position sur les pentes, au sud-ouest de Perles,
en liaison avec le G.R.D.41, qui tient ce village. Il
reste quatre officiers et une centaine de chasseurs
valides au Bataillon. Ils ne possèdent plus que cinq
fusils-mitrailleurs. Le Capitaine Ottavi et son P.C. sont
à Blanzy-les-Fismes, auprès du P.C. de la Demi-Brigade. Vers
21 heures, parvient l’ordre de repli vers Fismettes, où
les restes du 62ème B.C.A., renforcés par la 1ère
Compagnie du 22ème et le G.R.D.41, doivent constituer une
tête de pont. Le 62ème doit toutefois maintenir la
position qu’il occupe jusqu’à 22 heures, pour permettre le
décrochage des éléments de l’E.M. de la Demi-Brigade et le
passage du 6ème Régiment d'Infanterie, qui se replie sur
sa droite. Le maintien en position sera prolongé jusqu’à
23 heures. La
mise en place des unités de la tête de pont est effectuée
par le sous-Lieutenant Laroque, du G.R.D., le point
névralgique en étant le carrefour de la route de Blanzy.
Le Capitaine Griolet est désigné par le Commandant
Désideri pour prendre le commandement de l’ensemble. Le
64ème B.C.A. se replie à son tour et traverse Fismettes au
petit jour. Son corps franc, commandé par le
sous-Lieutenant Gesta, vient compléter, à l’est, le
dispositif de la tête de pont. Celui-ci
est remanié au jour : La 1ère Compagnie du 22ème
B.C.A. (Capitaine Latruffe) face à l’ouest, sur la route
de Bazoche; au centre, le G.R.D. face au nord, tenant le
carrefour de Fismettes; à l’est, le 62ème B.C.A., gardant
la route et les sentiers de Blanzy, prolongé par le corps
franc du 64ème. Une cinquantaine de chasseurs du 62ème,
récupérés par le train régimentaire du Bataillon,
stationné la veille à Fismes, sont rendus à leurs
compagnies. A 9
heures, la 1ère Compagnie du 22ème B.C.A. est surprise par
des éléments allemands parvenus à courte distance sans
avoir été décelés. Un certain flottement se produit. Le
tir précis des fusils-mitrailleurs rétablit la situation.
L’ennemi progresse maintenant face au 62ème B.C.A.. Une
section de la 2ème Compagnie du 22, commandée par le
sous-Lieutenant Core, est mise à la disposition du
Commandant Désideri, qui lui donne l’ordre d’occuper la
cote 162, au nord de Fismettes, et de s’y maintenir. Core
déploie sa section, progresse jusqu'au coude de la route
et refoule les occupants de 162. Il ne maintient jusqu’à
épuisement de ses munitions, puis, sous la menace d’un
débordement de la position, replie sa section à son tour,
après avoir subi quelques pertes. Son chef, le
sous-Lieutenant Gesta est tué en arrivant au pont de
Fismes. Les
tirs du 91ème R.A.D. causent de lourdes pertes aux
Allemands, mais ne peuvent les remplacer de progresser.
Ils sont trop nombreux! Leurs camions les amènent au
défilement des crêtes. Hier, ils ont mangé, et dormi cette
nuit,... tandis que les chasseurs...! Le
Capitaine Griolet fait replier la 1ère Compagnie du 22
puis le 62ème. Il ne reste sur la rive nord de la Vesle
que le groupe franc du sous-lieutenant Fritsch. A
11 heures, au signal du clairon, le groupe franc franchit,
au pas de course, le pont, qui saute quelques instants
plus tard, sous le nez des premiers feldgrauen. Le
combat reprend tout au long de la rivière. Mais les
Allemands ont largement débordé Fismes à l’ouest. A 13
heures, les unités reçoivent l’ordre de repli. La
destination du 62ème est Tramery, à quatre kilomètres du
village de Sarcy, où se trouvent déjà le Capitaine Ottavi,
qui regroupé quelques dizaines d’isolés, réchappés des
combats des jours précédents, et le train régimentaire du
Bataillon. Le
sous-Lieutenant Fritsch et son groupe franc assurent la
protection du décrochage des batteries du 91ème R.A.D.,
qu’il escortent jusqu’à Sarcy. Par la suite, le groupe
franc se verra confier la protection du train
régimentaire. Les
rescapés du combat de Fismettes, regroupés par les
sous-Lieutenant Garzulino, arrivent à Tramery à 20 heures.
Ils y retrouvent le renfort des chasseurs déjà regroupés
par le Capitaine Ottavi.Rapidement, deux compagnies sont
formées, fortes chacune d’une cinquantaine de chasseurs.
