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L'oeuvre
de Michel El Baze: Les guerres du XXe siècle à travers
les témoignages oraux |
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DENIS Raymond CARNET
DE BORD
GUERRE 1939 - 1945 Ma place dans l'Histoire |
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Analyse du témoignage Ecriture : 1987 - 73 pages AVANT PROPOS DU TÉMOIN Au cinéma, les actualités nous présentent les énormes rassemblements du peuple allemand levant le bras sous des forêts d'oriflammes à croix gammée. Leur chef, Hitler, nous fait rire avec sa petite moustache à la Charlot et ses hurlements. Puis vient le défilé des soldats marchant au pas de l'oie. D' énormes chars d'assaut suivent. Au-dessus, les avions passent comme l'éclair dans le tonnerre de leurs moteurs. C'est un fou, dit-on de ce Hitler. Il paraît qu'il a même écrit un livre où il prétend gagner la prochaine guerre. Cela aussi nous fait rire. Nous avons la ligne Maginot. La meilleure armée du monde. La Légion Etrangère. Et des Tirailleurs Sénégalais qui font peur rien qu'en les regardant. Chez nous, les hommes ne prennent qu'eux-même au sérieux avec leurs jugements définitifs. Beaucoup décrètent que la guerre n'aura pas lieu. "Il ne faut rien exagérer, Hitler a simplement mis de l'ordre dans son pays". Monsieur Chamberlain, l'homme au parapluie et Monsieur Daladier, le taureau du Vaucluse sont là pour nous rassurer. C'est d'ailleurs tout ce que nous désirons. Un an après, c'est la guerre.
At the pictures, the news show enormous gatherings of the German people, arms uplifted in a forest of Swastika bearing banners. We find their leader, Hitler, funny with his Charlie like moustache and his yells. Then come the soldiers parading at goose step, followed by huge tanks. Above that the aeroplanes are darting past like lightnings in the thunder of their engines. People think that Hitler is mad, People say that he even wrote a book in which he claims that he is going to win the next war. That we find funny also !.. We have the Maginot line. The best army in the world. The Foreign Legion. And the Senegalese infantry soldiers who chill whoever look at them. In our country, men only take themselves seriously with their definitive judgements. Many claim that war will not take place. "Things should not be exaggerated, Hitler only straightened up his country". Mr Chamberlain, the man with the umbrella and Mr Daladier, the "Bull of Vaucluse", are there to reassure us, that's all we want anyway. One year later, war breaks out. To Marcel and Fernand, childhood friends who did not understand a thing, and died in vain... somewhere on the Eastern front under the enemy's uniform.
"The order came to
switch off all the lights, the black out was
complete and the night lasted for four years. So
every one made is own choice. The greatest number
chose intellectual comfort, because to do nothing is
also a choice. Then, some, too numerous for the
misfortune of the country, allowed themselves to be
attracted by false prophets, and ended miserably,
hopelessly, deceived by those who made use of them,
for a few ridiculous advantages from the enemy. A
small number were carrying in themselves the honour
of the Knights of the times gone by and gathered
around a leader: General de Gaulle". Raymond Denis who writes those
lines, was one of those. Today through a series of
flashes, he is the historian of his own history,
placing his testimony in the atmosphere he was in,
and the edges of which he probably could not clearly
see. Behind the lightness of the style, how many
miseries, how many tragedies are evoked. How many
treasons, vileness, on the part of too great a
number of our fellow citizens, but also the example,
that of teenagers brought up in the faith that gave
them the strength to say No!
La mémoire La mémoire : seul bagage incessible Jacques ATTALI AVANT - PROPOS *** Au cinéma, les actualités nous présentent les énormes rassemblements du peuple allemand levant le bras sous des forêts d'oriflammes à croix gammée. Leur chef, Hitler, nous fait rire avec sa petite moustache à la Charlot et ses hurlements. Puis vient le défilé des soldats marchant au pas de l'oie. D' énormes chars d'assaut suivent. Au-dessus, les avions passent comme l' éclair dans le tonnerre de leurs moteurs. C'est un fou, dit-on de ce Hitler. Il paraît qu'il a même écrit un livre où il prétend gagner la prochaine guerre. Cela aussi nous fait rire. Nous avons la ligne Maginot. La meilleure armée du monde. La Légion Étrangère. Et des Tirailleurs Sénégalais qui font peur rien qu'en les regardant. Chez nous, les hommes ne prennent qu'eux-mêmes au sérieux avec leurs jugements définitifs. Beaucoup décrètent que la guerre n'aura pas lieu. "Il ne faut rien exagérer, Hitler a simplement mis de l'ordre dans son pays". Monsieur Chamberlain, l'homme au parapluie et Monsieur Daladier, le taureau du Vaucluse sont là pour nous rassurer. C'est d'ailleurs tout ce que nous désirons. Un an après, c'est la guerre.A Marcel et Fernand, camarades d'enfance qui Ils n'ont rien compris et sont morts pour rien... quelque part sur le front de l'Est sous l'uniforme ennemi. Nous avons la ligne Maginot : les Allemands ne passeront pas. Général Gamelin ;- 2/09/1939 LA GUERRE J'ai quinze ans à la Mobilisation Générale et je vais voir passer les trains qui se suivent nuit et jour, bourrés de soldats et de canons sur les plates-formes. Les mois passent. Le front reste calme. Derrière la ligne Maginot, nos artilleurs regardent l'ennemi à la jumelle au-delà du Rhin. Le généralissime Gamelin, dans son grand quartier général du fort de Vincennes se veut rassurant. Sûr de lui, de sa tactique héritée de la guerre de 14, il reprend à son compte l'invitation des Anglais à la bataille de Fontenoy. Cette fois, c'est : "Messieurs les Allemands, tirez les premiers ! " . A l'arrière, on appelle cela la drôle de guerre. L'hiver passe ainsi avec beaucoup de relèves, de vins chauds dans les gares et de communiqués insignifiants. En attendant, on peint les vitres et la lampe à carbure de nos bicyclettes en bleu pour respecter le black-out. La mairie nous distribue des masques à gaz que l'on porte en bandoulière. - " Méfiez-vous de l'ennemi, il vous écoute. " Disent des affiches étalées sur les murs. Il s'agit sans doute de la Cinquième Colonne. Chaque quartier a son type louche que l'on désigne discrètement à voix basse. Puis, on nous demande d'apporter au coin des rues nos vieux bouts de ferraille pour forger l'acier victorieux. Début mars, le Gouvernement change. Paul Reynaud remplace Édouard Daladier. Le Général Weygand prend la place du grand généralissime Gamelin. Mais nous avons toujours le regard fixé sur la fameuse ligne Maginot qui nous a coûté si cher et que l'on va enfin pouvoir amortir. Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts. Paul Reynaud - 20/03/40 Le ton change. Paul Reynaud commence par nous affirmer qu'il ne mentirait pas sur les événements. "Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts", clame-t'il à la T.S.F. et les vieux hochent la tête en approuvant. Comme en 14, on les aura. Au printemps, par une belle journée pleine de soleil, notre ville est bombardée par des Stukas hurlants. C'est le 10 mai et la guerre commence pour l'arrière. En quelques jours, les hordes allemandes ont envahi le Danemark, la Hollande, la Belgique et pénètrent dans le Nord de la France en évitant notre belle ligne Maginot. Mais le pays, entretenu dans la certitude de la victoire, reste confiant et continue d'espérer. "La route du fer est définitivement coupée pour l'Allemagne", Continue Paul Reynard à la Chambre des Députés. Nous nous demandons quand même à quel hauteur a lieu la coupure car, quelques jours après, il déclare que Paris sera défendue rue par rue, maison par maison. La Route Nationale venant de Paris passe près de chez nous, derrière le quartier de la Croix Rousse à Lyon. Un matin, on voit les premiers symptômes de la débâcle : Ce sont d'abord de belles automobiles bourrées de bagages, surmontées de matelas, puis de moins belles. Le lendemain, ce sont des charrettes attelées de chevaux harassés par de longues étapes. Puis des bicyclettes, des voitures à bras. Il y a des Hollandais, des Belges. Quelques-uns s'arrêtent et décrivent l'horreur de leur calvaire sur les routes de l'exode. Les Allemands mitraillent les civils sur les routes et ne respectent même pas la Croix-Rouge. Il fait très beau, nous restons des journées entières assis sur le rebord d'un petit mur, à les voir passer. Si la FRANCE est en danger, appelez le Général WEYGAND. Maréchal FOCH Des comités de dames patronnesses installés sur les places leur offrent de la nourriture et des boissons. Le 28 mai, la Belgique capitule et notre Gouvernement traite le Roi des Belges de félon. Lorsque les premiers Français du nord se présentent dans ce pitoyable défilé, mon père, qui a connu très jeune la guerre de 70 puis celle de 14, me conseille de partir : "Si les "Prussiens" arrivent, ils font prisonniers tous les jeunes. J'ai connu cela aux autres guerres. Va jusqu'à MARSEILLE et attend la victoire pour revenir." Pour lui, cela ne fait aucun doute, le Gouvernement vient de confier l'armée à WEYGAND, "' l'homme de la situation" selon les derniers mots du Maréchal FOCH avant de mourir. Il me remet cinq francs et me demande d'être prudent. Je graisse ma vieille bicyclette, fixe mon sac sur le porte-bagages et rejoint le troupeau sans fin sur la Route Nationale en direction du Sud. Mais les événements semblent alors aller plus vite que notre fuite....Nous reprendrons aux Français les deux SAVOIES, le COMTE de NICE, la CORSE et la TUNISIE Bénito MUSSOLINI Après VIENNE, dans l'ISÈRE, des militaires sans armes se joignent à nous. Je m'arrête sur la place d'un village où la voûte des platanes me donne un peu d'air frais. Deux gendarmes m'informent que l'ITALIE vient de nous déclarer la guerre. "Ne partez pas vers l'Est". Bien après le village, des Spahis bloquent une voiture portant le fanion d'un officier supérieur. Lorsque je les double, les Spahis menacent les Officiers qui braquent sur eux leurs armes. Je traverse VALENCE puis, juste avant MONTÉLIMAR, des avions volant bas mitraillent la route. -"Ce sont des Italiens", crient les soldats en se jetant dans les fossés. Après leur passage, des morts inondés de sang et des voitures en feu barrent la route. Des blessés hurlent mais la foule des piétons et cyclistes se faufile entre les obstacles et continue, indifférente, son exil vers le Sud. " Ne pas capituler mais demander l'armistice." Général WEYGAND L'exode devient la débâcle et un véritable sauve-qui-peut. La panique nous devance à chaque étape. Et chaque fois, d'autres réfugiés se joignent à nous. Il fait toujours beau, je profite à mon tour des buffets gratuits dressés sur les places par les Municipalités et les dames charitables. La nuit, je dors avec les autres sur la paille installée sous les préaux des écoles. J'arrive enfin à MARSEILLE et me précipite vers la mer que je n'ai jamais vu. Le 14 Juin, les Allemands entrent dans PARIS déclarée ville ouverte. La belle certitude de mon père pour le Général WEYGAND ne me suffit pas car la situation s'aggrave de plus en plus. Le Maréchal PÉTAIN devient Chef de l'État Français le 16 et le 22 Juin, l'armistice est signée. Nous allons prendre notre revanche sur les injustices faites au Reich depuis le jour maudit du Traité de Versailles. Adolf HITLER Je rejoins un groupe de jeunes dont beaucoup viennent d'ALSACE. Nous écoutons les nouvelles de la TSF dans un café du vieux fort. Je ne comprends pas encore très bien ce qui vient de nous arriver. Par contre, les autres plus âgés semblent conscients de la catastrophe, à leur visage triste. Les Alsaciens pleurent. L'un deux, saisissant la bouteille de pastis encore pleine, boit l'alcool pur jusqu'au bout et s'écroule. Deux heures après, il est mort. Son cadavre étalé le long du bar semble nous prédire que le temps de la mort est venu.Dans le poste, une autre voix succède à celle chevrotante du Maréchal pour demander à la population de rentrer chez elle. A l'unanimité, notre petit groupe décide de s'embarquer pour l'AFRIQUE afin de fuir les Allemands... "Sur nos terres, un grand pavillon rouge à croix gammée a déjà redevenir libre pour la FRANCE". Henry d'ARGENLIEU Presque tous sont admis sur des navires ramenant des Tirailleurs Sénégalais en AFRIQUE. Mais les autorités du Port me refoulent énergiquement à cause de mon âge. Je viens juste d'avoir seize ans. Je reprend donc le chemin du retour en compagnie des Hollandais, des Belges et des Ch'timis du nord. Cette fois, le mistral est contre nous. En attendant les conditions d'Armistice, le front s'arrête à TAIN-L'HERMITAGE. Côté sud, des gendarmes français interdisent le passage. De l'autre côté, on aperçoit des soldats allemands installant de l'artillerie. Je vois l'ennemi pour la première fois et les casques maudits dont nous aurons rapidement une indigestion. Les gendarmes français s'opposent à notre passage, il faut se former en peloton bien serré pour franchir le barrage en les bousculant un peu. Quelques mètres après, les Allemands braquent leurs armes sur nous : - "Halt ! Papir !", hurle un Officier. Après une brève vérification, il nous permet de partir avec un rire moqueur et méprisant, repris en choeur par ses soldats. Des soldats jeunes et beaux qui s'activent, joyeux, torse nu dans le soleil auprès d'un matériel puissant. Venant d'un peu plus loin, on entend résonner les pas cadencés d'une troupe en marche, frappant fort le sol de leurs bottes neuves. Puis, arrive jusqu'à nous un chant guerrier très juste qui vibre dans l'air chaud de cet après-midi d'été. Les vainqueurs ont bien d'allure de vainqueurs. Sûrs d'eux, sûrs de leur victoire et déjà condescendants pour les vaincus minables que nous sommes. La route du retour ramène les exilés de la défaite tristes et inquiets de notre avenir. Les attaques aériennes ont cessé. Je double les carcasses de véhicules que j'ai vu brûler à l'aller. Les cadavres ont disparu. "Le svastika est le signe sacré que j'imposerai dans le monde pour le triomphe de la race aryenne". Adolf HITLER - MEIN KAMPF Une longue colonne de soldats Français prisonniers est solidement encadrée par des Allemands aux fusils menaçants. Je m'arrête pour saluer nos prisonniers et leur proposer mes services. Mais, l'Allemand me crie : - "Schnel, Raoust !" en pointant son arme dans ma direction. Les dames patronnesses et leurs buffets ont disparu. Trois jours après mon départ de MARSEILLE, j'arrive chez mes parents. Mon père, qui a presque l'âge du Maréchal, me fait un long sermon sur la trahison et la politique responsables à son avis de la débâcle. - "Il faut faire confiance au Maréchal PÉTAIN, conclut-il, il sauvera encore la FRANCE !". Je me retiens pour ne pas éclater de rire car je pense aux autres qui devaient aussi la sauver, à l'acier victorieux, aux communiqués rassurants et au Général WEYGAND. Mais, je suis écrasé de fatigue par les kilomètres que je viens de faire sur une mauvaise bicyclette et par les événements tragiques dont j'ai été le témoin sur la route. Je rends la pièce de cinq francs à mon père et je vais me coucher. "Quoi qu'il arrive, la flamme de la Résistance Française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas". Charles de GAULLE. 18/O6/194O Ce qui vient de se passer ces dernières semaines nous a complètement décontenancé. Comment retrouver maintenant un minimum de vérité dans les contradictions permanentes de ceux qui prétendent nous sauver à tout prix ? André, un camarade d'école, me propose de l'accompagner à la salle paroissiale. Nous nous réunissons tous les samedis avec l'Abbé CARRIOUX. Il connaît beaucoup de choses sur les événements, Marcel et Fernand viennent aussi. La salle des fêtes se situe dans un vieux bâtiment attenant au presbytère. Un estrade sert de scène, un piano ancien et un vieux poêle en fonte pour l'hiver. L'Abbé Jean CARRIOUX est un homme de forte personnalité. Le groupe, autour de lui, comprend sept jeunes gens de notre quartier, de milieu différent. La semaine suivante, l'Abbé nous fait part de l'appel d'un certain Général de GAULLE à LONDRES, d'avoir à continuer la lutte et de ne pas céder à la défaite. Mais qui est ce Général ? L'Abbé répond à nos questions : - "Ce Général venait juste, avant la débâcle, d'être nommé Secrétaire d'État au Gouvernement !". La guerre, a-t-il dit, n'est pas finie, d'autres forces dans le monde viendront combattre la dictature allemande. La FRANCE devra être présente le jour de la victoire. D'autre part, nous dit aussi l'Abbé, le Maréchal Vainqueur de VERDUN ne peut pas pactiser avec l'ennemi. Il veut certainement limiter les dégâts et découvrira son jeu plus tard. Dans le groupe, Marcel et Fernand ont réagi. Il n'y a que le Maréchal pour sauver la FRANCE. Il est facile, pour ce Général réfugié à LONDRES, de donner des conseils. De toute façon, il faudra d'abord nettoyer le pays de toute la vermine responsable des malheurs du pays. Le ton de Fernand s'est élevé et sa voix laisse percevoir une volonté sans faille pour exprimer ses idées. "Le peuple Américain conserve la conviction que l'idéal que la FRANCE a défendu, idéal de la plus noble forme de civilisation, finira par triompher et reconquerra son entière liberté". 