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L'oeuvre de Michel El Baze: Les guerres du XXe siècle à travers les témoignages oraux   





Suzanne Blondeau-Hubin


Chronique de la famille Knaur-Blondeau

Chronik der Familie Knaur-Blondeau

1736-1991

Guerres 1914-1918   -   1939-1945

Témoignage

Les guerres franco-allemandes
En France et en Allemagne


Ouvrage bilingue



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Le survol des chemins que j'ai suivis me fait penser que,

comme les animaux sauvages qu'un instinct mystérieux avertit du danger,

prennent la fuite et cherchent un abri avant les premiers signes avant-coureurs,

j'ai été souvent poussée à agir juste au moment où il allait être trop tard.

Peut-être est-ce pour cette raison que j'ai écrit ces lignes en cet hiver 1990/1991

avant que, pour une raison ou une autre, il ne soit trop tard.

Fribourg en Brisgau

Janvier 1991

Erzählt von Susanne Blondeau geb. Hubin,

Urenkelin des Arnold-Theodore Alexandre Blondeau

und dessen Ehefrau Marie Jeanne Célestine Mette

während des Winters 1990 / 91 in Freiburg in Breisgau

POSTFACE de Michel EL BAZE

Sans renier "l'esprit de clocher, école primaire au patriotisme", indispensable au développement des peuples et à la pérennité de notre civilisation, on peut rêver que cette chronique d'une famille Franco-Allemande, que ce 101 volume de notre recueil, soit la première pierre d'un pont qu'il nous faudra construire entre la France et l'Allemagne d'abord, entre nos deux pays et l'Europe ensuite, pour l'écriture d'une histoire commune entre nos peuples qui ferait abstraction des frontières terrestres pour communier en un esprit commun, sur la stèle des témoignages oraux des survivants des guerre du XXème siècle. C'est le rêve que nous faisons au terme de cette étape et le souhait que nous formulons en imaginant que d'autres, aussi passionnés que nous l'avons été tout au long de notre entreprise, prennent le relais pour la continuation de notre oeuvre.
Without renouncing "the steeple spirit, primary school to the patriotism", indispensable to the development of peoples and to the durability of our civilization, one can dream that this chronicle of a family Franco-German, that this 101 volume of our collection, is the first stone of a bridge that it will be necessary us to construct betwen France and Germany approach, between our two countries and Europe then, for the handwriting of a common history between our peoples that would make abstraction terrestrial frontiers to commune in a common spirit, on the stèle of oral survivor testimonies of war of the XXth century. That is the dream that we make to the term of this stop and the wish that we formulate in imagining that others, as passionate as we have been all along our enterprise, take the relay for the continuation of our work.

Avant propos du témoin
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La famille Blondeau-Knaur doit son existence et les péripéties de ses différentes générations aux événements historiques et aux turbulences européennes des deux derniers siècles. Si j'essaie aujourd'hui de démêler les fils qui les unissent, c'est qu'une fois de plus, la grande et la petite Histoire me poussent irrésistiblement à le faire. En voici la raison: fin septembre 1990, ma fille Marlène, son mari Karl-Friedrich Bartlewski et moi-même étions partis vers ce qui était encore la R.D.A. pour y rendre visite à nos cousins à Quedlinburg et Halberstadt. Un soir, c'était le samedi 22 septembre, nous étions réunis, Marguerite Knaur, née Kiessling, et nous trois Occidentaux, dans la maison de Dietrich Kiessling et de sa femme Gisela, à Halberstadt. La date et le lieu de cette rencontre familiale me semblent bien corroborer ce que j'avançais dans ma première phrase. La date d'abord: quelques jours plus tard, le 3 octobre 1990, la réunion des deux Allemagne devenait une réalité officielle. Ce qui mettait fin au partage historique, RFA- RDA, qui durait depuis 1945. Le lieu ensuite: au mois d'avril 1945, venant de Magdeburg, mon mari, ma fille Marlène et moi-même, en cette matinée de dimanche, étions réfugiés avec d'autres locataires dans la cave d'une maison amie dans cette même ville d'Halberstadt. Pendant que les bombes américaines tombaient du ciel et transformaient la ville autour de nous en un champ de ruines. Au même moment, mon fils Hans et ma fille Renate montés sur le toit d'une ferme dans le village de Westerhausen, distant de quelques kilomètres d'Halberstadt, assistaient terrifiés et angoissés à ce spectacle effrayant. Mais revenons à notre actualité. Au cours de cette réunion familiale très animée, Gisela Kiessling me demanda comment moi, Française d'origine, je m'étais introduite dans la famille Knaur, pensant sans doute qu'un simple courant d'air venu de l'Ouest en était la cause. La réponse à cette question était si complexe que je demandai à l'assistance si elle voulait vraiment que je retourne aux sources. Et comme tout le monde était d'accord, je commençais à raconter. Ce que je n'avais pas prévu, Dietrich enregistra mon récit impromptu, qui, dans cette forme improvisée, les intéressa fort, mais qui pour moi resta incomplète. Je n'ai pas réécouté la cassette enregistrée et ne sais donc absolument pas, comment je me suis tirée de cette tâche. Mais une chose est sûre: les fils de cette trame compliquée qui forment une famille et que j'avais essayé de démêler, ont continué à s'agiter en moi, à se prolonger dans tous les sens. Aussi, une fois rentrée chez moi à Freiburg, poussée par quelques chose d'irrésistible, j'ai décidé de tenter une mise à jour des faits et événements familiaux qui n'ont eu aucune influence sur le cours de la grande histoire, mais qui, en revanche, dans les phases cruciales de leur déroulement, ont été terminés par elle. Commençons par l'histoire préliminaire de deux familles qui ne semblaient pas être prédestinées à se rencontrer.
The family Blondeau-Knaur has its existence and adventures of its different generations to historical events and to European turbulences of the last two centuries. If I tries today to disentangle what that unite them, it is once time more, the great and the small History push me irresistibly to make it. In here is the reason : September end 1990, my girl Marlène, her husband Karl-Friedrich Bartlewski and myself had left to what was again the R.D.A. to render there visit to our cousins to Quedlinburg and Halberstadt. An evening, it was Saturday 22 September, we were united, Daisy Knaur, born Kiessling, and we three Westerners, in the house of Dietrich Kiessling and his woman Gisela, in Halberstadt. The date and the place of this family encounter seem me well to corroborate what I advanced in my first sentence. The date of approach : some later days, 3 October 1990, the meeting of two Germany became an official reality. What put end at the historical division, RFA-RDA, that lasted since 1945. The place then : to the month of April 1945, coming from Magdeburg, my husband, my girl Marlène and myself, in this morning of Sunday, were fled with other tenants in the cellar of a house in this same city of Halberstadt. While American bombs would fall the sky and transformed the city around us in a field of ruins. To the same moment, my son Hans and my girl Renate climbed on the roof of a farm in the village of Westerhausen, distant of some kilometers of Halberstadt, assisted terrified and anguished to this frightening spectacle. But return to our current events. In the course of this family meeting animated, Gisela Kiessling asked how me, French of origin, I was introduced in the family Knaur, thinking without doubt that a simple running of come air from the West it was the cause. The reply to this question was so complex that I asked to the assistance if it wanted truly that I return to sources. And as all the world was of agreement, I began to tell. What I had not anticipated, Dietrich recorded my impromptu account, that, in this improvised form, concerned them strong, but that to remains me incomplète. I have not réécouté the recorded cassette and do not know therefore absolutely, how I am me pulled this task. But a thing is sure : this hatcies complicated that form a family and that I had tried to disentangle, have continued to shake in me, to prolong in all sense them. Also, once returned at me to Freiburg, thrust by some thing of irresistible, I have decided to tempt a update of facts and family events that have had no influence on the course of the great history, but that, in revenge, in the crucial phases of their déroulement, have been ended by it. Begin with the preliminary history of two families that did not seem to be predestined to meet.

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Daß es eine Familie Knaur-Blondeau überhaupt gibt, ist nur der großen Geschichte zu verdanken. Ebenso wurde die Verwobenheit ihrer Generationen durch die Irrungen-Wirrungen der europäischen Geschichte der zwei letzten Jahrhunderte bestimmt. Warum ich mich entschlossen habe, den Versuch einer Darstellung der familiären Geschehnisse zu unternehmen, erklärt sich so : Ende September 1990 fuhren meine Tochter Marlene, ihr Mann Karl-Friedrich Bartlewski und ich nach Quedlinburg und Halberstadt, um unsere dortigen Verwandten zu besuchen. An einem Samstagabend (22.9.90) saßen wir drei mit Marguerite Knaur, geb. Kießling im Hause von Dietrich Kießling und seiner Frau Gisela in Halberstadt. Zeitpunkt und Ort dieses gemütlichen Zusammenseins scheinen mir eine Bestätigung dessen, was ich eingangs äußerte- Der Zeitpunkt: einige Tage später wurde die Vereinigung der beiden deutschen Staaten offiziell verkündet und somit ein historischer Zustand beendet, der seit 1945 andauerte. Der Ort: An einem Sonntag im April 1945 saßen mein Mann, meine Tochter Marlene und ich im Keller einer befreundeten Familie in ebenderselben Stadt Halberstadt, als um uns diese Stadt durch einen amerikanischen Luftangriff zertrümmert wurde. Mein Sohn Hans-Jürgen und meine Tochter Renate standen zu derselben Zeit auf dem Dach eines Bauernhauses in Westerhausen und waren entsetzte Zuschauer des tödlichen Vorganges. Das Haus über uns wurde zur Hälfte zerstört. In der anderen Hälfte konnten wir das Feuer löschen, so daß uns persönlich nichts geschah. Es war aber keine Bleibe in der Stadt, weshalb wir uns am Nachmittag zu Fuß auf den Weg nach Schwanebeck aufmachten, wo wir einen Freund des Herrn Pfarrers Steinwachs hatten. Aber zurück in die Gegenwart: Im Verlauf der angeregten Unterhaltung wurden mir Fragen gestellt über unsere verwandschaftlichen Beziehungen zueinander. Die Antwort erschien mir so schwierig, daß ich die Anwesenden fragte, ob sie die Geduld hätten, einer längeren Erzählung zuzuhören. Da sie meine Frage bejahten, fing ich an, die Familiengeschichte an dem eigentlichen Knotenpunkt beginnen zu lassen: dem deutsch-französischen Krieg von 1870. Ich fing also an, aus dem Stehgreif zu erzählen und merkte bald, daß Dietrich eine Kassette aufgelegt hatte. Was so aufgezeichnet wurde, habe ich nicht wiedergehört; sicherlich war es nicht vollständig, vielleicht sogar fehlerhaft. Die kleine Gesellschaft schien mir trotzdem sehr interessiert, und somit bleibt mir nichts anderes übrig, als meinen damaligen mündlichen Bericht schriftlich zu vervollständigen und vor allem eine Übersicht zu geben über die Geschichte der Sippen Knaur und Blondeau vor ihrer Begegnung

Épilogue du témoin

Après toutes les frontières, les interdits qui nous ont diversement séparés, nous vivons en ce moment une période de notre histoire où la famille Blondeau-Knaur n'est pas fissurée. Il y a tout lieu de croire que cet état de chose durera, et c'est la tâche de chacun de nous d'oeuvrer dans ce sens. Les 33 descendants des deux couples qui sont à l'origine de cette chronique, sont dispersés entre Berlin - Brest - La Martinique entre la mer Baltique et la Côte d'Azur en passant par l'Italie du Nord. Je me les représente comme autant de points d'ancrage, de fils qui entremêlés à tous ceux que créeront les hommes de bonne volonté, formeront la trame d'une Europe que le temps affermira.
After all frontiers, prohibitions that us have variously separated, we live at this time a period of our history where the family Blondeau-Knaur is not fissureed. There is every reason to believe that this state of thing will last, and it is the task of each of us of work in this senses. The 33 descendants of the two couples that are to the origin of this chronicle, are dispersed between Berlin - Brest - The Martinique, between the Baltic sea and the Coast of Azure in pass by Italy of the North. I represent them as so much points of anchorage, thread that intermingled to all these that create men of willingness, will form hatcies of an Europe that the time will strengthen.
Je durchlässiger die Grenzen zwischen Menschen und zwischen Staaten sind, desto größer sind die Chancen für ein reiches erfülltes Leben. Die 33 Nachkommen der zwei Ahnenpaare Knaur und Blondeau, die die unterste Linie der Tafel bilden, sind zwischen Berlin und der Bretagne (sogar in der Karibik), zwischen dem Ostseestrand und der Mittelmeerküste verstreut. Zwischen Ost und West, zwischen Nord und Süd sind sie an sich winzige Punkte, die jedoch trotz ihrer Winzigkeit eine Rolle bei der Festigung der Beziehungen zwischen Menschen verschiedener Herkunft zu spielen haben, denn sie wissen, daß sie, wenn auch ihre Lebensumstände, ihre Zukunftspläne sehr mannigfaltig sind, zu einem und demselben Stamm gehören.