La 1ère est commandée par l'Adjudant-chef Gandioli, la
2ème par le sous-Lieutenant Garzulino. Elles n’ont , même
pas le temps de reconnaître leurs cantonnements, que les
Allemands sont signalés à l’entrée nord du village. La
1ère Compagnie se porte à leur rencontre, après avoir
ramassé les munitions des camarades de la 2. Il n’y fa pas
de quoi soutenir un siège!... Cent cartouches par
fusil-mitrailleur, et cinquante par voltigeur.
Heureusement, l’ennemi ne se manifeste pas. Le
Capitaine Dupassage, de l’E.M. de la 26ème Demi-Brigade,
apporte, à 22 heures 30, l’ordre de repli sur
Olisy-Violaines, où se regroupent les restes de la
Demi-Brigade. Départ de Tramery à minuit, étape
particulièrement pénible, par suite des fatigues
accumulées, du manque de sommeil et de nourriture. A 5
heures du matin, le 11 juin, le 62ème B.C.A. retrouve à
Olisy Violaines les autres unités de la Demi-Brigade. Le
Capitaine Griolet est convoqué par le Commandant Désideri,
qui lui donne le commandement du 22ème B.C.A. Vers
7 heures, on aperçoit, à un kilomètre à l’ouest du
village, une colonne de blindés allemands, qui foncent
vers le sud, sur la route Reims - Dormans. La
Demi-Brigade a reçu l’ordre de franchir la Marne au plus
vite. la colonne se met en route vers Chatillon sur Marne
et Port à Binson, à travers champs, pour éviter de
mauvaises rencontres. A plusieurs reprises, elle est
survolée et attaquée par des avions ennemis. Lorsque son
avant-garde arrive à proximité de Port à Binson, déjà
occupé par les Allemands, le pont saute. Un
passage est découvert à quatre kilomètres à l’est, où le
pont de Reuil Oeuilly est encore entre nos mains. Il est
franchi vers 13 heures. La Demi-Brigade prend position sur
la rive sud de la Marne, déjà occupée-si l’on peut
dire-par la 22ème Compagnie du 46ème Régiment
d’Infanterie, unité de regroupement et d’instruction
d’isolés. Au
cours de l’après-midi, le 22ème B.C.A. est chargé de la
défense du village d’Oeuilly, tandis que le 64ème prend
position à l’ouest, dans le bois de Misy. Les deux
compagnies du 62ème restent en réserve de Demi-Brigade. A
18 heures, les Allemands se présentent devant le pont, que
fait sauter le lieutenant Vetroff, du 46ème R.I.. On
tiraille de part et d’autre au cours de la nuit. Le petit
jour n’amène pas l’attaque que l’on supposait devoir se
produire. La matinée est relativement calme. La pluie, qui
menaçait hier, s’est mise à tomber. Le commandant Desideri
donne aux commandants des bataillons ses ordres pour une
nouvelle implantation, à réaliser à la tombée de la nuit.
Le 62ème se voit confier la charge d’aménager des
barricades sur toutes les voies d’accès du village. Cet
ordre n’aura pas le temps d’être exécuté. A 14 h 30,
l’ennemi déclenche sur le village de très violents tirs
d’artillerie, qui laissent prévoir une attaque imminente.
Son aviation intervient à son tour. Très rapidement, les
ruines s’accumulent dans le village, où éclatent de
nombreux incendies. Dispersés
et écrasés par le bombardement, les chasseurs du 62ème se
raccrochent aux positions des sections du 22ème B.C.A..
Les morts et les blessés sont nombreux. Le
Médecin-auxiliaire Barre s’est mis à la disposition du
Capitaine Griolet, pour panser les blessés de la 3ème
Compagnie, auprès de laquelle il se trouve. A
22 heures 30, l’ordre de repli parvient aux unités en
ligne.Après
le combat d’Oeuilly, le 62ème B.C.A. n’existe plus en tant
qu'une unité combattante. Quelques-uns des rescapés du
Bataillon se raccrocheront aux compagnies du 22ème B.C.A.
et suivront l’errance des restes de la 26ème Demi-Brigade,
par Vertus, Arcis sur Aube et Troyes, jusqu’à leur
capture, le 17 juin. D’autres seront regroupés par le
Capitaine Ottavi, qui, après le 14 juin, a pris le
commandement du train régimentaire du Bataillon, et, après
une traversée en diagonale de la France, de Troyes à
Millau, les ramènera en zone libre.
Le 62ème Bataillon de Chasseurs Alpins
est dissous
le 1er août à Millau.
Ses archives sont ramenées à Hyères.
Les cadres d’active sont affectés au
Bataillon de Rodez du Régiment Tarn-Aveyron.
TABLE
|
|