22/O6/194O - FRANKLIN D. ROOSEVELT Dès cet instant, le groupe se divise. Les idées se heurtent et l'amitié de nos réunions commence à se détruire. L'Abbé intervient brusquement, visiblement excédé.: "L'engagement ne vous concerne pas encore compte tenu de votre âge, un jour peut - être aurez - vous à vous décider sérieusement, selon le cours des événements à venir ?" Les accords d'Armistice repoussent les Allemands sur une ligne de démarcation au nord de LYON. Nous nous retrouvons en zone non occupée dite "Libre" mais sous surveillance. Certaines administrations de l'État s'installent dans notre ville. La vie reprend avec le travail ou les études. Des représentants de la Commission d'Armistice, en grand uniforme, occupent les beaux hôtels du centre. Très vite, le ravitaillement diminue chez les commerçants. Des tickets de rationnement alimentaire sont distribués par les mairies. Puis ceux des vêtements, du chauffage et finalement sur toutes choses. Les trains circulent aussi nombreux. Les Allemands vident notre pays de ses récoltes et du cheptel avant de voler nos matières premières de l'industrie. Sur les routes et en ville, les voitures automobiles sont de plus en plus rares. De vieux chevaux font leur apparition dans les rues avec d'innombrables voitures à bras. Le nouvel État Français du Maréchal s'organise rapidement dans la morale et la pauvreté, avec pour devise : "Travail, Famille, Patrie, Maréchal nous voilà !...". Mais aussi s'organise pour nous, inconsciemment, le choix vers ceux qui nous sollicitent.: Accepter la défaite et laisser faire les autres. Écouter les prophètes Français du nazisme qui, déjà, commencent à nous vanter leur idéal ou bien s'accrocher désespérément à la voix venue de LONDRES."Je fais le don de ma personne à la FRANCE pour atténuer ses malheurs". Philippe PÉTAIN Tous maréchalistes.!.. Son portrait apparaît dans les vitrines comme une idole capable de conjurer le mauvais sort. La voix chevrotante du 17 Juin a dit : "Je fais don de ma personne à la FRANCE pour atténuer son malheur !". Comme un seul homme, le peuple de la défaite l'applaudit de mettre fin à la tragédie. Prévoyant sans doute la razzia de notre industrie et de notre matière grise par le vainqueur, le Maréchal prêche le retour de la terre. La FRANCE est appelée ainsi à devenir le jardin potager de la GRANDE- ALLEMAGNE. D'immenses affiches en image d'ÉPINAL sollicitent cette vocation. Le Général de la Porte du Theil organise dans cet esprit les chantiers de jeunesse à la campagne, dans les forêts et la montagne. Le deux Août, le tribunal militaire de Clermont-Ferrand condamne le Général de GAULLE pour atteinte à la sûreté extérieure de l'État et désertion à l'étranger. Peine de mort, dégradation militaire, confiscation de tous ses biens. La presse des deux zones relate le jugement. Certains journaux, animés par une haine odieuse, en profitent pour insulter le Général. Par la radio de LONDRES, le Général de GAULLE répond que les vieillards de VICHY feraient mieux de défendre l'honneur de la FRANCE plutôt que de condamner ceux qui continuent la lutte pour sa libération. Le Ministère de l'Information devient celui de la propagande. Dès le début, la TSF et les journaux nous rappellent chaque jour que le bon peuple est la victime des mensonges de la démocratie décadente, du capitalisme franc-maçon et israélite. Ces boucs émissaires prennent ainsi la responsabilité de la défaite avec en plus celle des restrictions. - "Tous autour du Maréchal, - dit la radio de VICHY-et nous referons la FRANCE avec la Révolution Nationale !". Et cela marche. Joseph DARNAND crée la Légion des Combattants. "A MONTOIRE, nous avons civilisé le vainqueur". Pierre LAVAL Un décret sur le statut des personnes juives est déjà à l'étude avant même la demande des Allemands. La dénonciation par le Gouvernement et sa presse, des individus soupçonnés de gaullisme, francs-maçons et Juifs encouragent l'ignoble délation individuelle, une autre Légion mais de mouchards celle-ci. Le pays des deux zones s'installe dans l'allégeance de l'Occupant. Il ne manque pas de "braves gens" pour faire remarquer bien haut que ces Allemands sont corrects: J'en ai même vu prendre des enfants dans leurs bras. Les Allemands feront vite place aux nazis, ce qui changera bien des jugements hâtifs. Ceux-ci ont tué des enfants en POLOGNE car, pour eux, ce sont les ennemis de demain. Mais ceci, les "braves gens" veulent l'ignorer. Le vingt-quatre Octobre, c'est l'entrevue "Historique" de MONTOIRE. Le Vainqueur de VERDUN, serrant la main du chef nazi, va entraîner un grand nombre de Français dans la collaboration et conforter la politique des supporters de VICHY. C'est la grande tournée du FÜHRER. La veille, il rencontre à HENDAYE le Caudillo qui a profité de notre défaite pour occuper TANGER. Le vingt-huit Octobre, HITLER arrive dans son train blockhaus à FLORENCE. Le Duce, plastronnant, l'informe que ses troupes viennent de pénétrer en ALBANIE et en GRÈCE. Ce bouffon, sûr de lui, déclare faire lui aussi une guerre éclair en quinze jours. Mais quinze jours après, l'Armée Italienne est en difficulté, puis critique et, enfin, semble désespérée. HITLER doit envoyer ses propres troupes pour sauver l'Armée du Duce. Chez nous, l'Anglais redevient l'ennemi héréditaire. Radio-Paris commence à déverser des anathèmes délirants d'Hérold- Paquis, avec ses "avertissements sans frais" qui permettent aux Allemands d'arrêter ceux qu'il insulte. Puis, sa voix enfle pour terminer ses élucubrations chaque soir avec "L'ANGLETERRE comme CARTHAGE sera détruite". Et, là aussi, ça marche ! L'homme de la rue et les autres vous confirment que les Anglais nous ont laissé tomber à DUNKERQUE et qu'ils ont brûlé Jeanne d'Arc. "Ne l'oubliez pas !". "Je hais les mensonges qui nous ont fait tant de mal". Philippe PÉTAIN Ces phrases définitives ne sont pas sans danger car la moindre contestation vous désigne comme suspect. Mais, l'esprit indépendant gaulois va créer des groupes différents autour de noms porteurs. Les "Catholiques et Français Toujours", les Collabos inconditionnels, les Pétainistes durs mais aussi des mous opportunistes, les Doriotistes SS et les Darnand miliciens. Et tous, aventuriers, idéalistes, prophètes, révolutionnaires veulent refaire la FRANCE et n'hésiteront pas pour cela à s'enfoncer chaque jour dans leurs plus bas instincts criminels. Le tout orchestré par la puissance nazie qui a prévu, dès le début, la destruction physique et morale de la FRANCE. Et pourtant, le Maréchal a dit : "L'armistice dans l'honneur et la révolution nationale pour une FRANCE sans mensonge !". Quatre mois viennent de passer. L'État Français remplace la République, mais sa devise : "Travail, Famille, Patrie" s'analyse difficilement. Le Travail, doit se faire pour l'ennemi . La famille, beaucoup de familles sont séparées par la ligne de démarcation ou des prisonniers en ALLEMAGNE. La Patrie., que peut représenter ce mot si le Gouvernement vous invite lui-même à collaborer avec l'ennemi qui nous occupe ? Les hurlements du FÜHRER, qui ne nous font plus rire, redoublent d'imprécations pour le monde entier cette fois. L'ordre nouveau est établi pour mille ans. L'Afrikakorps du Général ROMMEL avance sur l'ÉGYPTE. L'ANGLETERRE subit d'affreux bombardements qui détruisent ses villes. Dès la tragédie de DUNKERQUE, CHURCHILL avait dit aux Allemands : - "Nous vous attendons, et les poissons aussi !". Et au peuple de Sa Gracieuse Majesté : "Nous combattrons sur nos rivages, nous combattrons sur nos collines, dans nos villages et dans nos villes et nous ne nous rendrons jamais !". "Nous vous attendons, Messieurs les Allemands, et les poissons aussi" Winston CHURCHILL Nous apprenons ensuite qu'HITLER, lors d'un grand rassemblement nazi, propose la paix aux Britanniques le 19 Juillet. Ceux-ci répondent que la paix sera obtenue lorsque l'ALLEMAGNE aura évacué tous les territoires occupés. Le FÜHRER réagit devant son peuple, aussi hystérique que lui, en affirmant que l'ANGLETERRE sera entièrement détruite. Les communiqués de nos journaux retracent chaque jour, sous d'immenses titres de victoires allemandes, la bataille aérienne d'ANGLETERRE commencée le 13 Août avec l'opération "Le Jour de l'Aigle ". La chasse anglaise fait des miracles avec ses quelques avions et son seul courage. Devant ce demi-échec, la Luftwaffe de GÖRING fait tomber une pluie de bombes sur LONDRES. Dès le lendemain, CHURCHILL riposte à ce crime contre des civils en bombardant BERLIN. - "Si une seule bombe tombe sur BERLIN, avait dit GÖRING, je veux m'appeler MAYER !". " Si une seule bombe tombe sur BERLIN, je veux m'appeler MAYER " Maréchal GÖRING Cette grosse finesse avait fait pleurer de rire les Berlinois. Cette fois, ils commençaient à pleurer leurs morts. Et les Anglais revinrent plusieurs nuits de suite. A la grande Chancellerie du Reich, HITLER rugit comme une hyène. Les Anglais assassinent mes femmes et mes enfants, je raserai leurs villes jusqu'au sol. GÖRING, dans un état d'exaltation hystérique, se prend pour NÉRON et clame à la radio que LONDRES est en feu. Les troupes allemandes, pour le débarquement en ANGLETERRE, sont prêtes à partir de CALAIS. Mais HITLER pense finalement mettre à genoux son pire ennemi en l'écrasant sous les bombes, le Quinze Septembre. GÖRING envoie toute sa Luftwaffe pour en finir ce jour-là. Le soir même, malgré d'épouvantables bombardements et les combats dans le ciel de LONDRES, nous apprenons que ce fut pour les Anglais le jour de la Victoire de la bataille d'ANGLETERRE. Plus de la moitié des avions allemands sont détruits et HITLER renonce, remettant à plus tard l'anéantissement des Anglais avec des armes secrètes."Une défaite militaire n'est jamais la défaite d'un peuple, quand ce peuple, fût-ce sous forme d'une poignée d'hommes, se refuse à l'accepter". Général de GAULLE En FRANCE, les Allemands conservent, sur ordre leur "Kolossal délikatesse" pour les petits "Französich" et sont surpris par la manifestation des étudiants et lycéens de PARIS, sur la tombe du soldat inconnu, le 11 Novembre. Manifestation vite réprimée par les mitrailleuses. Mais, que signifie le renvoi de Pierre LAVAL, le 13 Novembre ? Nous ne savons rien de ce qui se passe à VICHY. Il semble cependant qu'il y ait eu de sérieux désaccords. LAVAL, successeur désigné de PÉTAIN. C'est lui qui, le 1O Juillet, a obtenu à l'Assemblée Nationale les pleins pouvoirs permettant l'État Vichyste, exécré instinctivement par la majorité des Français. Le départ fait remonter la cote du Maréchal. Le Quinze Décembre, pour le centenaire du retour des cendres de NAPOLÉON aux Invalides, les Allemands vont remettre à la FRANCE son fils, le Duc de REICHSTADT, inhumé à VIENNE. Ce geste fait suite à la poignée de mains de MONTOIRE. HITLER invite PÉTAIN à PARIS pour la cérémonie. Mais, la destitution de LAVAL, juste la veille, a incommodé BERLIN et PÉTAIN ne viendra pas. Le cercueil de l'Aiglon arrive au milieu d'une haie de soldats Allemands et pénètre dans la chapelle des Invalides. Les Parisiens ne se dérangent pas et déclarent qu'ils auraient préféré du charbon et de la viande à des cendres et aux os de l'Aiglon. Ce n'est que ce mois-ci que nous apprendrons l'épopée du Colonel LECLERC, un des premiers officiers des Forces Françaises Libres. Nommé délégué par le Général de GAULLE, il débarque d'une pirogue le 27 Août à deux heures du matin à l'embouchure du fleuve WOURI au CAMEROUN Français. Les autorités civiles françaises de DOUALA obéissent aux ordres de VICHY et sont prêtes à repousser tous les assauts des forces gaullistes comme à DAKAR. Assisté du Commandant de BOISLAMBERT, LECLERC retrouve au rendez-vous cinquante Français passés au West-Cameroun Britannique lors de l'Appel du 18 Juin. " Ce matin 27 Août 194O, dans ce Territoire Français du CAMEROUN, la FRANCE continue la lutte aux côtés de ses Alliés. Elle sera présente à l'heure de la Victoire" Colonel LECLERC Tous les militaires au CAMEROUN sont gaullistes et, en vingt minutes, les points stratégiques de la ville sont occupés en silence. Les Camerounais sont heureux du bon tour joué au grand chef blanc à la francisque et adoptent aussitôt la Croix de Lorraine appelée le perchoir à perroquet. Radio-Londres nous apprend également que le Colonel LARMINAT a réussi la même opération à BRAZZAVILLE avec l'accord total de l'armée en place, ainsi que le Général LEGENTILHOMME pour DJIBOUTI. Cette tragique année de 194O se termine finalement avec pour nous un petit espoir, pour ceux aussi qui ne veulent pas désespérer. Dans l'ombre et le secret absolu, des officiers et des intellectuels en FRANCE préparent les premiers mouvements de résistance. Mais, d'autres aussi, de simples travailleurs et même des prisonniers de guerre en ALLEMAGNE qui ont le courage inouïe et la dignité de résister à l'orgueil du Vainqueur en supportant stoïquement leurs représailles.Pour André et moi s'organise inconsciemment le choix vers ceux qui nous sollicitent. Nous n'acceptons pas la défaite, les prophètes français du nazisme qui nous vantent leur idéal ont trop de haine dans leurs discours. Nous sentons intérieurement qu'il faut s'accrocher désespérément à la voix venue de LONDRES. Quelqu'en soit le prix.! "Être pour le vainqueur, être contre ou avec lui ; la première attitude implique subordination, la seconde hostilité, j'ai choisi la troisième, celle d'exister et de s'accommoder de sa présence". Benoist MÉCHIN 1941 La porte grince en s'ouvrant. Dans l'encadrement apparaît l'Abbé CARRIOUX . Il ôte sa longue pèlerine noire et réchauffe ses mains au-dessus du vieux poêle que nous venons de charger de quelques bûches. Dans l'obscurité de la rue, on entend crier : "Lumière !". C'est la voix du vieux Claudius, chef d'îlot de notre quartier. D'un coup de pied, FERNAND referme la porte qui grince à nouveau. Malgré nos désaccords, le groupe se réunit régulièrement tous les Samedis. Chacun de nous essaie de comprendre, d'imaginer une suite, accroché aux récits de l'Abbé. Il nous parle de Guy de la REGAUDIE, de PSICHARI, de Saint-Exupéry et bien d'autres exaltant le courage dans l'épreuve, où on change sa liberté et, mieux, sa vie pour un idéal. Il parle aussi du Maréchal, du Général de GAULLE à LONDRES dont il écoute chaque soir les nouvelles et aussi de STALINE. Dans le groupe, Marcel et Fernand continuent ostensiblement le débat avec Drieux la Rochelle, MAURAS et Jacques DORIOT. Pour eux, le Maréchal est gâteux. Maintenant, sa politique hésitante ne mène à rien. Les gaullistes sont des utopistes, l'ALLEMAGNE gagnera la guerre et seuls des chefs comme DORIOT qu'ils appellent déjà le grand JACQUES pourra maintenir notre pays dans l'ordre et lui redonner sa place dans l'EUROPE. Avec l'Abbé, nous expliquons vainement le danger nazi que rien ne peut faire admettre. Quel que soit la valeur des chefs qui jouent la collaboration, nous restons des vaincus auprès de vainqueurs de plus en plus exigeants et autoritaires. Mais, Marcel et Fernand s'enferment dans leurs convictions. Il y a presque de la haine maintenant dans leur regard. Ils ne viendront plus à nos réunions. Nous sentons qu'un jour, quelque chose interviendra et nous mettra en face d'un choix immédiat. Parti du TCHAD en Janvier 1941, le Général LECLERC prend KOUFRA en LIBYE où il fait le serment de ne s'arrêter que sur les bords du Rhin. Avec mon ami André, nous décidons de tenir un carnet de bord sur les événements que nous essayons d'obtenir. Nous apprenons ainsi à faire du renseignement, distinguant les uniformes allemands, leur unité, etc... Ce petit travail nous passionne et finira par rendre service. Nous apprenons ainsi que le pays n'est pas seulement divisé en deux zones mais en cinq tronçons. Une zone rattachée à la BELGIQUE, une zone interdite sur la côte Ouest, puis l'ALSACE et la LORRAINE à l'ALLEMAGNE. Léon DEGRELLE, le DARNAND Belge, demande