Table


Avant-propos

La famille Knaur

La famille Blondeau

La famille Claudel

La famille Hubin

Conclusion 





1 - Einleitung
2 - Vorgeschichte der Familie Knaur

3 - Vorgeschichte der Familie Blondeau in Longwy


Schlußwort




La famille Knaur

Nous possédons la chronique écrite par Anton Knaur, 1790-1864, dans laquelle il relate les faits de sa famille, de l'histoire de son père, de lui-même, de ses nombreux frères et de la suite de sa famille. Il est né à Prague, à cette époque une des capitales provinciales de l'Empire austro-hongrois. Le dernier fils d'une famille de dix garçons dont cinq seulement ont survécu aux premières années de leur existence. Le père était négociant en fourrures à Prague et la famille semble avoir vécu dans une aisance assez raisonnable. Jusqu'au moment où en 1794 - ce petit dernier avait donc 4 ans - le père meurt. Sa femme, incapable de continuer les affaires, est réduite, petit à petit, à la misère, après avoir essayé de récupérer l'argent qui se trouvait dans les différentes affaires et les procès qu'elle a mis en oeuvre à ce moment-là, ne lui ont rien rapporté. Les fils les plus âgés étaient déjà en mesure de commencer un apprentissage, mais le petit resté à la maison, n'a même pas eu le temps d'aller à l'école car sa tâche était de recueillir toutes les semaines ou tous les mois les aumônes que les anciens amis de la famille leur accordaient généreusement, quand il les leur accordaient. Il rentrait à la maison avec quelques sous et cela suffisait pour la nourriture de la mère et de lui-même. A neuf ans, il entre dans une fabrique de savon où il travaille du matin au soir pour gagner très peu d'argent qui suffise à la mère pour faire cuire un potage le soir, dans la journée ils se nourrissent de pain et d'eau. A treize ans, il entre comme apprenti orfèvre et son apprentissage dure 6 ans pendant lesquels il apprend son métier toute la journée, de 7 h du matin à 7 h du soir, et on lui accorde la permission de faire quelques travaux supplémentaires après le repas du soir pour lesquels on le paye dans une certaine mesure. Nous arrivons ainsi à l'année 1809. A cette époque, l'Autriche était alliée à la France, Napoléon s'apprétait à épouser l'archiduchesse Marie-Louise, et lui-même atteignait ses 19 ans, c'était donc la conscription, l'entrée dans l'armée napoléonienne. Il put échapper à l'enrôlement en entrant dans l'intendance, dans un service d'intendance, qui, à cette époque, était une affaire privée, une affaire commerciale privée. Le soir, la nuit, il apprend petit à petit les rudiments qui lui permettent d'accomplir son travail commercial. Il est envoyé comme commis et après comme presque directeur de l'intendance, c'est-à-dire pour l'approvisionnement en nourriture et en médicaments des hôpitaux de campagne. En particulier, en Gallicie au moment de la retraite de Russie, pendant laquelle il accueille les soldats à moitié gelés, estropiés, qui revenaient de Russie. 1812, il recule avec les armées napoléoniennes vers le centre de l'Europe. Il se trouve aux environs de Leipzig au moment de la grande Bataille des Nations. Il est témoin du renversement des alliances, de la prise de Paris par les armées des alliés et lui-même est rendu à la vie civile en 1814, après la première chute de Napoléon. Il revient donc à Prague avec une petite fortune qu'il a pu amasser pendant des années d'intendance. Il se marie avec la fille d'un boulanger, à Prague, il obtient ses lettres de bourgeois de la ville de Prague et il décide de fonder une existence et une famille. Il s'installe dans une ville d'eau Teplice, qui, à ce moment-là, connait un grand essor à cause du nombre très important de blessés, de malades des différentes campagnes qui venaient se faire soigner. Il fait construire une maison, mais, peu à peu, s'y commet en déboires de toute sorte. Le nombre de visiteurs de cette ville d'eau diminue de plus en plus, la ville qui s'est enrichi de nombreux hôtels ne lui permet plus d'y vivre. Il a des ennuis avec des concurrents malhonnêtes et, petit à petit, il perd tout ce qu'il avait amassé autrefois. Il est obligé d'abandonner son commerce. A partir de ce moment, il accepte des gérances d'auberges. D'après ce qu'il raconte, il prend plusieurs fois la gérance d'auberges, qui, au début, sont très bien achalandées, mais nous sommes dans les environs des années 1830/1835, c'est l'avènement des chemins de fer. Les relais de poste disparaissent les uns après les autres ou bien ce sont les bateaux à vapeur qui font sauter aussi des étapes, et, c'est toujours la même chose, il commence avec de bonnes affaires et puis les affaires périclitent et il est obligé de chercher ailleurs. Pendant toutes ces années entre 1818 et 1839, à sa femme et à lui naissent 15 enfants, dont seulement 8 survivent à la première enfance. Les 4 premiers passent leur enfance dans une période assez faste et peuvent suivre des cours à l'école, ce qui leur permet de s'installer plus tard dans de bonnes situations. Je ne sais pas exactement ce qui est arrivé aux autres, sauf au dernier qui est pris en charge par un de ses grands frères. Parmi ces 15 enfants celui qui nous intéresse, c'est le troisième, Karl-Anton, qui est né en 1822 et qui, après avoir suivi des apprentissages divers s'installe à Magdeburg qui est en Prusse, mais à ce moment-là, on ne semble pas s'occuper de frontières entre l'Autriche et la Prusse. Là, il rencontre une jeune fille, Mathilde Mund, la fille d'un employé de l'Etat, prussien. Ils se marient et viennent s'installer dans la petite ville de Burg, près de Magdeburg, où ils fondent leur famille et où naissent leurs 4 enfants, entre 1852 et 1859. Karl Anton Knaur possédait ou dirigeait une fabrique de draps et les photos qui nous sont parvenues sont celles d'une famille bourgeoise de l'époque. 1870. C'est la guerre entre la France et la Prusse qui devait aboutir, après la défaite de la France, à la proclamation à Versailles, de l'Empire allemand et l'intronisation du roi de Prusse, Frédéric Guillaume IV comme Empereur d'Allemagne Guillaume 1er. La paisible bourgade de Burg est bien loin des champs de bataille mais on y installe des hôpitaux pour les blessés et les malades, et la bourgeoisie de la ville s'y active bénévolement. C'est ainsi que Mathilde Mund reçoit, daté du 18 août 1872: "au nom de l'Empereur et Roi" la médaille commémorative décernée aux non-combattants, en reconnaissance de son dévouement bénévole aux blessés et aux malades de la campagne 1870-71.
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La famille Blondeau

Nous nous trouvons à Longwy, petite ville lorraine du Nord-Est de la France (département de Meurthe-et-Moselle) située à l'endroit où la Belgique, le Luxembourg et la France se touchent. C'est une cité double: Longwy-Haut, la citadelle construite dans sa forme actuelle au 17ème siècle par Vauban, des rues tracées au cordeau entourent le Champ-de-Mars, encerclées par d'énormes fortifications dont on trouve des répliques tout le long des frontières françaises et dont nous avons, ici, dans le Bade, un modèle parfait sous les yeux, à Neuf-Brisach. Longwy-Bas, aux 17 et 18ème siècles une agglomération agricole dans la plaine qui longe le plateau de la citadelle. Au 19ème et pendant la première moitié du 20ème siècle, la richesse du sous-sol en fer et en houille en a fait un important centre de sidérurgie. A l'heure actuelle, les bouleversements économiques l'ont plongée dans le marasme du chômage, et ses habitants rêvent d'un possible renouveau. Au début du 18ème siècle, on comptait une trentaine de foyers dans la ville basse, et l'un d'eux était celui de la famille Blondeau. Jean Blondeau, né en 1736 y était "laboureur et bourgeois" de la ville. C'est lui qui a fait construire la maison, sise 24, rue Curnot, dans laquelle je suis née et qui existe aujourd'hui encore, la dernière de celles qui furent construites à cette époque. Elle a encore un perron sur la rue, mais le jardin aménagé autrefois sur trois terrasses soutenues par des murs où poussait la corbeille d'argent a laissé la place à des bâtiments modernes qui détruisent totalement l'aspect original. Le jardin descendait jusqu'à la rue des tanneries où quelques maisons étaient bâties le long de la Chiers. La terrasse du haut, ombragée d'une charmille, a cédé la place à une aile. Jean Blondeau a eu au moins 2 fils: Jean, né en 1772 et Michel, né en 1776. C'est ce dernier qui nous intéresse. Enrôlé comme tous les jeunes gens de l'époque pour le service de l'Empire (français, cette fois!), nous le trouvons lieutenant des douanes dans le royaume de Westphalie en 1812. Il y séjournait certainement depuis plusieurs années, car il s'y est marié avec Marie-Cornelie Aerden, originaire de Wüstewest/Nehte. En 1812, il est en poste à Wreden, canton de Ahaus, arrondissement de Steinfurt, département de Lippe et il déclare la naissance de son fils Arnold, le vingt-et-unième jour du mois de janvier. De cette même année 1812, nous possédons une longue déclaration faite par la comtesse Fugger Dietersheim-Brandenburg, "ci-devant prévôt du prieuré de Wreden" où elle loue en termes dithyrambiques le courage et la générosité dont a fait preuve le lieutenant Blondeau à l'occasion du sinistre qui a ravagé la ville de Wreden et dont l'action a permis de préserver les bâtiments du prieuré et la vie de ses 80 habitants. Après la débâcle napoléonienne, Michel revient à Longwy avec sa femme Marie-Cornelie et son fils Arnold. Nous ne savons rien de plus à ce sujet et je ne connais pas la date de sa mort ni celle de sa femme. Son fils Arnold-Théodore Alexandre épouse Marie-Jeanne Célestine Meffe, de Montigny-sur-Chiers. Celle-ci est la fille de Jean Meffe et de Marie-Catherine Clesse. Elle est née en 1823. Arnold T.A. sert dans la gendarmerie. Leur fils Arnold Jean-Baptiste naît à Longwy en 1850, leur fille Marie-Amélie en 1861. En 1866, Arnold Th.A. meurt alors que ses enfants sont âgés de 16 et 5 ans. Pour subvenir aux besoins de la famille M.J. Célestine transforme une partie de la maison pour y installer un commerce d'épicerie qu'elle tiendra jusqu'à un âge très avancé, vers 1907. Lorsqu'arrive l'année 1870 et qu'éclate la guerre franco-allemande, Arnold J.B. a 20 ans. Comme ses camarades, il est appelé sous les drapeaux. Puis, la paix revenue, il revient à Longwy et se prépare à devenir commerçant-drapier. C'est là que le destin l'attend. Arnold J.B. semble avoir traversé les mois de guerre sans dommage, alors que des centaines de milliers de soldats français avaient été faits prisonniers par les troupes allemandes et emmenés vers l'Est. Mais si, dans leur grande majorité, ces jeunes hommes ne retinrent de ce conflit international que des souvenirs plus ou moins épisodiques, pour lui, Arnold J.B., ce même conflit détermina le cours futur de son existence. Je ne sais s'il s'agissait d'une méthode générale et si, à cette époque il n'existait pas de camps où l'on internait les prisonniers faits à l'ennemi, toujours est-il que des jeunes gens de Longwy furent envoyés à Burg où les habitants qui en avaient les moyens les prirent en charge. Quelques-uns furent logés dans la maison du fabricant K. Anton Knaur, et leur captivité ne fut pas trop dure car ils se lièrent d'amitié avec leur hôte forcé et continuèrent les bonnes relations quand ils furent libérés. Ils en parlèrent à leur camarade Blondeau, qui, justement, cherchait à élargir le champ de ses connaissances techniques sur la fabrication du drap hors des frontières. Par l'entremise des anciens prisonniers de guerre, il entra en relation d'affaires avec la maison Knaur et fut invité à venir y faire un stage professionnel. Il s'y rendit en 1873/74. La maison était accueillante. La famille comptait 3 fils et une fille Minna. Minna avait alors 16 ans, elle était ravissante. Arnold avait 23 ans. Ce qui devait arriver arriva: ils tombèrent amoureux l'un de l'autre, échangèrent des photos dédicacées que je possède et se jurèrent fidélité. Cependant, Minna était encore très jeune: Arnold n'avait pas de situation faite et je suppose que les parents Knaur étaient angoissés à l'idée de voir leur fille unique s'installer en un somme toute, lointain pays étranger. Mais, les jeunes gens tinrent bon, et les fiançailles furent célébrées en 1877. Ils se marièrent en 1879. Ce mariage fut le trait d'union entre les familles Knaur et Blondeau, que, jusqu'alors rien ne semblait devoir les rapprocher. Il est à l'origine de notre saga familiale. Sans lui, rien de ce qui va suivre ne serait arrivé. Le jeune couple vint s'installer à Verviers en Belgique. L'année 1880 fut marquée par deux événements familiaux: le 7 mars naquit leur fils Karl Arnold; quelques semaines plus tard mourut le frère aîné de Minna, Karl. Les lettres de l'époque parlent d'un destin tragique, mais ne sont pas plus explicites. Arnold semble avoir rencontré des difficultés dans son commerce, car en 1881 nous retrouvons la famille où vient de naître une petite fille, Marguerite, à Tournay, également en Belgique. Puis, pendant l'année 1882, c'est le drame: Un matin, en se réveillant, Minna trouva son mari mort dans son lit, sans doute à la suite d'un arrêt cardiaque. Elle a 25 ans, deux enfants de 1 et 2 ans; elle est dans l'impossibilité de continuer seule le commerce. Elle prend la seule décision possible, elle retourne avec ses enfant chez ses parents qui, entre temps, se sont installés à Magdeburg. Sa mère Mathilde meurt en 1884, et, dès lors, Minna va vivre auprès de son père, avec un unique but au monde: se consacrer à ses enfants. Ils sont alors tous les trois de nationalité française. Minna la gardera jusqu'à sa mort. Arnold devra choisir à sa majorité et, ayant passé toute sa jeunesse et fait ses études en Allemagne, il obtiendra la nationalité allemande. Marguerite perdra sa nationalité française à son mariage. Revenue dans sa patrie d'origine, Minna se mit en devoir de subvenir aux besoins matériels de ses enfants et d'elle même. Elle transforma l'appartement qu'ils occupaient avec son père en pension pour quelques lycéens dont les parents habitaient loin de la ville et put ainsi assurer la vie quotidienne. C'est dans cet appartement que mourut en 1901, Karl Anton Knaur, âgé de 79 ans. Ce retour à Magdeburg ne brisa pas les relations familiales avec la France. Tous les ans, aux vacances d'été les "enfants de Magdeburg" venaient chez leur grand-mère Blondeau, à Longwy, en compagnie de Minna, tant qu'ils furent petits, seuls ensuite, lorsqu'ils furent en âge de voyager seuls. Il n'y avait à cette époque aucune formalité de passeport à la frontière, ni dans un sens ni dans l'autre. Entre temps, une correspondance fréquente et abondante informait les uns des faits et gestes des autres. Le plus jeune frère de Minna, Robert (né en 1859) devint l'associé de son beau-frère Arnold J.B. et les deux beaux-frères semblent d'après leurs lettres avoir ressenti beaucoup d'affection l'un pour l'autre. Par la suite, Robert fonda à Magdeburg, une grosse maison de commerce. Il eut deux filles, Susi et Irmgard qui n'eut pas d'enfant. Nous avons perdu la trace des deux filles de Susi. Robert perdit sa femme en 1941. Son appartement fut complètement détruit par les bombes. En 1945, il trouva refuge dans un village des environs où il mourut misérablement en 1946.
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La famille Claudel

La famille Hubin

1880 - Pendant que les événements que je viens de raconter avaient lieu, la petite soeur d'Arnold, Marie-Amélie avait grandi et, à 18 ans, avait épousé Alexandre Paul Albert Claudel. Originaire de La Bresse (Vosges), il était issu de cette souche très ramifiée, dont aujourd'hui encore on compte là-bas de nombreux descendants et à laquelle appartiennent Paul et Camille Claudel. A.P. Albert Claudel était receveur des contributions, c'est à dire qu'avec cheval et voiture il parcourait les villes et villages de son district pour encaisser chez les commerçants et les cafetiers les taxes que l'Etat impose sur le café, l'alcool, le tabac etc... Très jeune encore, il tomba malade, si sérieusement qu'il dut prendre sa retraite, à la suite de quoi le couple s'installa chez M. Célestine, dans la maison de Longwy avec leurs deux filles, Madeleine, née en 1883 et Amélie, née en 1889. La cause de cette maladie du père que les médecins étaient impuissants à guérir se révéla d'elle-même. Il s'agissait d'un parasite connu sous le nom de ténia. L'hôte encombrant une fois expulsé, la santé d'Albert lui revint très vite et il vécut encore près d'un demi-siècle après cette alerte. Il entra alors dans une banque de Longwy (celle, si je ne me trompe, du baron d'Huart) et la famille Claudel vécut dès lors auprès de M. Célestine, la grand-mère des enfants Claudel comme des enfants Blondeau de Magdeburg. Tandis que les enfants de Magdeburg étaient élevés par leur mère dans un protestantisme très puritain, à Longwy, Madeleine recevait une éducation très catholique dans une école de religieuses enseignantes avec le Brevet Supérieur de l'époque comme premier but. Très pieuse, à la fin de ses études, elle obtient de ses parents l'autorisation d'entrer au noviciat pour devenir, elle aussi, religieuse enseignante. Elle y resta 3 mois et revint à la maison, très déçue de n'avoir pas pu supporter les méthodes employées pour couler les jeunes novices dans le moule idéal de la parfaite religieuse. Ne sachant à quoi se résoudre, elle accepta la proposition qui lui fut faite de partir pour deux ans en Bohème, dans une école de langues dirigée par un ordre cloîtré, la Visitation de Choteschau près de Pilsen. La Bohème était alors une province de l'empire austro-hongrois et la langue officielle était l'allemand. Les pensionnaires de l'établissement étaient les filles de la bonne bourgeoisie, c'est à dire tchèque. Il leur était interdit d'employer leur langue maternelle, ce qu'elles faisaient pourtant dès qu'elles échappaient à la surveillance. Les demoiselles françaises et anglaises les entendaient bavarder entre elles et ne s'en offusquaient pas. Elles n'avaient cependant jamais l'idée d'apprendre elles-mêmes cette langue difficile. Elles y étaient lectrices, animatrices de conversation en langue étrangère et sa collègue anglaise entra plus tard dans un monacal cloître. Pendant ces deux années, Magdeleine apprit l'allemand et approfondit ses études de piano. Puis, elle repartit pour Longwy, mais en s'arrêtant à Magdeburg, où elle venait pour la première fois. C'était en 1904. Là, les trois cousin/cousines, tous trois encore célibataires, profitèrent bien de leur rencontre qui devait être la dernière pour près de 30 ans. Pendant ce même automne/hiver 1904/1905, un autre enfant du pays séjournait momentanément chez ses parents. Il s'agit ici de Georges Hubin, dont nous connaissons bien la vie à travers le manuscrit de 1000 pages qu'il nous a laissé et qui circule dans la famille. Un exemplaire se trouve notamment aux Archives Départementales ainsi qu'à l'Université et à la Bibiothèque Municipale de Nice, un autre au Secrétariat d'Etat aux Anciens Combattants, à Paris.


