Général BUISSON
Capitaine
Griolet
Commandant
Désidéri
128
La bataille de l'Aisne
Avec le
22ème Bataillon de Chasseurs Alpins
Guerre
1939 - 1945
Témoignages
Nice
- Juillet 1994
Analyse
des témoignages
Écriture : 1940 - 66 pages
POSTFACE
de Michel EL BAZE
Pendant que le Général
Buisson raconte la bataille de l'Aisne aux
officiers prisonniers au Camp de Mailly, le
Capitaine Griollet prend des notes que nous
publions ici en même temps que son propre récit de
la campagne du 22e B.C.A. commencée le 9 Juin 1940
pour se terminer le 20 Juin par sa rédition aux
Allemands vainqueurs. Nous avons voulu joindre à
ces deux témoignages celui du Chef de Bataillon
Désidéri des événements du 22 Mai au 23 Juin,
écrits par lui le 1er Août 1940 dans ce même Camp
de Mailly, c'est à dire alors que les souvenirs
étaient encore cuisants.
ORDRE N°1 DU GÉNÉRAL BOISSEAU
Commandant par intérim la
44e D.I.
Constituée à la date du
1er mars I940, la 44eme Division d'Infanterie se
trouve pour la première fois réunie. Elle s'est
rassemblée dans une région riche en glorieux
souvenirs militaires, où en I8I4. le génie de
Napoléon infligea de rudes échecs aux armées
prussiennes, autrichiennes et russes, qui avaient
envahi la France, et où, cent ans plus tard, le
Maréchal Joffre arrêtait par la victoire de la
Marne une nouvelle ruée allemande sur Paris.
Chasseurs, Fantassins, Cavaliers, Artilleurs,
Sapeurs, Conducteurs du Train,.Militaires de la
Prévôté et des Services de la 44ème D.I., vous
êtes venus de toutes les parties de la France,
pour en finir cette fois avec la nation de proie,
qui ne songe qu'à piller et à asservir ses voisins
quand ils ne sont pas de taille à se défendre.
Vous serez dignes de vos Anciens. Tous, d'un même
coeur, vous travaillerez pour faire de la 44ème
D.I. une Division solide, ardente, dont tous les
éléments seront soudés entre eux par une confiance
et un dévouement réciproque absolu, une Division
sur laquelle la France pourra compter en toute
circonstance, et que l'ennemi apprendra à
redouter.
Constituted
to the date of 1st March I940, 44eme Division of
Infantry is found united for the time first. It
has gathered in a rich region in glorious remember
military, where in I8I4. the spirit of Napoléon
inflicted rough chess to armies Prussians,
Austrians and Russians, that had invaded France,
and where, hundred later years, the Marshal Joffre
stopped by the victory of the Marne a new German
rush on Paris. Hunters, Infantrymen, Horsemen,
Gunners, Sappers, Drivers of the Train, Soldiers
of the Prévôté and Services of 44ème D.I., you
have come from all parts of France, to in finish
this time with the nation of prey, that dreams
only to loot and to enslave its neighbors when
they are not size to defend. You will be deserving
your Ancient. All, a same heart, you will work to
make 44ème D.I. a solid Division, fiery, whose all
elements will be soldered between them by a
confidence and an absolute reciprocal dedication,
a Division on which it France will be able to
count in all circumstance, and that the enemy will
learn to fear.
Begründet am Datum des 1.
Marz 1940, befindet sich die 44.
Infanteriedivision zum ersten Mal vereint. Sie
hat sich versammelt in einer Region, die reich
an ehrenvollen militarischen Erinnerungen ist,
wo 1814 das Genie Napoleon den preussischen,
österreichischen und russischen Armeen, die
Frankreich überfallen hatten, harte Niederlagen
bereitete, und wo, 100 Jahre spater Maréchal
Joffre durch den Sieg an der Marne einen neuen
deutschen Ansturm auf Paris aufhielt. Chasseurs,
Fantassins, Kavalleristen, Artilleristen,
Pioniere, Zugführer, Militär aus der Region und
der Abteilung der 44. Infanteriedivision, ihr
seid aus allen Teilen Frankreichs gekommen, um
dieses Mal mit der räuberischen Nation, die nur
daran denkt, seine Nachbarn auszuplündern und zu
unterjochen, wenn sie nicht Manns genug sind
sich zu verteidiger Schluss zu machen. Ihr
werdet Euerer Vorfahren würdig sein. Alle werdet
Ihr mit gleichem Mut arbeiten, um aus der 44.
Infanteriedivision eine starke, feurige Division
zu machen, bei der alle Bestandteile fest
mieinander verbunden sind durch eine Zuversicht
und eine absolute gegenseitige Ergebenheit, eine
Division, mit der Frankreich in allen Umstanden
rechnen kann, und die der Feind lernen wird zu
fürchten.
Table
Préface 8
Chef de Bataillon Désidéri
9
Les événements du
22 mai 1940 au 23 juin 1940
Capitaine Edmond
Griolet 29
Mon rapport
d'opérations
Général Buisson
43
La Bataille de
l'Aisne
La mémoire
La mémoire : seul bagage incessible
Jacques ATTALI
Chef
de Bataillon Désidéri
Commandant la 26ème
D.B.C.A
44°
Division d'infanterie
26ème
D.B.C.A.
Les événements du 22 mai 1940 au 23
juin 1940
Le 22 mai 1940, je fus
nommé, par une lettre de service du Général
Boisseau, commandant la 44° D.I., au commandement
de la 26° Demi-Brigade en remplacement du Lt.
Colonel Montet, évacué pour maladie. Cette prise
de commandement fut régularisée par décision du
G.Q.G., en date du 28 mai 1940. Situation : La 26° D.B.C.A. tenait le canal de
l'Ailette, depuis son confluent avec l'Aisne (à
droite), jusqu'à Braye en Laonnois, (à gauche), ce
dernier point exclus. Dispositif : 22° B.C.A. (à droite) S/Q de Soupir
avec P.A. Pont Arcy. 62° B.C.A. (à gauche) S/Q de
la ferme Soupir. 64° B.C.A. sur la ligne d'arrêt
jalonné par la côte 171, Vieil Arcy - Moulin de
Bas, avec réduit à la cour des Moines (Sud de
Dhuizel). Liaison : à droite avec le 6ème R.I., à gauche
avec le 99° I. L'ennemi, depuis deux ou trois
jours, avait fait son apparition sur le canal mais
son artillerie ne paraissait pas encore en place.
Des militaires isolés français appartenant à
toutes formations se présentaient dans nos lignes,
venant de la région de Laon. Dans la
nuit du 21 au 22 mai L'ennemi se montre agressif sur le Canal,
notamment dans le P.A. de Pont-Arcy. La Compagnie
Minot est attaquée mais par une défense vigilante
évite toute infiltration. Dans le quartier de la
ferme de Soupir, la même activité de l'ennemi est
enregistrée. Des infiltrations venant de la gauche
de sous secteur sont jugulées par le 62° B.C.A.,
qui a deux officiers blessés (Lieutenants Lions et
Forgues), 1 chasseur tué, 2 blessés. Devant cette
situation, notamment à droite où le P.A. de
Pont-Arcy pouvait être considéré, à juste raison,
comme le point névralgique du S/secteur, je
suggère au général commandant la D.I. un
renforcement de cette position par des éléments de
la ligne d'arrêt (64° B.C.A.) Le général prescrit
alors un raccourcissement du front du 22° B.C.A.
par l'entrée en secteur du 64° B.C.A. Celui-ci
relève la Compagnie Minot à Pont-Arcy par la
Compagnie Becq. A la date
du 24 mai: le dispositif de la demi-brigade est
ainsi réalisé: P.C. à Chavonne. 64° B.C.A. (à
droite) une compagnie en ligne (P.A. de
Pont-Arcy), deux compagnies sur la ligne d'arrêt.
22° B.C.A. (au centre), deux compagnies en ligne
une compagnie en réserve à Chavonne et Cys la
Commune, à la disposition du Commandant du
S/secteur pour boucher la trouée de Soupir, entre
cette localité et l'Aisne. 62° B.C.A.: sans
changement. Commandement A la suite de ma prise de commandement,
le Capitaine Diot commandant le 62° est désigné
pour prendre le 64° (P.C. la Roche) et le
Capitaine Ottavi, Adjudant-Major au 62° pour
commander ce même Bataillon, avec le Capitaine
Griolet comme Adjudant-Major. L'ennemi s'est
renforcé, son artillerie est en place. Le canal
est bombardé par les minen et les arrières sont
copieusement arrosés par l'artillerie dont le
réglage est effectué par un avion divisionnaire.
Le bombardement devient, chaque jour plus intense
sur Soupir, Pont Arcy, Vieil Arcy, Chavonne, St
Mard. Nombreuses pertes. Un groupement
d'artillerie ami se constitue pour la défense du
S/secteur sous le commandement du chef d'escadrons
Remusat du 91° R.A.M. (2 batteries) Le
26 mai, le Caporal-chef Giacomoni (2°
Compagnie du 22°) ramène une mitraillette et
divers papiers pris sur un allemand tué et qui
permettent d'établir que nous avons en face de
nous le 14° R.I. Le
29 mai, un officier est blessé au 62°
(Lieutenant d'Allard) et 2 chefs de section sont
tués, un autre chef de section blessé, nombreuses
pertes. Au 64°, 3 officiers blessés (Lieutenant
Vincent, s/Lieutenant Roumegoux, s/Lieutenant
Germain), 5 autres blessés. Le
31 mai, le P.C. de la 26° D.B. et celui du
Commandant du groupement d'appui direct se
juxtaposent à la Ferme de la Montagne (sortie N de
St Mard). Dans la nuit du 1er
au 2 juin, la 26°
D.B. est relevée par la 25° D.B. (Lieutenant
colonel Bel) de la 28° D.I. Le 2
juin la situation de la
demi-brigade s'établit comme suit P.C. à Blanzy.
|
|
valeur
combative
|
Unités
|
Stationnement
|
Offic
|
Troupe
|
F.M
|
Mitr
|
Mort
|
Engins
|
22°
|
Paars
|
|
|
|
|
|
|
62°
|
Dhuizel
|
14
|
820
|
36
|
16
|
2
|
2
|
64°
|
Courlandon
|
|
|
|
|
|
|
La 25° D.B., après nous avoir relevé,
tenait un front plus étendu que le notre, avec
seulement deux bataillons en ligne. Le résultat de
cette disproportion ne devait pas tarder à se
faire sentir Le 3
juin Le 22° B.C.A. est
placé à Bazoches en réserve de D.I. Le 64° B.C.A.
part à Savigny s/Ardres en réserve du 7° C.A. Le
62° B.C.A. s'installe à Longueval avec une
compagnie sur la ligne d'arrêt du 6° R.I. Dans la
nuit du 4 juin, l'ennemi
réussit à enlever une section dans le P.A. de
Pont-Arcy (47° B.C.A., 25° D.B.). Dans le quartier
de la Ferme Soupir, le 27° B.C.A. est fortement
pressé par l'ennemi. Le 5
juin, Bombardements intenses sur Longueval,
nombreux tués et blessés au 62° B.C.A. L'officier
de la C.R.E. blessé (Lieutenant Giraud). A 14
heures un ordre de relever le 47° est envoyé au
62°. Le 64° retourne de Savigny pour Blanzy et St
Mard. Le 6 juin Le
P.C. de la D.B. se transporte de Blanzy les Fismes
à Vauxcére. Le commandement décide l'abandon du
Canal de l'Ailette. Une Compagnie du 47° B.C.A.
monte aux Grinons pour parer aux infiltrations
venant de la Ferme Soupir encore tenue par le 27°.
Le 47° glisse à St Mard et tous ses éléments sont
relevés. Le 62° s'installe sur l'Aisne à Vieil
Arcy, 2 compagnies en ligne: une au P.A. de Pont
Arcy (Compagnie Ciaudo) l'autre devant Bourg &
Comin (Compagnie Garzulino). Une autre compagnie
(Andréis) sur la ligne d'arrêt à Vieil Arcy. P.C.
à la Roche. Liaison assurée à droite avec le 6°
R.I. Le 64° B.C.A. après avoir laissé la 1°
Compagnie (Lieutenant Fumas) à la disposition du
6° R.I. dans le bois 2 km N de longueval installe
une compagnie en ligne dans la boucle de l'Aisne à
l'O de Pont Arcy (Becq) et l'autre compagnie à St
Mard et Cys-la-Commune. Ce dispositif fut réalisé
dans la nuit du 6 après une marche pénible de 38
kilomètres. Le 22ème B.C.A. demeure en réserve de
D.I. Le 7 juin Le
P.C. de la D.B. se transporte à Dhuizel. Le 62°
B.C.A. est fortement éprouvé par de puissants
bombardements d'artillerie. Le 64° dont le P.C. se
trouve à St Mard a 5 tués, 2 disparus et 10
blessés sous un violent martèlement de 105. A 22
heures, le 6° R.I. contre-attaque vainement pour
réoccuper les bords de l'Aisne que les éléments
avancés du 47° B.C.A. avaient perdus la veille. Le
bombardement ennemi augmente d'intensité sur les
arrières. Il se fait de plus en plus puissant par
minen sur Pont Arcy. A gauche, la situation de la
28° D.I. parait assez critique. Dans l'éventualité
d'un repli de cette G.U., le général commandant la
44° D.I. prend ses dispositions et envisage un
repli partiel de ses éléments qui formeraient une
bretelle face à l'ouest. Le Capitaine Dupassage,
officier de liaison venant de l'I.D., me met au
courant de ce projet et j'établis alors un
contre-projet contenant 3 paragraphes
correspondant à des éventualités diverses. Ce
contre-projet est envoyé à l'I.D. et porté en même
temps à la connaissance du 64° et du 62°. Le 8
juin, le P.C. de la D.B. se transporte à
Vauxtin à côté de celui du commandant de
l'artillerie d'appui direct. Les 2 compagnies
d'État-major doivent rejoindre le soir. La
préparation d'artillerie Des bombardements intensifs d'artillerie
plus puissants que jamais commencent le matin sur
Dhuizel, le bois de Dhuizel, Vieil Arcy, St Mard,
faisant présager une attaque prochaine.
L'après-midi, des bombardements massifs par vagues
d'avions se succédant à un quart d'heure
d'intervalle sur la Roche, Vieil Arcy, Dhuizel
(complètement rasé) bois de Dhuizel, St Mard.
Nombreuses pertes aux deux bataillons en ligne et
aux deux compagnies d'État-major à Dhuizel.
L'officier blessé (s/Lieutenant Masse). L'aumônier
divisionnaire détaché à la 6° D.B. et le Capitaine
Bessy, Commandant la C.R.E., procèdent eux-mêmes
sous le bombardement d'avions et malgré leurs
attaques à la bombe et à la mitrailleuse, au
périlleux sauvetages des blessés de la C.R.E. Un
sous-officier et un chasseur sont ainsi sauvés par
eux d'une mort certaine sous les décombres où ils
étaient enfouis, avec plusieurs de leurs camarades
tués sur place. La
division de gauche se replie Je fais alors demander au Commandant de
la 25° D.B. de faire tout son possible pour que
ses unités ne se replient pas avant la tombée de
la nuit. Mais vers 14 heures, les unités de cette
D.B. installées à Chavonne et Cys la Commune,
abandonnent l'Aisne et se replient. Vers 15
heures, le Lieutenant Colonel Bel, m'envoie un mot
conçu en ces termes : "Mon cher ami, j'ai presque
honte de le dire, mes chasseurs ont F... le camp
en désordre!" Le 64e
tourné à l'ouest Complètement découverte à sa gauche, la
Compagnie Becq (64°) qui occupait la boucle de
l'Aisne, en liaison à droite avec le P.A. de Pont
Arcy (62°) et à sa gauche avec le 47° B.C.A. (28°
D.I.) est contournée sur sa gauche par des
éléments venant de St Mard. A 16 heures, de forts
contingents allemands sont signalés sur le plateau
de Brenelle, derrière St Mard. (confirmation faite
par le Colonel Lacaze, commandant le 99° R.I.) Attaque
frontale A partir de 16 heures, la Compagnie Becq
est en même temps attaquée de front. Menacée à la
fois sur sa gauche, elle fait face résolument à
l'adversaire et résiste victorieusement jusqu'à 22
h 30 en infligeant à l'ennemi, qui attaque par
vagues successives, des pertes considérables.