la BOURGOGNE à son pays pour service rendu au Reich. Cette délirante prétention lui vient de l'Ancien Empire de Charles QUINT. Le Duce MUSSOLINI a, lui, déjà affirmé que le jour de la Victoire, la SAVOIE, le COMTE de NICE et la CORSE plus la TUNISIE lui reviendraient de plein droit. Le Vainqueur impose donc à la FRANCE une frontière artificielle qui sépare notre pays en plusieurs zones. La zone non-occupée reste sous l'autorité du Maréchal. Les autres étant dirigées par des gouverneurs militaires allemands. La ligne de démarcation coupe souvent en deux des communes aux hameaux dispersés. C'est une ligne abstraite dépendant de la seule volonté de l'occupant. "Achtung, Demarkationsline, Verboten". Aux points de passage, des soldats et douaniers allemands veillent sévèrement au contrôle. Bien entendu, la chronique journalière de Philippe HENRIOT à la radio ne mentionne jamais ces diktats du vainqueur qu'il persiste à présenter comme magnanime à notre égard. Le 2 Mars, une bonne nouvelle : LONDRES nous informe que le général LECLERC, à la tête des troupes Françaises d'AFRIQUE, vient de prendre KOUFRA en LIBYE contre la Sahariana Italienne. Pour cette première victoire, il prononce le serment de ne s'arrêter que sur les bords du RHIN. Le 14 Mars, c'est le Général MONCLAR qui entre en ÉRYTHRÉE avec la brigade d'Orient des F.F.L. Pour moi, le choix est fait. C'est la collaboration, sinon la FRANCE sera écrasée, disloquée et cessera d'être une nation. Amiral DARLAN - 12 Mai 1941 Le 25 Février, l'Amiral DARLAN remplace LAVAL et devient vice-président du Conseil. "L'Amiral qui n'a jamais vu la mer", disaient ses adversaires avant la guerre. Les Allemands boudent ce remplacement et durcissent leur attitude. La ligne de démarcation devient une véritable frontière. L'activité littéraire poursuit son cours sous le joug du censeur Otto ABETZ. Des écrivains célèbres, MAURIAC, Paul MORAND, CÉLINE, DRIEU la ROCHELLE, BRASILLACH, BENOIST - MÉCHIN, BÉRAUD continuent leurs oeuvres en parfait accord avec le nouvel ordre du Vainqueur. D'autres ont choisi la France Libre. Des tracts, des lettres, quelques revues imprimées sur ronéo puis, des livres :"Conseil à l'occupé", "Notre Combat" ,apparaissent dès cette année. Nous ne connaissons pas les auteurs pour des raisons de sécurité et nous avons bien du mal à nous les procurer. A LYON, un bulletin d'informations "Les Petites Ailes de FRANCE" nous donnent assez régulièrement l'autre version des événements et quelques vérités sur les occupants appelés Doryphores… Quand finira-t-elle cette République vérolée, vieille putain agonisante toujours debout sur son trottoir ? Elle est toujours là, la craquelée, sur le pas de sa porte pourrie jusqu'aux os. R. BRASILLACH. Les écrits de ces écrivains de l'ombre apportent la preuve qu'il existe une possibilité d'espérer envers et contre tout. De temps en temps, nous apprenons l'assassinat après tortures d'un de ces écrivains souvent livrés par des Français aux Allemands. La presse collabo s'en réjouit et les traite d'ignobles terroristes. Le livre reste cependant une denrée rare : pénurie de papier, imprimeurs prisonniers en ALLEMAGNE et, surtout, la censure. Les nazis spécialisés dans l'autodafé, depuis 1933, saisissent des millions de livres en quelques mois. Une liste signée d'Otto ABETZ envoyée aux libraires interdit les ouvrages anglais, polonais ou parlant des Juifs. Le livre "Pilote de guerre" de SAINT-ÉXUPÉRY est calomnié par BRASILLACH dans son journal "Je suis partout" parce qu'un pilote s'appelle ISRAËL. "Ce livre est l'apothéose du judéo-bellicisme de toutes les saloperies dont nous sommes en train de crever". Interdits aussi tous les ouvrages de la guerre 14/18, les histoires glorieuses, mêmes lointaines de la FRANCE et, bien sûr, André MALRAUX. Le nettoyage des cerveaux français a commencé. Il reste quelques bons auteurs neutres : Marcel RYME, Frison ROCHE, Albert CAMUS. Les théâtres affichent Sacha GUITRY, SARTRE, MONTHERLAND, GIRAUDOUX, ANOUILH. Le cinéma propose de bons films français mais, aussi, beaucoup d'allemands. Le 21 Avril, c'est le cinquante-deuxième anniversaire du FÜHRER. La YOUGOSLAVIE et la GRÈCE tombent à leur tour sous la botte allemande pendant que ROMMEL atteint la frontière égyptienne. Chez nous, le Onze Mai, sur proposition de Radio-Londres : "Les Français parlent aux Français", une manifestation a lieu devant le Monument de Jeanne-d'Arc à LILLE. Fou de rage, le Gauleiter MIEHOFF ordonne la confiscation immédiate de tous les postes de T.S.F. appartenant aux citoyens Français de LILLE et neuf communes environnantes. Un avis "BEKANNTMACHUNG" de l'Oberfeldkommandant est placardé sur les murs dénonçant la propagande étrangère et menaçant de lourdes représailles toutes nouvelles manifestations. Le Quinze Mai, cinq mille Juifs étrangers de PARIS sont dirigés sur des camps de concentration en FRANCE. Le journal Collabo "L'Oeuvre" déclare cette épuration nécessaire pour lutter contre le marché noir car, dit-il, on vient de prendre un Juif en flagrant délit. "Les ennemis du judaïsme... regardez-y de près, vous verrez que ce sont en général des ennemis de l'esprit moderne". Ernest RENAN. Cet enchaînement raciste ne soulève aucune protestation officielle du gouvernement de VICHY et prépare sans doute la méthode pour les Juifs Français et, finalement, tous les Français après la victoire nazie sur le monde. Le Vingt Mai, le Général STUDENT envahit l'île de CRÈTE avec ses célèbres parachutistes. Mais, cette nouvelle victoire allemande est la plus coûteuse pour la WEHRMACHT. Radio-Londres indique que les paras ont été accueillis par trente mille hommes qui les ont mitraillés en plein ciel. Les Allemands connaîtront une semaine meurtrière avant d'être renforcés par d'autres régiments qui parviendront à enlever la capitale de l'île et gagner la bataille grâce aux Stukas de la Luftwaffe. L'optimisme règne dans toute l'ALLEMAGNE et chez les collabos français. Un an après notre défaite, HITLER tient toute l'EUROPE de la NORVÈGE à la GRÈCE et du pays BASQUE à la MER-NOIRE. HAROLD-PAQUIS à "Radio Paris ment" , comme le dit Radio-Londres en bredouille de joie et prévoit le tour de l'ANGLETERRE pour bientôt. "Je ferai un EDEN des territoires russes pour les Colons Allemands lorsque j'aurai chassé les populations soviétiques vers l'ASIE." Adolf HITLER - 22 Juin 1941 Le fait marquant de la guerre aura lieu ce jour-là, vingt-deux Juin. Les séides français du REICH annoncent en première page de leurs journaux et à la radio l'Opération BARBORASSA. Par surprise, selon l'honneur allemand, un million et demi de combattants de la WEHRMACHT pénètrent en U.R.S.S. Les journaux nous relatent entièrement la déclaration faite après l'agression par le FÜHRER pour justifier son attaque. HITLER hurle à la radio de BERLIN : " Nos forces effectuent, en ce moment, la plus grande marche du monde pour anéantir le bolchevisme et conquérir notre espace vital. Dans trois mois, nous serons à MOSCOU et nos soldats fêteront Noël chez eux dans la paix retrouvée" La clameur démentielle du peuple allemand, en réponse à son FÜHRER, recouvre toute l'EUROPE occupée, sauf l'ANGLETERRE qui ose encore tenir tête au dictateur. Lors de nos réunions du Samedi, nous analysons tous les événements recueillis par le groupe et l'Abbé. Un fait apparaît. Comme NAPOLÉON, HITLER ne débarque pas en ANGLETERRE mais décide, cent-vingt-neuf ans après, d'envahir l'UNION SOVIÉTIQUE. L'Histoire recommence et nous espérons, quelques-uns, qu'elle ira jusqu'au bout de sa ressemblance. Ce dimanche-là, à trois heures du matin, plus de cent-vingt divisions attaquent férocement au Nord, au Sud et à l'Ouest. L'Armée finlandaise du Maréchal MANNERHEIM participe à la ruée. Et c'est encore la guerre éclair pour le début. Les Panzers foncent, invincibles, bousculant tout sur leur passage. La presse annonce les prises de KIEV, ODESSA, KHARKOV, RESTOV. LENINGRAD est encerclée, ainsi que plusieurs armées Russes. Au cinéma, les actualités nous montrent des milliers de prisonniers russes exténués, abrutis de fatigue et de faim par les combats que GOEBBELS présente comme des sous-hommes car il s'agit, aussi, d'une guerre raciale. HITLER a besoin de ces territoires pour instaurer l'hégémonie de la race aryenne. Ce nouveau combat de géants donne encore raison au discours du Général de GAULLE du 18 Juin 1940. Pourtant, le Premier Mai de cette année devant le défilé de la PLACE-ROUGE à MOSCOU, STALINE avait célébré la fête du travail dans l'amitié Germano-Soviétique. Cinq jours avant, Marcel DÉAT rendait encore hommage à STALINE : "C'est un grand Russe, il a su devenir l'ami de l'ALLEMAGNE". La guerre ne nous effraie pas, la RUSSIE des Soviets est née de la dernière guerre. L'EUROPE des Soviets naîtra de la prochaine. Joseph STALINE Dès le lendemain de l'attaque, dans son journal "L'Oeuvre" du vingt-trois Juin, il approuve HITLER dans son éditorial. "Nous nous trompions, l'habileté de STALINE n'était que duplicité et rouerie liées aux Juifs Américano-Anglais. La manoeuvre allemande est de premier ordre et nous rentrons enfin dans la vérité allemande pour nous débarrasser définitivement du bolchevisme". Cette nouvelle invasion des nazis libère définitivement la conscience des collaborateurs puisqu'il s'agit, maintenant, de sauver le monde du bolchevisme. Au tableau de chasse de leurs journaux et discours s'ajoutent les communistes qu'il convient de dénoncer selon les maîtres- chanteurs au pouvoir. Le journal "L'Appel" écrit : - Juifs, francs-maçonnards, Anglais et communistes ! Voilà l'infâme coalition! Charles MAURAS en zone non occupée est plus mesuré dans l'Action Française ! - Il ne faut pas sous-estimer la puissance de l'Armée Rouge ! Le Maréchal, fidèle à sa ligne de conduite, choisit de soutenir le REICH et rompt les relations diplomatiques, le trente juin, entre la FRANCE et l'U.R.S.S. Le bouffon du FÜHRER, le Duce MUSSOLINI promet une aide pour le front russe mais, son entourage fait savoir qu'il aurait déclaré en privé : - Je suis las d'être sonné ! Pour renforcer sa production militaire, l'ALLEMAGNE va faire appel à nos ouvriers spécialisés, en échange de nos prisonniers. Ce sera le chantage de la fameuse relève qui enchante Pierre LAVAL. La Légion des Combattants donne l'exemple et, à grand renfort de propagande, on voit aux actualités les premiers partant et le retour de quelques prisonniers adressant des louanges au bon Maréchal devant un parterre d'enfants chantant : "Maréchal nous voilà". Le Sept Juillet, Radio-Londres nous fait part de la prise du LIBAN par les Forces Britanniques et les Forces Françaises Libres. Nous saluons ce jour comme le navigateur après une nuit de tempête, salue l'aube qui lui montre la terre nouvelle qu'appelaient ses voeux. Jacques DORIOT. La création de la Légion des Volontaires Français L.V.F., le onze Juillet, marque un pas de plus dans la collaboration sans condition. Après l'attaque de l'U.R.S.S. par la WEHRMACHT, Jacques DORIOT décide d'un engagement français "aux côtés des Allemands pour défendre l'EUROPE contre MOSCOU." Un premier départ s'organise sous l'uniforme allemand. Comme pour la relève des prisonniers, la propagande stimule l'esprit de courage de ces jeunes inconscients. L'escalade se poursuit et rien ne semble pouvoir l'arrêter. Le silence du Maréchal encourage cette descente aux enfers pour ces jeunes engagés qui se laissent prendre par la magie des mots de l'odieuse et mensongère propagande nazie. Les Chantiers de Jeunesse du Général de la Porte du THEIL sont sollicités pour cette croisade mais, le Général antinazi contrecarre la propagande de Jacques DORIOT. Bien des jeunes des Chantiers de Jeunesse commencent, dès cette année, à rejoindre les montagnes pour échapper aux mauvais bergers. Les victoires remportées par la WEHRMACHT depuis notre défaite profitent encore à Marcel DÉAT, fondateur du Rassemblement National Populaire (R.N.P) pour une EUROPE Nationale Socialiste. Ce parti attire surtout des esprits simples et peu instruits dans l'espoir d'avantages matériels. Le vingt-deux Octobre, le beau temps de la Collaboration accepté par beaucoup et de l'Allemand correct est fortement perturbé dans un bain de sang. Un Officier Allemand, commandant la ville de NANTES, est abattu par deux jeunes gens. La réaction de l'Occupant est extrêmement rapide. HITLER exige qu'on fusille immédiatement cinquante otages et cinquante autres, trois jours après, si on ne retrouve pas les coupables. Les victimes désignées sont des communistes dénoncés et internés dans un camp puis, des anciens combattants dont un président d'association, grand mutilé de la guerre de 14 et décoré de la Légion d'Honneur. Tous ces otages n'ont aucun délit à se reprocher. Une affiche proclamant l'ordre d'exécution et le nom des premières cinquante victimes est placardée sur les murs de NANTES et de CHATEAUBRIAND. Elle promet aussi quinze millions de francs aux habitants de ces régions qui dénonceront les coupables. Je sens se lever un vent mauvais, le doute s'empare des Français, l'inquiétude gagne les esprits, un véritable malaise atteint le peuple Français. Philippe PÉTAIN - 12 Août 1941. Ce terrible placard, le premier, réveille bien des Français sur le sort qui les attend, en cas de victoire allemande. Cinquante fusillés, le jour même, pour un seul homme et autant dans trois jours : cela amoindrit la valeur du mot" Collaboration". C'est le début de l'action directe de la Résistance. Désormais, dans toutes les régions, des attentats ont lieu contre des militaires isolés. Sur les murs, dans la presse d'autres placards annoncent l'exécution de centaines d'otages innocents. Tous ces martyrs font prendre conscience, à la masse passive du vrai visage des nazis. "Civiliser le vainqueur !", a dit Pierre LAVAL, après la défaite. Mais se doute-t-il qu'après les Juifs Français, ce sera les Français tout court ? Après cela, la popularité du Maréchal, et surtout de son Gouvernement, continue de baisser avec le rationnement. Pour le peuple, la situation s'aggrave chaque mois, alors que nul n'ignore qu'en dehors du pillage fait par les Allemands, un trafic français du marché noir honteux enrichit un grand nombre de truands et diminue d'autant les rations. Les cultivateurs apprécient, dans une certaine mesure, cette époque qui leur donne toute leur importance. Ce ne sont plus des culs-terreux mais de braves paysans qu'il convient d'honorer. Pour beaucoup, la revanche est de faire payer le prix fort leurs précieuses récoltes qui alimentent le marché noir. Le retour à la terre, cher au Maréchal, est devenu le retour en arrière. Pendant ce temps, solidement installés dans les meilleurs hôtels de VICHY, les hauts fonctionnaires de l'État Français affichent un train de vie choquant dans cette époque de restrictions généralisées. Des Généraux, des Ministres festoient aux terrasses de restaurants affichant pourtant des menus squelettiques pour le commun des mortels. Rien ne manque pour ces messieurs qui nous font la morale, alors que la Gendarmerie française traque impitoyablement le citoyen coupable d'acheter quelques provisions, en dehors de ses tickets, pour survivre. Bien des Français arrêtés, pour cela, sont fusillés comme otage lors des actions clandestines de la Résistance contre l'Occupant. L'Armée Rouge est définitivement battue et ne se relèvera jamais. Adolf HITLER - 3 Octobre 1941 La guerre éclair prévue par HITLER, en RUSSIE, commence à faire long feu. La bataille "joyeuse et fraîche" de l'été n'a pas permis de prendre MOSCOU. Nous apprenons que l'avance en territoire Russe se poursuit au ralenti, dans la boue de l'automne. Le vingt-six Octobre, la WEHRMACHT met le siège devant SÉBASTOPOL. LENINGRAD n'a pas pu être prise. HITLER affirme pourtant à son peuple : "Au printemps prochain, nous détruirons une fois pour toute le bolchevisme !". Ces fanfaronnades sont immédiatement reprises par "Radio Paris Ment" et la presse collaboratrice qui en rajoute. Notre journal clandestin: "Les Petites Ailes" nous informe du mouvement "Combat", créé le premier Novembre, à GRENOBLE. Le sept se terminent les négociations Japon / États-Unis. Le Japon affirme une fois encore, avec de nombreuses courbettes, son désir de vivre en paix. Une bonne nouvelle de Radio-Londres, le onze Novembre, pour fêter l'Armistice de 1918: Les U.S.A. accordent la Loi "Prêt-Bail" au Comité National Français du Général de GAULLE. Le Vingt-Deux disparaît dans un accident d'avion le Général HUNTZIGER, au retour d'une mission, en AFRIQUE du NORD. Bien que Ministre de la Guerre du Maréchal PÉTAIN, le Général était hostile à la Collaboration