La première rencontre
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Succinctement: Né à Longuyon en 1875, il était venu habiter Longwy 11 ans plus tard. Il avait été alors un des clients de l'épicerie Blondeau. A sa sortie de l'école, il était entré à la banque où il avait appris les rudiments du métier sous la férule d'Albert Claudel. C'est à dire que les familles se connaissaient bien. Lui-même avait quitté le pays depuis plus de 10 ans. Engagé volontaire à 18 ans, passé à la légion étrangère avec laquelle il avait combattu dans le Sud-Oranais et participé à la conquête de Madagascar sous les ordres de Galiéni, puis à l'infanterie de marine qui l'avait conduit à la guerre du Tonkin et du Sud de la Chine, il avait ensuite, revenu à la vie civile, parcouru comme commerçant ce qui était alors l'Afrique Occidentale Française, c'est à dire. les pays compris entre le Niger et le Golfe de Guinée. Dans ces pays encore vierges de toute civilisation, il s'était senti si heureux qu'il avait conçu le projet d'y fonder son existence. Il voulait entreprendre un élevage de bovins dans le village de Mané, situé sur les trois rives de la Volta Blanche, à 80 km de Ouagadougou. Pour réaliser ce projet, il était revenu à Longwy pour y réunir les capitaux nécessaires. Il fit des visites soit pour ses affaires, soit à cause des relations familiales et accompagna sa mère lorsque celle-ci se rendit, un jour, dans la famille Claudel. Comme je l'ai dit plus haut, Magdeleine revenait de Bohème, ce qui n'était pas courant à l'époque. Elle avait 21 ans, était donc, comme l'on dit dans tout l'éclat de sa jeunesse. Lui était beau garçon, il parlait bien des régions lointaines où il avait vécu. Bref, l'étincelle jaillit. Les jeunes gens firent par la suite de longues promenades, au cours desquelles ils décidèrent de se marier et de tenter ensemble la grande aventure africaine. Cette rencontre, cette décision emportait Magdeleine bien loin de la vie conventuelle à laquelle elle aspirait depuis tant d'années. Ainsi en avait décidé le destin. Ils se marièrent en mai 1905 et, après les préparatifs nécessaires à une expédition de cette importance, ils s'embarquèrent à Bordeaux, direction de la brousse, de Mané, une région où Magdeleine Hubin-Claudel allait être la première femme blanche à y pénétrer. Je ne reviens pas sur ces années d'Afrique qui sont relatées en détail dans le manuscrit précité.Après un séjour de 2 ans dans ces contrées au climat épuisant, Georges et Magdeleine se mirent en route vers la France pour reprendre des forces et continuer ensuite l'entreprise qui promettait une belle réussite. Ce projet devait tourner court, comme nous le verrons plus loin. Pendant leur absence, 2 changements avaient eu lieu dans la famille. Amélie Claudel, la petite soeur de Magdeleine avait épousé en 1906 le lieutenant Henri Sohet que sa carrière militaire allait conduire de Stenay (Meuse), à Annecy (Hte-Savoie) puis, au printemps 1914 à Remiremont (Vosges). La même année à Magdeburg, Marguerite Blondeau avait épousé Hermann Kiessling, ingénieur agronome, responsable d'une partie des espaces verts de la ville. Ils eurent à leur disposition une jolie maison au milieu du grand parc de Herrenkrug où devaient naître leurs enfants: Karl-Hermann 1907, Marguerite en 1909 et Kurt en 1911. K. Arnold était depuis 1904 professeur au Lycée Notre-Dame, celui-là même où il avait fait ses études secondaires et où il devait enseigner toute sa vie. Mais revenons à nos Africains. Au cours de leur voyage vers la France, Magdeleine s'aperçut qu'elle était enceinte. Il n'était donc pas question qu'elle reparte dans la brousse avant l'accouchement. Il fut donc décidé que Georges repartirait seul, qu'elle attendrait la naissance de l'enfant chez ses parents à Longwy et rejoindrait son mari quand le bébé pourrait supporter le voyage. Le bébé naquît le 21 février 1908; c'était une petite Suzanne, et quand, ce même jour Georges reçut le télégramme lui annonçant la nouvelle, il se rendit compte sur le champ que ce projet d'élever un bébé au fond de la brousse africaine était une utopie. C'est lui qui rentrerait en France. Ce qu'il fit après avoir liquidé son entreprise. Revenu à Paris, il ressentit très vite l'étroitesse de la vie dans la métropole, et laissant sa femme et sa fille à Longwy, il s'embarqua pour le Canada où il était sûr de bâtir une nouvelle existence. Il devait y rester 3 ans. Magdeleine et Susanne, c'est à dire. ma mère et moi, vivions donc à Longwy avec la grand-mère M. Célestine Blondeau, impotente depuis plusieurs années, et les parents M. Amélie et Albert Claudel. Ma mère trouva très vite des élèves auxquels elle donnait des cours d'allemand et de piano tandis que M. Amélie s'occupait du ménage, de la grand-mère et de moi-même, l'épicerie ayant disparu. Cet état de chose ne dura pas longtemps: en 1909, ce fut la mort de M. Célestine, à l'âge de 86 ans. Puis, en 1910, à la suite d'un chaud-et-froid, M.Amélie, douée cependant d'une santé robuste, attrapa une pneumonie à laquelle elle succomba en 7 jours; elle avait 49 ans. J'avais alors 2 ans et demi. Et, le grand-père ne pouvait s'occuper de moi, je fus envoyée à l'école. Il n'y avait alors pas de classe dite maternelle. Dès que l'on entrait à l'école, on apprenait à lire, écrire, compter, et le reste. Je ne me souviens donc pas d'un temps où la lecture aurait pu me poser des problèmes. C'est à cette époque, Noël 1910, qu'eut lieu une réunion familiale qui concernait aussi les cousins de Magdeburg. M.Célestine Blondeau avait une soeur que je n'ai jamais connue que sous le nom de "la marraine". Elle avait alors plus de 80 ans, était veuve et sans enfant, et habitait sur le plateau de Longwy-Haut à Villers-la-Chèvre, une grande maison avec un jardin plein de fraises. Ne voulant pas que les héritiers, les petits neveux et nièces de son mari et d'elle-même, payent trop de droits de succession à sa mort, elle les convoqua tous et leur donna à chacun 10.000 francs-or. A l'époque, Marguerite Kiessling/Blondeau ne pouvant quitter mari et enfant délégua les pouvoirs à son frère et c'est à cette occasion qu'a été prise une petite photo. Ce fut la dernière visite de K. Arnold à Longwy. Il allait épouser en 1913 Ilse Brinkmann, fille d'un architecte de Magdeburg, puis ce serait... 1914. Pendant que ces événements se déroulaient à Longwy, mon père nous avait préparé une nouvelle existence à Quebec où il attendait notre arrivée. Ma mère, cependant, ne voulant pas laisser son père seul dans la maison jusque-là si animée, ne put se résoudre à s'expatrier et ce fut mon père qui revint au pays. C'était en 1911. Il transforma la maison, y fit mettre l'électricité et le téléphone, et y installa un cabinet d'assurance, de la compagnie La Paternelle dont le siège était à Paris. Toujours aussi actif et épris de modernisme, il ne faisait pas ses tournées à pied, comme ses concurrents, mais à bicyclette, ce qui augmentait beaucoup son rayon d'action. Les affaires allaient donc pour le mieux lorsqu'arriva le mois d'août 1914.

La première guerre mondiale et ses suites   #0_sommaire_france

Août 1914, le siège de Longwy.