Cette compagnie très éprouvée, est complètement
encerclée, et le Capitaine Becq lui-même ne
réussit à se dégager avec 29 chasseurs que grâce à
la protection des deux sections du s/Lieutenant
Josson qui tiennent les pentes nord de la cote 171
(ligne d'arrêt). Cette position est à son tour
menacée par des contingents allemands qui venant
des bois de St Mard ont contourné la cote 171. Le
s/Lieutenant Josson y fait face, mais doit se
replier à son tour en direction du P.C. Laroche.
Le 62°, lui, reçoit l'attaque directe dès 14
heures. Sur une poussée allemande, la Compagnie
Ciaudo contre-attaque. Le Lieutenant Ciaudo est
porté disparu. 30 survivants sont ramenés par le
Sergent chef Rolland. La 1er Compagnie (Lieutenant
Andréis) reçoit l'ordre de tenir à tout prix la
ligne l'arrêt qui est attaquée à 17 heures et
bientôt contournée par la gauche. Le Lieutenant
Andréis est porté disparu. La 2° section de canons
de 25 ne peut récupérer qu'un canon, avec le seul
cheval survivant. Les autres pièces sont rendues
inutilisables. Le chef de pièce Hughes est blessé
d'une balle à sa pièce. Le Capitaine Griolet
quitte le P.C. à minuit trente après avoir fait
sauter le dépôt de munitions. Ordres
donnés après le repli 62° B.C.A.: s'installer sur la ligne
allant de la cour des Moines incluse à 600 m ouest
de Longueval. 64° B.C.A.: tenir les lisières sud
de Longueval, en liaison à gauche avec le 62°, à
droite avec la 1° Compagnie du 64°, déjà installé
sur la ligne de réduit du 6° R.I. à qui elle avait
été prêtée. Le P.C. de la D.B. a assuré pendant
tout ce temps la défense de Vauxtin en liaison
avec le G.R.D. Après avoir protégé le repli de
l'artillerie, il se rend à Vauxcére, village
continuellement bombardé, où il trouve le P.C. du
G.R.D. Une liaison téléphonique est établie entre
le P.C. de la D.B. et le général commandant la
D.I. Le général me donne l'ordre d'appliquer les
paragraphes B et C d'une proposition que je lui
avais faite pour le cas d'un repli. Il s'agissait
des ordres ci-dessus précisés et déjà communiqués
aux commandants des 62° et 64° B.C.A. Le P.C. de
la D.B. est fixé par le général à Blanzy les
Fismes, et il s'y rend à la pointe du jour.
Situation des effectifs et du
matériel en fin de journée (8 juin)
22° B.CA. réserve de D.I.
62° B.C.A. 9 officiers/280 chasseurs/16 F.M./3 M.
64° B.C.A. 11 off/327 chass./16 F.M/2 M. et 2
autres ramassés sur le champ de bataille par la
C.R.E. (Capitaine Bessy). Le 9
juin Le 64° s'installe sur
la ligne de repli qui lui avait été fixée à
Longueval et entre en liaison avec la 1ère
Compagnie détachée au 6° R.I. (liaison effectuée
par le Capitaine Becq lui-même). Dispositif
réalisé à 5 heures du matin. A 9 heures, sous la
pression très forte de l'ennemi, le 64° se repli
des lisières de Longueval à la ferme Pinçon, où il
trouve une compagnie du 6° R.I. La 1ère Compagnie
du 64° B.C.A., installé sur la ligne de réduit du
6° R.I., s'y défend énergiquement, mais submergée
par le nombre, disparaît complètement avec ses
chefs: Lieutenant Fumas (présumé tué). 62° B.C.A.:
dispositif mis en place à 6 heures du matin: 1ère
Compagnie (Lieutenant Bodin) à Cour des Moines,
2ème Compagnie, à droite. 3ème Compagnie, en
réserve à la corne Ouest du bois ouest de la Ferme
Pinçon, avec le P.C. et 3 mitrailleuses. Ce
dispositif s'avère impossible à tenir. Une menace
d'encerclement se dessine à gauche. Le repli
s'effectue sur la route allant de la ferme Pinçon
à Vauxcére. Contre-attaque
vers Dhuizel Le général commandant la D.I., vient me
voir à Blanzy, un peu avant midi. Il ordonne de
pousser les éléments du 64° jusqu'à Longueval et
de faire contre-attaquer le 62° en direction de
Dhuizel. Le 64° B.C.A., parvient, après de grosses
difficultés à faire réoccuper les lisières sud de
Longueval par son groupe franc et une section de
F.V. jusqu'à 15 h et subit quelques pertes. Le 62°
B.C.A. amorce son mouvement, lorsque vers 15
heures une violente attaque allemande repousse les
éléments de ces deux B.C.A. Nombreux tués et
blessés au 62° : Capitaine Rullier, grièvement
blessé et disparu, s/Lieutenant Bodin, blessé et
évacué, Lieutenant Pactus, disparu et présumé tué.
Une cinquantaine de tués et blessés. De nombreux
disparus. A signaler: pendant cet épisode, la
belle conduite du Capitaine Diot, à la ferme
Pinçon, qui resta le dernier sur la position après
avoir assuré le repli de la compagnie du 6°
d'abord, des éléments de son bataillon ensuite, et
après avoir détruit le dépôt de munitions qui se
trouvait dans cette ferme. La défense
de Blanzy les Fismes A 17 heures, les deux bataillons refluent
vers Blanzy. Installé personnellement au carrefour
(sortie W de Blanzy), j'arrête ce repli et
installe le 62° face à l'ouest, le 64° face au
nord. Dans la soirée du 9, je reçois
successivement deux ordres du général Commandant
la D.I. Dans le 1er ordre, la 26° D.B., avec le
bataillon de la 173 D.B. installée en ce point
devait tenir Blanzy les Fismes "coûte que coûte".
Dans le 2ème ordre, verbal, et transmis par le
Capitaine Dewatre, Blanzy les Fismes devait être
défendu par la 26° D.B. et un bataillon du 6° R.I.
Des éléments de la 26° D.B. pouvaient, le cas
échéant, être installés sur les pentes est de
Perles. Cette dernière solution a été adoptée, le
64° restant à Blanzy et le 62° détaché sur les
pentes sud-est de Perles, en liaison avec le
G.R.D. Le P.C. de la D.B. s'installe vers minuit,
dans un boqueteau au sud-est de Perles.
Situation des effectifs et du
matériel en fin de journée: (9 juin)
22° B.C.A. : Toujours en
réserve de division, s'est battu à Bazoches et se
replie sur Fismes à minuit. 62° B.C.A. : 4
officiers/90 chasseurs/5 F.M. 64° B.C.A. : 10
officiers/297 chasseurs/13 F.M./1 canon de 37. Le
10 juin A la pointe du
jour, le bataillon du 6° qui tenait Blanzy, se
présente au pont de Fismes, pour traverser le
Vesle, entraînant avec lui le 64°. Le chef de
bataillon commandant le 6° lui interdit de
franchir le pont. Ce bataillon du 6° fait
demi-tour, longe la Vesle, sur la rive nord, et
passe la rivière plus à l'est. Le 62°, venant
derrière lui, passe la Vesle, et s'installe dans
un petit bois à la sortie sud de Fismes. Le 62°
B.C.A., constitue en quelque sorte une tête de
pont sur la Vesle, en avant de Fismettes. La tête de
pont de Fismes A 7 heures du matin, un ordre du général
commandant la D.I. me prescrit "de constituer en
avant de Fismes sur la Vesle, une tête de pont
solide, en vue de barrer à l'adversaire la route
Soissons - Reims. Le 22° B.C.A. est remis à la
disposition de la D.B. Le G.R.D. sera retiré du
Pont de Fismes pour être investi d'une autre
mission". Vers 9 heures du matin, le 64° reçoit
mon ordre de rallier le pont de Fismes. Le 22° ne
peut mettre à ma disposition que la Compagnie
Latruffe. Vers 10 heures, la tête de pont était
constituée dans les conditions suivantes : Les
éléments restant du 62° B.C.A. sont renforcés par
la Compagnie Latruffe qui occupent les crêtes N.O.
de Fismes et par les éléments du 64° B.C.A. qui
prennent position sur un mamelon au N. de Fismes,
clé de la tête de pont. 1 section du 22° B.C.A.
(Compagnie Combet) est envoyé à la cote 62 pour y
prendre position et protéger efficacement la tête
de pont contre une attaque allemande venant de
l'Est. L'Adjudant-chef Coré, commandant cette
section prend pied sur la position assignée malgré
un feu violent de mitraillettes allemandes et s'y
maintient en prenant à son tour à partie l'ennemi
qui dévale les pentes Est de Perles, en lui
infligeant de lourdes pertes. A 10 heures 30, une
puissante attaque allemande se déclenche; la
Section Gesta elle-même fortement pressée par
l'ennemi. C'est à l'arrivée de l'Adjudant chef
Coré que le s/Lieutenant Gesta, commandant le
groupe franc du 64° B.C.A., au cours d'une défense
héroïque tombe frappé à mort d'une salve de
mitraillette. A signaler la belle conduite du
Capitaine Griolet à qui j'avais confié le
commandement des éléments avancés de la tête de
pont. Cet officier, debout en avant du pont,
assura le repli de tous ses éléments et partit le
dernier avant la destruction du pont. Destruction
du pont de Fismes Vers 11 h 30, en effet, le groupe franc
du 64°, privé de son chef, et la Section Coré se
replient après avoir épuisé toutes leurs
munitions. Les Allemands s'installent au coude de
la route de Merval et prennent sous leur feu le
carrefour du pont. D'autre part, les éléments de
la Compagnie Latruffe du 22° B.C.A. sont refoulés
également par l'ennemi très supérieur en nombre.
Étant donné la situation, à midi, je fais replier
les éléments de la tête de pont du chemin de fer.
Une fois le repli total effectué j'ordonne la mise
de feu. Défense de
Fismes et l'ordre de repli Tous les éléments repliés sont alors
placés sur la défensive sur les bords de la Vesle.
Le Capitaine Diot installe sur le pont de chemin
de fer une partie de ses éléments avec 2 F.M.
prenant à parties d'importants contingents ennemis
qui descendent vers Fismes et leur infligea des
pertes massives. Le Chef de Bataillon Ardisson est
légèrement blessé à la main d'un éclat de minen.
Le Capitaine Pourchier prend le commandement du
22° B.C.A. et exécute l'ordre donné par son chef,
avant son évacuation : "Repli sur St Gilles". Le
Capitaine Bussat, commandant la C.A. du 22°,
précédant sa compagnie à bicyclette, disparaît.
Cet officier n'a plus donné signe de vie depuis ce
jour. Il aurait été vu le 11 juin à Troyes où il
serait arrivé en auto (renseignement donné par le
Chef de Bataillon Anneau Commandant le bataillon
régional) Avec lui se trouvait au départ de Fismes
le Médecin-auxiliaire de réserve Sidi, du 22°, qui
a rejoint, lui, son bataillon à Oeuilly sur Marne,
le 12 juin. Après que le pont de Fismes eut sauté,
j'établis le P.C. de la D.B. à la mairie de
Fismes. Vers 13 heures, le Lieutenant Abeille,
officier de liaison, arrive au P.C. porteur d'un
ordre de repli général, en direction de Lhéry et
Faverolles pour la demi-brigade. Des ordres en ce
sens sont aussitôt donnés. Les chasseurs privés de
tout ravitaillement sont exténués de fatigue.
L'ordre de repli parvient au 22° à St-Gilles.
J'assure ensuite le repli des 62° et 64° B.C.A..
Je mets au courant une compagnie isolée du 6° R.I.
(Capitaine Dommange) de la nouvelle situation et
je laisse sur place le Capitaine Bessy qui quitte
Fismes le dernier, à 15 h 15. A 16 heures le 62°
B.C.A. assure la protection du repli des batteries
du 91° R.A. par le groupe franc avec le
S/Lieutenant Fritsch. Celui-ci rejoint le
bataillon à Sacy où il est autorisé, ainsi que ses
hommes, à faire le trajet jusqu'à Tramery avec les
camionnettes du T.R. C'est par une nouvelle étape
très pénible que les chasseurs regagnent leurs
nouveaux points de stationnement, où, dans la
nuit, le Capitaine Bessy assure le ravitaillement
en munitions.
Situations des effectifs et du
matériel en fin de journée (10 juin)
22° B.C.A.: 16 officiers/400
chasseurs/30 F.M./9 mitr. 62° B.C.A.: 4
officiers/80 chasseurs/ 64° B.C.A.: 10
officiers/271 chasseurs/11 F.M. Le
11 juin, vers 2 heures du matin Le
Capitaine Dupassage, venant de l'I.D., arrive au
P.C., à Lhéry, porteur d'un ordre de repli
immédiat en direction de Violaine où les éléments
de la D.B. devaient attendre le ravitaillement et
de nouveaux ordres. A 5 heures, la D.B. est
groupée à Violaine. A 7 heures, le Lieutenant de
Cardaillac est envoyé au Q.G. de la division pour
provoquer de nouveaux ordres et y demander du
ravitaillement en vivres. Parti à motocyclette, le
Lieutenant de Cardaillac se heurte à sa sortie
nord du village à une colonne motorisée allemande.
Il fait demi-tour brusquement et revient me
prévenir. Puis, par un autre chemin, il se rend à
la D.I. où il explique la situation. Installation
défensive sur la Marne Je décide alors d'emmener la D.B. en
direction de la Marne, en prenant comme axe de
marche la route de Châtillon (64° à droite, 62° et
22° à gauche. Des éléments du 22° en
arrière-garde). Grâce à des mouvements de terrains
prononcés, les éléments de la D.B. parviennent à
échapper à l'emprise de la colonne motorisée
allemande. Mais à 2 kilomètres avant d'arriver à
Châtillon, des salves de mitraillettes allemandes
sont tirées venant de ce village sur mes éléments
de tête. Presque en même temps, une forte
explosion se fait entendre : le pont en arrière de
Châtillon (Port à Binson) vient de sauter. Je
détache aussitôt la Compagnie Minot (22°) en
direction des bois d'où venaient les coups de feu
allemands, et, à l'abri de cette protection,
j'oriente la marche de la D.B. vers Reuil que nous
atteignons sans encombre. Avec un Compagnie du
22°, j'établis en ce point une tête de pont et
fais franchir la coupure à tous mes éléments que
j'installe aussitôt défensivement à Oeuilly, rives
sud de la Marne. Je prends contact avec le
Capitaine Pluchot, commandant la 1ère Compagnie du
21/46 B.I. qui tenait le secteur de la Marne
depuis Port à Binson (exclus) jusqu'à Boursau
(inclus), front très large avec trois sections
disséminées sur les berges sud de la Marne, sans
aucune homogénéité. Après avoir donné le
commandement du 22° B.C.A. au Capitaine Griolet (à
midi), et pris la défense de ce secteur à mon
compte j'adopte le dispositif suivant: 22° B.C.A.:
Village d'Oeuilly, pont de Reuil. 64° B.C.A. : En
réserve dans le bois à 300 mètres S. d'Oeuilly.
62° B.C.A. : Très éprouvé ne compte plus que 60
hommes et 2 officiers. Il est chargé de construire
des barricades dans Oeuilly. Le Lieutenant
Fritsch, et le groupe franc n'ont pas rejoint. Un
compte-rendu est envoyé à l'I.D. au sujet de cette
installation et un premier ravitaillement en
munitions est effectué par le Capitaine Bessy qui
arrive en chenillettes. La journée du 11 se passe
sans incidents. Le contact est réalisé dans la
journée, avant la tombée de la nuit, par
l'apparition des Allemands sur la Marne. Un
deuxième ravitaillement en munitions est effectué
dans la nuit par les soins de la C.R.E. Le
ravitaillement en vivres n'arrive toujours pas.