et préparait, en secret, la revanche de l'Armée d'AFRIQUE contre l'ALLEMAGNE. Les raisons de l'accident de son avion ne seront jamais expliquées. Dès le Dix-Huit Novembre, les Forces Britanniques réorganisées en ÉGYPTE sous le commandement du Général AUCHINLECK, surnommé le "Pingouin", contre-attaquent ROMMEL ,le "Renard du Désert". L'attaque anglaise libère TOBROUK et repousse l'AFRIKAKORPS. CHURCHILL confirme l'importance de l'opération "CRUSADER".:" L'Empire a affronté les Allemands avec des armes nouvelles. Le temps est venu de frapper très fort pour la Victoire, la Patrie et la Liberté." La presse collabo, qui n'a aucun complexe, annonce que les formations britanniques ont été anéanties en LIBYE. "Monsieur Pierre LAVAL, vous vous vautrez dans la défaite comme un chien dans sa m... !". Déclaration du Général WEYGAND lors d'un Conseil des Ministres. "Le Petit Parisien" annonce le vingt-et-un Novembre que le Général WEYGAND prend sa retraite puis, est remplacé par le Général JUIN, nommé Commandant en Chef en AFRIQUE du NORD. Cité à l'Ordre de la Nation. le Maréchal explique que la tâche de WEYGAND est terminée. D'autres sources nous apprennent qu'en réalité WEYGAND est évincé, démis de ses fonctions sous la pression conjointe de DARLAN et des Allemands. WEYGAND, de tendance modérée, bien qu'étant favorable à l'Armistice, a toujours empêché le pays de sombrer dans la Collaboration totale. Il conserve des relations personnelles avec les États-Unis. Ainsi, le dernier neutraliste est écarté du Gouvernement de VICHY. La reprise des relations, au sommet, satisfait toujours certains Français naïfs, accrochés à l'espoir d'une amélioration de leur sort. Pour rencontrer GOERING à SAINT-FLORENTIN en BOURGOGNE, le premier décembre, le Maréchal a sacrifié WEYGAND. Les Philippe HENRIOT et consorts ont pourtant exalté toute l'importance de cette rencontre. C'est nous, les vainqueurs, ne l'oubliez jamais. Maréchal GOERING - 1er Décembre 1941. Retour anticipé des prisonniers, mesures économiques et sociales pour faire accepter la Collaboration à une population de plus en plus inquiète. Rien de tout cela n'est accepté, ce qui n'est pas sans surprendre lorsque l'interlocuteur est le Maréchal GOERING, fanfaron, gonflé au propre et au figuré de son importance, et ne sachant que répéter : "C'est nous, les vainqueurs !". Ceci est un bel exemple de la Collaboration proposée avec un vainqueur en haut et un vaincu en bas. De toute façon, le REICH se moque maintenant de cette Collaboration "à la petite semaine". Il lui suffira, à l'avenir, d'exiger ce qu'il a d'ailleurs toujours fait. Une histoire circule entre nous à ce sujet. Un Français demande à un Allemand : "Comment voyez-vous la Collaboration ?". L'Allemand répond : "C'est très simple, vous me donnez votre montre et moi, je vous donne l'heure!". L'anéantissement du régime bolchevique et la déportation de ses peuplades vers l'ASIE donneront à la GRANDE-ALLEMAGNE son espace vital pour une paix de mille ans. Dr Joseph GOEBBELS. Les actualités et la presse montrent, à grand renfort de films et de photos, la conquête totale de l'UKRAINE. HITLER donne l'ordre de prendre MOSCOU. Sans un jour de repos depuis le début de la campagne, les soldats repartent en chantant sur leurs Panzers pour ce dernier combat. La prise de MOSCOU signifie pour eux la victoire et la fin de la guerre. GOEBBELS et DORIOT se donnent rendez-vous sur la PLACE-ROUGE pour fêter Noël. Les Anglais, qui aident en matériels les Russes, ont maintenant des observateurs à MOSCOU et nous connaissons une autre vérité par sa radio. Après la saison des fortes pluies de l'automne, l'hiver apparaît brutalement avec moins vingt degrés. Les Allemands sont maintenant à trente-cinq kilomètres de MOSCOU. Trois Armées se rassemblent, avec un énorme matériel, pour lancer l'ultime offensive le cinq Décembre. Ce jour-là, la température tombe à moins quarante degrés. La WEHRMACHT est gelée sur place et ne peut plus exécuter les ordres lancés par HITLER. Fou de rage, le FÜHRER limoge des Généraux et exige la prise de MOSCOU immédiatement. Pendant ce temps, STALINE fait venir ses troupes d'élite sibériennes stationnées en ASIE. Ces nouvelles troupes fraîches, bien équipées, déclenchent malgré le froid mortel des contre-offensives successives décimant les éléments avancés de la WEHRMACHT. Les pertes en hommes et matériels des Allemands deviennent catastrophiques et HITLER est obligé d'accepter un ordre de retraite. Son Armée recule d'une centaine de kilomètres et s'enterre en attendant que l'hiver passe. C'est le six Décembre, le thermomètre est descendu à moins cinquante degrés. Hier, Sept Décembre 1941, un jour qui restera à jamais marqué d'infamie, les ÉTATS-UNIS ont été l'objet d'une attaque brutale et délibérée. F.D. ROOSEVELT. Sept Décembre, attaque surprise de PEARL HARBOR par les Japonais. La presse et la radio se déchaînent : "Le grand axe BERLIN, ROME, TOKYO va enfin en terminer une fois pour toute avec la Juiverie internationale".Peu après, l'Île de WAKE capitule. Les PHILIPPINES sont envahies et l'Armée Nippone débarque en MALAISIE. C'est la plus grande invasion que l'on connaît depuis des siècles. Au cinéma, les actualités nous montrent le désastre de la base militaire américaine. Les avions japonais déversent des tonnes de bombes sur le port et la ville. Nous voyons également les accords militaires signés entre les Généraux Japonais et Allemands. L'arrogance de ces visages rigides fige sur l'écran toute la cruauté et la férocité de ces barbares inhumains annonçant l'esclavage, sans espoir, pour le monde si ces monstres deviennent les maîtres. Cette fois, la prédiction du Général de GAULLE est devenue une réalité. Le monde entier est en guerre. Avec la fin de cette deuxième année d'occupation, nous savons maintenant que l'AMÉRIQUE n'est plus neutre et que le miracle de notre délivrance viendra de là. Nous avons l'occasion de détruire la FRANCE, elle le sera. Son âme, surtout, nous la pourrirons par nos sourires. Nous guérirons l'EUROPE de cette peste. Wir prellen sie, nous les bernons. VERCORS - "Le silence de la mer". 1942 Très calme, l'Abbé CARRIOUX alluma sa pipe tranquillement et nous passa son paquet de tabac gris. Lorsqu'il parla, on devina aussitôt que son calme n'était qu'apparent. - "MARCEL et FERNAND sont venus me voir cette semaine. Ils montent à PARIS pour s'engager à la Légion des Volontaires Français de DORIOT. Je pense qu'ils sont déjà en ALLEMAGNE pour leur formation !". L'Abbé observa longtemps le silence. Peut-être priait-il pour nos deux camarades ? Ses mains crispées se détendirent un peu. - "Je n'ai rien pu faire ! Pour eux, je ne suis qu'un prêtre communiste qu'il faudra tôt ou tard éliminer. Je pense qu'il convient, maintenant, de cesser nos réunions pour votre sécurité !". Sa voix est lasse, malheureuse et son regard au bord des larmes. Nous sommes partis, comme en exil, aussi malheureux que lui. Dans la rue obscure et vide, les murs lépreux traquent notre génération, avec ses affiches officielles, nous conviant à rejoindre la Légion des Volontaires contre le bolchevisme. D'autres affiches incitent le travail en ALLEMAGNE bien payé, dit l'annonce. Le tout reconnu d'utilité publique par un décret du Gouvernement de VICHY. La radio dégouline de sermons définitifs sur le devoir d'aider le vainqueur et de faire confiance au Maréchal. - "Ils gagneront la guerre !, affirment DORIOT et DARNAND, et la FRANCE devra sa survie à ceux qui les auront aidés !". La littérature collaborationniste, d'un certain talent, détermine des jeunes avides d'un idéal. - "Pour une FRANCE dans l'EUROPE nouvelle pure et dure !". La chronique quotidienne de PHILIPPE HENRIOT complète cette attirance dangereuse. Lentement, mais inexorablement, les mots pénètrent certains esprits faibles, déjà influencés dans leur famille ou tout simplement en révolte contre elle. DRIEUX LA ROCHELLE, CÉLINE, BRASILLACH : des maîtres à penser qui enchaînent leur volonté dans un abîme vertigineux ne permettant plus aucune analyse raisonnée. Tel que de porter l'uniforme ennemi. Nous autres Allemands, nous sommes le peuple des seigneurs (Herrenvolk) pour lequel doivent travailler les autres peuples qui nous serviront de manoeuvres. Adolf HITLER. Le destin les attend sans doute à ce tournant de leur vie pour les conduire, en aveugle volontaire, vers le sacrifice inutile de leur jeune vie. L'arbitraire inhumain de ce régime nazi expansionnisme d'esclavage, de rapines dans les pays qu'il occupe, la déportation des personnes juives et autres minorités dont on ne connaît pas encore la finalité. L'ALLEMAGNE se donne pour cela autant de mal à dissimuler la face cachée de son régime de terreur que pour mettre en valeur son soi-disant héroïsme à défendre l'EUROPE menacée, selon elle, par les hordes russes. Et, pourtant, le FÜHRER lui-même parle d'abord d'espace vital pour ses colons Allemands. MARCEL et FERNAND n'ont pu percevoir, dans les hommes de VICHY qu'ils ont choisi, l'ignominie de leurs discours. La totale collaboration avec l'ennemi de notre pays, dont le but réel est d'amener celui-ci à un réservoir d'hommes sous-développés en détruisant sont potentiel intellectuel dont il est jaloux. Même si la RUSSIE des Soviets va à l'encontre de notre forme de démocratie, la peur de ce régime ne peut faire admettre l'effroyable dictature nazie. Le vingt Janvier, la Police parisienne prête serment de fidélité au Maréchal PÉTAIN. Pierre PUCHEU, Ministre de l'Intérieur, représente à PARIS le Maréchal. Cette cérémonie, une de plus, contribue d'abord à édifier le culte du Maréchal, mais permet surtout, au nom de ce serment, de traquer les Résistants et dénoncer les Juifs aux Allemands, en toute bonne conscience, puisqu'on a prêté serment. "Je reviendrai !". Serment du Général MAC-ARTHUR après la défaite de COOREGIDOR et de la presqu'île de BATAAN. La guerre éclair japonaise continue avec des victimes spectaculaires. Les racistes Allemands craignent, finalement, que le grand vainqueur de l'AMÉRIQUE ne soit un peuple de couleur. Les Jaunes marchent au feu comme à une cérémonie religieuse. C'est la grande croisade où on meurt avec joie pour l'Empereur. Le Lieutenant-Général PERCIVAL doit se rendre après un siège, en règle, à SINGAPOUR. Notre presse présente, avec délectation, la photo de la reddition qui devient le symbole de la plus irrémédiable des défaites de l'Occident. Puis tombent BORNÉO, MINDANAO, BALI, SUMATRA et toute l'INDONÉSIE Hollandaise et Britannique avec JAVA. Deux grands empires européens, établis depuis trois siècles, sont détruits. C'est la colossale revanche de l'ASIE, des Jaunes sur les Blancs. Le Général MAC-ARTHUR est rappelé pour ne pas tomber aux mains de l'ennemi. Avant de partir, il affirme devant ses troupes qu'il abandonne aux Japonais : "Je reviendrai !". Les informations du vingt-huit Février font état d'un raid britannique sur DIEPPE. Les Allemands affirment avoir détruit les commandos anglais et repoussé le débarquement. Radio-Londres nous explique, le lendemain, l'importance du raid qui a permis de démonter un radar installé sur la Falaise de BRUNEVAL. Le vingt-huit Mars, l'opération "CHARIOT" sur SAINT-NAZAIRE prouve que les défenses du REICH ne sont pas invulnérables. Cette action suicide permet aux Anglais de faire sauter l'une des plus importantes bases navales de la KRIEGSMARINE. Un destroyer bourré d'explosifs est échoué malgré les tirs meurtriers de l'adversaire, devant la grande cale sèche du dock principal où a été construit le paquebot NORMANDIE avant la guerre. Après le repli des Forces Britanniques, de nombreux Allemands montés à bord du destroyer échoué disparaîtront dans la formidable explosion du navire. La presse Collabo se contente de nous répéter servilement le communiqué de victoire du REICH. Car chacun a sa vérité puisque le Maréchal haït les mensonges. "PÉTAIN, Ministre de la Guerre en 1934, avait déclaré non dangereux le secteur de SEDAN par lequel s'est infiltré l'ennemi en 1940." DALADIER ;au procès de RIOM. Ordonné en Mille Neuf Cent Quarante-et-Un, le procès de RIOM a pour mission de juger les hommes politiques et certains Généraux qui n'ont pas accepté l'Armistice, sur leurs responsabilités, dans la défaite. En réalité, ce sont les Allemands qui veulent faire proclamer, par l'Autorité Française, la responsabilité de la FRANCE dans la guerre. Pressé par le vainqueur, toujours sous le prétexte de préserver notre pays, le Maréchal exige personnellement la détention immédiate, en enceinte fortifiée, des Présidents DALADIER, BLUM, REYNAUD, des Ministres MANDEL et de la Chambre, ainsi que du Général GAMELIN. Les audiences de la Cour commencent le dix-neuf Janvier et la presse est invitée à orienter les esprits sur l'impréparation de la guerre en enlevant à l'Armée toute responsabilité, puisqu'elle n'avait pas les moyens nécessaires de faire une guerre moderne. Mais, les accusés présentent une défense serrée et deviennent finalement les accusateurs de ceux qui les poursuivent. DALADIER produit des chiffres et rappelle qu'en Mille Neuf Cent Trente-Quatre, le Maréchal PÉTAIN, Ministre de la Guerre, a déclaré non dangereux le secteur de SEDAN. Dans un discours enragé, HITLER reproche au Gouvernement de VICHY d'escamoter la responsabilité de la déclaration de guerre pour ne juger que son manque de préparation. Il désire un procès politique et, comme d'habitude, ces Français ne lui offrent qu'une pantalonnade ridicule. Le procès est finalement annulé sur ordre d'HITLER. Présenté au début comme celui du siècle par la presse, il s'achève sans conclusion. Les accusés restent cependant en prison, puis livrés à l'ennemi. Les durs de la Collaboration totale ne sont pas satisfaits, espérant des peines de mort pour ces "Sales Républicains". Il fallait juger la "sale affaire déclenchée" et non pas la "sale affaire mal terminée". Le Treize Décembre Mille Neuf Cent Quarante, le Maréchal avait fait arrêter et mis en résidence surveillée Pierre LAVAL, remplacé le Vingt-Cinq Février Mille Neuf Cent Quarante-et-Un par l'Amiral DARLAN. PÉTAIN ne supportait plus la forte personnalité trouble de son Premier Ministre. Sa collaboration, à tout prix avec le vainqueur, indisposait également certains Ministres et beaucoup de Français. Nous sommes donc surpris, ce Vingt-Six Mars Mille Neuf Cent Quarante-Deux, d'apprendre la rencontre du Maréchal avec LAVAL dans la forêt de RANDOM. Je souhaite la victoire de l'ALLEMAGNE Pierre LAVAL - 18 Avril 1942. Par des indiscrétions de fonctionnaires à VICHY, nous savons que l'Amiral DARLAN a déplu aux Allemands en autorisant les navires Américains à patrouiller au large des ANTILLES, tout près de la MARTINIQUE et de la GUADELOUPE. Le Vingt Mars, GOERING rencontre LAVAL et, dit-on alors, c'est l'ultimatum.- "Je jugerai, dit HITLER, si la FRANCE préfère l'Armistice des ÉTATS-UNIS ou celle de l'ALLEMAGNE si Pierre LAVAL ne revient pas au Gouvernement Français !". Le Dix-Huit Avril, PÉTAIN le nomme Chef du Gouvernement et, dans une allocution à la radio, affirme que LAVAL est son ami et qu'il a toute sa confiance. Pierre LAVAL jouit de sa victoire et s'adresse aux Français pour faire l'apologie de sa politique de Collaboration.