Il me reste des derniers jours de juillet 1914 trois visions extrêmement nettes. La première, celle d'une petite fille de six ans discutant sur le perron de la maison avec une camarade de son âge. Fortes de leurs connaissances historiques et géographiques acquises au cours de leur déjà longue scolarité, elles supputent les chances de victoire de la France et s'accordent à la lui prédire très proche puisqu'elle est alliée à ces deux grandes puissances que sont la Russie et l'Angleterre. La deuxième, celle de cette même petite fille qui, en compagnie de son père observe à l'aide de jumelles la ligne d'horizon qui barre le ciel en direction approximative de l'Est. C'est le bord du Plateau par où passe la frontière avec l'Allemagne, entre Metz et Longwy. Le long de cette ligne, on voit distinctement passer des cavaliers au casque caractéristique: c'est une patrouille de Uhlans en reconnaissance. La menace est proche. La troisième: le père et la mère rangent dans un grand placard de la cuisine des quantités de provisions (en particulier un énorme jambon!) qui permettront de survivre à un manque de ravitaillement, même prolongé. Ces trois scènes sont étonnamment claires dans mon esprit. Par contre, je ne me souviens absolument pas du départ de mon père pour le front. Je sais, par les récits souvent répétés, qu'il bouillait d'impatience et craignait que l'administration militaire ne l'oubliât: il n'avait que 39 ans, mais ayant devancé autrefois l'appel aux armes, il faisait nominalement partie de la classe 93, c'est-à-dire de "vieux" ayant dépassé les 40 ans, une situation qu'il ne pouvait pas supporter. Comme ses mémoires le racontent: il sut s'arranger pour prendre une part des plus actives à la guerre et en voir son existence bouleversée. Dès la déclaration de guerre, les combats en rase campagne s'étaient engagés, tout le long de la frontière entre les soldats allemands dans leurs uniformes gris-vert qui se noyaient dans le paysage et les fantassins français dont les pantalons rouge-garance constituaient une cible dérisoire aux tireurs ennemis. La place-forte de Longwy était un des bastions avancés des fortifications frontalières, et elle ne pouvait être surmontée que par le travail de l'artillerie. La ville connut alors une quinzaine de jours de répit, pendant lesquels la population tenta de faire face aux événements en cours. Le plus grand hôtel de la ville, l'hôtel des Récollets fut transformé en hôpital de campagne où bientôt affluèrent les blessés; les dames qui avaient suivi les cours de la Croix Rouge, parmi elles, ma mère, prirent leur service comme infirmières bénévoles; on aménagea les caves des maisons en abris et pendant ce temps, l'artillerie allemande installait ses batteries en territoire luxembourgeois à une distance calculée de telle façon que les canons allemands modernes pouvaient atteindre la citadelle mais étaient à l'abri des obus français, d'une portée beaucoup plus faible. Et lorsque tout fut en place, vers le 20 août, le siège de la forteresse commença. Notre vieille maison était bâtie au-dessus d'une cave voûtée comme une crypte d'église. Cette cave était accessible par un escalier intérieur et possédait en outre une ouverture vers la rue, sous le perron, fermée solidement par une porte de fer. Elle présentait donc toutes les qualités que l'on demande à un abri efficace. C'est là, avec des matelas de fortune, que nous avons passé les 5 jours et les 5 nuits qui furent nécessaires aux obus allemands pour anéantir la ville haute. Naturellement, tous les projectiles n'atteignaient pas leur but: les coups tirés un peu trop court tombaient sur la ville basse et une partie de notre toit s'envola ainsi avec la cheminée à un moment où ma mère tentait de préparer un repas dans la cuisine: elle abandonna ses casseroles pour nous rejoindre dans la cave. Elle n'était d'ailleurs pas souvent là, avec mon grand-père et plusieurs parents qui avaient plus confiance en notre cave qu'en la leur. Elle allait à l'hôpital soigner les blessés de plus en plus nombreux. Nous étions soulagés à chacun de ses retours, la traversée de la ville étant une aventure dangereuse. Une de mes camarades de classe, Marie-Louise Huguenin, qui habitait dans la rue des Tanneries, en face et en contre-bas de notre jardin, eut la cuisse fracassée par un éclat d'obus entré par le soupirail de leur cave. Elle fut transportée à l'hôpital militaire et lorsque le bombardement eut cessé, ma mère m'emmena la voir. Je lui apportai la poupée qu'elle réclamait fiévreusement et je revois nettement la petite chambre où elle était couchée et où elle mourut quelques jours plus tard. Elle avait, comme moi, 6 ans. Ce fut ma première rencontre avec la souffrance et la mort. Au bout de 5 jours et de 5 nuits, pendant lesquels les valeureux artilleurs se firent massacrer tout en lançant sur l'ennemi, sans lui causer aucun dommage, tous les projectiles dont ils disposaient, la citadelle dut déposer les armes. Le canon s'étant tu, nous avions abandonné la cave, et c'est d'une fenêtre du rez-de-chaussée que j'ai timidement regardé les plénipotentiaires allemands passer sur la grand-rue avec un drapeau blanc. Ils montaient à la citadelle pour y faire signer la reddition de la place. Les troupes allemandes entrèrent dans la ville qui fut occupée jusqu'à l'armistice de 1918. Nous étions coupés de toutes communications, aussi bien avec l'Ouest où mon père combattait sur le front où vivait ma tante Amélie et son mari, lui aussi au front, et où s'étaient réfugiés bon nombre d'habitants des régions de l'Est (Ardennes, Meuse) qui avaient fui devant le déferlement des armées ennemies, qu'avec l'Est, c'est-à-dire Magdeburg, dont nous n'avions plus aucune nouvelle pendant de nombreuses années. Ma mère continua à soigner les soldats français blessés ou malades jusqu'au moment où, rétablis, ils partaient, comme prisonniers de guerre, vers l'intérieur de l'Allemagne. Elle eut alors d'autres occupations: ses connaissances d'allemand acquises en Bohème, lui permirent d'aider les concitoyens dans leurs rapports avec l'occupant: obtenir un laissez-passer pour aller dans un village voisin, ou se plaindre de difficultés avec les militaires allemands logés chez l'habitant. Nous avons eu de nombreux sous-officiers qui se sont succédés dans notre maison et n'avons pas eu à nous en plaindre. Au contraire, car, par l'un deux (Rottner) dont la femme habitait en Suisse, nous avons pu avoir de temps en temps des nouvelles de mon père. C'est ainsi qu'un matin d'avril 1915, nous apprenions, par un court message, que mon père venait d'être blessé pour la quatrième fois, qu'il était soigné dans un hôpital de Dijon et que son état était très grave. Ma mère ne réfléchit pas longtemps: elle emplit un petit sac de voyage, dit adieu à son père qui, dès lors resta seul dans la maison de Longwy et, me prenant par la main - j'avais 7 ans - elle se mit en route pour la France libre. Nous avons passé la frontière du Luxembourg à pied par de petits sentiers de la forêt, et, à partir de là commença une odyssée de 5 jours, avec parfois des retours en arrière par Trêves, Mannheim, Karlsruhe, enfin Bâle, Genève et Lyon pour atteindre enfin Dijon. Cette aventure a dû à ma mère d'être décorée de la Médaille des Evadés. Pour moi, j'ai juré en arrivant à Dijon que je ne remonterais plus jamais dans un train. Inutile de dire que je n'ai pas tenu ma promesse. Mon père était hospitalisé au lycée Carnot, transformé devant l'afflux des blessés, et les médecins avaient peu d'espoir, de le sauver. Un éclat d'obus avait fracassé sa cuisse gauche si près de la hanche que la technique chirurgicale de l'époque rendait l'amputation impossible. Comme il était resté de longs jours sans soin (la bataille des Eparges faisait rage) la gangrène s'était déclarée. L'arrivée de ma mère à qui on permit tout de suite d'occuper à plein temps un poste d'infirmière dans la chambre qu'il occupait avec plusieurs camarades lui rendit la tranquillité morale et peu à peu la vigueur physique nécessaire à sa guérison. On tenta sur lui une des premières sutures osseuses de l'époque et il garda sa jambe. Mais lorsqu'après de longs mois d'immobilité absolue (pendant lesquels il fit de petits chef-d'oeuvre en macramé), il put sortir du plâtre, sa jambe gauche était raccourcie de 7 cm et le genou et la hanche définitivement ankylosés. Ainsi, cet infatigable coureur des bois était devenu invalide de guerre à 85 % avec nécessité d'une tierce personne puisqu'il ne pouvait plus se baisser pour atteindre le bas de son corps. Avec l'aide de ma mère, sa fidèle compagne, il a supporté ce terrible handicap, sans jamais se plaindre, pendant 50 ans. Pour ma part, je suis restée à Dijon, où j'allai à l'école jusqu'aux grandes vacances de 1915, date à laquelle je partis rejoindre ma grand-mère paternelle. Celle-ci, fuyant l'incendie de sa bonne ville de Rethel dans les Ardennes et l'avance des troupes allemandes vers la Marne, s'était réfugiée au Mans où habitait son plus jeune frère. C'est là où j'ai attendu la guérison de mon père, donc la réunion de mes parents. Lorsqu'en automne 1916, après la démobilisation de mon père, nous vînmes nous installer à Paris, notre situation n'était guère brillante. Tout ce que nous possédions se trouvait à Longwy, de l'autre côté du front; nous faisions partie de la masse des réfugiés de l'Est et du Nord dont les seuls biens étaient les vêtements qu'ils portaient, qui prenaient leurs repas dans des restaurants communautaires installés à leur usage et qui cherchaient du travail. Mon père trouva un poste d'employé de bureau au siège social de la compagnie d'assurance La Paternelle pour le compte de laquelle il avait monté son agence, à Longwy. Je fus inscrite à mon école de la Place Notre-Dame des Victoires et nous logions dans une chambre d'hôtel, rue de Richelieu. La fenêtre donnait sur le théâtre du Palais-Royal où l'on jouait alors "Madame et son filleul" dont nous entendions chaque soir les échos. Pendant l'entracte, les spectateurs prenaient bruyamment l'air sur les balcons extérieurs du théâtre. Bientôt, ma mère entra également à La Paternelle, si bien que, à 8 ans 1/2, je me trouvais livrée à moi-même dans ce grand Paris où personne ne pouvait s'occuper de moi en dehors des heures de classe. Il fut alors décidé de me mettre en pension et j'entrai comme interne à Argenteuil dans une institution très catholique conduite par d'anciennes religieuses sécularisées, où les exercices de piété que je suivais avec une grande assiduité tenaient une large place. Une partie des bâtiments avaient été transformés en hôpital militaire et j'y retrouvai l'atmosphère qui m'avait été familière à Longwy, puis à Dijon. Les blessés en voie de guérison prenaient l'air dans notre cour de récréation, et j'ai conservé toute ma vie le souvenir de ce jeune zouave qui, assis sur un fauteuil roulant, jouait à la balle avec nous. Il avait été amputé des 2 jambes et nous échangions de gentilles plaisanteries. Je me suis souvent demandé quelle avait pu être sa vie lorsque, dépouillé de son bel uniforme flamboyant et, de son auréole de héros, il s'était retrouvé, anonyme dans un costume civil et tel qu'il resterait jusqu'à la fin de ses jours: un cul-de-jatte, cloué sur son fauteuil roulant. Paris n'était pas loin du front. Ses habitants eurent bientôt la primeur des nouvelles tactiques de guerre. Ce furent d'abord les attaques aériennes, annoncées par les sirènes qui faisaient descendre les gens dans les caves. A l'internat, on nous faisait d'abord passer à la chapelle où, les bras en croix, nous implorions le seigneur de nous préserver des bombes, c'est-à-dire de les envoyer plutôt sur nos voisins. Et comme ceux-ci devaient lui exprimer la même requête... J'étais très heureuse lorsqu'une alerte se produisait pendant un de mes courts séjours à Paris. Comme mes parents ne descendaient jamais à la cave, nous pouvions assister au spectacle du ciel illuminé par l'explosion des shrapnells de la DCA. Mais bientôt la population fut confrontée à un nouveau genre de danger: des obus s'abattaient sur la ville, sans que l'alerte ait été donnée, des obus qui venaient on ne savait d'où, puisqu'aucun avion n'avait été signalé. Le premier jour, nous restâmes des heures à l'abri jusqu'au moment où l'on fit connaître l'origine de cette nouvelle menace; les premiers canons à longue portée, la grosse Bertha, comme on les appela très vite. Ils étaient la préfiguration des fusées V1 et V2, lancées sur Londres pendant la seconde guerre mondiale et (j'ajoute ceci en cette fin de mois de janvier 1991) celle des missiles qui tombent aujourd'hui sur l'Etat d'Israël. Il y eut alors un moment de panique, et puis, la population s'habitua à ce danger imprévisible et imparable et la vie normale reprit son cours. A ce moment, ma tante Amélie dut subir une opération à la thyroïde. C'était une des premières du genre, la technique que les chirurgiens d'aujourd'hui emploient chaque jour n'était pas encore au point. Elle ne survécut pas à l'opération. C'était au printemps 1917, elle avait 28 ans. Son mari, commandant aux chasseurs alpins en garnison à Remiremont (Vosges) était au front. Il mit son appartement à notre disposition lorsque la direction de La Paternelle proposa à mon père le poste d'inspecteur pour toute la région de l'Est, alors accessible. Nous allions donc nous installer à Remiremont en mai 1918, au moment de la dernière offensive allemande. J'y ai passé un été merveilleux dans des promenades interminables avec ma mère dans des forêts pleines de myrtilles, malgré le grondement des canons qui les accompagnaient. Novembre 1918. J'avais 10 ans; ce fut l'armistice, l'arrivée du grand-père Claudel, délivré de 52 mois d'occupation, puis en juin 1919 la naissance de ma première petite soeur Monique. La guerre était finie, il fallait recommencer à vivre normalement. Mes parents n'avaient pas envie de retourner à Longwy. Ils vendirent donc la maison familiale qui, 150 ans après sa construction, cessait d'être "la maison Blondeau". Ils achetèrent une propriété à Croismare, village situé à 6 km de Luneville. La maison, entourée de beaux arbres, avec un grand potager, un verger plein de mirabelles, des prés sur une surface de près de 2 ha, était bâtie un peu en retrait de la route nationale Paris-Strasbourg. Elle s'appelait La Belle Etoile. Mon père, fidèle à son éternel esprit d'entreprise, voulait y pratiquer la culture maraîchère et y faire l'élevage de lapins-angoras. Le projet ne tenait aucun compte de son infirmité qu'il voulait surmonter à tout prix. Il dut bientôt reconnaître que son rêve était irréalisable (qu'à cela ne tienne!). Il devint bientôt directeur de la verrerie de Croismare qui avait été rachetée à très bas prix par les frères Mueller dont la firme est bien connue aujourd'hui: Mueller Frères Lunéville. Cette verrerie, située au milieu du village, était très ancienne, difficile à moderniser. Mon père se décida donc à édifier une nouvelle verrerie sur les prés de la Belle Etoile dans laquelle les ouvriers verriers, de l'ancienne furent embauchés. Malheureusement, cette entreprise ne fut pas du goût des maîtres-verriers nancéens Daum. Il s'ensuivit un procès à la suite duquel mes parents durent céder et la verrerie et la Belle Etoile. C'est dans cette maison que naquirent Françoise en janvier 22 et Jean-Pierre en août 24. Entre 1927 et 1936 mes parents, mes frères et soeurs s'installaient d'abord à Lunéville, puis aux environs de Nancy à Bouxières-aux-Dames. Pendant les premières années de notre séjour à la Belle-Etoile, le grand-père Claudel avait partagé notre vie. Puis, il s'était installé dans une maison de retraite à Châtel/Moselle où il mourut en 1932 d'une pneumonie. Il était âgé de 83 ans. 1921. J'avais obtenu, en 1919 au Collège de Remiremont le diplôme qui correspondait au Certificat d'Etudes Primaires et mon père considérait que ma scolarité était achevée et qu'il me suffirait, dès lors, de lire quelques livres scientifiques et littéraires pour parachever ma culture. Il m'inscrivit cependant à un cours par correspondance, que je suivis pendant deux ans. Dans mon fort intérieur, j'aspirais à une évolution mieux dirigée et je demandai à entrer dans un établissement secondaire. Comme nous habitions en pleine campagne, ce désir ne pouvant être réalisé que si j'étais interne soit à Lunéville, soit à Nancy. Il n'était pas question pour mes parents, d'assumer une telle charge financière, d'autant plus que les études elles-mêmes ainsi que livres et cahiers étaient entièrement payés par les parents. Cependant, mon père étant grand invalide de guerre, j'avais la qualité de pupille de la nation, et comme telle, le droit de me présenter à l'examen d'aptitude à l'obtention d'une bourse. C'est ce que je tentai et obtins, en effet, une bourse d'internat et d'externat pour le lycée Jeanne d'Arc de Nancy, où je passai en 1925/26 le bac (le bac se passait alors en 2 parties) après 5 années passées à Saint-Fontaine, l'internat du dit lycée. 1926. Le grand rêve de mon enfance et de ma jeunesse avait été de suivre les traces de mes parents et de découvrir le monde. Mais une jeune fille de 18 ans peut difficilement s'engager dans la Légion Etrangère et le seul chemin qui me sembla praticable fut de devenir professeur de mathématiques et de demander alors un poste soit à Tananarive, soit à Saïgon, soit dans toute autre contrée exotique. Mais la réalisation de ce plan s'avérait difficile, à cause de la situation financière de mes parents. Après la débâcle de la verrerie, ils n'avaient d'autres revenus que la pension d'invalidité du père, et la famille comptait, à part moi, 3 enfants encore très jeunes. Il fallait que je me débrouille seule. Je résolus de solliciter un poste d'institutrice et d'employer les jeudis (jour sans école), les dimanches et toutes les soirées à mes études. A cette époque, les candidats du métier d'instituteur étaient formés dans les Ecoles Normales où l'on entrait après le Brevet Simple vers 15 ans. Les études duraient 3 ans et les lauréats prenaient leur premier poste à 18/19 ans. Il était également possible d'entrer dans la carrière avec le seul baccalauréat. Les difficultés étaient alors plus grandes, car on se lançait dans l'aventure avec des connaissances suffisantes mais sans aucune notion théorique ou pratique. Je fis donc ma demande et je fus envoyée dans le village de Bertrambois, situé sur les pentes ouest du massif vosgien, non loin du Donon, à 5 km de la gare la plus proche, celle de Cirey-sur-Vesouze. Dans cette école de village, il y avait 3 classes: celle des grandes filles (de 7 à 13 ans) et celles des petits des 2 sexes (de 4 à 7 ans). Ce fut celle qui m'échut. Une bonne cinquantaine de gosses divisés en 3 groupes qu'il fallait occuper dans le même temps. Les plus jeunes dessinaient, regardaient des images, avaient des jeux de construction; les moyens apprenaient à lire, à écrire, à compter avec les grands (ceux de 6 ans) ou abordaient les analyses grammaticales, les quatre opérations, les leçons de choses, tout cela à côté de la gymnastique dans la cour et les leçons de chant, très chers à l'inspecteur de primaire. La vie privée ne manquait pas non plus de charme: j'avais à ma disposition une chambre et une cuisine sans eau, ni gaz, ni électricité. On s'approvisionnait d'eau à la fontaine du village, on fourbissait tous les jours la lampe à pétrole; le bois de chauffage qui servait aussi à alimenter le poêle de la salle de classe, était fourni scié, mais non fendu, par la commune, et les classes duraient de 8 h à 11 h et de 13 h à 16 h. Il fallait ensuite faire des modèles d'écriture sur les cahiers et préparer l'emploi du temps pour le lendemain. Le mercredi soir, après l'école j'enfourchais ma belle bicyclette Hirondelle - qui possédait une 2ème vitesse par rétropédalage - pour prendre le train à Cirey. Puis à l'aide de 2 tortillards, j'atteignais la grande ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg à Luneville pour débarquer vers 20 h à Nancy. Le jeudi se passait à assister aux cours qui avaient lieu ce jour-là et à m'enquérir auprès de mes rares condisciples (nous étions 7 à préparer le même examen) de ce qu'ils avaient fait et de ce qu'ils avaient à faire. Le jeudi soir, je prenais le chemin du retour en sens inverse de la veille avec, pour arriver à ma maison d'école vers 22 heures, la traversée de forêts de hêtres sur 5 kilomètres. Cet emploi du temps était très vivifiant et m'a permis de passer les examens de mathématiques pures de la licence. Pour posséder une licence d'enseignement, j'aurais dû passer également un certificat de physique pour lequel une présence plus assidue aux travaux pratiques aurait été nécessaire. Le destin en avait décidé autrement, comme la suite de mon récit le montrera. Je ne solliciterais jamais un poste à Tananarive ou à Saïgon...