Situation des effectifs et du
matériel en fin de journée (11 juin)
22° B.C.A.: 17 officiers/400
chasseurs/30 F.M./9 mitr. 64° B.C.A.: 10
officiers/271 chasseurs/11 F.M./ 62° B.C.A.: 2
officiers/ 60 chasseurs(la plupart sans armes). Une lettre
du Colonel Delmas: Le rétablissement de la 26° Demi-Brigade
sur la Marne dans des conditions aussi pénibles
devait, le lendemain, motiver de la part du
Colonel Delmas commandant l'I.D. la lettre de
félicitations suivantes:
"Mon cher Désidéri Je vous fais mes
compliments pour la façon dont vous avez ramené
et réinstallé la 26° Demi-Brigade sur la Marne.
Amitié le 12.VI 1940 Signé: Delmas"
Le 12 juin, dans la
matinée D'importants
contingents ennemie dévalent les pentes
surplombant Reuil et de nombreux véhicules blindés
entrent dans cette localité. Un ordre de la D.I.
parvenu dans le milieu de la journée à la 26° D.B.
prescrit l'entrée en secteur sur la Marne de la
44° D.I. dans la nuit du 12 au 13. Les éléments
des bataillons d'instruction se trouvant sur la
Marne doivent être laissés sur place. Secteur de
la 26° D.B. : de Port à Binson exclus, au pont de
Reuil inclus, en liaison à gauche avec la 45°
D.I., à droite avec le 6° R.I. Le groupement
d'artillerie d'appui direct de la 26° D.B. n'étant
pas encore en place, j'envoies le s/Lieutenant
Causeret à un P.C. d'artillerie voisin pour
demander un tir sur Reuil. Ce tir est effectué
aussitôt. A 13 heures je reçois l'ordre de faire
présenter mon adjoint, le Commandant Faraut à la
visite du médecin divisionnaire. Celui-ci est
évacué sur l'arrière pour raisons de santé. Je
désigne le Capitaine Bessy pour le remplacer dans
ses fonctions d'adjoint. Le Lieutenant de
Cardaillac remplace le Capitaine Bessy au
commandement de la C.R.E. Les
Allemands s'infiltrent à Port à Binson A 16 heures le Colonel Serre, commandant
le groupement d'artillerie arrive au P.C. de la
demi-brigade et signale que, depuis 14 heures, son
observatoire voit, à l'oeil nu, des Allemands
traverser la Marne en barques, sur l'îlot de Port
à Binson. Une navette régulière apporte de gros
contingents d'une rive à l'autre. Le Colonel Serre
repart aussitôt à l'A.D. en vue d'actionner toute
l'artillerie de la D.I. sur ce point. En même
temps j'envoie le Capitaine Bessy à Port à Binson,
avec une voiture de liaison, avec mission de voir
ce qui s'y passe et de s'en approcher le plus
possible. Le Capitaine Bessy arrive à Port à
Binson vers 16 h 30 et prend contact avec le
Lieutenant Chataignier du 48° B.I. qui, avec sa
section, était en train d'abandonner le pont qu'il
était chargé de défendre. Interrogé, cet officier
affirmait que de forts contingents ennemis (plus
d'un millier) avaient franchi la Marne et pris
position dans le bois en arrière de Port à Binson.
Le Capitaine Bessy, qui n'avait du reste rien
remarqué d'anormal, ordonna au Lieutenant
Chataignier de réoccuper ses emplacements de
défense. Cet ordre ayant reçu un commencement
immédiat d'exécution, le Capitaine Bessy revint me
rendre compte de sa mission.
Dispositions
défensives
A 17 heures, je prends
les dispositions suivantes portées à la
connaissance du général, commandant la D.I., par
voie de C.R. Ordre au 64°
B.C.A.
Se
porter à la lisière du Bois de Misey avec -
Mission de s'opposer à toute avance ennemie au cas
où les Allemands auraient franchi à Marne à Port à
Binson. - De couvrir à l'ouest le village
d'Oeuilly. - De s'installer à la tombée de la nuit
sur la rive sud de la Marne et le talus de chemin
de fer, en liaison à gauche avec la 45° D.I. qui
doit venir à Port à Binson et à droite avec le 22°
B.C.A. qui doit étendre son secteur par
l'intégration de la Compagnie Latruffe dans le
système de défense à l'ouest d'Oeuilly.
Le Capitaine Diot,
commandant le 64° B.C.A., dont les unités avaient
été jusqu'ici fortement éprouvée, accepta
résolument cette mission s'exprimant en ces termes
: "Cette fois-ci, mon commandant, c'est le coup de
grâce que vous nous donnez". Ordre au 22°
B.C.A. :
- Porter
la Compagnie Latruffe à la gauche de la Compagnie
Combet sur la Marne et la voie ferrée et prendre
liaison à gauche avec le 64° B.C.A. - Placer les
éléments restants de la Compagnie Minot (très
réduite) dans le boqueteau derrière la Compagnie
Latruffe pour barrer le couloir compris entre
cette compagnie et le 64° B.C.A. au cas ou
celui-ci n'aurait pu déboucher du bois de Misey
pour se porter sur la Marne.
Ordre au 62°
B.C.A.:
-
Continuer dès la tombée de la nuit les barricades
dans Oeuilly.
Le capitaine, commandant
la Compagnie du 46° B.I. est prévenu de ces
dispositions et ordre lui est donné de laisser ses
éléments en place à ma disposition. A 18 heures,
le Capitaine Juguin, Commandant la Compagnie
d'Instruction de Port à Binson (48° B.I.) arrive
avec un chef de section au P.C. et rend compte
qu'il s'est replié avec 2 sections devant une
forte attaque allemande. Ordre lui est donné
aussitôt de repartir pour reprendre ses
emplacements, avec une section du 22° B.C.A. mise
à sa disposition. Le Capitaine Juguin s'arma
lui-même d'un fusil et partit résolument à la tête
de sa troupe. Mais il fut rendu compte au bout
d'une demi heure, au P.C., qu'il n'avait pu aller
jusqu'au bout, arrêté par d'importants contingents
ennemis qui avaient déjà franchi la Marne. Un
officier du génie se disant être le commandant
d'un groupe de 2 compagnies du génie vient au P.C.
vers 18 H 30 pour rendre compte de ce que ses 2
unités réinstallées sur le plateau derrière le
bois de Misey, s'étaient repliées et qu'il ne
savait pas où elles étaient passées. Je lui
donnais l'ordre d'aller à leur recherche et de les
regrouper. Je n'ai plus revu cet officier. Préparation
d'artillerie ennemie - Arrêt du tir de
l'artillerie amie Depuis 16 heures un violent tir de
destruction s'est abattu sur Oeuilly. Ce tir s'est
poursuivi presque sans arrêt jusqu'à 21 h 30.
Pendant tout ce temps la Marne était franchie
largement du côté de Port à Binson d'une part, et
d'autre part des éléments ennemis commençaient à
partir de 20 heures à passer cette coupure à 1 km
de l'est d'Oeuilly. Cette situation est portée à
la connaissance du général commandant la D.I. dans
un C.R. par lequel je fais ressortir qu'il n'y a
rien à ma droite ni à ma gauche pour s'opposer au
franchissement de la rivière et demande que des
dispositions soient prises pour en diriger
l'avance allemande en ces deux points. Des
éléments du G.R.D. sont envoyés en direction de
Port à Binson et entrent en liaison avec le 64°
B.C.A. au bois de Misey. L'attaque atteint une
violence extrême entre 19 heures et 21 h 30 tout
un groupe d'artillerie ennemie tire sur Oeuilly
sans interruption. Pendant ce temps là aucun tir
n'a pu être obtenu de notre artillerie qui fut
décrochée pour des raisons inconnues de 17 h 30 à
21 heures passées (C.R. apporté par le Capitaine
Fossat) L'attaque
devant le 22° B.C.A. Le 22° B.C.A. résiste avec vigueur à
cette attaque et mitraille les embarcations
pneumatiques allemandes qui passent la rivière à
700 mètres ou 800 mètres sur sa droite. Sur sa
gauche la Compagnie Latruffe, fortement pressée
par des forces élevées ennemies venant de Port à
Binson, est contournée à l'ouest. Un ordre de
résistance sur place est donné à tous les éléments
de la 26° D.B. de Chasseurs Alpins qui défendent
la Marne. Vers 20 heures un officier de liaison du
6° R.I. venant de Boursault arrive au P.C. de la
D.B., son régiment devant prendre le secteur à la
droite de la demi-brigade à la nuit. Je lui
explique la situation dont il parait se rendre
compte lui-même par la violence du bombardement
qui ne cesse de croître en intensité. A 21 h 30,
arrêt brusque du tir ennemi. Des fusées blanches
de l'ennemi partent des directions nord, est et
ouest. C'est le moment où les Allemands devant
encercler Oeuilly ont largement dépassé la coupure
et signalent à leur artillerie de ne plus tirer.
La Compagnie Combet est débordée vers la droite.
La Section Merpillat est encerclée et ne réussit
pas à se dégager. Le Capitaine Combet fait replier
ses autres sections dans Oeuilly où l'ennemi avait
déjà pris pied par endroit. La Compagnie Latruffe
contournée vers sa gauche se défend énergiquement
et se replie à son tour en faisant un prisonnier
(blessé évacué). Devant le
64° B.C.A. D'autre part le 64° B.C.A. se bat depuis
20 heures dans le bois de Misey contre une forte
patrouille ennemie. Il fait un prisonnier qui est
envoyé à la D.I. La patrouille allemande du début
s'est renforcée progressivement par des éléments
nouveaux qui aux dires du prisonnier s'élèvent à 6
compagnies. Les éléments du G.R.D. 41 en liaison
avec le 64° B.C.A. luttent courageusement côte à
côte. Ils se trouvent dans l'obligation de se
replier vers 23 heures après avoir combattu avec
énergie et infligé à l'adversaire de lourdes
pertes. Le 64° B.C.A. dégage deux officiers
d'artillerie encerclés dans leur observation. Repli dans
l'ordre et nouvelle installation défensive A 22 h 30, je donne l'ordre de repli qui
se fait dans l'ordre le plus parfait. La
demi-brigade derrière moi, en colonne par 3, et à
des distances appropriées. Je décide de me
défendre sur les lisières nord et ouest du bois de
la ferme des Chênes à travers lesquels passe la
route d'Ablois. Je rencontre à 23 h 30 le
groupement d'artillerie du Colonel Serre qui
venait de se remettre en batterie suivant l'ordre
de l'A.D. Je place la Compagnie Latruffe en
couverture de l'artillerie et dispose le reste de
mes éléments aux lisières du bois. Le Capitaine
Bessy chargé d'instruire le général commandant la
D.I. de ce repli revient avec un ordre verbal pour
la D.B. d'avoir à se reporter en direction
d'Oeuilly. Un ordre arrive peu après pour préciser
et prescrire de s'installer sur la ligne jalonnée
par la ferme de la cense-carrée et la corne ouest
du bois des Chênes. La demi-brigade, presque sur
place, n'a qu'une petite rectification à faire
pour occuper ses emplacements où un ravitaillement
en munitions est effectué par le Capitaine Bessy
avec les chenillettes de la C.R.E.
Situation des
effectifs et du matériel en fin de journée (12
juin)
22° B.C.A. : 10
officiers/150 chasseurs/6 F.M. 62° B.C.A. : 2
officiers/40 chasseurs 64° B.C.A. : 9 officiers/
219 chasseurs/8 F.M. Le 13 juin A
l'aube un ordre prescrivant le repli en direction
de Morangis me parvient. Cet ordre indique, en
outre, qu'une compagnie du 99° R.I.A. est mise à
ma disposition dans la région d'Ablois. Je me mets
aussitôt en relations avec le Chef d'Escadron
Cardot (303° R.A) commandant le groupe d'appui
direct; je règle avec lui les différents arrêts de
l'artillerie en vue de son appui et décroche mes
éléments sans contact avec l'ennemi. Je rencontre
aux environs d'Ablois le commandant de la
Compagnie du 6° R.I. et celui-ci me fait connaître
qu'il a reçu mission de renforcer le G.R.D.I. 41
pendant ce repli. Je n'ai plus revu, par la suite,
cet officier. Avant d'arriver à Morangis, un
officier régulateur se disant appartenir au C.A.
m'interpelle en criant : "26ème Demi-Brigade!
Morangis!" La 26° demi-brigade s'installe à
Morangis. La Compagnie Minot du 22° B.C.A. est
placée en lisière nord en couverture approchée. Le
G.R.D. et la Compagnie du 6° assurent la
couverture éloignée. L'état de fatigue des
chasseurs, qui, depuis de longs jours, n'avaient
ni mangé ni dormi (se déplaçant la nuit pour se
battre le jour), était tel qu'il paraissait
impossible de leur demander alors le moindre
effort. C'est à ce moment que je suis appelé au
P.C. de la D.I. Le général commandant la D.I.
projette une contre-attaque en direction d'Oeuilly
avec l'appui de chars qu'il demande au commandant
d'une division voisine, sans pouvoir les obtenir.
Pendant l'élaboration de ce plan on me conseille
de me reposer un peu et la chambre du général fut
mise à ma disposition. Réveillé une heure après
vers midi, j'appris du général que les Allemands
étant à Ablois, il fallait qu'avec les éléments de
la 26° D.B. j'aille occuper le plateau sud de
cette localité, en contre-attaquant. Je mis alors
le général au courant de l'état de fatigue extrême
des chasseurs, mais, comprenant qu'il s'agissait
surtout d'une mission de sacrifice devant
permettre au reste de la D.I. de se replier, je
demandais au général d'envoyer tout de suite de
quoi faire manger les hommes de façon à pouvoir
assurer cette mission avec plus d'efficacité.
Effectivement, je pouvais rapporter du
ravitaillement à Morangis, à midi trente. A 14 h
30, le dispositif de contre-attaque composé de
quatre compagnies de 3 sections de la D.B. avec 14
F.M. et d'une demie compagnie du 99° R.I.A. est
déclenché ayant comme axe de marche la route
d'Ablois. Les hommes ont mangé et dormi deux
heures. Les éléments d'avant-garde venaient à
peine de prendre le contact qu'un ordre très
urgent de
repli était donné en direction de Bergéres les
Vertus. Deux automitrailleuses, mises à la
disposition de la demi-brigade s'étaient portées
en direction d'Ablois. L'ordre impliquant la
rapidité de l'exécution en raison des menaces
sérieuses à l'ouest, la 26° D.B. se décroche et
commence son repli. Le Capitaine Griolet
commandant l'arrière-garde de la 26° D.B.
rencontre pendant le repli deux capitaines qui
stationnaient, avec leurs chars, sur la route.