- "Sans mon retour, des mesures de contraintes vis-à-vis de la FRANCE allaient s'aggraver !". Pour les Allemands, c'est aussi la victoire. BERLIN rappelle la politique de MONTOIRE et souhaite une épuration intérieure de la FRANCE dans l'intérêt du nouvel ordre européen. Avec le retour de LAVAL, le Maréchal perd un peu plus de son autorité morale. Les U.S.A. ne lui pardonnent pas d'avoir cédé aux Allemands et rappellent leur ambassadeur : l'Amiral W.D. LEALY. Ainsi, les derniers liens avec les Alliés sont rompus. En zone occupée, toutes les Polices du REICH recherchent le Général GIRAUD, évadé le Dix-Sept Avril de la forteresse de KOENIGSTEIN-an-der -Elbe. Sa tête est mise à prix : cent-mille marks. Aidé de deux autres Généraux prisonniers, nous apprendrons qu'il a tressé une corde en cachette, pendant un an, pour descendre la falaise de quarante-cinq mètres qui le sépare de la rue. Grâce à de faux papiers, à sa connaissance de l'allemand, il échappe aux recherches. - "Ramenez-le mort ou vif !", ordonne le Maréchal KEITEL. GIRAUD, soixante-trois ans, cinq étoiles, est le plus fort en grade de tous les prisonniers de guerre. Pour LAVAL, GIRAUD est dangereux et il lui demande de se rendre aux Allemands pour éviter des représailles. - "Je me rendrai si on libère cinq cent-mille prisonniers Français!". La colère des Allemands augmente à cette proposition et KEITEL donne l'ordre de le liquider physiquement. Le lendemain, le Général GIRAUD rejoint, en secret, l'ALGÉRIE à bord d'un sous-marin. L'enjeu de cette guerre est claire pour tous les Français. C'est l'indépendance ou l'esclavage. Chacun a le devoir de contribuer à libérer la Patrie par l'écrasement de l'envahisseur. Manifeste du 23 Juin 1942 — CHARLES de GAULLE. Le premier convoi de déportés raciaux quitte la FRANCE pour l'EST. Les Allemands affirment que des camps de travail les attendent en POLOGNE. Dans nos squares, des statues de bronze disparaissent, la collecte du cuivre et du nickel commence. Rien n'est épargné, même les dessus de nos bars en zinc de nos bougnats iront rejoindre l'effort de guerre de nos vainqueurs. Ceux-ci semblent, maintenant, manquer de matière première et cela nous réjouit. Une annonce anodine de la presse signale simplement que cinq communistes ont été fusillés à PARIS pour l'assassinat d'une sentinelle allemande. Suite à ce nouveau cas de révolte, la GESTAPO s'installe officiellement dans toute la zone occupée. Le lendemain, un Officier de la WEHRMACHT est abattu dans la station du métro Molitor et pour cela, aussi, le Général S.S. OBERG dirigera, à l'avenir, le Commandement des unités S.S. en FRANCE. Le Dix-Huit Avril : premier bombardement américain sur TOKYO annoncé par Radio-Londres. Le Vingt-Sept, la presse signale le raid d'un commando britannique à BOULOGNE-sur-MER. "Les Petites Ailes", que nous recevons de plus en plus difficilement, affiche la création du mouvement de Résistance et Maquis des francs-tireurs Partisans Français du Parti Communiste clandestin. Ce mouvement semble copié sur les partisans soviétiques que le bulletin "L'HUMANITÉ" a signalé à plusieurs reprises. Le mot "partisan" viendrait de la retraite de RUSSIE, en 1812. Des Cosaques et des troupes légères dénommées "Partisans" harcelaient les arrières de la grande armée de NAPOLÉON. Les consignes, pour les F.T.P.F., sont d'interdire tout repos à l'Occupant et obliger celui-ci à maintenir des troupes en alerte pour protéger les voies ferrées et les Postes de Commandement. Autant de soldats indisponibles pour le front de l'EST. En combattant pour défendre leur mode de vie, les RUSSES défendent aussi le nôtre. Je ne suis pas communiste, mais les communistes ne sont différents de personne et les mères Russes pleurent leurs fils qui meurent pour nos libertés. CHARLIE CHAPLIN - 1942 - Après l'échec total de la bataille pour MOSCOU et, malgré la voix arrogante de GOEBBELS affirmant après celle d'HITLER, que la capitale Russe tomberait au printemps, la WEHRMACHT reçoit l'ordre de prendre d'abord la CRIMÉE, le CAUCASE et tout le Sud de la RUSSIE. La nouvelle campagne, de cette année, débute au mois de Mai avec deux-cent quarante divisions comprenant des Hongrois, Roumains, Italiens, Slovaques, Espagnols et Finlandais. Des mortiers de huit-cents millimètres, tirant des obus de quatre tonnes, ont raison de la forteresse de SÉBASTOPOL. Cent-cinquante mille tués et prisonniers Russes donnent au vainqueur Von MANSTEIN le bâton de Maréchal. Le Général Von PAULUS arrive avec sa quatrième Armée sur la VOLGA à DOUBOUKA. Son objectif : STALINGRAD qu'il doit conquérir à tout prix. Au début de cette nouvelle bataille, HITLER, dans un long discours reproduit en entier par la presse de VICHY, déclare :- "Les hordes Russes seront, cet été, battues et anéanties !Ce sera l'année des plus longs combats que l'Histoire ait connus et nous remercions la Providence de nous permettre de résister victorieusement à la coalition du marxisme juif et du capitalisme réunis.." Nous profitons d'un enterrement pour revoir l'Abbé CARRIOUX et sommes persuadés, avec ANDRÉ, qu'il est responsable d'un mouvement de Résistance. L'annonce de la nomination de SAUCKEL, planificateur général pour le recrutement de la main-d'oeuvre, laisse prévoir qu'une action se prépare pour obliger les jeunes à partir en ALLEMAGNE. C'est aussi l'avis de l'Abbé. Sur notre insistance, il accepte de nous recevoir :- "Je suis sûr, nous dit-il, que nous allons vers des événements très durs. Le Maréchal ne contrôle plus la situation et se laisse imposer de plus en plus une politique de Collaboration totale par LAVAL, DARNAND et DORIOT!". L'année d'Armistice, dirigée par le Général VERNEAU, reste encore un élément sûr et peut, le moment venu, jouer un grand rôle pour la libération du pays. Je connais personnellement le Capitaine SARTOU du Jonchay du Onzième Régiment de Cuirassiers. Un engagement dans cette Armée serait le meilleur moyen d'éviter l'ALLEMAGNE à moyen terme. "Toujours au chemin de l'honneur". Devise du Onzième Régiment de Cuirassiers. LYON - La Part Dieu - AVRIL 1942. Notre décision est vite prise ; pour nous, l'Abbé est un homme sans équivoque sur le devoir et sa proposition n'est pas gratuite. C'est certainement le meilleur moyen de préparer la revanche et de nous enrôler pour cela. Bien que n'ayant pas encore dix-huit ans, notre engagement est accepté et, par ce beau jour de printemps, alors que CHARLES TRÉNET chante à la radio : "La romance de PARIS", nous franchissons la porte de la grande et vieille caserne de LA PART DIEU. L'accueil est bon enfant, détendu. Les sous-officiers sont très jeunes et s'adressent à nous, sans autorité excessive. Intégrés au Quatrième Escadron, Deuxième Peloton, l'entraînement sur le terrain se fait à grande vitesse. Exercices, corvées, théories. En trois mois, le Peloton est capable de démonter et remonter les yeux bandés : les mitrailleuses HOTCHKISS, les mortiers BRANDT, le fusil-mitrailleur BRAN, parer à l'attaque d'une arme blanche et jeter le plus loin possible une grenade OF 37. La nuit, plusieurs fois par semaine, c'est la garde d'écurie et pansage. Ce sont des petits chevaux arabes entiers, difficiles à maîtriser, au début. Les "Classes" sont terminées. Pour sa bonne conduite, le Colonel SCHWARTZ, entouré de son état-major, nous remet la fourragère de la Croix de Guerre que le Onzième Régiment de Cuirassiers a mérité sur le front de 1940. Puis, ce sont les grandes manoeuvres. Nous partons camper dans les ALPES pour deux mois. Manoeuvres de nuits et de jours, les Blancs contre les Rouges. C'est l'été, il fait très chaud. Les marches sont épuisantes, mais nous chantons : "Les Allobroges" et "Vous n'aurez pas l'ALSACE et la LORRAINE" avec enthousiasme, heureux de l'effort accompli. Le Capitaine SARTOU DU JONCHAY, nous prépare au pire car, dit-il, un jour, il faudra bien redevenir libre. Les grandes manoeuvres vont se terminer. Avec ma section, nous sommes arrivés au sommet du Mont REVARD qui domine AIX-LES-BAINS. Le Lieutenant m'assigne un poste d'observation, sur le toit d'une vieille maison abandonnée. Les vieilles tuiles branlantes sont encore recouvertes de rosée. Presqu'au faîte du toit, je glisse et c'est la chute. Je reprends connaissance, à l'Hôpital de CHAMBÉRY, avec une fracture de la cheville et du poignet. Nous remplissons notre mission depuis quatorze nuits et quatorze jours. Plus les jours passent, plus ce sera dur, mais ceci n'est pas pour faire peur à la Première Brigade de la France-Libre. Général KOENIG à BIR-HAKEIM. Début Juin, la France-Libre a prouvé son courage à BIR-HAKEIM. Le Général KOENIG dirige alors la Première Brigade des F.F.L. Quatre bataillons groupent des unités d'Infanterie de Marine, des Tirailleurs et la Treizième demi-brigade de Légion Étrangère. Celle-ci, expédiée en NORVÈGE en 1940, a rejoint LONDRES et constitue les premiers éléments des Forces Gaullistes. Refusant trois ultimatums de ROMMEL, KOENIG permet aux Alliés de renforcer leurs lignes. L'opération "VENEZIA" de l'AFRIKAKORPS a pour objectif la reprise de la ville par tous les moyens. L'artillerie pilonne la position française, en alternance, avec les bombardements des STUKAS. Puis, l'Infanterie allemande attaque, mais les Français-Libres détruisent l'ennemi, chaque fois qu'il se présente. Les munitions s'épuisent, le Général KOENIG reçoit alors l'ordre du Commandement Allié de se replier. Malgré la pression ennemie de plus en plus forte, la majorité de la Brigade réussit à passer. Six-cents Français-Libres tombent morts ou blessés, mais la Première Brigade des F.F.L. n'a pas cédé et remporte ainsi une grande victoire. Dans son Ordre du Jour, le Général ROMMEL reconnaît "qu'une fois de plus, la preuve est faite qu'un chef décidé, le Général KOENIG, peut réaliser des miracles, même si la situation est désespérée". De LONDRES, le Général de GAULLE fait parvenir un message de félicitations : "Sachez que toute la FRANCE a les yeux fixés sur vous et que vous incarnez sa fierté retrouvée". La presse Vichyste célèbre la victoire des Allemands et méprise les troupes "mercenaires" Françaises sous les ordres d'Officiers "félons" de de GAULLE. Le Dix-Neuf Août, la presse nous présente comme aussi une grande victoire allemande l'échec d'un débarquement Américano-Anglo- Canadien à DIEPPE. Ce jour-là. Radio-Londres confirme de lourdes pertes, mais affirme qu'il ne s'agissait que d'une opération pour tester le fameux mur de l'ATLANTIQUE. La revue allemande "SIGNAL" en profite pour accentuer sa propagande de l'invincibilité du "mur". Exagérant sa victoire, elle parle de milliers de morts et prisonniers et montre d'abondantes photos prises après le raid. Mieux vaudrait une FRANCE morte que vendue, on pourrait pleurer sur elle, mais la FRANCE qui trahit l'espoir des opprimés nous dérobe jusqu'à nos larmes. 1942 - Pasteur ROLAND de PURY - LYON. L'Église Catholique accueille favorablement le nouveau pouvoir, se réclamant officiellement de DIEU, après soixante-dix ans de République souvent anticléricale. En 1942, le retour de LAVAL, l'évolution de l'opinion publique et surtout les persécutions contre les Juifs lui font prendre ses distances. Des Bénédictins se font passeurs pour permettre aux Juifs de rejoindre la zone libre. D'autres religieux frayent un passage vers la SUISSE aux persécutés. A TOULOUSE, Monseigneur SALIÈGE fait lire, dans ses paroisses, une lettre pastorale dénonçant l'anti-judaïsme et organise une oeuvre d'Assistance permettant de cacher mille cinq-cents enfants. A LYON, le groupe "AMITIÉS CHRÉTIENNES" réussit à placer des centaines d'enfants dans des familles. Les nazis réclament ces enfants et font arrêter son animateur : l'Abbé CHAILLET. La Communauté Protestante protège aussi des enfants et des centaines de familles. Des prêtres sont arrêtés par la Police Française et fusillés par la GESTAPO pour leur "pro-sémitisme". Dès cette année, le Treize Mars, le Grand-Rabbin de PARIS déclare : - "Jamais le Judaïsme ne pourra être assez reconnaissant de tout ce que font pour nous prélats, prêtres, pasteurs, fidèles catholiques et protestants !". Le Vingt-Sept Mai, Reinhard HEYDRICH, Adjoint de HIMMLER, "protecteur" de la TCHÉCOSLOVAQUIE, est abattu par des Résistants Tchèques à PRAGUE. Pour se venger, des centaines de familles sont fusillées sur son ordre. La réaction du FÜHRER est terrible : cent Tchèques exécutés le lendemain, dix-mille déportés et le village d'un Résistant entièrement brûlé et rasé au bulldozer. ... alors la FRANCE devient terre de pogrom, terre de honte. On arrête, on déporte. Il ne faut pas laisser faire ça, une grande heure humaine vient de sonner. Français, faites la chaîne des braves gens. 1942 - André LABARTHE. L'ignominie de nos vainqueurs, avec le triste et criminel consentement de notre pouvoir, atteint le sommet lorsque l'Ordonnance du Vingt-Neuf Mai oblige les personnes Juives à porter l'étoile jaune. Les Commissariats délivrent l'étoile obligatoire et exigent, en échange, un point de la carte textile. Cet insigne facilite leur déportation et permet de leur interdire la fréquentation des piscines, restaurants, cafés, théâtres, cinémas, stades et téléphones publics. La dernière voiture du métro leur est réservée et les magasins ne doivent les servir qu'en fin de journée, alors qu'il sont vidés de leurs marchandises dès la fin de la matinée. Avec ANDRÉ et l'Abbé CARRIOUX , nous pensons que, pour cela, il n'est plus possible de pardonner aux êtres ignobles qui appliquent ou cautionnent cela. Le Trente-et-Un Mai, à PARIS, des dizaines de femmes attaquent un magasin d'alimentation réservé aux Allemands. Organisée par la Résistance, cette manifestation veut faire comprendre l'insupportable rationnement imposé. La Police Française charge violemment les femmes dont plusieurs arrêtées sont condamnées à mort par la Cour Spéciale de PARIS. Le lendemain, des chars Allemands patrouillent dans les rues, des affiches menacent de mort les manifestants éventuels. Malgré ces mesures, d'autres femmes se réunissent et lancent le slogan : - "Pas un Français ne doit partir travailler pour les boches, empêchez vos maris de partir en ALLEMAGNE !"Cette fois, une riposte s'organise contre la charge de la Police, deux agents Français et un Officier Allemand laissent leur vie sur le trottoir. A LYON, les animateurs du groupe "COLLABORATION" tentent de propager l'idéologie nazie par le biais de la "KULTURE". Ils organisent, ce jour-là, à la salle RAMEAU un concert de l'orchestre de BERLIN dirigé par le Maître Allemand KRAUSS. La Résistance loue, à l'avance, toutes les places dans le but de saboter le concert avec une salle vide, mais la consigne s'est ébruitée, de nouvelles locations sont effectuées sous contrôle. "La FRANCE se couvrira, s'il le faut, de camps de concentration et des pelotons d'exécution fonctionneront en permanence. Le nouveau régime se fera aux forceps et dans la douleur" Marcel DÉAT - Ministre de la Solidarité Nationale à VICHY. Alors, la Résistance organise, le soir du concert, une grande manifestation devant la salle RAMEAU. Des centaines de personnes, dont de nombreux Alsaciens réfugiés à LYON, défilent dans les rues en chantant "LA MARSEILLAISE". La Police Française charge : deux-cents arrestations. Bien que le Préfet ANGELI ait donné pour consigne, aux policiers, de favoriser la fuite aux plus grand nombre possible de manifestants. Radio-Londres, puis les tracts de la Résistance proposent de fêter le Quatorze Juillet en se rassemblant à dix-huit heures pour crier : - "Vive la liberté !". Dans toutes les villes, la consigne sera respectée en majorité. Dans LYON pavoisé, le centre est en état de siège. La Police et le Service d'Ordre Légionnaire S.O.L. de DARNAND préparent la riposte. De PERRACHE aux Terreaux et de la Charité aux quais, la Police a barré les rues. A dix-sept heures, la foule déferle dans les artères menant à la Place CARNOT, où se dresse la Statue de la République. Puis "LA MARSEILLAISE" éclate. Les policiers, qu'excite la GESTAPO, chargent et les arrestations à coups de matraques commencent. La foule, qui vient de dresser une banderole "Vive la FRANCE", s'étend maintenant jusqu'aux Terreaux où le Monument à la Gloire des S.O.L. est mis en miettes. Des bérets S.O.L. flottent dans la fontaine de BARTOLDI, le père de la Statue de la Liberté à NEW-YORK. Chaque ouvrier français, se rendant en ALLEMAGNE, libère un ouvrier allemand pour le front russe. La relève n'est que la traite des Blancs. 