La famille Hubin - Blondeau
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La deuxième rencontre

Les années trente à Magdebourg  

Revenons à l'été 1926. Au mois d'août, ma mère reçut une lettre qui lui causa une grande émotion. Elle venait de Magdeburg, de son cousin Arnold. Depuis 12 ans maintenant, il n'y avait plus eu de contact entre les membres de la famille séparés par une frontière qui avait fait tant de mal des deux côtés. Cette difficulté à renouer avec un passé révolu, Arnold la ressentait de la même façon. Lui qui autrefois venait en France à peu près tous les ans, n'avait pas eu le courage d'y revenir dans les premières années de l'après-guerre. Cet été seulement, il y était revenu et était allé à Longwy, espérant y retrouver la maison d'autrefois et ses habitants. Il n'avait pu y trouver qu'une adresse et il s'en servait pour donner à Magdeleine les nouvelles de Magdeburg. Aucun des membres de la famille n'avait été mobilisé. Hermann Kiessling avait dépassé 45 ans et lui-même ayant perdu un oeil à l'âge de 7 ans était réformé d'office. Il avait seulement été requis comme interprète auprès des prisonniers français internés à la citadelle et employé à la censure de leur correspondance. La vie privée avait été celle de toute la population, plus dure qu'on ne l'avait imaginé à l'Ouest, surtout pendant les mois de l'après-guerre et de l'inflation dont on a peu parlé à l'époque dans les médias occidentaux. Arnold et sa femme étaient venus s'installer dans la maison au bord de l'Elbe que les parents Brinkmann n'étaient plus en mesure, financièrement d'entretenir seuls. Malheureusement, sa femme Ilse, atteinte d'un cancer, avait dû être opérée et les chances de guérison semblaient bien compromises. Sa mère, Minna, victime d'une attaque d'apoplexie, était restée paralysée pendant de longs mois et venait de s'éteindre au printemps de cette même année à l'âge de 69 ans. Les enfants de sa soeur Marguerite avaient grandi dans le merveilleux cadre du parc de Herrenkrug. Ils avaient maintenant 18, 16 et 14 ans. Arnold espérait recevoir bientôt une réponse que ma mère, selon son habitude, écrivit le jour même et il comptait bien venir nous voir au cours du prochain été. C'est ce qu'il fit en juillet 1927. Magdeleine et ses 4 enfants étaient à la gare pour accueillir cet oncle Arnold inconnu mais personnage de légende. Les retrouvailles furent émouvantes d'autant plus que sa femme, Ilse, venait de s'éteindre à l'âge de 42 ans. J'étais en vacances, et l'oncle Arnold me proposa de passer quelques semaines à Magdebourg. J'allai avec mon père à Paris (2 nuits en train et une journée de démarches) pour y chercher le visa nécessaire à l'entrée en Allemagne, et je partis pour mon premier séjour à Magdebourg. Ce fut pour moi un enchantement: les bains dans la piscine du bord de l'Elbe, en face de la maison, de longues promenades sur les innombrables chemins cyclistes qui sillonnaient la campagne, la forêt et la ville. Je fis la connaissance des cousins et cousines de Herrenkrug, et si nos conversations n'étaient pas très animées - ils ne parlaient pas français et j'avais oublié moi-même les quelques rudiments d'allemand, deuxième langue nécessaire à l'obtention de la première partie du bac (1925!) - mais nous apprîmes à nous connaître et leur mère, tante Marguerite, s'efforçait de retrouver son français d'autrefois. A mon retour à Bertrambois, commença un échange épistolaire très régulier entre l'oncle Arnold et sa nièce. Il dura pendant toute l'année scolaire, et juillet 1928 me vit reprendre le chemin de Magdebourg. Encore une année de correspondances, un troisième séjour, cette fois dans la maison Kiessling du parc de Herrenkrug, et il devint évident que nos sentiments mutuels avaient évolué et qu'il n'était plus question entre nous de rapport oncle/nièce. Arnold qui s'était aperçu de ce changement avant moi, hésitait à le reconnaître à cause de la différence d'âge - 28 ans - qui nous séparait. Le sentiment de sa responsabilité vis-à-vis d'une toute jeune femme le faisait reculer devant la réalisation d'un mariage. Lorsqu'à mon tour, je vis clair, je sus le convaincre que ce qui compte, dans une union, c'est la similitude de goûts, le bonheur de vivre ensemble, la confiance totale que l'on a l'un dans l'autre. Les âges respectifs n'ont aucun impact sur l'intensité ni surtout sur la durée d'un couple. Le destin de ses parents, dont la vie commune avait durée 3 ans, alors qu'ils étaient jeunes tous les deux, en était une preuve évidente. En novembre 1929, nous décidâmes donc de nous marier et en janvier 1930 le pasteur Frantz de la Johannis-Kirche nous unit dans la maison de Herrenkrug. Mon oncle n'était plus mon oncle; Arnold était mon mari! Je pense que cette évolution de nos rapports est due au fait qu'en réalité, la différence de nos âges n'était pas aussi grande que les chiffres pouvaient le faire penser. Si, pour l'état civil, je n'avais pas encore 22 ans, le fait d'avoir dès l'âge de 2 ans 1/2 vécu à part entière la vie des adultes, m'en donnait beaucoup plus. Pour sa part, Arnold avait conservé une fraîcheur d'âme toute juvénile. Nous n'avons jamais regretté le pas que nous venions de franchir. Au mois de décembre 1930, ce fut la naissance de notre fils Hans-Jürgen (Jean-Georges) et, en février 1931 Magdeleine vint pour la deuxième fois à Magdebourg pour y assister au baptême de ce petit garçon qui était le fils de son cousin Arnold, le neveu de Marguerite et ... son propre petit-fils. Nous devions ensuite avoir deux filles: Marlène en août 1932 et Renate en 1937.

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S'il n'est pas courant que, dans un couple, les conjoints appartiennent à 2 générations différentes, ce l'est encore moins qu'une telle exception se produise deux fois dans la même famille, à quelques années d'intervalle. Et pourtant. En octobre 1936 eut lieu dans la cathédrale de Magdebourg, le mariage de Marguerite Kiessling et d'Ernst-Adolf Knaur. Marguerite était la fille de Marguerite Blondeau, la petite-fille de Minna Knaur; Ernst-Adolf était le fils d'Adolf Knaur, frère de Minna qui avait épousé à Breslau ,Elsbeth Rittner, avait eu deux filles, Hertha née en 1893 et Marga née en 1896, puis beaucoup plus tard, en 1906 un fils Ernst-Adolf. Il s'agissait, pour ce nouveau couple, d'une situation analogue à la nôtre: Marguerite épousait le cousin germain de sa mère. Il s'en suivait, pour elle comme pour moi, des imbroglios familiaux; elle devenait la cousine germaine de sa mère; ses enfants, comme les miens, étaient les petits-neveux de leur père. Et tout comme pour moi, elle avait en commun avec eux un couple d'arrières-grands-parents. Ils s'agissait pour eux du couple Anton Knaur/Mathilde Mundt, tandis que chez nous, nos ancêtres communs étaient Arnold Th. A. Blondeau/Marie-Jeanne Célestine Meffe! Marguerite et Ernst-Adolf Knaur eurent par la suite 3 enfants: Ulrich en 1938, Sigrid en 1940 et Christiane en 1942. Les parents Kiessling, eux, ayant atteint l'âge de la retraite, avaient quitté Herrenkrug et habitaient un appartement citadin, non loin de la cathédrale.

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Pendant que se déroulaient les événements familiaux que je viens de relater, le monde, autour de nous, commençait à gronder. Je laisse aux historiens le soin de commenter, de juger la marche du temps. Je ne raconte ici que ce dont j'ai été témoin ou ce que j'ai appris de mes proches. Nous habitions dans un quartier nouvellement construit, en bordure de la ville, avec des rues larges et sinueuses, bordées de maisons à 2 étages, des trottoirs propres à l'usage des patins à roulettes et des chemins cyclistes, comme dans la plupart des rues de la ville. Quelques magasins nécessaires à la vie journalière: boucherie, boulangerie, 2 épiceries, mais aucune agitation commerciale. Dans ce cadre paisible, je n'ai été témoin d'aucune violence de quelque sorte que ce soit. Aucune démonstration, aucun défilé; et les quelques Chemises Brunes qui se rassemblaient parfois au coin d'une rue, participaient plus d'un folklore pour soldats de plomb, qu'ils ne semblaient être les précurseurs d'une tragédie mondiale. La vie professionnelle de mon mari n'a pas été non plus perturbée extérieurement. Le lycée où il enseignait depuis plus de 30 ans était un lycée classique avec des effectifs moins nombreux que ceux des autres établissements scolaires à enseignement moderne. Très souvent, les fils y succédaient à leurs pères et il s'ensuivait une atmosphère de grande famille. Aucun des professeurs n'est entré dans le parti national-socialiste. Ils furent priés de le faire, refusèrent et l'affaire en resta là. Une difficulté survint lorsque le directeur en exercice, le docteur Karl Wudel, atteignit l'âge de la retraite. Le nouveau directeur, obligé de représenter le lycée dans les occasions officielles, devait être membre du parti. Comme il ne s'en trouvait aucun sur place, on fit appel à un professeur de sciences naturelles qui exerçait jusqu'alors dans la petite ville de Wernige-Rude et il fut un directeur tout à fait acceptable. Ce ne furent donc pas des atteintes à notre vie personnelle qui engendrèrent l'angoisse. Ce ne furent pas non plus les médias qui en étaient à leurs premiers balbutiements. C'est vers 1935 que nous avons acheté notre premier poste de radio qui nous servait surtout à tenter de capter de la musique plutôt que pour écouter les nouvelles. Celles-ci nous étaient fournies par le journal quotidien, que l'on croyait ou qu'on ne croyait pas, et on s'empressait de tourner le bouton lorsque retentissaient les éclats de voix des discours officiels. Non, l'actualité n'était pas ce que nous demandions à cette merveilleuse invention. C'était la possibilité d'entendre de la musique chez soi, même si la transmission était alors bien imparfaite. Il est difficile de réaliser aujourd'hui ce que cela représentait: ma mère m'avait assise devant un piano depuis l'âge de 4 ans, nous avions plus tard passé des heures à jouer à 4 mains les arrangements pianistiques des symphonies de Beethoven ou les ouvertures de grands opéras. Or, j'avais près de 19 ans lorsque j'ai entendu pour la première fois les vrais instruments de l'orchestre, que j'ai eu pour la première fois de ma vie l'occasion d'assister à un concert symphonique. Ce bonheur était réservé aux seuls habitants des grandes villes, la difficulté des déplacements l'interdisant aux autres. A part les flons-flons, militaires ou autres, qui résonnaient, les jours de fête, sur les places publiques ou les orgues plus ou moins malmenées dans les églises, la seule musique que l'on pouvait entendre était celle que l'on faisait soi-même. D'où le nombre de pianistes amateurs (dont je suis) qui sévissait à cette époque. Nous n'étions donc pas poursuivi par les nouvelles du monde comme nous le sommes aujourd'hui. Pour savoir ce qui se passait, il fallait aller soi-même au-devant de l'événement. C'est ce que je fis pendant les étés 1933 et 1934, à l'occasion des deux voyages en France que je fis avec les enfants. Nous sommes partis chaque fois avant le commencement des vacances scolaires et Arnold nous rejoignait à la fin des classes. En juillet 1933, le train s'est arrêté en gare de Kehl, et c'est à pied, avec les deux enfants de 2 ans 1/2 et de 10 mois que j'ai traversé le Rhin pour continuer ensuite le voyage à partir de la rive gauche du fleuve. En 1934, nous avons hésité longtemps avant de nous mettre en route, car nous n'avions droit qu'à 10 RM par personne au passage de la frontière. Après un accord avec mes parents, nous sommes quand même partis, mais nous savions que nous allions être pris au piège, que les frontières de l'Allemagne se refermeraient sur ses habitants, que l'idéologie du Parti tendait à en faire un bloc dont il se servirait... dans quel but ?? Ce fut, en effet notre dernière visite en France avant la guerre. En cette année 1934, ma soeur Monique nous accompagna pendant le voyage de retour. Elle avait, à 15 ans, terminé sa troisième, et n'avait aucune envie de rester au lycée à cause de l'horreur qui lui inspirait les mathématiques. Mais elle semblait très douée pour les langues étrangères, et, forte de son expérience d'autrefois, ma mère s'était mise en rapport avec la direction du couvent de la Visitation à Chosteschau - maintenant en République tchéchoslovaque - Monique y avait été acceptée comme lectrice et animatrice de conversation française tout comme sa mère 30 ans auparavant. Elle est restée 3 ans dans cet établissement, y apprenant parfaitement l'allemand et l'anglais et suffisamment le tchèque. Elle séjourna ensuite 6 mois à Prague où elle passa des examens de langues à l'Université allemande avant de rentrer, prise d'une sorte de panique devant la tension internationale croissante, en automne 1937. Un an auparavant, nos parents avaient quitté leur Lorraine natale pour s'installer dans une modeste maison tout près de la plage des Sablettes, aux abords de la rade de Toulon. Françoise et Jean-Pierre les accompagnaient. Françoise fréquentait une école de commerce et Jean-Pierre se préparait à entrer dans la marine. Lorsqu'elle revint au pays, Monique accepta un poste de secrétaire trilingue dans un hôtel de Saint-Raphaël. C'est dans cette ville qu'elle fit la connaissance de Marius Lovéra et leur mariage eut lieu en automne 1938, juste au moment de l'entrevue de Munich. En 1938, après la réunion de l'Autriche et de l'Allemagne, l'Anschluss, les puissances occidentales, France, Angleterre, manifestèrent bien leur inquiétude, augmentée par les manifestations pro-allemandes qui s'intensifiaient de jour en jour dans les Sudètes. On parla de guerre; on prépara la mobilisation des troupes. Mais, au cours de l'entrevue de Munich, monsieur Hitler sut convaincre ses interlocuteurs que ce petit territoire des Sudètes était certainement le dernier qu'il revendiquerait jamais. On le lui accorda donc, et les signataires de l'accord furent accueillis avec un enthousiasme délirant par les populations de leurs pays, puisqu'ils avaient sauvé la paix. Daladier et Chamberlain avaient fait reculer le spectre de la guerre et l'humanité entière les saluait comme des héros. Nous connaissons malheureusement la suite; et bon nombre d'historiens s'accordent à penser que cette paix qui paraissait définitivement acquise pour la France et l'Angleterre ne fut pour Hitler qu'un répit qu'il mit à profit pour renforcer sa puissance militaire, et que, s'il s'était heurté à une résistance plus ferme, le conflit qui aurait alors éclaté aurait pris moins d'ampleur et occasionné moins de désastres que la seconde guerre mondiale que nous connaissons. Dans mon souvenir ces années trente ont un double visage. D'une part, un vie familiale heureuse, avec les soucis et les joies de tous les jours, les enfants grandissant, les longues excursions dans les montagnes du Harz, les randonnées à bicyclette dans les prairies et les bois des bords de l'Elbe ou le long des digues qui enserrent le fleuve, les visites furtives aux colonies de castors installées dans la forêt le long de petits cours d'eau presque stagnante, des semaines de vacances, en été, sur les plages de la mer Baltique. D'autre part, l'angoisse qui se fait de plus en plus pesante, à mesure que l'isolement du pays se fait plus hermétique que les propos guerriers devenaient plus délirants, que l'on a l'impression de vivre à l'intérieur d'une chaudière prête à exploser, sans qu'on puisse rien faire pour l'en empêcher. Et la chaudière explosa en automne 1939.