Après lui avoir appris que les deux
automitrailleuses envoyées en avant des éléments
de contre-attaque avaient été détruites et brûlées
par l'ennemi à la sortie sud d'Ablois, ces deux
officiers français firent la réflexion : "Au moins
voilà une troupe qui se replie en ordre. pour une
fois, cela fait plaisir." A Vertus, la Compagnie
Latruffe (22° B.C.A.) est placée en couverture sur
les hauteurs qui dominent la localité au nord. Des
bouchons sont installés sur la voie ferrée, en
direction de l'ouest. Le reste de la demi-brigade,
cantonne à la ferme de la Censée où elle subit un
bombardement intensif d'aviation. Aucun
ravitaillement ce soir-là encore et fatigue accrue
des hommes. Le 14 juin A une
heure du matin, arrive l'ordre de départ, apporté
par un motocycliste. Cet ordre prescrit le passage
de la D.B. à 2 heures au point initial fixé par la
D.I. à 3 kilomètres de là. La demi-brigade doit se
rendre sur la bretelle Maurins le Petit - Ecury le
Repos, où de nouveaux ordres seront donnés. Les
éléments de la D.B. arrivent vers 6 heures. A 11
heures, le Capitaine Fossat, commandant la section
de transmission de la compagnie de commandement,
apporte un ordre prescrivant à la 26°D.B. de
partir se placer à 600 mètres au nord d'Oeuvy, à
l'ouest de la route Fère Champenoise - Oeuvy. Les
2 autres régiments de la D.I. devaient se disposer
dans la même région de façon à former un triangle,
la pointe au nord avec le 6° R.I. Après une étape,
durant laquelle, l'aviation italienne ne cesse
d'effectuer des bombardements par vagues
successives, créant un intense désarroi parmi les
innombrables convois qui sillonnaient la région,
la 26° D.B. s'installe, vers 14 heures, aux
emplacements prescrits. La liaison recherchée avec
le 6° et le 173° permet de constater l'absence de
ces unités qui, semble-t-il, n'avaient été
touchées par l'ordre. La D.B. essuie de nouveaux
bombardements aériens ne provoquant heureusement
que des pertes légères. Vers 17 heures, un
chauffeur du P.C. de la D.B. prescrivant le repli
de la D.B. en 2 bonds : a) Champfleury. - b) Rives
sud de la Seine. Les éléments de la D.B. se
mettent en route et atteignent Champfleury vers 20
h 30. Aucun ravitaillement en vivres n'est encore
arrivé. Et la faim ajoute encore à la fatigue des
hommes. A 21 heures, le Capitaine Dupassage,
venant de l'I.D., arrive avec un nouvel ordre de
repli immédiat sur Pouan (Aube). Le P.C. de la
D.I. était fixé pour le lendemain à 8 km S.E.
d'Arcis sur Aube. Le Capitaine Dupassage avait
expliqué que la poussée ennemie se faisant surtout
à l'Ouest, il y aurait lieu de passer la Seine
plus au sud, sans autre précision. Et il avait
laissé entendre que désormais les ordres
parviendraient difficilement. Ce fut le dernier
contact que la 26° D.B. eut avec la D.I. Le 15 juin La
D.B. franchit l'Aube au pont de Viapres le Petit
et atteint Pouan vers 2 heures du matin, toujours
sans ravitaillement. Le lieutenant chargé de faire
sauter le pont me fit part de son pessimisme en me
disant qu'il n'était pas prudent de s'attarder à
Pouan. Je pris l'initiative de partir à 4 heures
pour traverser la Seine à Villacerf et
communiquais cet ordre aux chefs de bataillon.
Puis je partis en avant avec ma voiture
personnelle et mon adjoint pour reconnaître le
passage. Le pont de Villacerf était déjà tenu par
des blindés allemands. Je fis alors la
reconnaissance de tous les ponts jusqu'à Troyes.
L'ennemi était partout. Arrivé à Troyes vers 9
heures, je remarquais que le pont Hube situé un
peu plus loin que le pont Ste Marie et coupé par
une bombe d'avion, venait d'être à nouveau à la
circulation. Je reviens aussitôt à Villacerf
croisant d'innombrables camions de réfugiés
embouteillant la route latérale à la Seine. A
Villacerf j'attendis les éléments de la D.B. et
j'expliquais la situation aux chefs de bataillons.
Je leur demandais de dire aux hommes que malgré
leurs fatigues un nouvel effort s'imposait à eux
pour franchir la Seine à Troyes avant que les
Allemands n'y arrivent (15 km environ). Je leur
fis également part de mon intention de me rendre à
Troyes pour y organiser un cantonnement provisoire
et du ravitaillement en vivres. L'affaire
du Pont Hubert J'arrivais à Troyes avec le Capitaine
Bessy, mon adjoint, et s/Lieutenant Causeret. Le
pont Hubert est maintenant barré par les
Allemands. Et un double convoi civil et militaire,
sans conducteur dont la tête arrive jusqu'au pont
embouteille la route. Un bombardement de
l'aviation italienne ajoute encore au désordre
complet qui règne dans ce faubourg. Ayant remarqué
la présence de divers éléments épars je les
regroupe et les constitue en patrouilles avec
mission d'expulser des jardins bordant la route
les éléments légers ennemis qui s'y étaient
infiltrés. Un capitaine du génie de la 28° D.I.,
et le Capitaine Bessy, s'offrent pour faire une
patrouille ainsi que 2 autres officiers
(Lieutenant Potier du 80° R.I.) et un cavalier du
G.R.D. Grâce à l'action de ces patrouilles, les
jardins ont pu être "nettoyés" aux deux ailes,
mais la défense ennemie se concentre sur le pont
et dans les maisons environnantes au delà du pont.
Deux automitrailleuses se défilent derrière les
haies et mitraillent les petits postes que j'avais
placés autour du pont. Des minen semblant tirés
d'une maison d'habitation, bientôt repérée,
tombent en avant du pont balayé en même temps par
un feu nourri de mitraillettes. Le Capitaine Bessy
découvre un canon de 25 et des munitions dans un
convoi de chenillettes abandonné. il le met en
batterie et à défaut de personnel, cet officier
assure seul le service de la pièce sous le tir des
armes automatiques et minen allemands. Avec un
mortier de 60, trouvé également sur les lieux, un
officier et un sous-officier d'infanterie tirent
pendant ce temps sur la maison d'où viennent les
minen. Mais le combat s'amplifie. Des renforts
allemands surviennent. Deux mitrailleuses d'un
régiment de zouaves sont mises en batterie.
L'aviation italienne reparaît et bombarde et
mitraille le pont. Assurant la direction des
opérations je regroupe le plus grand nombre
d'hommes dans le but d'essayer de faire une brèche
dans le dispositif et de faire passer le pont à
l'interminable convoi stationnant à ses abords.
Cependant la défense ennemie se renforce de plus
en plus et la vanité de nos efforts apparaît
malgré l'héroïsme de certaines individualités dont
une surtout est à retenir: celle d'un tireur de
F.M qui, ayant un mauvais champ de tir pour
utiliser sont arme, se dresse debout à l'entrée du
pont, mitraillant les Allemands à 150 mètres, il
tombe grièvement blessé atteint par une rafale de
mitraillette. J'ai rédigé sur le champ un ordre de
citation à l'ordre de l'armée pour ce soldat dont
j'ai oublié le nom, et j'en ai remis le texte à
l'officier du régiment de ce jeune héros. Vers 18
heures ayant acquis la certitude que tout effort
de percée en direction de Troyes était vain, la
ville étant fortement occupée par l'adversaire,
j'abandonne ces opérations de nettoyage et me
porte au devant de la 26° D.B. dont les différents
éléments venaient d'arriver et de se regrouper
dans un bois à l'entrée de Troyes. Je réunis les
chefs de bataillon et prends la décision de passer
la Seine plus au sud. Au même moment, des vagues
successives d'avions italiens, bombardant le bois
et l'entrée de la ville. Les faubourgs sont
complètement rasés et les convois hippo ou
motorisés fortement endommagés. Après avoir
consulté une carte Michelin, je donne l'ordre
suivant : "La 26° D.B. traversera la Seine à
Ville-Moyenne et se regroupera au delà de la
coupure au village de Foucarde". Je renvoie alors
mes deux voitures de liaison avec le Capitaine
Ambrosi de mon E.M. et, suivi de mon adjoint, et
du s/Lieutenant Causeret, prends le tête de la
D.B., qui ne constitue plus qu'un détachement de
200 hommes. La Compagnie Latruffe du 22° B.C.A. et
la Compagnie Combet, fortement réduites et encore
dispersées par le dernier bombardement d'avions,
furent regroupées par leur chef respectif mais ne
rejoindront pas le gros de la D.B. et passeront la
Seine, le lendemain à des endroits différents. Affaire de
Les Parres Après Villechétif qu'elle quitte à 19
heures, la D.B. traverse une forêt puis débouche
sur un vaste champ de blé. Le groupe du 22° B.C.A.
est en avant-garde. Devant, à environ 600 mètres,
une crête parallèle à la route nationale Troyes,
Bar-sur-Seine. Des coups de feu partent de cette
crête située à 2 ou 3 km à l'est de Les Parres. Le
groupe franc se déploie et prend le contact. Des
éléments du 64° B.C.A. le renforcent et le combat
s'engage. Je demande un volontaire pour porter un
F.M sur un point afin de prendre de flanc
l'ennemi. Un s/officier du 22° B.C.A. se présente,
enfourche une bicyclette et par une route
perpendiculaire à la crête va prendre position au
point indiqué, malgré le tir ennemi qui l'oblige à
abandonner son vélo. Appuyé par le tir de ce F.M.,
le groupe franc avance et l'ennemi se replie vers
Les Parres, laissant entre nos mains un prisonnier
valide du 14° R.I. allemand. La 26° demi-brigade
reprend sa marche en avant et sans être inquiétée
de la soirée, poursuit sa progression en direction
du sud-ouest. A quelques kilomètres plus loin,
devant une ferme, nous rencontrons un officier du
G.R.D en side-car. Celui-ci m'apprend que sa
division (42° D.I.) doit se frayer un passage sur
la Seine le lendemain et demande qu'on lui remette
le prisonnier. Ce prisonnier interrogé à la D.I.
pouvant fournir des renseignements utiles à
l'opération projetée, je le remis entre les mains
de l'officier du G.R.D. et la demi-brigade reprit
sa route, en direction de Ville Moyenne. Arrivé
dans une ferme, à environ 7 km du village de
Verrières, un s/officier m'a fait connaître que le
pont sur la Seine à hauteur de cette localité,
était libre. La D.B. s'y dirige et atteint ce pont
à 22 h 30. Il avait sauté! Le détachement reprit
alors la direction de Clercy bas dans l'espoir de
trouver un passage libre. La fatigue
des chasseurs Depuis le départ d'Oeuvy, le 14 juin à 18
heures (c'est à dire en 30 heures), le détachement
avait parcouru 80 km sans manger ni dormir et
avait soutenu deux combats, faisant un prisonnier.
Le dernier ravitaillement datait du 13 Juin midi à
Morangis où les chasseurs avaient touché du pain
et du singe (pas en abondance) avant la
contre-attaque amorcée. A Clercy-bas, ce n'étaient
plus des chasseurs, mais des fantômes titubant,
littéralement épuisés de fatigue, harassés par le
manque persistant de sommeil depuis neuf jours.
Situation des effectifs de la
demi-brigade
Officiers :Hommes:
150
chasseurs et 200 hommes environ de toutes armes
qui s'étaient joints à la demi-brigade.
Le 16 juin L'arrivée
à Clercy a lieu à 3 heures du matin. Je prends la
décision de donner 2 heures de repos aux hommes et
de passer le pont à 5 heures. A 5 heures 30 le
détachement se présente à Clercy-pont. Il avait
sauté depuis une heure! On recherche alors un gué
et, par chance, on en trouve un en amont. Tout le
monde passe la Seine, avec de l'eau jusqu'au
genoux. Le détachement se reforme dans un bois au
sud de la Seine. Les hommes se rhabillent et se
chaussent et après une courte halte, la marche est
reprise direction sud-ouest à travers champs, en
petites colonnes. Accompagné du Capitaine Diot et
du Capitaine Bessy et d'un groupe de chasseurs
(liaison), je me porte à quelques centaines de
mètres en avant, vers les Vaudes. A peine après
avoir débouché sur la grande route qui traverse le
village, une colonne motorisée ennemie surprend le
détachement, le harcèle et le disperse causant 6
blessés qui ont pu être ramenés. Cette colonne
allemande venait de Bar sur Seine. Je me trouve,
avec un groupe de 7 ou 8 chasseurs, coupé du
Capitaine Diot et du Capitaine Bessy qu'ont suivi
une quinzaine d'hommes, d'une part, et d'autre
part, du gros du détachement où se trouvent les
Capitaines Pauly et Becq et les s/Lts Georges,
Escande, Causeret, Bounias, Ballandras et Elerz.
Malgré nos efforts, nous ne pouvons nous
rejoindre. Tous nous progressons dans le bois
d'Aumont que nous avons gagné afin de nous
soustraire aux Allemands. Malgré toutes les
patrouilles organisés dans la matinée, dans cette
forêt, immense et touffue, aux rayons sinueux, les
groupes demeurent disloqués. C'est le dernier acte
de guerre de la 26° Demi-Brigade. Des détachements
isolés continueront encore à combattre, mais en
dehors du cadre tactique et pour essayer d'éviter
de tomber entre les mains de l'ennemi.
Conclusions
La 26ème Demi-Brigade a
organisé et tenu pendant prés de quinze jours un
sous secteur sur le Canal de l'Ailette à l'Aisne,
en repoussant à plusieurs reprises des tentatives
isolées de l'ennemi qui cherchait à s'infiltrer à
l'intérieur de son dispositif. I.
Disposée à gauche de la D.I., elle a toujours eu à
subir le premier choc parmi les éléments
constitutifs de la 44° D.I. et cela en raison même
de la situation créée par la rupture progressive
des fronts que les événements de la Somme et de la
région de Paris avaient provoquée. Le 8
juin 1940, sur l'Aisne, la
28° D.I. à sa gauche, lâche au début de
l'après-midi pendant que la 26° D.B. attaquée sur
son flanc gauche et de front résiste pendant toute
la journée et ne se replie, encerclée, qu'à la
nuit, vers 22 h 30 et même 24 heures pour les
derniers éléments. Le
10 juin 1940 devant
Fismes, après une défense héroïque sur la tête du
pont, la 26° D.B. rétablit la défense sur les
bords sud de la Vesle et reçoit l'ordre de se
replier en évitant de se laisser couper d'Épernay. Le
11 juin 1940 à
Oeuilly-sur-Marne, la 26° D.B. se rétablit sur la
Marne, de sa propre initiative, et s'y maintient
pendant deux jours alors que, à gauche et à
droite, les unités voisines n'étaient pas encore
en place le 12 juin à 22 heures 30, heure à
laquelle les Allemands prennent pied dans Oeuilly. II.
Dans tous les replis effectués, la demi-brigade
s'est toujours dégagée en bon ordre pour se
rétablir un peu plus loin et faire front à
l'ennemi: Ligne Dhuizel - Longueval. Ligne Ferme
Pinson - carrefour N.W. de Blanzy les Fismes.
Ligne de la Vesles, avec établissement d'une tête
de pont sur Fismes qui infligea des pertes sévères
à l'ennemi. Ligne de la Marne à Oeuilly (deux
prisonniers allemands) Oeuvy, près de Fère
Champenoise où la demi-brigade se trouvait seule
en position et y subit des bombardements aériens
répétés et puissants. Ligne de l'Aube à Pouan.
Ligne de la Seine à Troyes et à Les Parres où la
demi-brigade se fraya un passage en combattant et
en faisant un prisonnier allemand. III.
A aucun moment pendant toute la durée des
opérations je n'ai perdu le contact avec mes
bataillons, ni la liaison avec la D.I. Ce désir
constant d'une liaison étroite fut réalisé dans
les circonstances les plus difficiles et permit de
maintenir une cohésion intime entre tous les
éléments de la demi-brigade. Cette cohésion,
génératrice de l'ordre, à même provoqué de la part
de 2 officiers de chars français, lors du repli
après la contre-attaque sur Ablois, cette
réflexion encourageante : "Voilà au moins une
troupe qui se replie en ordre. Pour une fois cela
fait plaisir". En résumé, au cours d'un mois
d'opérations, les éléments de la demi-brigade
restèrent toujours groupés autour de leur chef et
le restèrent jusqu'au bout, c'est à dire jusqu'au
moment où après le franchissement de la Seine,
troupe et chefs partageront la même sort dans un
camp de prisonniers. Comme commandant de la 26°
Demi-Brigade j'ai tenu à souligner dans ce rapport
la grande satisfaction que j'ai obtenu dans le
commandement de cette troupe dont les efforts
collectifs et les actions d'éclat isolées ont
contribué à conserver intacte la renommée
traditionnelle des chasseurs alpins.
Camp de Mailly;, le 1er août 1940
Capitaine
Edmond Griolet
Rentré de captivité
militaire le 26.8.1941
Mon
rapport d'opérations
Rappel de la situation de la
44e D.I.