13 Août 1942 - Maurice SCHUMANN L'offensive de la WEHRMACHT, en RUSSIE, continue. Pour l'armement, un effort considérable est fait. Un nouveau char "TIGRE", de soixante tonnes muni d'un canon de quatre-vingt huit millimètres, est présenté à la presse. D'autres chars "LA PANTHÈRE ET LE LÉOPARD" sortent aussi des usines souterraines, sous l'impulsion du Ministre SPEER. Celui-ci cravache l'économie du REICH avec les déportés du travail de l'EUROPE soumise, fournis par le Gauleiter SAUCKEL. Mais, nous apprenons que les Russes ne perdent pas leur temps. Après l'angoisse de Novembre dernier, MOSCOU sauvé, l'industrie soviétique fournit, elle aussi, le même effort, aidée par les Alliés qui les ravitaillent par l'envoi de matériel jusqu'au port de MOURMANSK, malgré les attaques de la marine allemande. La bataille de KHARKOV se termine encore à l'avantage des Allemands et, le Vingt-Cinq Août, le drapeau à croix gammée flotte sur la plus haute montagne du CAUCASE : l'ELBROUZ, cinq mille six-cents vingt-neuf mètres. Toutes les tentatives de sorties de la garnison de LENINGRAD se heurtent aux formidables positions organisées par la WEHRMACHT et les revues allemandes montrent un échantillonnage de leurs moyens diaboliques, parmi lesquels des mines sauteuses. Mais, Von PAULUS rencontre la première Résistance sérieuse devant STALINGRAD. L'Occident est en danger le peuple Allemand met tout son sang dans la guerre, il est normal que le reste de l'EUROPE mette son travail à sa disposition. Joseph GOEBBELS - 1942 - Début Septembre, le Médecin-Major de l'Hôpital m'informe que mes fractures sont consolidées et m'accorde une permission de convalescence. Je me présente à mon Régiment et apprends que je suis inscrit, avec ANDRÉ, au Peloton d'Élèves Brigadiers. J'obtiens l'annulation de ma convalescence pour commencer les cours avec mes camarades. L'entraînement est très dur : Manège de chevaux tous les matins à six heures, manoeuvres dans la baie et exercices de commandement sur le terrain ; le soir : théorie sur le Règlement et les connaissances du Service. Le Lieutenant DELLY, qui commande notre Peloton, exige de nous la perfection. Je fais de mon mieux pour ne pas trop boiter et m'estime heureux d'avoir eu ma fracture au poignet gauche car le sabre et le mousqueton de cavalerie sont lourds à manier. Pendant ce temps, nous apprenons que l'Abbé avait raison ; une loi du Quatre Septembre votée par le Gouvernement LAVAL astreint les jeunes Français, de dix-huit à cinquante ans, à effectuer "tous les travaux que le Gouvernement jugera utiles dans l'intérêt supérieur de la Nation". Ce qui signifie le travail en ALLEMAGNE, en priorité, pour tous les jeunes célibataires. Les cent-mille soldats de l'Armée d'Armistice devront se sacrifier pour tenir une tête de pont destinée à permettre le débarquement Allié en FRANCE. Général VERNEAU - 5 Novembre 1942 Des ordres supérieurs consignent toute l'Armée dans les casernes et quartiers. Sur le terrain de manoeuvres de la PART DIEU, tout le Régiment doit effectuer rapidement un exercice qui consiste à monter avec armes et bagages dans des maquettes en bois représentant des cellules d'avions. Puis, le même exercice dans une gare de marchandises avec des wagons et plates-formes. De retour au quartier, on nous distribue des munitions, grenades et obus de mortiers. Tout le monde est consigné sur place. L'attente avec les suppositions commencent. Cela va durer une semaine. Au rapport, le Capitaine SARTOU du JONCHAY nous informe que nous pourrons nous replier dans le Midi, le long de la MÉDITERRANÉE. - "Les événements vont peut-être nous obliger à nous battre pour la FRANCE. Votre engagement a été un choix qui vous honore et ce choix sera bientôt mis à l'épreuve pour l'honneur de notre pays. Et j'insiste, seulement pour la FRANCE !". Par recoupement, nous apprenons qu'un débarquement Anglo-Américain pourrait avoir lieu sur les plages du Midi. L'Armée d'Armistice devra alors se sacrifier pour tenir une tête de pont destinée à permettre le débarquement. Mais d'autres ordres arrivent. Nous rendons les munitions et, avec ANDRÉ, rejoignons notre Peloton d'Élèves Brigadiers repris durement par le Lieutenant DELLY. Le Huit Novembre, la nouvelle éclate. Les Américains ont débarqué en AFRIQUE du Nord. Le lendemain, la presse et la radio annoncent la "trahison" de l'Amiral DARLAN, passé à l'ennemi avec toute l'Armée d'AFRIQUE. Nous sommes immédiatement consignés : les permissionnaires rappelés d'urgence, les armes lourdes et munitions chargées dans les camions. "L'ordre du Général VERNEAU est annulé. Il convient d'adopter une attitude de résistance morale d'ordre et de dignité en attendant l'envahisseur allemand". Général BRIDOUX - Ministre de VICHY - 11/11/1942. Au rapport, notre Capitaine nous fait part des ordres du Général VERNEAU. Notre Régiment s'établira en position de défense, dans le Massif du VERCORS, si les Allemands envahissent la zone libre. En effet, peu après, HITLER réagissant au débarquement d'ALGER, annonce des mesures de protections immédiates. Mais, dans le même temps, un contre-ordre de VICHY annule celui du Général VERNEAU : - "Les troupes sont consignées dans leurs casernes, tous mouvements annulés afin d'éviter tous incidents avec les Allemands !".C'est encore, comme en Juin 40, la lâcheté et la démission qui l'emportent. Par une ironie du sort, c'est le lendemain Onze Novembre au matin, que la WEHRMACHT franchit la ligne de démarcation en deux colonnes de neuf divisions. Par la vallée de la GARONNE et la vallée du RHÔNE, elle va désormais occuper toute la FRANCE. Une déclaration du Maréchal PÉTAIN est lue à la radio, toutes les heures, protestant contre la rupture des accords d'Armistice. Mais, vers midi, les Allemands occupent la maison de la radio et suppriment l'émission. - "Français, je croyais avoir vécu les jours les plus sombres de mon existence, la situation d'aujourd'hui me rappelle les mauvais souvenirs de 1940...... Mais, faites confiance à votre Maréchal qui ne pense qu'à la FRANCE !". Bien des Français croient que le Maréchal va rejoindre ALGER pour reprendre la lutte. Le Maréchal et de GAULLE sont d'accord, affirment-ils, persuadés que depuis la défaite, le Maréchal représente le "Bouclier" et de GAULLE "L'ÉPÉE" nécessaire pour vaincre à nouveau les Allemands. Mais, comme pour l'Armée obligée de se rendre sans combat, le Maréchal reste à VICHY. "On ne peut concevoir une autre solution que de se battre jusqu'au dernier". Général de Lattre de Tassigny - 11/11/1942 - Un Général, de LATTRE DE TASSIGNY, refuse l'ordre de BRIDEUX et regroupe quelques fidèles dans la région de MONTPELLIER. Il est aussitôt arrêté par la Gendarmerie Française et transféré à la prison de TOULOUSE. La presse collabo l'insulte : - "Ce Général factieux doit être sévèrement condamné !". A partir du Douze Novembre, le Maréchal n'a plus, semble-t-il, aucun pouvoir. Il ne peut même pas empêcher l'arrestation, par les S.S. au nom du FÜHRER, du Général WEYGAND qui rejoindra de LATTRE en prison. Mais, nous ignorons ce qui se passe à l'Hôtel du Parc de VICHY. Pourtant, des rumeurs très pessimistes filtrent : "PÉTAIN est l'objet d'un chantage effrayant, HITLER menace de polariser la FRANCE". Au quartier de Cavalerie, les armes et munitions sont à nouveau déchargées et remises aux magasins. Le Peloton d'Élèves Brigadiers reprend ses cours pour la troisième fois, mais tout est différent maintenant. Nous percevons une "cassure" entre les Officiers. Certains, au nom du Maréchal, proclament leur accord de cette passivité honteuse devant l'ennemi. D'autres, en accord total avec les Généraux VERNEAU et de LATTRE, souffrent de cette reddition sans gloire.Il est cinq heures du matin, le Vingt-Sept Novembre. Je suis de corvée de "jus" pour la chambrée. En sortant du bâtiment pour me rendre aux cuisines, je me trouve brusquement braqué par un Allemand. Il me fait rapidement remonter au dortoir, sa mitraillette dans les reins. D'autres Allemands surgissent de partout, les ordres fusent, tout le monde doit descendre immédiatement dans la cour les mains en l'air. Un canon antichar tire un obus contre une porte fermée à clef. C'est justement notre salle de cours. Nous restons plus de trois heures, plaqués contre un mur, gardés par un poste de mitrailleuses lourdes. Pendant ce temps, toutes les armes, fusils et pistolets sont rassemblés au réfectoire. Lorsque nous sommes autorisés à remonter pour nous habiller, les Allemands ont tout saccagé et volé notre réserve de tabac, nos savons et même nos montres. "L'action entreprise par les troupes Allemandes, en occupant la zone libre, rejoint et fortifie l'esprit de collaboration qui sauvera la FRANCE". Jean LUCHAIRE - 12 Novembre 1942 - "Cinq minutes pour s'habiller et rassemblement dans la cour !", hurle en mauvais français le Chef Allemand. Notre Capitaine SARTOU du JONCHAY, pâle, le regard mauvais, s'adresse à nous : - "Mes amis, rien n'est fini. Un jour, nous nous retrouverons pour défendre la Patrie. Maintenant, rentrez chez vous !". - "Heraus! Heraus !, hurlent les Allemands, plus de soldats Français A coups de baïonnettes, à coups de crosses et de bottes, ils nous dirigent vers la sortie. Voilà ce que VICHY qualifia, le lendemain, de "démobilisation sans incidents". Les Allemands nous fouillent encore au passage. Le Maréchal des Logis-Chef LONZANE nous attend à la sortie. Avec ANDRÉ, il nous invite dans un petit café devant la caserne. - "Je dois revoir notre Capitaine, les Allemands vont piller les magasins, il y a peut-être quelque chose à faire de ce côté. Revenez demain matin ici !". Le lendemain, le Chef LONZANE arrive avec une camionnette du Secours National. - "Nous avons maquillé un accord de la KOMMANDATUR pour embarquer des couvertures. C'est la seule chose que nous pouvons prendre sans éveiller l'attention. Elles seront utiles en montagne. Il faudra faire vite avant qu'ils ne découvrent la ruse. Je vous informe qu'un Officier a pu sortir le drapeau du Régiment, il va regrouper des volontaires !". Au poste de garde, l'Allemand examine notre ordre de mission puis téléphone, sans doute à son chef. Son adjoint nous examine et semble rassuré par la francisque que LONZANE a fixé à nos boutonnières. L'accord est donné. Avec la camionnette qui crache sa fumée de charbon de bois, nous fonçons aux magasins. Dans la cour du quartier, les Allemands embarquent déjà les armes par pleins camions. Lorsque nous repassons au poste de garde, l'Allemand exige de garder l'ordre de mission, ce qui ne nous permet plus de revenir. Dès que nous sommes éloignés de la caserne, LONZANE nous demande de descendre :- "Il vaut mieux se disperser, j'ai apprécié votre calme, je vous contacterai par l'Abbé CARRIOUX !", dit-il avec un sourire entendu. Nous n'avions jamais parlé de l'Abbé à la caserne et cela nous étonne. "Les explosions de TOULON sont arrivées jusqu'aux héros de STALINGRAD qui anéantiront les bourreaux de la FRANCE. Gloire aux marins de TOULON". STALINE - 27 Novembre 1942 Pendant ce temps, le même jour, un autre cauchemar complète la destruction de la FRANCE de 1940. Les Allemands tentent de s'emparer de la flotte rassemblée à TOULON. Pourtant, la veulerie ou l'incroyable naïveté de LAVAL de croire encore à la parole d'HITLER fait que celui-ci offre aux Allemands la totalité de notre flotte marchande pour marquer, précise-t-il, la volonté de la FRANCE de prendre parti dans notre combat gigantesque. Cinq milles marins Allemands s'emparent de nos bateaux de commerce, le Vingt Novembre. La presse locale et collabo minimise le drame de TOULON et, comme d'habitude, accuse de trahison nos Amiraux pour ne pas avoir remis la flotte nationale aux nazis. Mais les radios étrangères apportent une partie de la vérité. Alors que les Panzers S.S. cernent la rade par surprise, à six heures du matin, l'ordre de l'Amirauté exige que chaque bâtiment soit sabordé immédiatement. Une des plus belle flotte du monde, quatre-vingt-dix bâtiments, sombre dans la matinée du Vingt-Sept Novembre. Quatre sous-marins réussissent à prendre le large pour rejoindre les Alliés. Radio-Londres diffuse, dès le lendemain, les sentiments du Général de GAULLE pour cette nouvelle épreuve : - "La FRANCE a entendu le canon de TOULON, l'éclatement des explosions, l'ultime résistance. Un frisson de douleur, de pitié, de fureur l'a traversée toute entière !". Radio-Suisse relate l'enthousiasme de l'Agence Soviétique TASS : - "L'idée de la nouvelle EUROPE d'HITLER vient de sombrer avec les navires Français. Gloire aux marins de TOULON ! Mort aux Allemands !". Le Vingt-Quatre Décembre, l'Amiral DARLAN est assassiné à ALGER et l'année se termine par une bonne nouvelle : l'avance Allemande semble stoppée et les Armées de Von PAULUS sont encerclées à STALINGRAD. Ce qui fait dire à PABLO MARUDA, du CHILI : - "Lorsque des milliers d'obus déchirent ton coeur, STALINGRAD, NEW-YORK danse, LONDRES médite et moi je te dis "merde" parce que mon coeur n'en peut plus, mais tu ne tomberas pas, même si le fer et le feu te mordent jour et nuit !". "Les bandes du maquis et ceux qui les aident seront attaquées partout et frappées impitoyablement". Joseph DARNAND -20 Janvier 1943 1943 Radio-Genève rapporte cette petite phrase de la presse Soviétique "La Collaboration vient de sombrer dans le port de TOULON !".Le Maréchal aussi. Son Gouvernement a perdu définitivement toute crédibilité, il ne représente plus la FRANCE, mais une minorité de collaborateurs extrémistes qui s'appuient sur la croisade antibolchevique pour justifier leurs crimes et leur lâcheté vis-à-vis des nazis. Un Gouvernement de Résistance est maintenant établi à ALGER, terre française, et donne la perspective d'une libération prochaine. Commence alors, dans l'intérieur de la FRANCE, une lutte impitoyable de la GESTAPO, des S.S. et des miliciens Français pour traquer les patriotes résistants. Le Cinq Janvier, le Maréchal créée la milice dirigée par DARNAND. Celui-ci a prêté serment à HITLER et devient Lieutenant S.S. Il exige un serment des hommes qu'il regroupe sous le signe du GAMMA qui font d'eux des assassins. Ils n'hésiteront plus à torturer, tuer au grand jour d'autres Français et deviennent plus barbares que les Allemands dans bien des cas. Les Alliés, à la conférence de CASABLANCA, décident de poursuivre la guerre jusqu'à la capitulation, sans condition du REICH. Cette nouvelle provoque une violente fureur des nazis et de leurs complices. L'Abbé CARRIOUX nous donne rendez-vous dans l'Institution des Sourds et Muets de la Croix-Rousse. Nous retrouvons notre Maréchal des Logis-Chef LOZANNE avec un Officier du Onzième Cuirassiers. Celui-ci nous remercie pour la petite expédition des couvertures et demande notre accord pour participer à la Résistance. L'engagement doit être total et l'obéissance absolue. Tout manquement peut entraîner la peine de mort. L'Officier semble bien nous connaître et nous accorde toute sa confiance. ANDRÉ rejoint le maquis directement avec eux. "La Collaboration empêche trop de Français et non des moindres de prendre conscience, une conscience assez lucide et courageuse pour dire "non" aux vainqueurs, à ses fausses séductions, à ses crimes de lèse-humanité". Courrier de la Résistance du Témoignage CHRÉTIEN. Pour moi, je suis chargé d'abord d'une mission de renseignements et d'observation de l'ennemi. Je dois prendre contact avec Monsieur BESSON, peintre qui travaille bénévolement au Secours National et le Père FAUCHIER, à la Maison des Étudiants Catholiques - Quai Claude BERNARD. Monsieur BESSON me fait admettre au Secours National. Le Père FAUCHIER me remet une carte d'Étudiant en Droit, celle-ci doit me protéger contre le S.T.O. et son numéro sert de mot de passe pour le réseau. Mon premier travail est de distribuer discrètement, dans les boîtes aux lettres, des tracts. Le but de cette communication est d'insinuer une expression directe pour réveiller les cerveaux engourdis par la lâcheté ou la peur. La Résistance doit se murmurer de bouche à oreille pour la conduite à tenir devant l'ennemi. Le merveilleux livre de VERCORS "Le Silence de la Mer" sert de base ou réveille des consciences. Peu après, je suis chargé de faire un rapport sur l'immense entrepôt que sont devenus les abattoirs de la ville "LA MOUCHE" à GERLAND. Je découvre ainsi que, parmi les marchandises en partance pour l'ALLEMAGNE, s'entassent d'innombrables caisses de sous-vêtements fabriqués à LYON par les Établissements "VEDETTE", pour l'Armée de l'Est. Un chimiste de la Résistance a trouvé un produit qu'il suffit de glisser dans les caisses pour détruire ces sous-vêtements. Mon brassard du Secours National me permet, avec beaucoup de culot, de pénétrer dans les lieux et de prendre contact avec deux jeunes manoeuvres. Trois livraisons sont ainsi détruites par le produit pendant le voyage, puis les deux complices acceptent de rejoindre le maquis avant que l'enquête menée par la GESTAPO les découvrent. Je continue mon carnet de bord et j'ai l'immense joie, qui réjouit aussi la grande majorité des Français, d'apprendre que la Sixième Armée de Von PAULUS vient de capituler à STALINGRAD. C'est la première grande victoire de l'Armée Soviétique. "Nous avions juré de tenir jusqu'à la mort plutôt que de rendre STALINGRAD à l'ennemi. Et nous avons tenu la parole donnée à la Patrie". Général JOUKOV - 2 Février 1943 - Des centaines de milliers d'Allemands, précise Radio-Londres, sont morts ou prisonniers dans l'infernal chaudron de cette ville désormais célèbre. HITLER avait, quelques jours avant, proféré de terribles menaces contre toutes tentatives de reddition et décerné à Von PAULUS la dignité de Feldmarschal. Le bâton étoilé fut parachuté sur les ruines de son état-major, par un avion de la LUFTWAFFE, juste avant la capitulation. Monsieur BESSON m'emmène, ce jour-là, peindre un paysage à Crèche sur Saone et m'offre un formidable "gueuleton" d'anguilles au beurre, la spécialité de l'auberge de ce petit village tout au bord de la rivière. Cela me change des repas quotidiens de topinambours et rutabagas des restaurants populaires. Nous fêtons ses soixante - douze ans. Je l'appelle "Maître ", nous sommes devenus très vite des amis. Nos chevalets de campagne sont plantés sur les premiers coteaux du Beaujolais, loin de tous témoins gênants. Le Maître m'informe de ma prochaine mission. Je dois me rendre à RIVE-de-GIER remettre un colis. La région est particulièrement surveillée en ce moment et de grandes précautions sont nécessaires. Le Maître m'explique que l'occasion se présente actuellement. Le correspondant vient de perdre sa mère. Je devrai transporter un coussin de fleurs pour l'enterrement. Le colis sera fixé à l'intérieur. La discrétion obligatoire de notre travail ne me permet pas de savoir ce que contient le colis. Dès le lendemain de très bonne heure, je prends le train, affublé de ma couronne mortuaire. J'ai droit à un contrôle dans le train par des miliciens arrogants et provocateurs. Le domicile de la défunte est à quatre kilomètres de la gare, à l'autre bout du bourg. Bien avant d'arriver, je m'arrête dans un petit café pour me réchauffer. Le patron m'observe curieusement, puis me dit :- "Avec votre couronne, vous n'allez pas chez la Claudine qui vient de mourir !".