La deuxième guerre mondiale   #0_sommaire_france

Septembre 1939. Déclaration de guerre entre la France et l'Allemagne, mes deux pays, l'un où plonge mes racines, l'autre où j'ai été accueillie sans aucune réticence, de la part de qui que ce soit. Les deux armées qui s'affrontaient et tentaient de s'exterminer ne sont, pour moi, qu'une seule et même armée qui se suicide. C'est le drame absolu, sans issue car, quelle que soit la décision du destin, il n'y aura pas de victoire, mais, d'un côté comme de l'autre, une extermination. Je ne veux pas paraphraser notre bon vieux Corneille, mais lorsqu'en quatrième nous étudiions, sans grand enthousiasme, la tragédie d'Horace, que nous en apprenions par coeur des tirades entières, je ne pensais pas que ces vers fameux seraient pour moi prémonitoires et résonneraient dans mon esprit tout au long de ces années. Mais quels que soient les sentiments qui nous agitent, les moments de désespoir qui nous étreignent, il faut assumer la vie quotidienne. Notre vie familiale ne fut pas bouleversée par la mobilisation générale. Hermann Kiessling et Arnold étaient trop âgés; Karl-Hermann, ingénieur dans l'aéronautique, travaillait aux usines Junkers à Dessau et restait à son poste. Son plus jeune frère Kurt, ingénieur agronome, qui administrait un domaine agricole au nord-est de Berlin, et Ernst-Adolf Knaur, médecin neurologue, ne devaient être mobilisés que plus tard. Je n'avais plus, et n'aurais plus pendant longtemps de nouvelles de ma famille française, mais mon frère Jean-Pierre n'avait alors que 15 ans et il ne me semblait pas, alors, en danger. Du jour au lendemain, cependant, l'atmosphère changea. Ce fut, dès le premier jour, la distribution des cartes de ravitaillement. Il fallut se plier à la discipline des rations attribuées aux uns et aux autres. Ce n'était pas l'abondance, mais les quantités de vivre qui nous étaient octroyées étaient suffisantes. Les bons d'achat ont été honorés et, jusqu'au derniers jours de la guerre, nous n'avons pas souffert de la faim. Au cours des années, les difficultés se sont surtout fait sentir dans le domaine du linge, des vêtements, des chaussures, surtout pour les enfants qui grandissaient. Dès les premières semaines de la guerre, il fallut procéder dans toutes les maisons, à un nettoyage radical des greniers dont les cloisons délimitant les mansardes des particuliers devaient disparaître, afin de permettre l'extinction des incendies qu'un jour ou l'autre il serait nécessaire de combattre. Dans chaque maison, une partie de la cave fut aménagée en abri, avec des poutres de soutien supplémentaires, une protection pour le soupirail et une porte blindée, et, plus tard, une sortie aménagée dans le mur mitoyen qui devait permettre une évacuation au cas où la maison s'éffondrerait. Il y avait un responsable pour chaque bloc de 3 ou 4 maisons et il me semble important de dire ici que nos voisins me choisirent moi dont tout le monde connaissait l'origine française, pour assumer ce rôle de défense passive anti-aérienne. Toutes ces mesures imposées par l'état de guerre n'étaient pas trop contraignantes et elles ne pesaient pas lourd en regard de l'angoisse latente que suscitait en nous cette hécatombe. Nous n'avions pas de parent proche au front, mais Arnold était obsédé par le sort réservé à tous ces hommes dont, au cours de près de quarante ans de carrière, il avait suivi l'adolescence et qui lui témoignaient un attachement durable. Le lien qui l'unissait en particulier aux classes dont il avait été le professeur principal tenait non seulement à la relation maître-élèves à l'intérieur du lycée, mais pour une grande part aux excursions de 8 - 10 jours qu'il organisait chaque année, pendant lesquelles se développait une véritable fraternité, que ce soit à bicyclette par les chemins sablonneux de la lande couverte de bruyère, avec une flottille de bateaux à rames à travers les lacs de la Prusse Orientale, ou à pied à la découverte d'une région pittoresque, chacune de ces expéditions engendraient une fraternité entre les participants et j'y ai pris part chaque fois que cela m'a été possible. Je me souviens en particulier d'une excursion pédestre d'une huitaine de jours dans la vallée de la Weser. C'était en automne 1935 et la classe de terminale qui formait notre groupe se composait de 20 à 25 jeunes gens. De longues marches à travers les collines boisées nous faisaient découvrir les méandres du fleuve. Nous visitions de vieilles abbayes et l'un de nos compagnons s'asseyait aux orgues centenaires et improvisait. Le soir, à l'auberge de Jeunesse, après la corvée de pommes de terre et le repas en commun, les garçons organisaient des séances théâtrales, la légende de Faust en particulier. Ces jeunes gens, imprégnés de culture classique étaient enthousiastes de la vie, ils s'apprêtaient à devenir médecin, avocat, pasteur... Ils terminèrent leurs études secondaires en été 1936, entrèrent pour un an dans le service de travail obligatoire qui les amena au service militaire. Celui-ci allait se terminer lorsqu'éclata la guerre. Et, de mois en mois, nous apprenions par les journaux ou par les familles la disparition de la plupart d'entre eux. Ils tombèrent en Pologne, à Narvik, en France, dans les sables du désert nord-africain, dans les immensités glacées de Russie. Ils représentaient pour nous, dans leur individualité, les millions de camarades qui, dans toutes les armées en présence partageaient leur destin tragique. Et ces images de morts formaient comme une chape qui pesait aux épaules et que l'on ne pouvait rejeter. A partir de 1943, les raids américains se firent de plus en plus fréquents et les nuits étaient rares où le sommeil n'était pas interrompu par les sirènes d'alarme. Le plus dur alors était de réveiller les enfants pour descendre à la cave. La région de Magdeburg n'était pas toujours concernée, mais comme la ville se trouvait légèrement au sud de la trajectoire visant Berlin, les bombardiers en route pour la capitale grondaient au-dessus de nos têtes et nous gratifiaient de temps à autre, de quelques décharges. On commença alors à évacuer les enfants et les personnes âgées. Marlène fut la première à quitter la maison. Sa classe fut dirigée vers une petite ville située sur les pentes nord-est du Harz, Wernigerode, où elle resta de décembre 43 jusqu'au mois d'avril 45. Hans-Jürgen, qui avait alors 13 ans, faisait partie, avec ses camarades, des équipes qui se relayaient nuit et jour au lycée pour monter la garde contre les incendies provoqués par les petites bombes au phosphore. Renate, 6 ans à l'époque, n'était pas concernée par le plan d'évacuation scolaire. Nous l'avons confiée à nos amis Steinfatt qui habitaient Halberstadt, petite ville sans importance stratégique, qui nous semblait moins exposée que Magdeburg.L'année 44 vit la situation empirer et ce fut, le 16 janvier 1945 la destruction à 80 % de la ville, un anéantissement qui rappelait celui de 1631, lorsque pendant la guerre de Trente Ans les Impériaux avaient détruit la ville et massacré ses habitants. Alors que les maisons voisines de la nôtre avaient été écrasées par les lourds explosifs, nous n'avions reçu que des bombes au phosphore, plus légères, qui ne traversaient guère que deux étages et que l'on pouvait éteindre si on les combattait vite et énergiquement à l'aide de petites pompes à main, plongées dans un seau d'eau. 3 maisons furent ainsi préservées du pire et nous pûmes donner asile à des voisins moins chanceux. L'activité scolaire, étant totalement interrompue, Arnold s'employa à trouver un refuge pour Hans-Jürgen en dehors de la ville. Par l'entremise du pasteur du village de Westerhausen, près de Halberstadt qui avait été son élève, il le fit accepter par un cultivateur en qualité d'apprenti, avec un contrat de 2 ans qu'il serait possible de résilier au bout d'un an si les circonstances permettaient alors une reprise de la scolarité normale. C'est pendant ces mois d'apprentissage que l'idée de son futur métier a germé dans l'esprit de notre fils et les expériences qu'il fit alors lui servirent tout au long de sa vie professionnelle. La vie était devenue chaotique. On sentait la catastrophe finale approcher. Les parents Kiessling avaient perdu leur appartement et s'étaient réfugiés à Quedlinburg. Leur fille Marguerite, fuyant la ville de Schweidnitz avec ses trois enfants âgés de 6, 4 et 2 ans avait échappé de justesse (à 24 heures près) à la terrifiante destruction de Dresde, les y avait rejoint. Nous avions alors décidé de nous préparer un pied-à-terre à Halberstadt, dans une mansarde de nos amis et d'être ainsi près de nos 3 enfants. Chaque fois que nous en avions l'occasion - un train en partance, un camion, les bicyclettes - nous y avons transporté quelques objets de première nécessité. Et c'est ainsi qu'un samedi d'avril 1945 nous avons débarqué à la gare de Halberstadt au moment où une attaque aérienne faisait sauter un train de munitions à quelques dizaines de mètres de la gare. Marlène venait, elle aussi, d'y arriver après la dislocation des classes hébergées à Wernigerode. Hans-Jürgen était venu chercher sa petite soeur Renate pour passer le dimanche à la campagne à Westerhausen. Et ainsi, tout le monde était en place pour le drame qui allait se dérouler le lendemain et auquel j'ai fait allusion dans mon avant-propos. La situation était alors la suivante. Les troupes américaines se trouvaient à une vingtaine de kilomètres à l'ouest de Halberstadt tandis que les Russes avaient atteint les faubourgs de Berlin. 200 kilomètres à peine séparaient les deux armées. Un esprit réaliste ne pouvait douter que leur rencontre était inéluctable. Cependant, les autorités locales, tous partisans fanatiques du Führer, croyaient encore dur comme fer à la victoire du Reich, persuadés qu'ils étaient de l'imminence du renversement de la situation grâce à l'arme miraculeuse qu'annoncait la propagande officielle. Malheur à celui qui émettait un doute à ce sujet en présence de témoins mal choisis. Cela pouvait le conduire au peloton d'exécution. C'est dans ce contexte que, ce samedi d'avril, le commandement américain pria le maire de la ville de laisser libre passage à ses troupes. Le maire répondit en faisant creuser des tranchées en travers des rues pour arrêter l'avance des chars. Ces travaux ne servirent pas à grand chose: le dimanche matin, vers 9 heures, plusieurs vagues de bombardiers vinrent arroser la ville qui, jusque-là n'avait subi aucun dommages, et la transforma en un champ de ruines. Après quoi, les soldats américains purent continuer leur marche en avant sans coup férir. J'ai appris, dans les jours qui suivirent, que la population, exaspérée par cette décision absurde qui avait causé la ruine de la cité, s'était emparée de l'homme responsable et l'avait pendu. Le devant de la maison où nous nous trouvions s'était effondrée, mais la cave étant située sur l'arrière, nous nous en sortions sommes toute très bien, sauf que l'immeuble était devenu inhabitable et qu'il fallait trouver un refuge. Nous sommes alors partis à pied vers le village de Schwanebeck, situé à une dizaine de kilomètres où le pasteur mit une pièce de sa maison à notre disposition. Les soldats américains nous ayant dépassé, la route du retour vers Magdebourg était coupée, et nous sommes restés 6 semaines dans cette campagne perdue où tous les gens valides furent immédiatement réquisitionnés pour les travaux des champs. C'est là que nous avons vécu la fin des hostilités, lorsque Russes et Américains eurent atteints les rives de l'Elbe, qu'ils occupèrent chacun de son côté, se regardant en chiens de faïence. C'est là que nous entendîmes que les premières émissions libres diffusèrent des reportages sur les camps de concentration, et notre première réaction fut de les prendre pour de la propagande. Il fallut se rendre à l'évidence: ces reportages décrivaient des faits qui avaient vraiment eu lieu et nous en restions béats d'horreur. Car, je le dis pour nous-mêmes et certainement pour des millions d'autres: nous connaissions l'existence des camps où l'on internait les récalcitrants au régime. Nous savions que les Juifs étaient rassemblés dans les régions de l'est, peut-être même en Pologne. Mais de là à imaginer l'enfer où avaient été plongés ces malheureux, il y avait un monde! J'ai appris par la suite, que tous ceux qui, pour leur malheur, avaient été en contact avec ce monde de l'horreur, victimes qui avaient pu en réchapper, témoins impuissants comme, par exemple, les employés des chemins de fer occupés aux manoeuvres dans les gares étaient astreints à un silence absolu, sous peine de représailles terribles. Il y avait donc les gens qui savaient et se taisaient et ceux qui comme nous, grâce à un concours de circonstances bénéfique, avaient côtoyé cette horreur sans en soupçonner l'existence. On connaissait la rigueur des sentences prononcées contre les adversaires déclarés du régime; la répression sanglante après l'attentat manqué du 20 juillet 44 contre Hitler - une marque de déception quant à l'issue de l'attentat faite en privé et recueillie par de faux amis a suffi, dans de nombreux cas, pour mener son auteur à la potence - les suicides sur commandement du maréchal Rommel, du Général Udet (entre autres) tout cela n'était que la partie visible de l'iceberg. La masse immergée de l'horreur venait de nous être révélée.