Enlevée
du front d'Alsace du 11 au 15 Mai 1940, par voie
ferré la 44e D.I débarque dans la région de
Châlons sur Marne, le 17 Mai, est transportée par
camions à 20 Km de l'Aisne, au Nord de Reims. Elle
entre en contact avec l'armée allemande qui
progresse en direction de cette rivière le 19 Mai
sur le canal de l'Ailette à l'Aisne et sur
l'Aisne. La 44e D.I. (6e R I et 173e D B C A 26e D
B C.A combat sur cette position jusqu'au 1er Juin,
date à laquelle elle est partiellement relevée par
la 28e D.I. (Général Lestien). Malgré des pertes
importantes, la 26e D B C A est engagée à nouveau
sur l'Aisne entre Charonne et Bourg et Comin, du 5
au 8 Juin (62e et 64e en premier échelon, 22e B C
A Bazoches en réserve de D.I.) Le 9 Juin, après
l'enfoncement du front de l'Aisne par les
Allemands, la 44e D.I. poursuit le combat sur les
plateaux qui dominent la rivière. Le 22e B C A
attaqué à Bazoches même, est replier sur Fismes.
La 26e D B C A tient une tête de pont en avant de
Fismes à Blanzy les Fismes. Le Commandant Ardisson
commandant le 22e B.C.A, est blessé le 10 Juin au
matin.
9 Juin 19 H.
Les Allemands occupent la crête entre le plateau
E. de Vauxeiré et Blanzy. Reçus par des feux
serrés, ils ne poursuivent pas leur avance jusqu'à
la nuit. A 21 H. : Ordre de départ pour Fismettes
afin d'y établir une tête de pont. Je suis chargé
par le Commandant Désidéri, Commandant la 26e D B
C A de protéger jusqu'à 22H., le repli du 6e R.I.
et des services de la 26e D.B.C.A. Au moment où je
me dispose à rallier Fismettes, un contre-ordre
nous faire remonter à Blanzy. Au retour, nous
sommes accrochés par les Allemands qui, à la
faveur de la nuit, se sont approchés de la route
Blanzy - Fismes. A 23 H., nouvel ordre pour la
constitution avec le G.R.D. et la 1ère Compagnie
du 22ème B.C.A. de la tête de pont de Fismettes.
La mise en place se fait en longeant le ruisseau
de Blanzy, la route étant tenue par les Allemands.
Dans la nuit, la mise en place des éléments du 22
et du 62 est faite par le S/Lieutenant Laroque du
G.R.D. et consiste à doubler les F.M. du FRD.
Surtout en vue de tenir le carrefour de Fismettes
sur la route de Blanzy. Au petit jour, le 64ème
B.C.A. passe à Fismettes. Le Commandant Désidéri
établit son P.C. dans une villa contre le pont de
Fismes, côté Fismes le capitaine du G.R.D.
commandant la tête de pont, adopte le même P.C. Le 10 Juin Le
jour levé, m'étant rendu compte que seul le
carrefour de la route de Blanzy était efficacement
tenu, aucune défense n'étant assurée sur les
sentiers vers le ruisseau, la route vers cote 162
etc.... je propose au Commandant Désidéri un
remaniement de la tête de pont avec le dispositif
suivant: 62ème B.C.A. à l'est tenant la route cote
162, les débouchés des sentiers venant de Blanzy,
G.R.D. au centre tenant le carrefour de Fismettes,
1ère Compagnie du 22ème B.C.A. à l'Ouest tenant la
route vers Bazoches. J'informe en même temps tous
ces éléments que je prends le commandement de la
tête de pont. A 9 H. le 22ème B.C.A. est attaqué à
courte distance par des éléments allemands
descendus de l'Ouest en direction du pont de
Fismes. Pressés, les chasseurs du 22ème lâchent
les lisières de Fismettes, je fais tenir les
carrefours par leurs F.M. m'efforçant d'empêcher
leur retraite. A 10 H. ordre de la D.I. de
réoccuper les emplacements suivants de l'Ouest à
l'Est; route venant de Bazoches à Fismettes,
carrefour Nord de Fismettes, cote 162. Le
Commandant Désidéri me confie le commandement de
la tête de pont avec la 1ère Compagnie du 22, 1
Section de la 2ème Compagnie du 22 le G.R.D.
motorisé, le 62ème, 1ère Compagnie du 64ème B.C.A.
Par la suite, l'escadron moto du G.R.D. sera
envoyé pour parer à des infiltrations allemandes
du côté de Bazoches et sera remplacé par des F.M.
du 64ème B.C.A. La 22ème réoccupe la route
Bazoches-Fismettes. La G.R.D. réoccupe le
carrefour N. de Fismettes. La 64ème B.C.A. section
S/Lieutenant Gesta occupe le carrefour 800 m.E de
la route côte 162. Le s/Lieutenant Coré de la 2ème
Compagnie , reçût l'ordre d'attaquer avec sa
section la cote 162 et de s'y maintenir. Cette
section, dès le coude de la route, est prise à
partie par les Allemands qui progressent en
direction, eux aussi, de la cote 162. Le
s/Lieutenant Coré déploie sa section face à
l'ennemi, met sa F.M. en batterie et disperse
l'ennemi, lui infligeant des pertes. Il se
maintiendra jusqu'à épuisement de ses munitions
sur cette position, puis repliera sa section en
bon ordre sur le coude de la route. A cet endroit,
la section du 64 attaquée par les Allemands a subi
de lourdes pertes, le s/Lieutenant Gesta a été tué
ainsi que de nombreux chasseurs. Le s/Lieutenant
Vigneron, officier de liaison du 91ème R.A.D., qui
se tient avec moi sur le pont de Fismes, suit le
déroulement du combat et prend possession des
crêtes au fur et à mesure de leur évacuation. Les
tirs d'artillerie causent aux Allemands de lourdes
pertes. A 10 H.30, un bataillon du 6ème se
présente à la tête de pont. J'organise le passage
du pont par petits groupes car les Allemands qui
tiennent 162 tirent sans arrêt sur le pont sur
lequel ils ont des vues. Les Allemands, à 11 H.,
ont réussi à s'infiltrer jusqu'au coude de la
route vers cote 162 , d'où ils coupent en deux par
leurs feux le carrefour N. du pont. D'autre part,
ils sont au contact sur la route de Bazoches où
ils tentent de s'infiltrer le long de la Vesle au
carrefour N. de Fismettes et au ruisseau de
Blanzy, ils poussent également nos postes.
Progressant du coude de la toute 162, je prévois
qu'ils arriveront au carrefour du Pont rendant la
retraite impossible aux éléments du 22 et du 62.
Après avoir rendu compte de la situation au
Commandant Désidéri, je décide de faire replier
d'abord la 1ère Compagnie du 22ème , homme par
homme. Le 62ème passe le pont à son tour à
l'exception du groupe franc du s/Lieutenant
Fritsch qui contient l'ennemi face au pont et que
je ferai replier à vu au dernier moment. A 11 H.
30, le Commandant Désidéri est venu me retrouver
au pont. Les Allemands sont à peu près au
carrefour; ils tirent sur le pont même à l'aide de
minens. Je fais placer des mitrailleuses du 3ème
sur le pont du chemin de fer pour interdire
l'accès du pont de la Vesle, dans le cas où la
mise de feu raterait. Je fais par signaux rentrer
le s/Lieutenant Fritsch et j'attends le débouché
des allemands pour faire sauter le pont. Il saute
à leur arrivée même. Les bataillons sont mis en
place sur la rive Sud de la Vesle. Les Allemands
qui arrivent en masse le long de la rivière sont
accueillis par des feux nourris et efficaces. A 13
H. dans le sous-sol de la Mairie de Fismes où le
Commandant Désidéri a installé son P.C., nous
recevons de la D.I. un ordre de repli. Le 62ème
B.C.A. devra cantonner à Tramery. Au milieu de
l'étape, nous sommes rejoints par le s/Lieutenant
Vigneron. Il me demande de lui donner un
détachement de protection pour faire décrocher les
batteries de son groupe. Je désigne le
s/Lieutenant Fritsch et son groupe franc. Nous
avons été ravitaillés par le T.R. du bataillon
avant le départ de ce détachement du s/Lieutenant
Fritsch, en pain, en vin et viande de conserve.
Les hommes se restaurent au cours d'une pause pour
la première fois depuis trois jours. A Reamery, où
j'arrive en même temps que les débris du
Bataillon, conduits par le S/Lieutenant Garzulino,
nous reclassons les unités. La 1ère Compagnie a, à
sa tête, l'Adjudant-chef Grandioli. La 2ème
Compagnie , le s/Lieutenant Garzulino. L'effectif
total du 62ème bataillon est de cent hommes. Ce
reclassement s'opère sur la route encombrée par
des éléments de toutes armes, qui retraitent en
désordre. Nous n'avons encore pu organiser les
postes et le logement que les Allemands sont
signalés à l'entrée du village. Je conduis
rapidement la 1ère Compagnie à la sortie N. après
avoir fait ramasser toutes les munitions des
autres chasseurs; cette 1ère Compagnie dispose de
cent cartouches par F.M. et cinquante par
voltigeur. Les tris dans la nuit sont rendus très
délicats par la suite de la présence de nombreux
Français qui se replient. A 22 H. 30, le Capitaine
Dupassage nous apporte un ordre de repli pour O H.
sur Olizy-Violaine où le bataillon arrive à 5 H.
du matin. Le 11 Juin Il y
retrouve la 26ème D.B.C.A. qui cantonnera toute
entière dans ce village. A l'arrivée, le
Commandant Désidéri me fait appeler pour me
demander de prendre effectivement le commandement
du 22ème B.C.A., commandement qui m'avait été
confié la veille. Le cantonnement est reparti
entre les Bataillons. A 7 heures, les
automitrailleuse et les chars allemands défilent
sous nos yeux, sur la route d'Olizy. Ordre de
repli sur la Marne, par Bataillon, est donne par
le Commandant Désidéri sur Chatillon, Port à
Binson. Départ à travers champs, les routes sont
obstruées par des convoi d'artillerie, à la
recherche d'un pont. Le bataillon, survolé et
bombardé par avions, arrive en vue du Pont de Port
à Binson attaqué par avions et chars ennemis
lorsque ce pont saute. Force est de rechercher un
autre passage. Nous nous dirigeons en amont vers
le pont de Reuil-Oeuilly distant de 4 km environ.
Sur la rive Sud le Commandant Désidéri rassemble
les bataillons. Il les dirige sur le plateau au
sud du village, laissant le pont et le village à
la garde de la 1ère Compagnie du 22ème B.C.A.
Le
Bataillon a l'encadrement suivant :
E.M.
|
Capitaine
Griolet Commandant le Bataillon Capitaine
Fourchier, Adjudant-Major
Lieutenant
Ricatte officier de renseignements.
|
C.A.
|
S/Lieutenant
Agard
S/Lieutenant
Elorz.
|
1ère
Compagnie
|
Capitaine
Latruffe S/Lieutenant Lajous
S/Lieutenant
Ballandras
|
2ème
Compagnie
|
Capitaine
Combet S/Lieutenant Merpillat
S/Lieutenant
Beau.
|
3ème
Compagnie
|
Lieutenant
Minot S/Lieutenant Escande S/Lieutenant
Renaudo
S/Lieutenant
Darmont.
|
Il reste neuf mitrailleuses utilisables,
ainsi que les deux tiers des F.M. Les compagnies
sont toutes à trois sections. Il n'existe aucune
voiture de liaison. Par la suite, j'utiliserai la
moto du Service de Santé; elle me laissera en
panne le 13. Après, plus rien. A 14 H., ordre
d'assurer la défense du Pont de Reuil - Oeuilly à
l'aide d'une compagnie qui relèvera la section de
la 1ère Compagnie . Je trouve au pont une section
de la 22ème Compagnie du 46ème R.I. (Bataillon
d'Instruction). Ce bataillon est commandé par le
Capitaine Leclercq et la Compagnie par le
Capitaine Pluchot. Ils défendent le pont de Reuil
- Oeuilly avec une section et le village d'Oeuilly
avec le reste de la compagnie . Ils sont vaguement
en liaison avec une 22ème Compagnie du 48ème R.I.
(Bataillon d'Instruction également) qui tient le
pont de Port à Binson. Quant à leur liaison à
droite, ils l'ignorent. Une visite au capitaine
Pluchot dans Oeuilly me donne les moyens et la
mission de la compagnie de garde du pont. Les
hommes sont des permissionnaires de tous corps et
des récupérés récents, il ne faut pas faire fond
sur cette unité. Compte-rendu verbal de cette
situation étant fait au Commandant Désidéri, la
2ème Compagnie du 22ème B.C.A. prend le dispositif
suivant : 1 section sur la rive Sud de la Marne,
au pont de Reuil - Oeuilly, 2 sections sur la voie
ferré parallèle à la Marne, de part et d'autre du
pont de la route Reuil - Oeuilly. En outre, I.S.M.
complète commandée par le s/Lieutenant Elorz
s'établira en caponnière à la croupe 600 m. S.O.
du pont tirant sur ce pont 36 caisses de
cartouches. Les deux autres compagnies du 22ème
B.C.A. s'installeront dans le bois sur le plateau
N. d'Oeuilly. le dispositif est mis en place
immédiatement. A 18 H. les Allemands se présentent
devant le pont que fait sauter le Lieutenant
Vétroff du 46ème. Jusqu'à la nuit, des coups de
feu sont échangés de part et d'autre. Je rends
compte de l'activité des Allemands dans Reuil où
ils se sont emparés d'un dépôt du Génie important;
le Lieutenant Vétroff avait à différentes
reprises, demandé le transport de ce matériel sur
la rive Sud de la Marne. A la nuit, je descends
sur la rivière, on entend nettement l'ennemi
travailler, vraisemblablement à la construction de
passerelles. A 23 H., je reçois par chenillette, 3
caisses de grenades, 3 caisses de cartouches de
F.M. ainsi qu'un ravitaillement de cinq boules de
pain et vingt boîtes de viande de conserve par
compagnie . Ordre d'alerte est donné pour tout le
monde à 3 H. du matin, afin de parer à une attaque
possible au lever du jour. Malgré de nombreuses
alertes et bombardements d'avions qui ont mis le
feu à une partie du village, aucune attaque
d'infanterie ennemie ne se produit. Le
12 Juin Le Commandant
Désidéri a établi son P.C. dans une maison du haut
d'Oeuilly à courte distance de celui du 22ème
B.C.A. Toute la matinée, les avions ennemis
survolent et mitraillent le village. L'artillerie
allemande s'est installée sur les crêtes N. de la
Marne et effectue ses réglages. Les mitrailleuses
ennemies, très nombreuses, entrent en action
contre tout personnel qui se déplace dans nos
lignes. Le Commandant Désidéri me convoque vers 11
H. à son P.C. pour me communiquer un nouveau
dispositif de la 26ème D.B.C.A. qui sera à
réaliser à la tombée de la nuit: voici le texte de
l'ordre d'opérations qui ne me sera remis qu'à 16
H 30 :
26ème D.B.C.A. - Ordre Général
d'Opérations
.c.1° La 44ème D.I.; a pour mission de tenir la
Marne de Port à Binson exclus à Damery inclus. .c.
2° Barrage principal ;appliqué sur la rivière.
Ligne principale de résistance jalonnée par la
voie ferrée. Barrage en profondeur par
l'organisation des villages en points d'appui
fermés et l'obstruction complète de toutes voies
de communication allant vers le Sud (Barricades et
mines). .c. 3°
Le secteur de la D.I.; est divisé en trois
sous-secteurs. 26ème D.B.C.A. s/secteur Ouest.
Limites Ouest (avec 45ème D.I.) carrefour de
routes 800 m. S.E. de Chatillon s/Marne, Port à
Binson, Chène la Reine, tous ces points à la 45ème
D.I. Limite Est (avec le 6ème R.I.) Reuil s/Marne,
la Cense Carrée: Ces deux points au 6ème R.I. .c.
4° Répartition des unités 2 Quartiers. A droite:
le 22ème B.C.A. Limite Est: celle du s/Secteur
Limite Ouest: corne S.E. du bois situé au Sud de
la voie ferrée à 1 km. à l'Est de Port à Binson.
P.C. du chef de Bataillon: Oeuilly. A Gauche:
64ème B.C.A. Limite Est: celles du quartier de
droite. Limite Ouest: celles de la gauches du
s/secteur. Le Commandant du 64ème B.C.A.
recherchera la liaison à gauche avec la 45ème D.I.