- "Oui!".- "Alors, faites attention, le fils a été arrêté cette nuit et c'est la Police qui la veille !". "La FRANCE désigne ses chefs. On ne les lui impose pas. Alors que tout semblait perdu, le Général de GAULLE fut la lumière dans les ténèbres. Un cri de foi et d'espoir qui sauvait l'honneur. La FRANCE choisit de GAULLE". Journal clandestin "COMBAT". H. FRENAY. - 15 Avril 1943 - J'ai un moment de panique. Je remercie et sors sans hâte. Pour me débarrasser de la couronne explosive, un seul endroit possible : le cimetière, car je ne peux plus accomplir ma mission. Une petite chapelle fait l'affaire et je note moralement l'endroit. Par précaution, je prends le car pour SAINT-CHAMOND afin d'éviter la gare. De retour à LYON, j'applique la règle de sécurité pour me rendre chez Monsieur BESSON ; un carton à dessin sous le bras, je deviens l'élève se rendant chez son Professeur. Le Maître reste silencieux au compte-rendu et me félicite simplement de ma présence d'esprit face au danger, après avoir pris note de l'emplacement de la couronne au cimetière. Mon travail d'enquête et de renseignements continue, ce qui ne m'empêche pas d'enregistrer les nouvelles: TRIPOLI en LIBYE, puis TUNIS sont maintenant aux mains des Alliés. A ALGER, PUCHEU , Ministre de l'Intérieur du Gouvernement de VICHY, s'est laissé surprendre par le débarquement d'AFRIQUE du Nord. Le Général GIRAUD lui promet de le faire "participer" à la lutte contre l'ennemi s'il se rallie aux Alliés. Mais le Gouvernement provisoire de la République, qui condamne VICHY, n'accepte pas. Un Ministre de l'Intérieur est le patron de la Police et celle de VICHY traque et arrête les Juifs, les patriotes et désigne aux Allemands les noms des otages à fusiller. PUCHEU est jugé, condamné, exécuté. Après l'assassinat de DARLAN, cela donne un sérieux avertissement au Gouvernement LAVAL sur ce qui l'attend, le jour de la victoire. La Résistance, qui ne cesse d'être en deuil chaque jour, reçoit successivement deux coups très durs. Le Neuf Juin, CHARLES DELESTRAINT Chef de l'Armée Secrète, est arrêté à PARIS. Puis, le Vingt-et-Un Juin, MAX, le patron du Conseil National de la Résistance tombe par trahison entre les mains du bourreau de LYON : l'ignoble KLAUS BARBIE.Nous apprendrons que MAX est l'ancien Préfet JEAN MOULIN, nommé par le Général de GAULLE pour unifier l'ensemble des Réseaux de la Résistance comme Ministre pour la lutte intérieure. " Battez-vous comme des lions", disait MUSSOLINI quelques jours après le débarquement Allié en SICILE. Soixante-dix mille prisonniers italiens, dont dix généraux et quatre amiraux, ont montré qu'ils n'avaient rien compris à son discours. Le Premier Juillet, la bataille de KOURSK va définitivement stopper les Allemands. Des divisions entières de chars s'affrontent et la victoire reste aux Russes. Le rouleau compresseur Soviétique se met en marche. Il semble maintenant que rien ne pourra l'arrêter. Le Dix Juillet, c'est le début de la campagne d'ITALIE. Les Alliés débarquent en SICILE avec la complicité de la mafia. Et c'est la valse des généraux allemands. Sûr de son génie militaire, HITLER les tient pour responsables de ces défaites. La guerre mondiale vient de tourner favorablement et définitivement en faveur des Alliés. La poussée japonaise vers l'AUSTRALIE est interrompue et brisée par la bataille de MIDWAY. En Afrique du Nord, le génie de ROMMEL s'est heurté au nouveau Commandant en Chef Anglais MONTGOMERY et la nouvelle force meurtrière de la Royale AIR-FORCE. Tout est terminé, le Treize Mai, avec la reddition des dernières troupes Italo-Germaniques en TUNISIE. Sur le front russe, STALINE a lancé l'ordre de contre-attaquer et plus rien ne pourra arrêter, semble-t-il, les divisions fraîches venues de SIBÉRIE. L'ITALIE se sent maintenant menacée directement avec le débarquement en SICILE. MUSSOLINI a amené la guerre chez lui, déclenchée en 1940, lorsque la FRANCE était déjà envahie sans l'accord du Parlement, donc du peuple, espérant bénéficier de la victoire Allemande pour prendre les deux SAVOIES, NICE, la CORSE et la TUNISIE. Et pourtant, ses troupes n'ont jamais pu franchir la frontière des ALPES."C'est un fait unique que d'avoir servi, pendant vingt-et-un ans le Roi avec fidélité et d'être arrêté au seuil des appartements privés de ce monarque". Bénito Mussolini - 17 Septembre 1943 Devant la tournure des derniers événements, le Maréchal BADOGLIO et le Prince AIMON de SAVOIE vont tenter l'impossible pour sortir leur pays du conflit : Le Roi arrête MUSSOLINI et dépose le Gouvernement fasciste. BADOGLIO forme un nouveau Gouvernement. Le Duce est caché quelque part en Italie du Nord. Le Huit Septembre, sur l'ordre du nouveau Gouvernement, l'ITALIE capitule et obtient l'Armistice. Dès le lendemain, des combats s'engagent entre Italiens et Allemands , alliés de la veille. La presse allemande et collaboratrice bouillonne de rage sur cette trahison. La naïveté des Italiens, désirant quitter le vainqueur d'hier pour celui d'aujourd'hui, leur fait oublier que LONDRES n'a jamais passé l'éponge sur les faits de 1940 lorsque les avions italiens bombardaient les navires et les villes britanniques. Il n'y aura pas de De GAULLE italien et la guerre se poursuit chez eux avec maintenant deux envahisseurs : les Allemands devenus des ennemis redoutables et les Alliés à l'assaut de l'EUROPE. La propagande nazie trouve enfin un motif de victoire pour atténuer ce nouveau revers : HITLER a donné l'ordre de délivrer son ami MUSSOLINI. Nous apprenons qu'un Zoro allemand, le S.S. OTTO SKORZENY réussit, avec ses commandos, à enlever le Duce, prisonnier dans la région du Grand Sasso, le Douze Septembre. De retour à ROME, sous contrôle allemand, MUSSOLINI fait fusiller son gendre : le Comte CIANO, Ministre des Affaires Étrangères, soupçonné de faire parti du complot. En dénonçant les communistes, les Gaullistes et les Juifs, je ne fais que m'inspirer de ce qu'a dit le Maréchal PÉTAIN : "Il ne suffit pas qu'on me fasse confiance, il faut qu'on m'aide." Un Français anonyme. Les rafles des personnes Juives continuent. Pour nous cela dépasse toute compréhension. Des anciens combattants à la Croix de Guerre, Légion d'Honneur, gagnées sur le champ de bataille pour la France en 1914, sont arrêtés comme des criminels, entassés dans des camps comme du bétail. Puis expédiés par milliers dans des wagons à bestiaux plombés, sans eau ni vivre pour de longs jours de voyage. Je reçois l'ordre de me rendre à la gare de triage de CHASSE près de LYON pour le passage d'un convoi de déportés. L'horreur est insoutenable. Par les petites fenêtres grillagées des wagons, de pauvres visages de femmes, d'enfants et d'hommes supplient pour avoir un peu d'eau. Les SS aux gueules plus inhumaines que les chiens dressés qu'ils tiennent en laisse nous menacent de leurs armes. Avec quelques camarades du secours national et l'Abbé CARRIOUX, nous arrivons à faire céder l'officier SS et pouvons enfin remettre un bidon d'eau à chaque voiture. Puis le train s'en va vers l'inconnu de leur mort emportant les larmes et les cris de frayeur des enfants. Le bulletin clandestin "J"accuse " du 20 Octobre 1942-N°2- affirme avoir la preuve que les SS allemands brûlent et asphyxient des milliers d'hommes, femmes et enfants déportés de France. Pour étouffer les protestations contre cette sauvagerie sans nom, la valetaille nazie de "Gringoire " et "Je suis partout " nie ces faits horribles. Pour cela, avec mes camarades , nous n'hésiterons pas à abattre des Allemands lorsque l'occasion se présentera. Le soir même, à la radio, les voix du gouvernement LAVAL nous donnent envie de vomir. Ce spectacle vécu à 18 ans nous enlève toutes illusions sur le sens de l'honneur dont PÉTAIN et ses ministres nous abreuvent chaque jour. "Il est nécessaire que l'ennemi soit battu par la France comme par les autres Alliés... Vingt six Nations ont reconnu la France libre". Général de Gaulle - Alger 1943 A la Maison des Étudiants Catholiques, avec le père FAUCHIER, nous cachons deux familles à Lyon. Notre comité décide de les faire passer en Suisse car les dénonciations deviennent de plus en plus fréquentes. Je suis chargé de les convoyer jusqu'au maquis de l'Ain qui les prendra en charge pour le passage de la frontière. Pour échapper aux nombreux contrôles de la Milice et des Allemands, nous nous transformons avec les familles en bûcherons. Nous louons le cheval et la carriole remplie de fagots de bois d'un charbonnier ami. Le voyage se fait au pas du cheval jusqu'à BOURG-EN-BRESSE. Sur la route défoncée par les convois militaires de nos touristes vert de gris, la circulation civile est très rare. A Villars -les- Dombes un barrage coupe la route. Nous avons de la chance, ce sont des Allemands, les miliciens sont plus vicieux et plus durs à rouler. - ACHTUNG, papir ! L'Allemand hurle les mots, sa mitraillette braquée sur nous - "Vous terroristes". Je lui répond en rigolant : "Non, bûcheron pour cheminée kommandatur." Il nous fait descendre et mettre au sol tous les fagots -"C'est bon, vous repartir vite". Juste après BOURG-EN-BRESSE que nous évitons de traverser, je remets le cheval et son chargement dans une ferme amie. Puis, dès la nuit tombée, nous partons à pieds pour franchir à travers champs et forêts les quarante deux kilomètres qui nous séparent du premier poste de maquisards, bien après CEZERIAT, dans les premières montagnes du Jura. Prévenu de notre arrivée, deux maquisards surgissent d'un fourré et sollicitent le mot de passe. Ils nous conduisent jusqu'au petit village de VILLEREVERSURE le P.C. avancé du maquis. Le lendemain soir, je refais seul la route à pieds jusqu'à BOURG-EN-BRESSE où je prends le train. Le boy scoutisme des chantiers de jeunesse entretient le bellicisme à l'égard de l'Allemagne et contrarie l'intégration de la jeunesse française à l'Europe d'Hitler. Marcel DÉAT -1943. Le Ministre de l'Éducation Abel Bonnard, de qui relèvent les Chantiers de Jeunesse enjoint au Général de la Porte du Theil, de favoriser l'envoi de jeunes sur le front Russe dans la Légion des Volontaires Français pour la Croisade Antibolchevique. A Limoges, de jeunes démobilisés sont aussitôt conduits par des gendarmes français au bureau de recrutement du Service du Travail Obligatoire et embarqués pour l'Allemagne. Cela se sachant, beaucoup d'entre eux rejoignent les maquis. Puis les Chantiers de Jeunesse sont supprimés et trente mille "Vert " reliquat des Chantiers, tombent sous la main de Sauckel pour l'Allemagne. Pierre Laval révoque la Général de la Porte du Theil, arrêté le soir même par la Gestapo. Marcel Déat se réjouit de cette disparition. Dans son journal collaborateur "L'Oeuvre" ,il écrit : Les Jeunes Français perdaient leur temps dans ces Chantiers, ils seront plus utiles en Allemagne pour faire l'Europe. Il est fou d'oublier le sens du sacrifice lorsqu'il s'agit de résister à l'agression de son pays. Général de Lattre de Tassigny à son procès - 9.02.1943 Condamné à dix ans de prison pour abandon de poste par un Tribunal d'État à huis clos, le Général de Lattre de Tassigny se voit infliger cette peine par des Français: le Général TOUCHON, l'amiral CADAR et le sinistre DARNAND. Transféré du fort MONT LUC de Lyon à la prison de Riom il s'évade le 3 Septembre avec la complicité d'un garde après avoir scié un barreau de sa cellule. Le Général rejoint ensuite l'Afrique du Nord grâce aux Réseaux de la Résistance. Bien des Français furent écoeurés lors de son arrestation en Novembre 1942 en apprenant que c'était le Général français Commandant la 17e Division Militaire qui donna l'ordre de se saisir de son ancien collègue pour le livrer aux Allemands. Une très grande nouvelle arriva. Le premier département français, la Corse, est libérée le 4 Octobre. Les radios de Londres et Genève nous informent dans la joie, de l'opération "Vésuve" rondement menée par l'Armée Française d'Afrique. "Les Corses auraient pu attendre tranquillement que la victoire des autres régla leur destin ; au lieu de cela, unis, ils ont préféré être eux-mêmes vainqueurs." Général de Gaulle. Le Général Giraud a l'initiative du débarquement et le Général Henry Martin l'exécution. Le sous-marin Casabianca transporte les premiers éléments du Bataillon de Choc puis les croiseurs MONTCALM, Jeanne d'ARC, les contre torpilleurs FANTASQUE, AUDACIEUX et TERRIBLE de notre marine nationale déposent à AJACCIO les troupes françaises. Notre Aviation complète l'attaque. "CORSICA a noï, NIZZA a noï, SAVOIA a noï" avait superbement clamé le bouffon Mussolini en nous déclarant la guerre. Les Corses ne pouvaient envisager cela et avaient fait le serment : "Comme les Corses d'autrefois, hommes d'honneur ,soyons prêts à tuer et prêt à mourir." L'armistice fit cesser la résistance active au début, mais la Commission Italienne fut constamment bernée et aucun Corse ne consentit à les servir dans n'importe quel emploi. Le 8 Novembre 42, après le débarquement Allié en Afrique du Nord, 80.000 Italiens arrivent pour occuper l'Île. Très vite des bagarres éclatent malgré la répression sévère et les familles soumises aux représailles. La résistance s'organise. Le Général de Gaulle envoi le capitaine Scamaroni pour préparer le débarquement. Le 8 Septembre 1943, le Pacte d'Acier de l'axe est rompu et les Italiens rejoignent les maquisards pour attaquer les 20.000 Allemands qui se regroupent sur Bastia. 27 jours après la Corse est entièrement libérée et libérée par des Français. La presse locale et la radio des collaborateurs écument de rage et en profitent pour lancer d'horribles menaces contre les communos-maquisards terroristes et les traites gaullistes. A" Radio Paris ment", Philippe Henriot prévoit avec délectation le massacre de la peuplade Corse si les hordes rouges ne sont pas stoppées par les vaillantes armées du Reich. "Radio Paris ment... Radio Paris ment... Radio Paris est allemand ! " de Pierre Dac dans son émission : "Des Français parlent aux Français, à Radio Londres. Après la SICILE, l'invasion de la péninsule commence le 3 Septembre près de Naples. Le 8, l'Axe Italo-Germanique est rompu. Les Italiens se retournent contre les Allemands, avec les Alliées. Le Maréchal Kesselring, chef de la Wehrmacht en Italie, reprend la situation d'une impitoyable férocité contre le peuple Italien accusé de trahison. Les Alliés marquent le pas et font intervenir les goumiers d'Afrique du Nord du Général Juin. A l'Est, Koursk, Orel, Kharkov et Kiev sont libérés par la formidable offensive de l'Armée Rouge. Dans le Pacifique les Américains passent aussi à l'attaque: Guadalcanal, l'archipel Bismarck, les Îles Gilbert et Marshall, Bougainville et la Nouvelle Bretagne sont repris aux Japonais. Tokyo et les villes Japonaises connaissent à leur tour les bombardements, c'est la revanche de Pearl Harbor. Cette quatrième année de guerre reste en faveur des Allies. Allemands et Japonais subissent des défaites irréversibles. La lutte est désormais sans merci. Les nazis redoublent de violences et "Polonisent" les territoires qu'ils occupent pour se venger de leur recul. Goebbels, le grand maître de la propagande hurle encore plus fort dans son micro. "Nos armes secrètes détruiront nos ennemis et ce sera la victoire pour notre Führer." Les collabos français approuvent son discours avec leurs voix haineuses pour conjurer la faillite de leur politique criminelle. Les aboiements ridicules d'Harold Paquis à "Radio-Paris-Ment" continuent bêtement son slogan usé. "L'Allemagne vaincra, l'Angleterre comme Carthage sera détruite." Dans l'ombre les maquis réunifiés reçoivent maintenant des armes et de l'encadrement parachutés par les Anglais. Fin décembre pour clôturer cette année pleine de morts et de martyrs de la liberté, la Résistance reçoit son cri de ralliement "Le chant des Partisans" composé par Joseph KESSEL et son neveu Maurice DRUON, sur la musique de Duna MARLY. Ami entends-tu Le vol noir des corbeaux Sur nos plaines ? Ohé, Partisans Ouvriers et Paysans C'est l'alarme Ami entends-tu Les cris sourds du pays Qu'on enchaîne ? Ce soir l'ennemi Connaîtra le prix du sang Et des larmes.Les peuples occupés sont en ce moment soumis à une telle pression, ils souffrent si violemment l'injustice qu'il y a lieu de prévoir à la libération de nos pays, une formidable explosion de haine. 