L'après-guerre   #0_sommaire_france

Nous sommes rentrés à Magdeburg au début du mois de juin, Arnold, Marlene, Renate et moi, tandis que le grand frère, resté à Westerhausen, y continuait son apprentissage agricole. La maison était toujours debout; les voisins recueillis après le grand bombardement occupaient l'appartement et l'avaient préservé du pillage, mais l'état dans lequel nous trouvions les lieux familiaux était plutôt pitoyable. La moitié des tuiles du toit s'étaient envolées. Les bombes incendiaires que nous avions réussi à maîtriser avaient laissé des trous dans les plafonds et les planchers. Les vitres des fenêtres s'étaient volatilisées sous le souffle des explosions. Et nulle part on ne pouvait trouver du matériel neuf. Il fallait se contenter de ce qu'on découvre d'utilisable dans les décombres: tuiles pour le toit, planches pour boucher les trous et obstruer une partie des fenêtres, le reste étant fermé avec du papier huilé qui laissait passer une lumière diffuse, peu propice à la correction des copies. Notre quartier était situé, dans la moitié ouest de la ville, occupée par les Américains, et nous pouvions espérer que cet état de choses durerait. Or, par un beau dimanche de juillet, nous vîmes arriver les petites voitures de paysans tirées par les petits chevaux sibériens de l'armée russe, tandis que le lourd matériel américain se retirait vers l'Ouest. C'était l'application des accords de Yalta suivant lesquels la frontière entre le monde occidental et les pays de l'Est, cette frontière qui allait devenir célèbre sous le nom de Rideau de fer coupant d'un trait nord-sud l'Allemagne en deux, passait à 75 kilomètres environ à l'Ouest de Magdebourg. Nous étions pris dans la souricière qui nous isolait du reste du monde, qui me coupait de ma famille française dont je n'avais plus aucune nouvelle. Il fallait cependant réorganiser la vie suivant les règles nouvelles que les circonstances nous imposaient, nous assistions à un double bouleversement de la société: d'une part, les Russes tenaient à nous faire bénéficier de leur progrès social en inversant les rôles d'une façon radicale: les cadres étaient tenus d'accomplir les tâches manuelles, leurs enfants n'avaient pas le droit de fréquenter les classes supérieures des lycées, tandis que les ouvriers étaient promus organisateurs et que leurs enfants représentaient l'élite des années à venir; d'autre part, la chute du régime national-socialiste appelait un règlement de comptes général. On fit une distinction entre, les membres du parti qui avaient exercé une autorité et étaient rendus responsables des exactions commises et les simples adhérents, les "Mitläufer" dont il existait plusieurs sortes: certains avaient adhéré au parti dans les toutes premières années alors que la suppression du chômage, la reprise économique avaient pu faire illusion, même aux lecteurs superficiels de "Mein Kampf". Lorsque leurs yeux s'étaient dessillés, ils ne pouvaient plus rendre leur carte sans encourir un terrible danger. Ceux-là portaient leur insigne caché sous le revers de leur veston. D'autres, tels les moutons de Panurge, s'étaient fait inscrire en masse, emportés par les discours hystériques d'une violence envoûtante d'un Goebbels. D'autres encore étaient entrés dans le parti ou dans une des organisations annexes avec l'intention et l'espoir utopique d'en freiner les tendances, de ramener à la raison au moins une partie de ceux qui se laissaient aveugler par les paroles tonitruantes des dirigeants.On assista donc à un bouleversement total de la société: un juge d'instruction sciait des planches au milieu des décombres, le fils de notre épicière (25 ans), armé d'un brassard, commandait la police locale. Il fallait, dans un même temps, pourvoir au remplacement des fonctionnaires limogés par des hommes nouveaux et trouver du travail pour les autres. Car la doctrine communiste exigeait que tous, hommes et femmes, sauf les mères d'enfants en bas âge, trouvent du travail, sous peine de ne recevoir que la carte d'alimentation la plus basse, celle dont les rations sauvaient tout juste de la famine. Or, le seul travail du moment était le déblayage des ruines. Dans toute la ville, on voyait les gens armés de marteaux qui sortaient à mains nues les pierres à équarrir qu'ils empilaient ensuite pour en préparer le transport. Je ne sais pas comment fut reconstitué l'appareil judiciaire. La tâche était particulièrement difficile, car dès la prise du pouvoir par Hitler, les juges avaient été mis en demeure de choisir entre l'adhésion au parti et la résiliation de leur fonction. Très peu avaient choisi la seconde solution qui ne pouvait aboutir qu'à l'exil. Les autres se berçaient de l'espoir illusoire de préserver leur liberté d'action. Le problème était moins grave dans l'enseignement où, à ma connaissance du moins, la pression du parti avait été moindre. Il fallait quand même compléter les effectifs le plus vite possible. Dans un premier temps, la limite d'âge de la retraite fut abrogée, tout comme le statut de fonctionnaire d'Etat en général. Celui qui cessait le travail à 65 ans avait droit à la retraite égale pour tous dont le montant était de 90 RM (Reichsmark) par mois - Par comparaison, le traitement d'Arnold qui resta à son poste était le 1er.11.1946 de 833 RM net -. On fit ensuite appel, dès l'automne 1945, à tous ceux qui, n'ayant pas appartenu au parti, possédaient en outre les connaissances leur permettant un recyclage comme instituteur ou professeur. Lorsque j'eus vent de cette action, je me présentai avec mes certificats de licence passés en France et présentai ma candidature de professeur pour les maths et le français (en Allemagne les professeurs ont obligatoirement 2 ou 3 spécialités). Par un examen préalable portant sur les connaissances spécifiques des candidats, on procéda à une sélection, et pour ceux qui furent admis, commença une préparation pédagogique et didactique qui devait être sanctionnée par un examen final de la valeur du CAPES français. Dans ce groupe se trouvaient des ingénieurs qui allaient enseigner la physique ou la chimie, des interprètes pour les langues étrangères et des gens comme moi qui avaient fait autrefois des études qu'ils allaient maintenant, mettre en valeur. Cette préparation était véritablement un emploi à plein temps. Un jour par semaine était consacré aux cours de pédagogie générale et de didactique pour chaque spécialité. Pour le reste, chacun de nous avait la charge complète de 18 heures de cours, avec préparation écrite, correction des copies, responsabilité immédiate pour moi d'une classe de terminale. Les élèves qui avaient été ballotés par la guerre - certains revenaient des camps de prisonniers russes, américains ou français - étaient avides de savoir, mais de niveau très divers. D'un autre côté, il n'est pas évident d'enseigner sa langue maternelle à des étrangers. Il faut chercher à saisir les difficultés qu'éprouvent les élèves à partir de leur langue maternelle à eux, trouver des explications plausibles et émettre des règles là où l'instinct du premier langage se suffit à lui-même. En mathématiques, la difficulté provenait de l'énorme différence qui existe entre les méthodes didactiques françaises et allemandes. C'est bien simple: lorsque je me réfère à mes propres expériences scolaires, il faut tout inverser, mettre en somme la charrue avant les boeufs. Ce sont ces différences de méthodes dans l'enseignement des maths qui m'ont fourni le thème du mémoire de pédagogie pratique nécessaire à l'obtention du diplôme. A côté de cette initiation à la vie professionnelle, il y avait la vie privée qui ne manquait pas non plus d'embûches. Notre appartement qui donnait asile à 8 personnes ne possédait naturellement qu'une salle de bains avec toilette incorporée. Quand tout le monde doit être à son travail au plus tard à 8 heures du matin, il y a des problèmes. A la cuisine, nous disposions de 3 fois une heure de gaz par jour. Celui qui était à la maison au moment propice mettait la préparation d'un plat en route ou achevait la cuisson sous les édredons. Il fallait aussi faire la queue pour se procurer les denrées que promettaient les cartes. Et en hiver, il n'y eut pas de chauffage, si bien qu'il fallait mettre des gants pour écrire ou tenir cuillères et fourchettes. A Pâques 1946, après un an d'apprentissage et selon les clauses de son contrat, Hans-Jürgen revint à la maison et put, comme ses soeurs le faisaient depuis l'automne précédent, reprendre le chemin de l'école. Il en avait perdu l'habitude depuis près de 18 mois. Ces années 45/46 virent le retour progressif dans les foyers de tous ceux qui, ayant pu sauver leur vie, avaient été retenus loin de chez eux par la force des choses. Les soldats qui avaient pu quitter clandestinement leurs unités se cachaient des mois entiers avant de réapparaître, de peur d'être arrêtés comme déserteurs. Les prisonniers de guerre internés en Amérique, en Angleterre, en France étaient rendus à la vie civile avec des papiers en règle. Et puis arrivèrent des convois venant de Russie, des trains dans lesquels étaient rassemblés des ombres d'hommes incapables d'un travail quelconque et dont les Russes se débarrassaient ne gardant dans les camps que ceux qui pouvaient leur servir. A l'arrivée de ces convois, on voyait sur le quai des gares, des femmes, des mères espérant découvrir un visage familier ou posant inlassablement les questions pour obtenir ne serait-ce que l'ombre d'un renseignement au sujet de l'un de ces innombrables disparus dont elles ne connaitraient jamais le sort. Dans la famille, les hommes étaient là. Karl-Hermann, resté à son travail aux usines Junkers à Dessau, avait été dans un premier temps emmené en Russie au cours du démontage de son usine. Puis, il avait été renvoyé en Allemagne, à Leipzig, où il vit encore actuellement ainsi que sa femme, ses deux filles, l'une pharmacienne, l'autre ingénieur, et une petite fille Hertha Riegelt. Ernst-Adolf Knaur, incorporé comme médecin aux armées, avait retrouvé sa femme et ses 3 enfants à Quedlinburg où il avait obtenu le poste de neurologue pour le district. Kurt avait épousé pendant la guerre Dörthe Arndt, fille du propriétaire du domaine où il était régisseur, au nord-est de Berlin. Parti au front, puis démobilisé, il était, lui aussi, arrivé à Quedlinburg, mais sans sa femme. Au cours du déferlement des armées russes venant de Pologne, celle-ci avait été emmenée avec sa mère et sa soeur jusqu'en Sibérie. Un jour, elle vint sonner à notre porte, à Magdeburg. Elle revenait seule. Sa mère et sa soeur n'avaient pas survécu à cette terrible épreuve. Nous avons pu lui donner l'adresse de Kurt, dont elle était sans nouvelles et ils commençèrent leur vie commune à Quendlinburg où naquirent leurs deux fils Ekkehard, aujourd'hui ingénieur à Berlin et père de deux filles, en 1947 et Dietrich, chercheur en biologie végétale à Halberstadt, également père de deux filles, en 1949. C'est à cette même époque que je reçus enfin les nouvelles tant attendues de France et qui ont dû faire des détours incroyables avant de me parvenir, vu le temps qui s'était écoulé depuis leur envoi. Les parents avaient été obligés de quitter pour un temps leur petite maison des Sablettes, située dans la zone stratégique de la rade de Toulon. Le calme étant revenu, ils y étaient maintenant comme auparavant. Monique avait passé toute la guerre à Saint-Raphael où elle avait vécu aux premières loges le débarquement d'Agay et où étaient nés ses deux fils, Jean-Claude en 1941 et Yves en 1945. Françoise habitait à Paris avec sa fille Marie-France. Divorcée, elle s'apprètait à épouser Jacques Stevens et leur fils Jean-Pierre devait naître en 1948. Ces nouvelles strictement familiales ne m'apprenaient rien sur ce qui avait été la vie en France pendant la guerre. Les récits, les livres, les débats publics m'ont fait peu à peu connaître les réalités de cette période. Mais ce n'est pas à moi de la raconter puisque je n'y étais pas. Cette lettre contenait une autre réalité, ô combien cruelle, celle-là: la mort de notre petit frère Jean-Pierre. Je l'avais quitté pendant l'été de 1934 alors qu'il avait 10 ans. Au début de la guerre, il était entré comme mousse dans la marine marchande et en 1943, son navire se trouvait sur la côte est de l'Amérique, au moment de l'entrée en guerre des Etats-Unis. Son navire bloqué, il s'était engagé dans une escadrille des forces françaises, avait passé son brevet de pilote et, avec ses camarades, s'était envolé vers l'Afrique où leur escadrille fut cantonnée à Agadir. Là, au cours d'un exercice en mer, son avion fut happé par une vague et il disparut avec lui tandis que les camarades qui l'accompagnaient parvenaient à s'en échapper. Il n'avait pas atteint son vingtième anniversaire. Ses camarades, débarquant à Saint-Raphael vinrent informer Monique qui eut la terrible tâche de prévenir nos parents. Quelques jours plus tard, ces jeunes hommes disparurent, eux aussi, en mer. Pendant les vacances de l'été 46, Hans-Jürgen accepta l'offre que lui fit son ancien patron et il partit pour Westerhausen. Cette perspective de travail à la campagne agrémentée d'une nourriture plus abondante et plus riche qu'à la maison le ravit. Malheureusement, il en resta marqué pour la vie, car c'est là qu'en pleine moisson un refroidissement brusque dû à un orage qui le trempa jusqu'aux os, il fut atteint par l'épidémie qui sévissait alors et contre laquelle il n'existait là-bas ni vaccin, ni réel traitement: la poliomyélite. Il fut hospitalisé dans une clinique de Magdeburg où il séjourna de septembre 46 à avril 47. Il employa toute son énergie à lutter contre les séquelles de la maladie, se proposant comme cobaye pour les ponctions de moelle épinière, aidant au service, ce qui lui valait des rations supplémentaires, tentant de faire bouger les camarades plus apathiques dont plusieurs restèrent grabataires. Les muscles des jambes qui avaient fondu pendant la période aiguë de la maladie ne se reconstituèrent pas, mais des exercices intenses lui permirent de compenser la faiblesse qui en résultait. Quand il revint à la maison, et reprit après cette nouvelle interruption de 8 mois, le chemin du lycée, il marchait encore difficilement. Mais il pouvait se déplacer à bicyclette et c'est de cette façon que, pendant tout l'été 1947, il se rendait sur les bords de l'Elbe, chaque fois qu'il en avait le temps et s'entraina à l'aviron. A la fin de l'été, il avait couvert plus de 1000 kilomètres sur le fleuve. Il n'a jamais cessé, depuis lors, de maintenir les muscles qui lui sont restés, en pleine activité et longues marches à pied, courses en vélo, ski de fond et de piste lui ont permis de vivre normalement et d'exercer à plein son métier de vétérinaire montagnard. L'hiver 46/47 que Hans-Jürgen passa en clinique fut, dans son ensemble, plus dur que le précédent. Il fut, pour nous, particulièrement tragique, car il vit la fin de notre couple et pour les enfants qui avaient alors 16, 14 et 9 ans, la perte de leur père. Voici comment le drame arriva. Arnold qui, dans son enfance, avait perdu un oeil, était chargé du recrutement et de la promotion des professeurs de latin, et avait à corriger de longs mémoires, souvent manuscrits. Or, les fenêtres étaient toujours obstruées par des Ersatz de vitres qui ne laissaient passer qu'un semblant de lumière. La fatigue extrême de son oeil unique provoqua un décollement de la rétine auquel seule une opération pouvait tenter de remédier. La technique chirurgicale de l'époque exigeait du patient après l'intervention une immobilité absolue pendant 3 semaines qui interdisait même toute expectoration. Un engorgement, d'abord bénin, des bronches se transforma alors en pneumonie, impossible à combattre par les antibiotiques dont nous ne soupçonnions même pas l'existence. Au manque de traitement spécifique, à l'impossibilité de dégager les bronches par la toux qui aurait immédiatement causé la perte définitive de la vue s'ajoutait l'affaiblissement général de l'organisme dû aux dures conditions de vie des années passées. Trois semaines après l'opération Arnold, s'éteignit, le 27 février 1947. Et la vie continua, plus difficile encore. Heureusement, les enfants étaient totalement solidaires, aidant à l'approvisionnement souvent déficient et accomplissant avec moi les tâches de la vie quotidienne. Je voudrais dire ici que ni l'un, ni l'autre ne m'a jamais posé de problème éducatif. Peut-être est-ce dû à cette lutte commune contre les difficultés extérieures, mais, à aucun moment, il n'y a eu entre nous ce qu'on déplore si souvent aujourd'hui: la lutte des générations.