P.C. du chef de Bataillon: Nord du bois de Misy.
En entrant en secteur, ces deux bataillons
laisseront sur place les éléments du 48ème B.I. à
gauche (Port à Binson) et 46ème B.I. à droite
(Oeuilly) ces éléments resteront sur place à la
disposition des commandants du Quartier. .c. 5°-
Conception de la défense: .c.A) Quartier de droite
2 compagnies en premier échelon. 1 compagnie en
point d'appui dans Oeuilly. La compagnie de 1er
échelon détachera unes section sur les bords de la
Marne, le reste sur la ligne principale de
résistance en arrière de la ligne de chemin de
fer. .c.B)- Quartier de gauche 3 sections sur la
ligne principale de résistance, celle-ci se
confondant avec les bords de la rivière. 1 section
en point d'appui lisière N. du bois de Misy. Ce
dispositif sera réalisé ce soir dès la tombée de
la nuit. Le commandant du 64ème B.C.A. (quartier
de gauche) devra assurer de façon étroite la
liaison à sa gauche d'abord avec les éléments du
48ème E d'instruction, ensuite avec ceux de la
45ème D.I. qui doivent entrer en secteur. Le 62ème
B.C.A. à effectif très restreint sera chargé de'
l'aménagement intérieur du réduit d'Oeuilly
(barricades fermées à ériger sur toute les voies
d'accès venant du N. de l'E. et de l'Ouest)
Artillerie : Un groupe 1/302 d'artillerie
appliquera devant le front du secteur des tirs
d'arrêt déjà préparés après entente avec le
commandant du groupe d'artillerie.
P.C. le 12
Juin, 16 Heures
Le Chef de Bataillon Désidéri
Commandant 26ème D.B.C.A.
Sans attendre la réception
de cet ordre détaillé, les commandants de
compagnie ont été réunis au P.C. du 22ème B.C.A.
et mis en possession des éléments leur permettant
d'exécuter les reconnaissances de leurs quartiers.
Ces reconnaissances sont prévues pour 14 H.
L'ordre du bataillon, en plus des dispositions
prescrites par la 26ème D.B.C.A. donne pour limite
entre le s/quartier de droite (2ème Compagnie
Capitaine Combet) et le s/quartier de gauche (1ère
Compagnie Capitaine Latruffe) une ligne N.E. -
S.O. passant par le ruisseau 150 m. Ouest
d'Oeuilly. Il précise en outre que la Marne sera
défendue sans esprit de recul. En outre, le Pont
de Reuil est donné au Capitaine Combet de manière
à ce qu'il ne puisse y avoir manque de liaison à
ce point avec le 6ème R.I. Dans la journée, le
6ème R.I. n'ayant pas pris position, il sera même
ordonné à la Compagnie Combet de déborder
largement le pont à l'Est pour parer à toute
attaque allemande en face de ce pont. La
préparation d'attaque allemande commence aux
environs de 14 H 30. La violence du bombardement
est telle qu'il n'est pas possible de se méprendre
sur les intentions ennemies. En effet, en quelques
heures le village d'Oeuilly sera en ruines et en
flammes. D'importantes concentrations de troupes
dans Reuil, des constructions de passerelle des
tentatives de mises à l'eau de radeaux sont
signalées à la 26ème D.B.C.A. car je ne possède
aucun moyen de liaison, ni de signalisation.
Plusieurs demandes de munitions sont faites
également ainsi qu'en témoigne le carnet d'ordres.
Le Commandant Désidéri me donne l'ordre de prendre
immédiatement le dispositif qui ne devait être
appliqué qu'à la nuit. La 3ème Compagnie
(Lieutenant Minot) qui devait venir former un P.A.
fermé à Oeuilly est placée sur la croupe Ouest du
village pour protéger la D.B.C.A. contre des
infiltrations signalées dans le bois de Misy. La
1ère Compagnie est alertée par nos soins et
dirigée vers ses emplacements en attendant le
retour de reconnaissance de son capitaine. Le
62ème ne peut commencer la construction des
barricades sous le feu violent des canons et des
avions ennemis. Vers 16 H., par le 48ème B.I. dont
une partie s'est repliée sur Oeuilly, nous
connaissons le passage de la Marne à Port à Binson
par l'ennemi. Un prisonnier allemand fait dans le
bois de Misy, indique que 3 compagnies allemandes
se sont infiltrées par la route Port à Binson -
Oeuilly dans la partie N. du bois de Misy. La 1ère
Compagnie progressant vers ses emplacements, par
cette même route, arrête et met en fuite un
peloton cycliste parvenu à l'entrée d'Oeuilly. La
section de cette compagnie qui devait occuper le
bord de la Marne, prise sous les feux violents de
la rive Nord, ne peut atteindre ses emplacements.
Cette compagnie toute entière sera donc placée en
flèche face à l'Ouest en bordure du bois de Misy.
Les pertes de toutes les compagnies sous le feu
d'enfer de l'ennemi, sont élevées. Fidèles à une
tactique qui leur a constamment réussi en face
d'une ennemi numériquement inférieur, les
Allemands repoussés devant Oeuilly par les tirs
d'artillerie, les feux de la 2ème et de la 1ère
Compagnie cherchent à déborder par les ailes. Un
lieutenant du 6ème R.I se présente vers 19 H. au
P.C. de la 26ème D.B.C.A. au moment où je viens
rendre compte de la situation du bataillon. Il
vient demander des renseignements sur la situation
et informe que son régiment viendra prendre
position dès la tombée de la nuit. Je lui réponds
qu'il sera sans doute trop tard pour nous aider ou
nous retrouver vivants. En effet, la situation
devient grave dans la soirée. L'ennemi a réussi à
passer des éléments importants par radeaux à l'Est
du bataillon dans le secteur du 6ème R.I. à l'abri
d'une boucle de la Marne. Ces éléments, pris à
partie par les sections de la 2ème Compagnie
placées sur la voie ferrée, poursuivent vers le
Sud, leur marche en avant, sans se rabattre sur le
bataillon. Un peu avant la tombée de la nuit, des
infiltrations se sont produites un peu partout sur
les flancs du bataillon. L'importance des troupes
transbordées par l'ennemi est considérable, vers
S.E. l'ennemi contourne le village par les
jardins. Les compagnies demandent sans arrêt des
munitions que je ne puis obtenir et des tirs
d'artillerie qui se font plus rares. D'autre part,
elles signalent un inconvénient que j'ai déjà
remarqué au 62ème. Les F.M. plus fragiles que nous
l'avions supposé, par suite du manque de graissage
et de la poussière, deviennent inutilisables. Les
pertes sont importantes. La 3ème Compagnie est
réduite à 50 hommes, la 2ème au même effectif,
approximativement. Enfin, à 21 H., l'attaque
frontale allemande augmente et vigueur coïncidant
avec une attaque par le flanc Est des unités
ennemies traversées Le s/Lieutenant Merpillat de
la 2ème Compagnie est fait prisonnier avec
quelques hommes après de très lourdes pertes. Le
village est rempli de blessés. Nous plaçons un
bouchon à la sortie Nord du village. Bientôt, les
fusées éclairantes allemandes nous apprennent que
l'ennemi, tant par le bois de Misy que par l'est
du village d'Oeuilly, progresse largement vers le
Sud. A 22 H.30, le Commandant Désidéri me donne
l'ordre de replier les compagnies sur la sortie
Nord du village. A 22 H 45, les compagnies
rassemblées, le repli du Bataillon s'opère en
Direction de la ferme Bois brûlé. Le 64ème B.C.A.
est alerté au passage. La nuit toute entière sera
employée en manoeuvres. D'abord, la 1ère Compagnie
est placée en protection de batteries qui doivent
s'installer sur la route d'Oeuilly à hauteur du
Bois Brûlé. Le capitaine commandant le groupe
ayant décidé de ne pas faire quitter la route çà
ses pièces, je ramène cette compagnie avec le gros
du bataillon. Le
13 Juin Au petit jour, un
nouveau dispositif est pris. Le bataillon sera
disposé sur un front de 2 km. environ entre la
ferme La Creuse Carrée et la ferme Bois Brûlé, en
protection de batteries. Le dispositif est réalisé
dans les blés mouillés. Les hommes qui ne
connaissent ni repos, ni sommeil, ni repas,
marchent comme des automates. Il n'y a plus de
munitions. En raison des effectifs et du front à
tenir, le bataillon est en ligne entre les deux
fermes. Fort heureusement, quelques patrouilles
ennemies se présentent seules et n'insistent pas.
Il fait un brouillard très épais qui a dissimulé à
l'ennemi toutes nos manoeuvres. A 7 H.30, me
parvient l'ordre suivant :
Ordre à 22ème
B.C.A.
Ordre
de repli
Axe général Ablois -
Vertus. Axe de retrait de la 1/2 Brigade
Oeuilly
Brugny Morangis
Décrochage dès réception
du présent ordre. La manoeuvre en retraite doit
éviter de se laisser accrocher et de se laisser
couper d'Épernay. Le G.R.D. reste sur place.
P.C.
5 H.15
En même temps que cet
ordre, un chenillette nous apporte les
munitions... qui nous ont fait défaut à Oeuilly et
dont une partie doit être refoulée. La marche sur
Morangis est pénible. Les hommes ont leurs
chaussures pleines d'eau, ils sont harassés. En
forêt, nous croisons le G.R.D. en position et la
Compagnie Villernet du 99ème R.I.A. Nous arrivons
à Morangis le Petit à Midi. Quelques granges sont
réparties aux compagnies pour faire reposer les
hommes. Du pain et de la viande de conserve sont
distribués par le T.R. du bataillon qui nous a
rejoint. A 13 H.30: alerte. Le Commandant Désidéri
m'informe que les Allemands occupent le bois N.O.
du village, contenus par la Compagnie Villermet du
99ème. L'ordre de la 44ème D.I. est de
contre-attaquer en direction du carrefour 1.500 m.
Sud de Brugny et de s'y installer. Un bataillon
sera constitué avec une compagnie du 64ème
commandée par le Capitaine Becq, 2 compagnies du
22ème, la Compagnie Combet (2ème) et la Compagnie
Minot (3ème). J'assume la direction de cette
contre-attaque, le Capitaine Diot commandant le
64ème, rassemblant les éclopés de tous les
bataillons et en assurant le repli vers Vertus.
Avec la route pour axe de marche, le bataillon
progresse vers le carrefour, rejoignant la
Compagnie Villermet du 99ème R.I.A. Les Allemands
ont un bouchon composé de side-cars de
mitrailleuses et d'un mortier dans le bois N.O. de
Morangis. Conservant la Compagnie Becq sur la
route, en soutien de la compagnie du 99ème je
découple à gauche par le bois la Compagnie Combet,
à droite, la Compagnie Minot pour tourner et
réduire la résistance ennemie. L'opération est en
bonne voie, le contact est pris avec l'ennemi
lorsque à 14 H.30, je reçois ordre du Commandant
Désidéri de rompre le contact et de me replier le
plus rapidement possible sur Vertus. Nous sommes
croisés à ce moment par trois automitrailleuses
qui se rendent sur la route Epernay - Montmort. Le
repli s'effectue en ordre parfait, la Compagnie
Becq du 64ème B.C.A. assurant le service
d'arrière-garde. A Vertus où toute la demi-brigade
cantonne dans la ferme La Cense 2 km E. de Vertus,
la Compagnie Latruffe est laissée en bouchon sur
la crête au carrefour, 1 km. Ouest de Vertus. Le 14 Juin A 1
H., ordre de repli sur Morains le Petit par
Bergères les Vertus. Les routes sont encombrées de
convois, d'artillerie, de troupes de couleur, dans
un désordre complet. Aux carrefours, il faut se
battre pour assurer la circulation. Le bataillon
est en colonne par un, et ce trajet exige une
surveillance constante. Arrivés à Morangis à 7 H.
du matin, nous nous établissons face au Nord. Les
Allemands bombardent par avions à plusieurs
reprises nos emplacements et les convois qui
refluent. A 11 H.30, ordre de repli en direction
de bois N.O. d'Euvy (4 km. Sud de Fère
Champenoise). Le repli s'opère très difficilement
en raison de l'encombrement. Je suis obligé de
faire retraiter par compagnie. L'aviation
allemande accompagne sans répit les convois, tuant
les chevaux, éventrant les voitures. Les réfugiés
commencent à se mêler à la troupe. A Fère
Champenoise, le désordre est tel que la
circulation est totalement arrêtée. Je me porte au
carrefour central et je constate que les colonnes
descendant du Nord au Sud et celles allant de
l'Est vers l'Ouest se sont pénétrées au point que
tout mouvement est devenu impossible. Les avions
allemands mettent le feu à la ville, la panique
dans les convois où sans vergogne les conducteurs
abandonnent chevaux et voitures pour se terrer
dans les caves. De Midi à 16 H.30, laissant les
compagnies du 22ème se diriger vers Euvy, je
resterai à ce carrefour pour assurer la
circulation identifiant douze divisions
d'infanterie, renseignant les repliés sur les
directions de rassemblement, grâce aux
renseignements obtenus par d'autres éléments de
leurs unités. Le soir, dans un rapport remis à
Champfleury au Commandant Désidéri, je signalerai
ce désordre indescriptible en regrettant qu'un
officier d'État-major n'ai pas été placé par le
commandement à ce carrefour important pour
effectuer ce travail de remise en ordre. Le
spectacle est le même d'ailleurs sur la route
d'Euvy où, la route étant obstruée, les convois
défilent sur plusieurs rangs à travers champs,
soldats et réfugiés mêlés, bombardés par les
avions. A Euvy, je suis informé par le Capitaine
Ottavi qui s'y trouve en voiture, que les ordres
donnés pour la défense des bois Ouest-Est d'Euvy
et la remise en ordre des unités, ne tiennent
plus, la 26ème D.B.C.A. devant se rendre à
Champfleury. D'Euvy à Gourgançon et à Salon, la
retraite est plus pénible encore. Les
bombardements sont plus violents, les réfugiés
plus nombreux, les pistes à travers champs plus
nombreuses aussi. Les bombes font des dégâts
importants dans le personnel et le matériel. Après
Salon, la route est libre, civils et troupes en
retraite empruntant la route d'Arcy s/Aube. Je
retrouve le soir à 20 H., à Champfleury les
compagnies de mon bataillon. A 21 H., le Capitaine
Dupassage vient nous communiquer l'ordre de repli
nous prescrivant de gagner au cours de la nuit la
rive Sud de l'Aube, à Pouan. Ce sera le dernier
ordre reçu. Le Commandant Désidéri donne ses
ordres pour le départ qui s'effectue à 22 H. Je
suis chargé d'orienter la demi-brigade, plus
spécialement de reconnaître le passage de l'Aube.
Trajet difficile dans la nuit. Depuis Fère
Champenoise, j'ai prescrit au commandants de
compagnies de conduire isolément leurs unités
suivant les itinéraires que je leur indiquerai de
manière à éviter les longues colonnes. Le Pont de
Plancy est inutilisable, une bombe étant tombée au
milieu de la route. Je recommence à organiser à ce
carrefour la circulation jusqu'à l'arrivée des
éléments de tête de la D.B.C.A. L'encombrement est
encore compliqué par l'obscurité. Je trouve un
passage à Viapres le Petit; j'arrive à temps pour
empêcher de faire sauter le pont. Une colonne de
réfugiés et de troupe vient en effet échouer à ce
pont parce que celui d'Arcy sur Aube est coupé.
J'attends à ce passage les éléments de la D.B.C.A.
Je reste auprès de la garde du pont jusqu'à
écoulement complet des unités. Le 15 Juin Je
rejoins Pouan à 4 H. du matin. J'erre à la
recherche de mes compagnies. A 5 H., je rencontre
le Capitaine Ambrosi en possession d'une voiture.
Le Commandant Désidéri me donne un ordre de repli
sur Estissac par Premierfait, les Grandes
Chapelles, Villacerf. Je communique cet ordre aux
capitaines. Nous partons avec le Commandant
Désidéri reconnaître le passage de la Seine à
Villacerf. Au moment où nous y arrivons, les
Allemands viennent de prendre possession du pont.