1944 - 1945 J'ai vingt ans cette année. Ceux de ma génération qui n'acceptent pas l'avilissement de nos bourreaux en participant à la lutte ont accumulé tant de privations, d'injustices, de mensonges officiels le long de ces cinq dernières années que nous avons perdu toute la spontanéité de notre âge. Et la haine grandit, elle couve au fond de nous avant de répandre au dehors ses effets terribles, mais déjà elle nous empoisonne. Les voix autorisées de notre gouvernement nous rappellent l'exigence de notre morale chrétienne pour prôner la charité contre la haine. A en croire leurs discours, seuls les vrais chrétiens seraient ceux qui se réfugieraient dans une gémissante neutralité, au dessus de la mêlée. "Bienheureux les pacifiques". Ce refus de prendre parti des choses où tout le pays est impliqué rappelle le geste de PONCE PILATE. La vie n'est pas neutre, et la justice non plus. L'appel de la patrie à défendre, non plus n'est pas neutre. Car les voix de VICHY qui nous font la morale célèbrent la charité en couvrant l'injustice. Que les Allemands rentrent chez eux et que les mauvais bergers français cessent de nous faire croire que ces Allemands sont une race de seigneurs faits pour dominer la terre avec leur guerre et leurs crimes odieux. Les mainteneurs français de l'ordre Hitlérien, des mensonges de la propagande nazie sur tous les pays "protégés" par la puissance militaire allemande, nient systématiquement la planification monstrueuse de l'injustice et le but fixé, détruire ce qui ne peut être séduit. Et pourtant, l'exemple de la Pologne martyre devrait édifier les gens naïfs. Le manque d'efforts des Français dans la lutte que nous menons contre le bolchevisme entraînera une destruction totale de la France après la victoire de l'Allemagne. GAULEITER SAUCKEL. Notre courrier français du Témoignage Chrétien cite dans son numéro 12 consacré au terrorisme Hitlérien en France. "Le terrorisme nazi sort depuis quelques mois du secret des chambres de tortures, du mystère des prisons et des camps de concentrations pour opérer au grand jour. Puissent ces témoignages sur l'effroyable tragédie qui se déroule par ordre de HIMMLER, soulever la réprobation indignée des consciences et créer l'unanimité française devant la barbarie nazie." Aujourd'hui radio LONDRES nous apprend que LENINGRAD l'invaincue, assiégée, bombardée depuis 900 jours est définitivement dégagée le 27 Janvier. La grande capitale des arts et des lettres de la Russie, fête sa victoire de la persévérance dans la Résistance. A PARIS, LÉON DEGRELLE, le Darnand belge, chef du parti Rexiste, commandeur de la brigade SS Wallonie vient au Palais de Chaillot inciter les jeunes Français à rejoindre les rangs de la Waffen SS. DORIOT, DÉAT, BUCARD, DARNAND en uniforme allemand saluent son entrée, le bras tendu. Pour DEGRELLE, le temps de la politique est terminé. "Seule les combattants, du front de l'Est auront droit de commander dans la nouvelle Europe. C'est là que se joue l'avenir de la civilisation occidentale." thème que répètent inlassablement les affiches. "Toi aussi, tes camarades t'attendent dans la Division Française de la Waffen SS." Un décret signé de Pierre LAVAL encourage aussi cet engagement. Trois mille jeunes Français rejoignent dans cette brigade d'assaut toutes les formations des volontaires étrangers. Ceux-ci constituent la Division Charlemagne jetée brutalement sur le front pour colmater la Wehrmacht saignée à blanc et démoralisée par cinq ans de guerre. Au début, la Légion des Volontaires Français puis la Légion Tricolore conservaient un commandement français avec le Colonel LABAUNE et le commandant BRIDOUX, fils du Général, Ministre de la Guerre du Gouvernement LAVAL. Le Maréchal Pétain déclare alors à ces officiers.: "Vous détenez une part de notre honneur militaire en servant la France sous ses couleurs pour cette croisade dont l'Allemagne à pris la tête afin d'écarter le péril Bolchevique." Aujourd'hui, le temps de la susceptibilité tricolore est terminé. Les Français sont engloutis dans l'armée politique nationale socialiste des SS allemands et vont mourir en mercenaires, trompés par leurs chefs politiques et rejetés comme parias dans leur pays. "Là ou nous passons tous brûlent Et le diable rit avec nous Ha, Ha, Ha, Ha, Ha, Ha, Ha !" Chant des SS Panzer - Jägerlied - "Soldats, soyez fermes, purs et fidèles. Au bout de nos peines, il y a la plus grande gloire du monde: celle des hommes qui n'ont pas cédé." Charles de GAULLE. Un cavalier de mon régiment vient d'arriver chez l'Abbé CARRIOUX. Il est agent de liaison entre le maquis et le service de renseignements. Il me donne des nouvelles de mon Ami André. Le maquis du 11ème Cuirassiers a commencé dans la forêt du Grand Serre à 90 km de LYON. Un coup de main a été réalisé contre les Italiens installés au camp de CHAMBARRAUD. De nombreuses armes et munitions ont été récupérées ainsi qu'une voiture radio. Puis le groupe s'est installé dans la forêt de THIVOLLET qui devient le nom de guerre du Lieutenant GEYER, commandant le maquis. Fin 1943, des troupes SS ont lancé un raid de représailles, de nombreux otages et des cuirassiers ont été abattus ou déportés en Allemagne. La milice française attaque maintenant sans cesse le maquis depuis le début de l'année. A l'issue de cette rencontre je suis chargé d'une mission. Un groupe important de miliciens est au repos à ST CYR au Mont d'Or tout près de LYON. Je dois faire un relevé exact de l'approche du camp, situer les alentours et ramener un milicien vivant. Ceux-ci pense-t-on, ont participer avec une sauvagerie sadique à l'attaque, ils ont torturé, tué des fermiers pour leur faire avouer l'emplacement des maquis. Si nous obtenons des preuves, notre service action enverra un commando pour punir ces tueurs. Avec deux camarades et la camionnette du Secours National nous prenons comme prétexte de chercher du ravitaillement dans les fermes autour du camp pour les restaurants populaires. Nous nous payons l'audace d'aller les voir dans leur camp pour leur signaler notre présence dans la région. Nos faux papiers sont en règle et tout se passe bien. Les lieux se gravent dans notre mémoire. Le commis d'une ferme éloignée nous signale qu'un milicien vient régulièrement à la ferme en fin de journée à bicyclette, faire la cour à la fille du fermier. C'est la chance de notre mission. Nous préparons alors minutieusement l'enlèvement. Tout est prêt. Nous empruntons une ambulance. Simulant une panne sur le bord de la route que le milicien emprunte pour venir à la ferme, Maurice, mon adjoint, guette son arrivée. Lorsqu'il se présente, la route est déserte. Je lui fait signe d'arrêter. Dès qu'il a mis pied à terre, Maurice bondit derrière lui et l'assomme d'un violent coup de matraque sur la nuque. Placé dans l'ambulance, nous remplaçons son uniforme en quelques minutes par des vêtements usagés d'agriculteur en lui barbouillant le visage et les mains de terre. Maurice endosse l'uniforme du milicien, prend sa bicyclette et va à la gare de ST GERMAIN au Mont d'Or prendre le train en n'oubliant pas de se faire remarquer. Cette mise en scène à pour but de faire croire au camp milicien qu'un des leur a déserté, ce qui arrive maintenant que le vent de la victoire souffle pour les Alliés. Pendant ce temps j'ai solidement attaché le traître avec des sangles, les yeux bandés, de la vaseline autour de la bouche forme une bave. En cas de barrage, je transporte un aliéné alcoolique dangereux à l'asile psychiatrique de BRON. J'ai un faux certificat médical pour son entrée à l'hôpital. Dès mon arrivée à l'Asile, le milicien est pris en charge par deux infirmiers résistants qui vont l'interroger sur l'expédition de son groupe contre le maquis. Philippe HENRIOT, milicien n'a jamais été soldat, n'a jamais subi l'épreuve du feu, mais il déverse chaque jour, à la radio, des flots d'ordures sur les cadavres des Résistants abattus par la milice et les Allemands. Ensuite, il restera enfermé sous haute surveillance jusqu'à la Libération pour être jugé. Le commandant du maquis veut avoir la preuve qu'il s'agit bien de la formation qui a participé à l'opération criminelle contre les fermiers du VERCORS. Je retrouve Maurice à la gare des BROTTEAUX. Il a remis ses vêtements civils dans les toilettes du train et mis la bicyclette et la valise contenant l'uniforme à la consigne. La mission est terminée.Nous fêtons sa réussite chez le Maître en vidant une bonne bouteille de vin de sa cave. Quelques jours après, la presse signale un odieux attentat contre le camp de miliciens de ST CYR au Mont d'Or, par des terroristes communistes: Onze miliciens dont un chef ont été tués. Joseph DARNAND réagit à la radio et promet des représailles terribles. L'engrenage de la violence ne peux plus s'arrêter."Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré" Libéré par lui-même, par la France éternelle. Charles de GAULLE - 25.08.1944 Ce soir à la maison des Étudiants catholiques que nous appelons la M E C, une immense tristesse nous serre le coeur. Le Père FAUCHIER nous apprend que notre ami, l'Abbé CARRIOUX vient d'être arrêté par la Gestapo. Nous connaissons tous le traitement réservé aux Résistants par le sinistre BARBIE et ses séides. Spontanément nous proposons de constituer un commando pour le libérer. Mais le père FAUCHIER a reçu des ordres et il faut obéir. Avec deux de mes camarades nous devons rejoindre dès demain le maquis du régiment. Notre sécurité n'est plus assuré à LYON. Maintenant les événements vont s'accélérer. Peu après l'arrivée au maquis, Cassino ,en Italie, tombe sous les coups répétés des goumiers du Général JUIN et ouvre la route de ROME. Le grand Débarquement réussit en NORMANDIE et PARIS est libéré le 25 Août. Juste avant, le 15 Août c'est un nouveau débarquement en PROVENCE. Nous rejoignons la 1ère Division Française Libre sous les ordres du Général BROSSET. Ma division participe à la libération de TOULON, toute la vallée du RHÔNE, LYON, BELFORT avec de très durs accrochages à GIREMAGNY, au BALLON d'ALSACE et GROSMAGNY. La Jeep de notre chef se renverse dans un torrent. Le Général BROSSET est tué sur le coup alors que son aide de camp, l'acteur Jean-Pierre DUMONT, assis à côté de lui sort indemne de la chute. La 2ème DB du Général LECLERC poursuit son avance sur le RHIN pendant que notre Division traverse la FRANCE pour prendre position devant la poche de ROYAN que nous devons libérer, sous les ordres de notre nouveau chef, le Général GARBAY. Au passage nous traversons le village martyr d'Oradour sur Glane. En signe de deuil et de respect, nous nous arrêtons. Un homme du Secours National venu tout de suite après la tragédie nous explique le drame effroyable de cette petite ville de 800 habitants, tous assassinés.: Un détachement de la Division SS "Der Führer" fait irruption dans le gros village à 21 km de LIMOGES. Avec une brutalité inouïe, tous les hommes rassemblés sur le champ de foire, vieillards et infirmes compris sont abattus à la mitraillettes. Le massacre des hommes achevé, les femmes et les enfants sont conduit à l'intérieur de l'église ainsi que les élèves en classe et leurs maîtresses. Ceux qui tentent de fuir sont abattus sur place. Les SS se livrent à toutes sortes de brutalités sur les femmes et les enfants, profanent l'autel et tuent les trois prêtres présents dans l'église. Puis ils déposent une grande caisse au centre de la nef. Un heure après son dépôt, la caisse explose, incendiant l'église de toutes parts. Pendant ce temps, toutes les maisons et bâtiments du village sont arrosés de produits incendiaires au phosphore. Des femmes réussissent à briser un vitrail pour jeter leurs bébés dehors, mais les SS les mitraillent au passage. A la même heure les Collaborateurs clamaient à Radio Paris, la grandeur de l'Allemagne nazie. Quelques jours après notre arrivée et avoir pris position pour l'attaque de ROYAN, le Maréchal VAN RUNDSTEDT lance la grande offensive des ARDENNES qui surprend EISENHOVER. Dans la foulée, une division de jeunes SS ramenée de NORVÈGE doit reprendre l'ALSACE. Pendant que les Américains et les Anglais risquent leur vie pour libérer notre pays, les jeunes Français ont le droit de choisir entre l'engagement volontaire ou les bars à la mode. Albert CAMUS - Novembre 1944 Alors notre division reprend la route dans la nuit de Noël pour soutenir la 2ème DB devant STRASBOURG. La guerre n'est pas finie et risque de reprendre durement comme le feu qui couve et rejailli brusquement.Albert CAMUS, rédacteur du journal "Combat" écrit désabusé sur la situation en France : "Tout ce que nous avons à dire c'est que l'Allemagne existe encore, qu'elle n'est pas vaincue et que la guerre n'est pas finie. Si nous faisons dans les ARDENNES la guerre avec des vies Américaines, il faut la faire ailleurs avec des sacrifices français. Cette offensive devrait nous apprendre qu'il n'est pas possible qu'un pays en guerre laisse sa jeunesse choisir entre l'engagement volontaire ou les bars à la mode." Après de durs combats à ROSSFELD et HERBSHEIM nous rentrons dans COLMAR. Toute l'ALSACE est libérée jusque sur les bords du RHIN. Au camp du STRUTHOF, nous découvrons l'horrible amoncellement de cadavres squelettiques, les fours crématoires et les quelques rescapés à l'état de cadavres vivants. Je perçois alors davantage mon engagement dans la lutte contre les nazis depuis le début. "Le 18 Juin 1940 la France revenait à la vie, elle ne comprenait, alors, qu'un Général indomptable, entouré de quelques compagnons animés du même esprit." WINSTON CHURCHILL Les Allemands repoussés définitivement chez eux, ma Division descend dans le midi. Après le dur hiver des VOSGES, nous découvrons le soleil en traversant NICE. Puis c'est à nouveau la montagne pour arriver à SOSPEL sous une pluie d'obus de 88 des Allemands bien installés dans toutes les fortifications des ALPES, renforcées et truffées de mines. L'attaque doit se faire dans le massif de l'Authion, dépassant 2000 mètres entouré de précipices. Il faut l'intervention des chars des fusiliers marins tirant des obus au phosphore et l'utilisation des lance-flammes pour en avoir raison. 273 tués et 614 blessés pour ce dernier combat à un mois de l'armistice et de la paix. Les forts enlevés nous dégringolons dans la vallée de la Roya prendre l'ancienne ville frontière de Breil, dont chaque porte est piégée. Puis nous passons la frontière Italienne et prenons Tende et la Brigue qui resteront Français avec toute la Vallée des Merveilles. "Le 18 Juin 1940 est ce jour où l'histoire nous a donné un homme qui d'un mot annulait la déroute et maintenait la France dans la guerre jusqu'à la victoire." GEORGES BRANANOS Le 8 Mai, c'est l'Armistice. Notre Général nous offre trois semaines de repos sur la Côte d'Azur. De Menton à Cannes toute la 1ère Division Française Libre reprend des forces avant de remonter à Paris pour le défilé de la Victoire. Après la descente des lacets du Col de Braus, nous traversons l'Escarène, petit village tout près de Nice. Là se trouve le dernier cimetière de notre Division. C'est terminé. J'ai juste 21 ans, la majorité, l'âge des responsabilités comme disent les adultes convaincus d'avoir toujours raison, comme en 40. L'abbé CARRIOUX et André, mes deux amis du début de cette aventure meurtrière sont morts pour la France. Marcel et Fernand aussi, sur le front Russe, dans le mauvais choix. Qui peut les blâmer, ils avaient 18 ans et des adultes, mauvais bergers, des DARNAND sous la houlette d'un Maréchal de France ont su les attirer sur le mauvais chemin. Les autres, la grande majorité passive des donneurs de conseils, ceux qui nous traitaient de terroristes avant de nous acclamer par peur des représailles, comment ceux qui sont revenus des camps de prisonniers et des camps de la mort, ont-ils eu la générosité de leur pardonner ? |
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