Des blessés sont au village. Nous sommes reçus sur
la route du pont par des coups de feu. Le
Commandant Désidéri décide de glisser le long de
la Seine vers Troyes. Nous partons en voiture
reconnaître les ponts. La circulation à partir de
Pont Marie est arrêtée; troupes et réfugiés
bloquent la route sur plusieurs kilomètres de
longueur. Nous allons à pied à Pont Hubert. Le
pont est coupé par une bombe d'avion qui a creusé
au milieu de la route un entonnoir de cinq mètres
de profondeur. Des volontaires s'emploient à
reboucher le trou, à essayer, grâce aux rails de
tramway restés suspendus au-dessus du vide de
faire passer des véhicules légers; on peut espérer
rétablir en quelques heures la circulation. Nous
retournons aux voitures. Le Commandant Désidéri me
ramène à Villacerf où j'attendrai au passage les
unités de la demi-brigade pour leur indiquer le
changement d'itinéraire. Il part à Troyes avec le
Capitaine Bessy, le Capitaine Ambrosi, le
s/Lieutenant Causeret, tenter d'organiser un
ravitaillement pour les hommes en fin d'étape.
Toutes les unités sont touchées au passage de
Villacerf. A 10 H.30, je quitte Villacerf avec les
compagnies du 22. Les bombardements d'avions,
fréquents, détruisent les convois sur la route. Je
dois faire déployer les hommes à travers champs
pour éviter des pertes sérieuses, mais le
regroupement une fois l'attaque passée est
difficile. A Pont Sainte Marie, à 15 H.; j'arrête
la tête de colonne pour rechercher le Commandant
Désidéri. Il est impossible de circuler même à
pied, la route étant complètement obstruée par les
convois d'artillerie et de réfugiés sur plusieurs
rangs. Je trouve à Pont-Hubert le commandant avec
le Capitaine Bessy, le s/Lieutenéant Causeret et
des hommes de toutes armes qu'ils ont récupérés.
Le Pont est tenu par des chars allemands, de
l'infanterie, avec des mitrailleuses. Le
commandant me demande d'amener le Bataillon pour
essayer de forcer le passage du pont. Je retourne
à Pont Marie où j'ai laissé les s/Lieutenants
Agards, Escande, Ballandras, Elorz. La 2ème
Compagnie n'est pas encore arrivée. Le capitaine
Coubet me rejoindra dans l'après-midi. Le
capitaine Diot revient avec moi à Pont Hubert où
le Capitaine Besay sert un canon de 25 qu'il a
trouvé. Des patrouilles sont organisées pour
essayer de détruire la résistance ennemie. Il y a
des tués et des blessés sans résultat appréciable.
Dès le début, j'ai conseillé au Commandant
Désidéri, comprenant que tous les passages sur la
Seine sont tenus par l'ennemi qui occupe la rive
gauche, de glisser vers la source de la rivière à
la recherche d'un passage. J'obtiendrai gain de
cause vers le soir. A 18 H. le Commandant Désidéri
rassemble à la sortie N.E. de Pont Marie sur la
route de Crenay, les débris de la demi-brigade,
après qu'une dernière tentative de passage ait été
effectuée sans succès par un G.R.C.A. Nous
subissons des bombardements d'avions italiens. Le
Commandant Désidéri décide de renvoyer les deux
voitures touristes de la demi-brigade vers
l'arrière. La demi-brigade va essayer de
contourner Troyes par l'Est et recherchera un
passage de la Seine. Je suis chargé de conduire la
colonne. Itinéraire: route de Crenay, Villechétif,
direction Sud, par les bois, traversés d'un
marécage. De l'autre côté du bois, des camions
abandonnés dans lesquels nous trouvons ses vivres.
Une patrouille commandée par le s/Lieutenant
Elorz, est envoyée reconnaître la route de Bellin
à Saint Parres qui passe sur la crête. Elle la
trouve libre mais découvre des Allemands en
direction de Troyes. Le Sergent-chef Johansen
revient en bicyclette chercher un F.M. De notre
emplacement, nous voyons une patrouille allemande
descendre la crête, dans un angle mort, à 200
mètres à l'Ouest de notre propre patrouille. Un
fusil mitrailleur est mis en batterie, servi par
le Lieutenant Ricatte. Nous décidons de les
attendre, pour les capturer, mais comme à notre
droite, un groupe de Français marche à leur
rencontre, les bras levés, je fais ouvrir le feu
et la patrouille allemande s'enfuit, laissant
entre nos mains un prisonnier qui sera remis
ultérieurement entre les mains de la 42ème D.I. Je
conduis une patrouille pour fouiller le village de
Bellin pendant que, par les bois, le reste de la
26ème D.B.C.A. gagne la route nationale Troyes -
Lusigny. La route est libre. Sont présents :
Commandant Désidéri, Capitaine Bessy, s/Lieutenant
Causeret de la 26ème demi-brigade, Capitaine
Griolet, Lieutenant Ricatte, s/Lieutenants
Escande, Ballandras, Elors du 22e, Capitaine Diot,
Capitaines Becq, Polli, S/Lieutenants Josson,
Bougnasse, Georges du 64. Le 16 Juin Après
bien des marches et contre marches, nous arrivons
à 3 H. du matin à Rouilly sur Loup. Nous entrons
faire de la lumière pour consulter la carte dans
une maison. Le Commandant Désidéri décide de
traverser la Seine avant de laisser reposer les
hommes, apprenant que le pont de Vernières doit
sauter incessamment. Au pont de Vernières, qui est
sauté, je découvre à cent mètres en aval une
passerelle oubliée par laquelle j'atteins la route
de Buchères. Un renseignement reçu la veille nous
a donné Rumilly les Vaudes comme P.C. de la 44ème
D.I. Je suis la route sur l'autre rive de la Seine
par Saint Aventin Clercy, Courcelles et Courbeton.
Ma troupe s'est augmentée de zouaves (20 Hommes
sous le commandement. du Sergent chef Vaillant du
1er Zouave), 10 Hommes du G.R.C.A. sous le
commandement du Maréchal des Logis Bonafos - 30
Hommes du 115ème R.I. 3ème Compagnie sous le
commandement du Sergent chef Devauley, etc. A
Courbeton, à midi, nous trouvons quelques maigres
provisions. J'envoie une patrouille reconnaître le
pont de Saint Parres les Vandes. Elle se heurte à
un char allemand escorté de sides exactement comme
à Vernières. Le pont de Courtenot est tenu par des
chars français. Nous le passons en même temps
qu'un groupe du 66ème R.A.D. Dans le village de
Virey sous Bar, je trouve le colonel commandant le
80ème R.I. (42ème D.I. dont le P.C. est à Jully
sur Sarce). A 18 H., je trouve à la ferme de
Lantages les Capitaines Becq, Polli, s/Lieutenant
Georges, Bougnasse du 64ème S/Lieutenants Escande,
Ballandras, du 22ème, S/Lieutenant Causeret et une
centaine de chasseurs. Je prends le commandement
du détachement. Les Allemands attaquent le
village. La ferme est pleine de civils de soldats
de toutes armes, de blessés auxquels nous
refaisons les pansements. Les Allemands arrivent
en camions à deux cents mètres de la ferme. Ils
tirent sur nous avec des canons de 20 mm et des
mitrailleuses, blessant plusieurs hommes à
l'entrée de la ferme. Nous attendrons la nuit pour
retraiter car les abords sont dénudés. Nous
prenons des dispositions pour résister à une
attaque si elle se produit avant ce moment. Rien
ne se passe. A 21 H., après avoir fait charger les
blessés sur les voitures des réfugiés, nous
retraitons par Praslin, Parges, Beugneux la Fosse.
Les villages étant signalés tenus par l'ennemi,
différentes patrouilles sont effectuées. Le 17 Juin A la
pause de Beugneux la Fosse, je pars devant la
colonne avec les S/Lieutenants Escande, Georges et
Ballandras pour reconnaître dans le village des
Riceys un cantonnement où faire reposer les homme
exténués. A l'entrée du village, nous approchons
avec précautions des barricades. Rien ne bouge,
nous pénétrons dans le bourg. Après avoir trouvé à
la sortie Est, devant l'hôtel du Commerce, une
grange suffisante, j'envoie le s/Lieutenant
Ballandras au premier carrefour à l'entrée Ouest
rechercher la colonne. Après un quart d'heure
d'attente, ne voyant rien venir, j'envoie alors le
s/Lieutenant Georges. Il fait à peine cent mètres,
est accueilli par des coups de feu. Il fait
demi-tour; à 20 m de nous, il est à nouveau
apostrophé par une patrouille allemande qui sort
d'une autre rue. Il se replie sur nous, nous
disparaissons derrière une maison. La retraite
nous est coupée. Nous entrons dans un magasin,
passons dans une cour. Nous sommes tellement
fatigués que nous décidons de nous reposer un peu.
Nous nous barricadons dans une chambre. Nous
dormons de 5 H à 8 H. Un peu reposés, nous tentons
une sortie. Pas loin, des Allemands discutent
devant la porte de la cour. Nous franchissons un
mur, puis d'autres murs et de propriété en
propriété, nous gagnons une villa en bordure de la
route, séparée de celle-ci par un mur crêté d'une
grille. Je suis à califourchon sur le mur quand
une patrouille allemande qui m'observe, me tire
dessus. Je descends du mur rapidement. Nous
enfonçons la porte de la villa que nous
barricadons derrière nous. Nous nous couchons et
nous dormons jusqu'au lendemain midi. Le 18 Juin Sans
interruption, sous nos fenêtres passent les chars,
d'artillerie, l'infanterie portée allemande. Le
soir et toute la nuit des orages se succèdent,
rendant tout départ impossible. Les troupes
allemandes occupent le village pour la nuit, une
brigade entière y cantonne. Sans arrêt, des hommes
tentent de forcer la porte d'entrée sur la route;
même situation dans la journée du lendemain. Nous
décidons de laisser écouler le gros des troupes
avant de reprendre notre marche. Nous vivons sur
quelques légumes secs trouvés dans le grenier et
des salades qui nous ont été données par une
habitante d'une maison voisine avec laquelle nous
communiquons à la tombée de la nuit par les
jardins. 20 Juin Le
soir du 20, reposés, restaurés, je décide de
partir à la nuit. Nous marcherons à travers
champs, de nuit seulement, à la boussole. A 19
H.30, nous sommes équipés prêts au départ. Un
capitaine de Panzer se présente à la grille sur la
route; ne pouvant l'ouvrir, il demande à la
voisine si la maison est inoccupée, sur sa réponse
affirmative, il déclare qu'il lui faut loger ses
troupes puis il s'en va. Il revient un quart
d'heure plus tard après par le jardin, avec une
section environ. Il opère comme nous l'aurions
fait nous-mêmes, en enfonçant la porte. J'ai cinq
cartouches dans mon revolver. Les s/Lieutenants
Escande et Georges n'ont rien dans les leurs. Il
n'y a rien à tenter. Quant aux restes de la
demi-brigade; j'ai recueilli à leur sujet les
déclarations du s/Lieutenant Bougnasse du 64ème
B.C.A. à l'Oflag XVII A. à Lienz (Tyrol).
Lorsqu'ils
se sont présentés, un quart d'heure environ après
moi à la barricade de l'entrée des Riceys, les
Allemands au nombre d'une centaine, qui avaient
laissé passer les isolés, c'est-à-dire mes trois
s/lieutenants et moi-même, sans se montrer,
ouvrirent le feu sur les arrivants. Le Capitaine
Becq qui savait que les munitions portées par les
hommes représentaient quelques cartouches
seulement pour chacun, dans quel lamentable état
physique étaient les chasseurs, a estimé qu'il
était impossible de combattre ni de chercher à
fuir. C'eût été vouer inutilement à la mort la
plupart des hommes. Il se rendit. J'aurais agi
comme lui.
Général
Buisson
.c.
La Bataille de l'Aisne
2ème phase - Juin 1940
1 -
Situation Au début du mois de Juin, les Allemands
ont liquidé le Nord de la France. La position de
résistance des Armées Françaises passe par (de
l'Ouest à l'Est): la Somme, Canal du Nord, Oise,
Canal des Ardennes, Ailette, Chemin des Dames,
Canal de l'Oise, Aisne, Montmédy, Ligne Maginot. 2 -
ORGANISATIONDe l'Oise à l'Argonne, la position est
tenue par le Groupe d'Armées n°4, sous le
commandement du Général Hutzinger, ayant à sa
gauche le Groupe d'Armées du Général Besson. 1er
- à gauche : VIème Armée -
Général Touchon-P.C. Congis. 7ème C.A. - Général
Noël 47ème D.I. - 7ème D.I. 28ème D.I. 17éme C.A.
- Général de la Porte du Theil - 44ème, 45ème et
42ème D.I. P.C. Ville en Tardenois. 2e-au
centre : IVème Armée -
Général Requin - P.C. Cernon. 8ème C.A. - Général
Demaze 14ème D.I. 23ème C.A. - Général Germain
2ème D.I. - 1Oème D.I. 3e-
à droite : IIème Armée -
Général Fradenberg P.C. Attigny (Verdun). C.A.
Colonial - Général Carle 35ème D.I. - 36ème D.I.
21ème C.A. 18ème C.A. - Général Doyen 4e-
Réserves : 27ème D.I.A. -
Dormans. 82ème D.I.N.A. - Montagne de Reims. à
partir du 8 juin : 235ème D.I. 238ème D.I.- N.O.
de Reims. 53ème D.I.Légère. - Mailly. En
plus : Groupement Cuirassé
du Général Buisson:En outre, le Groupement Polonais
(arrivera le 16) et le Groupement D.1 (qui
n'arrivera pas) Ce Groupement Cuirassé a été
constitué pour contre-attaquer d'est en ouest en
direction de l'Aisne, si l'ennemi franchit cette
rivière. Il est rassemblé dans la région de
l'Argonne. Sa première difficulté serait donc un
changement d'Armée au cours de sa mission. 3 - ÉTAT
DES DIVISIONS ENGAGÉES a/ Hommes Divisions
en ligne fatiguées par vingt jours de combat ou
secteur de combat. Arrêt de l'ennemi sur la ligne
de repli. Effectifs diminués par les pertes de ces
combats, les évacués, les permissionnaires non
rentrés. (26ème D.B.C.A. le 10/6). Changements et
glissements fréquents avec marches pour
l'aménagement des C.A. b/
Matériel. - Artillerie : Complet. - Infanterie :
Complet. D.C.A. : F.M. et mitrailleuses. (peu de
munitions) D.C.B. : 25 - à peu près complet. 47 -
peu. Matériel peu connu. 37 - pétoires. - Aviation
: Néant. 4 - DÉTAIL
DES DIVISIONS ENGAGÉES -
2ème D.I.- Gal Klopfenstein Inf: 33-73-127. Art:
1-34-234. G.R.D.11. - 3ème D.I. - Gal Bertin
Boussu Inf: 51-67-91. Art: 42-242. G.R.D.6. - 3ème
D.I.N.A. - Gal Mast Inf: 12ème Zouaves 14 et 15ème
Tirailleurs. Art : 20-220. G.R.D. -3ème D.C.R. -
Gal Buisson ; 4ème Bat de Chars. 319ème R.A. 16ème
B.C.P. - 6ème D.I.C. - 7ème D.I. - Gal Huppel Inf
: 93-102-130. Art : 31- 231. G.R.D.40. - 10ème
D.I. - Gal Ayme Inf : 5-24-46. Art : 32-232.
G.R.D15. - 14ème D.I. - Gal de Lattre ;Inf :
35-152 3ème Demi-Brigade Art: 4-204 G.R.D.25 -
20ème D.I - Gal Corbe Inf : 2-47-115. Art : 7-207.
G.R.D.20. - 27ème D.I - Gal de Bilemont Inf:
7I-159 7ème Demi-Brigade Art : 58-258 G.R.D.20 -
28ème D.I - Gal Lestien Inf : 97-99- 25ème
Demi-Brigade. Art : 2-202. G.R.D.22. - 35ème D.I -
Gal Decharmes Inf : R.E.T.-11-123. Art : 24-224.
G.R.D. - 36ème D.I - Gal Aublet Inf : 14-18-57.
Art : 24-224. G.R.D. - 41ème D.I - Gal Bridoux Inf
: 101-103-104. Art : 13-213. G.R.D. - 42ème D.I -
Gal Keller Inf : 80-94-150. Art : 61-261.
G.R.D.37. - 44ème D.I - Gal Boisseau Inf : 6-26ème
D.B.C.A. 173 Demi-Brigade. Art : 91-291. G.R.D.41.
- 45ème D.I - Gal ROUX Inf : 31-85-113. Art :
55-255. G.R.D.33. - 53ème D.I - GalEtchebarrigaray
Inf : 208-329. Art : 22- G.R.D.60. - 56ème D.I -
Gal de Mierry Inf : 294-306-332. Art : 26-226.
G.R.D. 63. - 59ème D.I. - Gal Lascroux Inf :
83-135. Art : 84. G.R.D. - 82ème D.I. - Gal
Armingeat Inf : 4 et 6èmes Tirailleurs. 1er
Zouaves - 439 R.P. Art : 66-266. G.R.D. 82 -
235ème D.I - Gal Trolley de Prévaux Inf : 9-108.
Art : 323. G.R.D. - 238ème D.I - Gal Debeney Inf :
25-114. Art : G.R.D. - 240ème D.I - Gal Buisson
Inf : 42ème R.I.C. 40ème Demi B.T. - Brigade
Polonaise - Gal Maczek 1 Bat Chars. 1 Bat porté.
5 - LA BATAILLE
Le front du Groupe d'Armées,
étendu sur cent cinquante kilomètres, est tenu par
neuf divisions, ce qui représente seize kilomètres
au minimum par D.I. Or, au peloton des
élèves-caporaux, on apprend qu'une D.I. tient
défensivement sur six kilomètres d'une position
organisée. Dans le cas présent, il n'y a dans la
presque totalité des cas pas de position
organisée, pas de tranchées, pas d'aviation, pas
même l'avion de reconnaissance divisionnaire de
l'ancienne guerre. Le 5
juin Les Allemands
attaquent sur l'Ailette, sur le front des 7ème,
41ème et 28ème D.I. L'attaque est menée comme elle
le sera par la suite sur toutes les coupures, à
l'aide des moyens de 1918 : préparation
d'artillerie, infanterie en masse,
reconnaissances, et emploi de l'aviation de
bombardement en plein. L'ennemi, donc, sur l'aile
gauche du IVème Groupe d'Armées, pénètre jusqu'à
la ligne d'arrêt, très faiblement étoffée. Le 6
juin L'attaque de l'aile
gauche continue. Vers 15 heures, l'ennemi met en
oeuvre la nouvelle arme : attaque massive par
blindés. La 28ème D.I., la 41ème D.I. et la 7ème
battent en retraite derrière l'Aisne. La 27ème
D.I. est alertée. Elle contre-attaque en direction
de Soissons, mais ne réussit qu'à recueillir les
éléments de la 41ème D.I. Le 7
juin L'Allemand prépare la
rupture de l'Aisne. Pour cela, il amènera toute la
journée ses moyens à pied d'oeuvre. Le Groupe de
Contre-Attaque du Général Buisson fait un bond de
45 kilomètres vers l'ouest, au sud d'Attigny, dans
la région de St Morel. Il n'a aucun renseignement
sur la situation. La 7ème D.L.M. le rejoint à ce
moment. Le 8 juin Attaque
de l'Aisne, toujours sur l'aile gauche du IVème
Groupe d'Armées. 41ème, 28ème, 44ème D.I., jusqu'à
l'est de Pont-Arcy, charnière du canal de l'Oise à
l'Aisne et de l'Aisne. Partout il franchit
l'Aisne, grâce aux trous très importants de notre
dispositif et à la disproportion des moyens. Mais,
alors que devant la 26ème D.B.C.A., aile gauche de
la 44ème D.I., ses gains se bornent à la rive sud
de l'Aisne, à gauche, il réussit à percer dans la
région de Soissons, établissant une tête de pont.
Le P.C. de la 28ème D.I., à Serches, manque d'être
enlevé. La 28ème D.I. s'installe face à l'est sur
la Vesle, sous la protection du 22ème B.C.A., qui
tient le plateau de Bazoches. La 27ème D.I.
contre-attaque sur Soissons, se heurte aux chars
allemands et se replie. La 238ème D.I., envoyée en
renfort, est embarquée. Les routes sont encombrées
de réfugiés. Elle n'arrivera pas, et sera dirigée
sur la Marne par la suite. Le 9
juin La 27ème D.I. se
replie de Soissons sur l'Ourcq d'Oulchy le
Château. La 28ème D.I. cède du terrain. Il se
produit un trou entre elle et la 44ème D.I. Le
commandement bouche ce trou en y mettant la 45ème
D.I. qu'il retire de l'Aisne (région de Berry au
Bac), à 3 H 30 du matin. De cette opération
découlent une série de fausses manoeuvres, bientôt
la pagaille. Autobus parisiens non employés alors
que la troupe fait le chemin à pied ou par des
moyens de fortune. Les Allemands ayant étendu
l'attaque à l'ensemble du front, certaines unités,
accrochées, restent sur place (4 bataillons sur 9
- 1 groupe de 75). La 44ème et la 42ème D.I.
s'étirent dans les deux sens pour tenir l'Aisne.
La 42ème arrive à Berry au Bac et y trouve les
Allemands installés depuis le départ de la 45ème.
L'artillerie de la 28ème D.I. est donnée à la
45ème. Ordre de repli est donné dans la nuit aux
44ème, 45ème et 42ème D.I. sur Fismes. Trou entre
Fismes et Fére en Tardenois. Devant les 10ème et
2ème D.I., les Allemands ont réussi à créer des
poches, à droite de Rethel. Plus à droite, à la
36ème D.I., ils ont également fait une poche. Nuit
du 9 au 10 La 26ème
D.B.C.A. organise une tête de pont pour la défense
de la Vesle à Fismes. Le 22ème B.C.A. est sur la
rive sud de la Vesle à Bazoches. Le Groupement
Cuirassé se porte vers l'Ouest, région de La
Neuville - P.C. Hauville. La 3ème D.I.M. n'ayant
pas rejoint, les ordres sont laissés sur place. La
53ème D.I. est toujours à Mailly. Le
10 juin L'ennemi poursuit
son attaque générale. A gauche, la 27ème D.I.
retraite sur Château-Thierry. La 238ème, amenée en
renfort, se place à sa droite derrière la Marne.
La 44ème, sous les ordres de laquelle ont été
placés les éléments de la 28ème, se bat sur la
Vesle, à Fismes. La 45ème s'oriente Nord-Sud pour
essayer de joindre la 238ème et la 44ème. Dans
l'après-midi, la 44ème, attaquée par derrière, se
replie sur Lhéry - Tramery. La 45ème a passé la
Marne à 23 heures. La 42ème se replie sur la
Vesle, à l'est de Reims. La 82ème tient la
montagne de Reims. Les 1Oème et 2ème sont
dépassées par les engins blindés. Les restes de la
10ème se réunissent à la 233ème. Les restes de la
2ème se replient au sud de... A 19 heures, les
chars allemands sont à Reims. Les deux tiers de
ces divisions sont perdus. Il ne reste que des
îlots encerclés. La 14ème D.I. tient son front.
Une contre-attaque de chars lui fait reprendre une
partie du terrain perdu. Le Groupement Cuirassé
d'Attaque reçoit de tous côtés des appels au
secours. Il reçoit du commandant de la IVème Armée
quatre avis de contre-attaque; trois vers l'ouest,
un vers le nord-est, à déclencher sur ordre écrit
du général commandant la IVème Armée. Cependant,
sur demande de la 14ème D.I., menacée d'être
tournée, vers midi, la 3ème D.I.M. attaque en
direction de Perthes et voie ferrée Rethel-Reims.
Les chars sont pris à partie et détruits par des
canons de 47 servis par des Allemands. La 7ème
D.I.M. attaque sur La Retourne et fait faire
demi-tour aux blindés allemands. Le Groupement
chars Maczek débarque à Épernay. La 36ème D.I. bat
en retraite en direction de Vouziers, mais dans
cette région l'attaque allemande est faible. Le
11 juin L'ennemi passe la
Marne à Château Thierry et progresse en direction
du Petit Morin. La 20ème D.I., arrivant de l'Est
est débarquée entre Dormans et Épernay et est
engagée en pagaille avant d'être rassemblée. La
gauche des 27ème, 238ème et se replie sur
Montmirail. La 45ème laisse à Dormans un un
bataillon qui sera fait prisonnier. Le reste de la
division s'organise au sud de la Marne, sur
Verneuil. La 44ème franchit la Marne (ordre de
repli) à 12 heures, à Reuil-Oeuilly. La 26ème
D.B.C.A se retourne défensivement sur la rivière.
Les 6ème R.I. et 173ème demi-brigade sont à
quelques kilomètres au sud - Forêt d'Enghien -
Boursault;. Reims est tenu jusqu'au soir par le
439ème Régiment de Pionniers. On a laissé des D.I.
à la Montagne de Reims, (survivance des souvenirs
historiques), pendant les journées du 11 et du 12
: la 42ème D.I., qui se replie sur la Marne, la
82ème, le groupe 235ème et 1Oème, qui est à Verzy
- Verzenay dans la soirée. La 36ème et la 14ème se
sont repliées entre Suippes et le nord de
l'Argonne, sous la protection de la 3ème D.I.M. La
7ème D.L.M. reçoit l'ordre de se porter sur
Épernay, mais ne part que le lendemain, (trente
chars), disloquée en deux groupes, car le
commandant de la 14ème D.I. en conserve une
partie. La 3ème D.C.R. reste seule. La 53ème D.I.
Légère, venant de Mailly, s'installe entre Châlons
et Outrepont (S.E. de Châlons), avec deux
régiments, sur un front de cinquante kilomètres ! Le
12 juin A gauche, les
Allemands avancent leurs moyens. La 27ème D.I. est
à Montmirail, derrière le Petit Morin. La 238ème,
en crochet défensif, se replie sur la gauche, puis
recule un peu en direction de l'est. La 59ème
arrive à 19 heures entre Montmirail et Cézanne. La
45ème se replie en direction de Montmort. La 44ème
tient à Oeuilly, derrière la Marne. On commence à
dégarnir la Montagne de Reims, qui tient toute la
journée, mais, les Allemands étant à Nanteuil la
Fosse le soir, il faut se replier. On regroupe les
1Oème et 235ème D.I. A droite, la 14ème s'aligne à
la Montagne de Reims, la 3ème, région de Souain,
la 6ème D.I.C. (nouvelle) à l'est d'Épernay;,
prolongée par la 36ème. Mais les chars allemands
sont sur la route Reims-Châlons. Les ponts sautent
à 12 heures. Les D.I. décrochent, la 14ème en
direction de Vitry la Ville. La 3ème D.I.M. est
attaquée vers Suippes par des chars, mais,
couverte par trois bataillons de chars, elle se
replie en direction de La Saulx. La 3ème D.C.R.
couvre la retraite en attaquant dans le camp de
Mourmelon, où elle laisse quatorze chars B sur les
Ouvrages Blancs. Le passage du Pont de Poigny est
forcé à 16 heures par treize chars de la 3ème
D.C.R., envoyés en arrière pour réparations. Cela
permet le passage des colonnes en retraite. Le
pont saute à 22 heures La 3ème D.I.N.A. arrive et
vient tenir le front de la nasse entre La Saulx et
l'Argonne. La marche des D.I. 14, 3, 6, 36,
atteint 80 kilomètres pour joindre le sud de la
poche (Revigny, Bar le Duc). Le
13 juin Les Allemands
percent à Montmirail, tombent sur la 52ème D.I.
Légère, qui débarque. Elle est rejetée avec la
235ème et la 7ème et disparaît de la bataille. Ces
D.I. retraitent vers Sézanne. Au centre, la 44ème
est accrochée à la forêt d'Enghien, se replie vers
13 heures à Ablois, et la 26ème D.B.C.A.
contre-attaque de Morangis sur le plateau d'Ablois
à 14 heures. .c.Action locale de la 7ème D.L.M.
Les Allemands étant à Romilly, ordre de repli lui
est donné sur Vertus, qu'elle atteindra dans la
nuit. A 21 heures, les Allemands entrent à
Romilly. Les Divisions d'Infanterie ont perdu de
un tiers à trois quart de leurs effectifs. La
53ème tient derrière la Marne. Les 14ème et 3ème
se regroupent derrière la Marne. La 3ème D.I.N.A.
est complètement bousculée. A 19 heures, las
Allemands entrent à St Dizier par le nord de la
Marne. Le 14 juin Le
18ème Corps d'Armée arrive de l'Est, (56ème et
306èmes D.I.) et débarque en pleine bataille. Son
artillerie et une bonne partie de son infanterie
sont immédiatement capturées. La 44ème D.I., en
arrière-garde, reçoit un ordre de repli sur
Morains le Petit, qu'elle atteint à 8 heures du
matin. A 11 heures, elle retraite sur Euvy, puis
sur Champfleury, par Fére Champenoise, où sont
identifiés à midi le passage d'éléments de dix
divisions. Le soir, nouvel ordre de repli
prescrivant de traverser l'Aube. Bombardement des
colonnes par avions. La 3ème D.C.R. se replie de
nuit sur l'Aube. Le
15 juin Les Allemands,
glissant le long de la Seine, postent à chaque
pont un ou deux chars et quelques sides, qui
interdisent les passages et la reconstruction d'un
pont. De ce fait, toutes les colonnes en retraite
qui s'y présentent, roquent vers l'est et viennent
par la suite se heurter aux grandes colonnes
blindées allemandes, dont le passage est signalé: - Le
15 : Auxerres - Tonnerre à
18 heures. - Le
16 : Avallon à 5 h -
Clamecy ;à 6 h 30 - Sens à 12 h - Saulieu ;à 12 h
- Dijon ;et Montbard à 14 heures. Les colonnes
disloquées franchissent parfois la Seine, mais
seront faites prisonnières dans la région
Montbard, Chaource, Châtillon, Dijon, exténuées
par les fatigues de dix jours de combats en
retraite, sans alimentation, sans munitions, sans
ordres.
.c.6
CONCLUSIONS
Les causes de l'échec de la
bataille peuvent se résumer ainsi: -1°- Dimension
exagérée du front, ainsi qu'il a été exposé au
début. -2°- Fatigue des troupes en secteur,
résultant des travaux exécutés de nuit, du manque
de sommeil, des marches répétées pour prendre
position, des changements de secteur provenant des
glissements et du manque de réserves. -3°-
Défectuosité des liaisons : a - Téléphone : zéro.
b - Radio : insuffisante en nombre et en force. c
- Avions d - Liaisons sur route non prévues au
cours de la retraite - Aucune indication aux
grands croisements - Aucune police. - 4° -
Réfugiés : Aucune prévision - Aucune organisation
Aucun ordre - Encombrement des routes : Ex: Soupir
le 18 Mai - Cars rentrant à vide - Grande misère
Victimes - Peur et affolement. - 5° - P.C.
inversés dans les déplacements - Chevauchement des
unités - Manque de renseignements d'en haut. - 6°
- Insuffisance numérique de chars - 1200 + 600
(cavalerie) - Environ 2000 en quelques D.Cu et
bataillons isolés. Les Allemands avaient des
masses blindées en Grandes Unités. G.R.C.A. sans
blindés. - 7° - L'aviation ennemie, maîtresse
indiscutée du ciel, a brisé nos arrières dès le 5
juin. Plus de ravitaillement en vivres et
munitions - Les unités sont obligées de piller par
ordre pour vivre - Le pillage devient individuel -
Les réfugiés l'augmentent encore en vivant dans
les maisons. - 8° - Contre nous : Troupes
préparées, sélectionnées pour les panzer -
Souplesse, puissance, rapidité - Propriété du ciel
- Infanterie moyenne - Artillerie à forces égales.
- 9° - Chez nous : Préparation insuffisante -
Croyance forcenée à la paix - Moral insuffisant. |