L'exode et la vie en Sarre    #0_sommaire_france


Je ressentis alors le besoin irrésistible de reprendre contact avec ma famille française, d'aller la voir, leur parler, échanger avec eux autre chose que des lettres avec des nouvelles superficielles. Mais, comment réaliser ce désir? L'Allemagne était totalement occupée par les armées des puissances victorieuses. Elle était divisée en 4 zones, suivant les accords de Yalta. Ce partage avait été compris par les Occidentaux comme un partage d'influence, que la paix arrangerait au mieux. Les intentions de Staline, par contre, étaient autres: il considérait la zone qui lui était allouée comme un bastion avancé, à partir duquel il pourrait conquérir le reste de l'Europe, pour le plus grand bien de son idéologie. La frontière ouest de la zone russe devait être la ligne de démarcation qui couperait l'Europe en deux et il fallait la rendre, peu à peu, si hermétique qu'aucun échange ne soit plus possible entre deux mondes totalement distincts et les voies ferrées avaient été interrompues tout le long de cette frontière artificielle. Seul subsistait le chemin de fer reliant Berlin à l'ouest, permettant la liaison entre la capitale partagée elle aussi, en 4 secteurs et les pays occidentaux.
 Si, donc, l'Allemagne toute entière se trouvait à l'écart des autres nations, la zone russe, elle, était maintenue sous double verrou, dans une situation internationale jusqu'alors sans précédent. Aussi, lorsque j'allai me renseigner à la police sur le moyen d'obtenir un passeport pour la France, les secrétaires me regardèrent, se regardèrent quelque peu décontenancés. Voilà la réponse à laquelle j'eus droit: "Essayez toujours. Si vous réussissez, vous nous direz comment vous avez fait?". Forte de ce renseignement précis, je partis pour Berlin où le premier pas fut de déterminer si, oui ou non, je possédais la nationalité française. Il s'avéra après recherches, que, si je m'étais mariée en 1932, je l'aurais gardée automatiquement, mais la législation en vigueur en 1930, au moment de mon mariage, exigeait qu'on en fasse la demande formelle. Comme à l'époque nous ne nous étions pas préoccupés de la question, j'avais donc perdu cette nationalité et ne bénéficiait donc d'aucun statut de faveur. Je me suis lancée dans la mêlée, assiégeant les bureaux des 4 délégations militaires, me battant avec les plantons pour accéder aux officiers, responsables. J'ai subi toutes sortes d'interrogatoires, rempli des questionnaires, écrit des lettres explicatives, rassemblé les signatures d'une dizaine d'administrations allemandes (police, impôt, banque, etc...), tout cela au cours de 7 voyages à Berlin, dans des wagons sans fenêtres qu'une locomotive poussive mettait 6 heures pour couvrir la distance de 120 km par l'unique voie que le démontage des rails supplémentaires avait laissé sur place. Tout cela, je le faisais dans l'unique but de tenter un voyage aller et retour en France que je pensais accomplir en compagnie de Renate (elle allait avoir 10 ans) tandis que les deux grands (15 et bientôt 17 ans) étaient d'accord pour rester à la maison à nous attendre. Le problème du rationnement serait moins difficile puisqu'ils disposeraient de 4 cartes au lieu de deux. L'idée d'un exode définitif vers l'Ouest ne m'était pas encore venue. Nous avions conservé par une chance inouïe, notre appartement et son contenu. L'examen que j'espérais bien réussir - (et qui eut lieu au début du mois d'août à l'université de Halle), m'assurerait un poste stable, qui nous permettrait de vivre. La vie pouvait donc continuer, et la vision d'une échappée peut-être toute proche estompait les réalités difficiles que je trouverais après mon retour. Pourtant, bon nombre d'habitants de la zone russe cherchaient à en sortir. Quelques uns en avaient fait leur métier, sortes de contrebandiers qui, par des chemins détournés, se glissaient vers l'ouest et en revenaient avec des marchandises d'un luxe inouï, comme des bobines de fil à coudre, épingles de sûreté, qu'ils revendaient au marché noir (50 RM, la bobine de fil!). D'autres abandonnaient tout, partaient chercher l'aventure, du travail, de l'autre côté. Pour nous, une femme et 3 enfants, l'aventure était impossible. Cependant, ce voyage que je concevais comme une rencontre unique avec mes proches entre deux éternités de séparation ne devait être qu'un prologue, un entre-acte dans notre destinée. Car, il eut lieu, ce voyage, et j'en parlerai bientôt, mais auparavant il me faut raconter comment se produisit le tournant qui devait tout changer. Au mois d'août, après l'obtention de mon diplôme et alors que mes démarches pour l'obtention du fameux passeport semblaient en bonne voie, je fus mise en rapport, par hasard, avec une famille sarroise qui s'apprêtait à retourner au pays avec tout un groupe de leurs compatriotes. Ces gens, des ingénieurs et des techniciens avaient été évacués à la fin de la guerre avec leurs usines, de leur région frontalière, donc dangereuse, vers l'intérieur du pays. La Sarre était alors une enclave, en bordure de la Lorraine avec un statut particulier. Rattachée économiquement à la France, elle avait un gouvernement autonome, supervisé par un gouverneur général français. Ce gouvernement avait obtenu des autorités russes le rapatriement de ces familles, et un train spécial devait être mis à leur disposition pour les ramener chez eux en passant par Berlin. Au cours de la conversation que nous eûmes chez des amis communs, et qui portaient sur les conditions de vie en Sarre, j'appris que ce petit pays d'un million d'habitants n'accueillait que les autochtones avec cependant une exception; l'entrée dans cette sorte de réserve était accordée à qui y trouvait un travail. A ce moment, j'ai senti un éclair fulgurant me traverser. J'ai quitté brusquement la société et ai marché dans les rues et à travers des jardins, comme en transes. Et si, j'essayais? Si je proposais mes services? L'idée semblait un peu folle, mais les enfants mis au courant n'eurent pas d'objections, et j'écrivis une lettre circonstanciée au ministère de la Culture de Sarrebrück. Puis j'attendis. Le 15 septembre 1947, je reçus de Berlin, l'avis de l'aboutissement de mes démarches: le passeport était prêt. Le 16 septembre 1947, donc au courrier suivant, se trouvait la réponse de Sarrebrück sous forme du questionnaire officiel qui devait étayer ma candidature. Quelques jours plus tard, après avoir démarché et obtenu un congé sans solde, je pris, avec Renate, l'autocar pour Berlin, d'où un train militaire français nous conduisit en France, avec, comme première halte obligée (nous devions rencontrer mon père à Strasbourg) la ville où allait peut-être se décider notre destin: Sarrebrück. La visite que je fis le lendemain au responsable de l'enseignement secondaire sarrois fut très concluante. Naturellement, je ne pouvais pas avoir une réponse immédiate, mais ma demande allait être examinée favorablement, et il fut convenu d'une nouvelle rencontre à l'occasion de mon voyage de retour. A peu près certaine d'avoir trouvé le point de chute à partir duquel nous pourrions prendre un nouveau départ, je décidai d'oublier pour un temps les difficultés qu'il faudrait surmonter par la suite pour ne penser qu'au moment présent, c'est-à-dire à la suite de voyage. Avec les mille francs français que j'avais pu échanger contre nos RM, nous avons pu payer le voyage Sarrebrück - Strasbourg et la nuit passée à l'hôtel en attendant l'arrivée de mon père, après quoi je n'avais plus un sou en poche. Après une nouvelle nuit dans le train, nous avons atteint la Côte d'Azur, une région que Renate autant que moi-même voyions pour la première fois. A Toulon, ma mère et Monique nous attendaient à la gare et je passe sur l'émotion de ces retrouvailles après une séparation de 13 années douloureuses. Le trajet Toulon - Les Sablettes en autobus fut déjà un enchantement pour Renate. Après les premières gelées blanches de Sarrebrück, nous baignions ici dans un air tiède, ensoleillé, beaucoup de fleurs dans les jardins, et, en débarquant devant la petite maison des grands-parents d'où l'on découvrait, à gauche la rade de Toulon entourée de montagnes roses, à droite la mer au-delà d'une plage vierge de toute construction et de tout baigneur, Renate s'exclama (en allemand naturellement!) "je ne retournerai jamais plus à Magdeburg!". Cette impression d'avoir atteint la Terre Promise ne fit que s'accroître lorsqu'elle se rendit compte, à table, qu'on lui servit un oeuf à la coque entier pour elle toute seule, tandis qu'à la maison on coupait un oeuf dur en minces rondelles pour le partager équitablement et pourtant il régnait encore en France une pénurie relative, illustrée par les deux cartes d'alimentation qui nous furent délivrées le 6 octobre 1947 par la mairie de La Seyne. Ces quelques semaines que je passai là-bas sont restées dans mon souvenir comme une période hors du temps, une sorte de rêve éveillé qui ne se rattachait ni au passé, ni au futur. A Saint-Raphael, je fis la connaissance du mari de Monique, Marius, de ses deux petits garçons, Jean-Claude 6 ans et Yves 2 ans. Monique me fit rencontrer une famille de Boulouris dont un membre était officier en poste dans le secteur français de Berlin. A mon retour, je suis entrée en relation avec lui et son intervention a joué un rôle capital dans la dernière phase de notre déménagement. Quand il fut temps pour moi de reprendre le chemin de Magdebourg, nous convînmes de laisser Renate auprès des grands-parents aux Sablettes. Puisqu'il était à peu près sûr qu'elle pourrait dans un avenir assez proche nous rejoindre en Sarre, j'étais contente de la voir passer un hiver heureux dans cette contrée bénie. D'autant plus que, fréquentant l'école du village elle allait apprendre le français dont elle ne connaissait pas un mot. En effet, à Noël déjà, Monique me manda qu'elle parlait couramment, et, lorsqu'elle nous revit, au mois de juillet suivant, elle avait oublié sa langue maternelle et il fallut réactiver ses anciennes connaissances pour lui permettre d'entrer en 6ème à la rentrée d'automne. A partir de ce moment, elle était parfaitement bilingue. Mon voyage de retour se fit par Paris, où je retrouvai Françoise que j'avais quittée lorsqu'elle avait 12 ans, avec son mari Jacques Stevens et sa fille Marie-France, 5 ans. Avec l'aide de Jacques, je pus me procurer une provision de clous (marchandise inconnue chez nous!). J'ai pu partager leur vie pendant quelques jours, puis, après une nouvelle halte à Sarrebrück où il me fut confirmé que ma nomination n'était qu'une question de temps - après la décision des Affaires Culturelles sarroises, il fallait obtenir l'assentiment du gouvernement militaire - j'arrivai à Magdebourg vers le 10 novembre. Tout s'était bien passé pour les enfants à part, peut-être, de légères contestations au sujet du partage des rations de beurre ou de sucre, et les vêtements que je rapportais, dons des amis de la famille qui s'étaient empressés de nous aider, furent fort bien accueillis. Je leur fis part de l'imminence probable de notre départ et s'ils continuèrent à fréquenter leurs lycées respectifs jusqu'à Noël, ils se mirent à préparer avec moi le grand départ. Pour ma part, j'avisai les autorités compétentes que je ne reprenais pas mon poste, et je me suis mis à la besogne. Pour comprendre la situation d'alors, il faut se souvenir qu'en 1947 la division de l'Allemagne en deux Etats distincts, RFA et RDA, n'existent pas encore. Nous vivions en zone russe, c'est-à-dire que l'administration allemande fonctionnait sous la haute surveillance de l'armée d'occupation russe, mais elle ne faisait pas corps avec elle. Les Russes étaient décider à intégrer la zone dans leur système et voulaient contraindre les habitants à y rester, d'où la surveillance de la ligne de démarcation par des patrouilles de soldats russes qui refoulaient les fuyards et pouvaient dans certains cas les emprisonner. Mais du point de vue allemand, aucune loi n'interdisait les départs. Dans la population, on parlait ouvertement des possibilités de passage à l'ouest. Nos préparatifs de départ ne furent un secret ni pour nos voisins, ni pour mes collègues. Il fallait seulement éviter que les Russes n'en aient connaissance. La situation changea du tout au tout après la proclamation de la République Démocratique dont les dirigeants avaient fait leurs, les projets russes. A partir de là, ce furent les autorités allemandes qui déclarèrent désertion le fait de vouloir quitter le pays, à partir de là que la ligne de démarcation fut gardée par des unités militaires allemandes qui la transformèrent petit à petit en Rideau de Fer, à partir de là que la délation fit des ravages au sein de la population et que le simple désir exprimé en public de se rendre à l'ouest a conduit de nombreux habitants dans les geôles de l'Etat. Le parti unique S.E.D. était tellement inféodé à Moscou qu'il faisait lui-même tout le travail. Les Russes n'avaient alors plus à intervenir ouvertement, sauf en cas de véritable révolte comme ce fut le cas à Berlin le 27 juillet 1953. Une répression brutale et sanglante, comme plus tard en Hongrie et en Tchéchoslovaquie, et tout rentrait dans l'ordre. Cette situation terrible nous a été épargnée et personne n'a averti les Russes de nos intentions. Le changement de domicile posait quelques problèmes. Notre but était situé quelque part en Sarre mais où précisément? Nous n'en savions rien, non plus de la date où nous serait donné le feu vert pour entrer dans ce territoire fermé à l'immigration. Pour atteindre ce but, c'était un peu la traversée de la Mer Rouge: il fallait espérer qu'un chemin s'ouvre devant nous. Des précisions m'avaient été données par l'officier français qui avait eu la gentillesse de se pencher sur notre cas: il ne pouvait rien pour nos personnes puisque nous étions ressortissants allemands de la zone russe. Il me faudrait, lorsque j'aurais atteint la zone française me faire délivrer par les autorités compétentes un laissez-passer pour l'entrée en Sarre. En revanche, si j'arrivais à faire passer les objets que nous voulions emporter jusque dans le secteur français de Berlin et s'il avait en mains l'attestation officielle de ma nomination en Sarre, il pouvait faire en sorte que ces objets soient chargés dans un train militaire français passant par Sarrebrück. Faisant donc abstraction pour le moment de notre voyage personnel qui devait être une fuite, nous avons préparé la solution du problème transport des objets. Le volume total était limité; or nous voulions avoir de quoi vivre, donc les 3 lits pliants pour les enfants, un divan pour moi, les bibliothèques démontables, les bureaux pour le travail de chacun. Le reste du mobilier, c'est-à-dire salle à manger, chambre à coucher, cuisine, piano, etc... il fallait le vendre pour financer (au marché noir!) le transport et tous les intermédiaires nécessaires. Nous voulions surtout emporter avec nous les livres, les objets que contenaient les armoires, tout ce qui est essentiel pour que la vie affective d'une famille se prolonge. A l'aide des clous rapportés de Paris et de ma ration de Vodka - car nous avions parfois droit à un litre de ce breuvage - j'ai pu faire confectionner 10 caisses de 1 m3 chacune, où nous avons entassé couvertures, vêtements, linge, argenterie, vases, lampes, tableaux, avec ou sans cadre, le tout calé avec des chiffons car le papier de journal manquait totalement. La bibliothèque une fois triée, les livres furent emballés dans de plus petites caisses, quémandées un peu partout - il y en eut 28 -. Ma nomination au lycée de Homburg (Sarre) arriva avec l'autorisation du gouverneur général de la Sarre, Gilbert Grandval, et le scénario démarra. Fin février, quelques jours après mon quarantième anniversaire, une voiture attelée d'un cheval vint prendre possession de nos biens qui s'éloignèrent dans la nuit. Les reverrions-nous jamais? Ils devaient être transportés clandestinement dans le secteur russe de Berlin, là, passer dans le secteur français où ils pourraient être pris en charge par notre aimable intermédiaire. Mais, arriveraient-ils jusque là? Je ne possédais aucun recours et devais me fier à l'honnêteté et à l'adresse des convoyeurs. Hans-Jürgen était allé transmettre nos adresses à la famille de Quedlinburg et avait fait la connaissance du bébé de Ekkehard et notre départ coupait les ponts entre ceux qui restaient à l'est et nous, les nouveaux transfuges. Le dimanche 29 février 1948, chargés chacun d'un sac à dos qui contenait du linge de rechange et des provisions de route, nous quittions définitivement Magdebourg par deux voies différentes. H.J. essayerait de passer à bicyclette par un chemin obliquant légèrement vers le nord où un camarade de classe devait le guider. Marlène et moi prenions le train pour bifurquer avant Halberstadt et longer à pied les contreforts nord du Harz et traverser alors le no man's land. Nous nous étions donné rendez-vous chez des amis installés dans la ville frontière de Helmstedt. H.J. passa sans encombre. En revanche, notre première tentative échoua piteusement. Rattrapées au dernier moment par une patrouille russe, il nous fallut faire demi-tour, passer la nuit dans une cave de leur cantonnement avec la perspective désagréable d'être internées dans un camp. Puis, le lendemain matin, nous sommes brusquement libérées, mais il faut reprendre le train vers l'est. Seconde nuit passée dans une gare sordide où des compagnons d'infortune nous indiquent un autre passage, gardé par les Allemands et que nous pouvons atteindre par une autre voie ferrée qui, comme la première, s'arrête en pleine campagne, là où les rails ont été interrompus. En effet, le renseignement est bon. Nous franchissons à pied le territoire qui nous sépare du commencement ouest de la voie ferrée et sommes mardi, tard dans la soirée à Helmstedt où nous dormons dans l'asile de nuit de la gare. Le mercredi matin, nous rejoignons H.J. au moment où, pris d'inquiétude, il allait reprendre le chemin de Magdebourg et se mettre à notre recherche. Nous embarquons dans un train, cahotant vers Braunschweig, puis, par un convoi de nuit bondé qui, via Hannovre nous amène le jeudi matin à Francfort. Nous mangeons là nos dernières provisions, puis je me mets à la recherche des autorités françaises habilitées pour nous permettre le passage en Sarre. Ma nomination, le passeport obtenu pour mon précédent voyage sont des arguments de valeur. Mais celui qui emporte la décision est celui que j'avance plutôt timidement: nous sommes en situation irrégulière puisque nous avons quitté notre zone sans la permission de nos occupants russes. La réponse de l'officier français: "Madame, vous avez de la chance: si les Russes vous avaient accordé leur autorisation, nous, nous ne vous laisserions pas passer!" La guerre froide battait déjà son plein! Le jeudi soir, enfin, nous arrivions à Homburg après avoir troqué à la frontière nos marks allemands contre un reçu qui nous vaudrait par la suite, la remise de 300 francs par personne. Il faisait noir, nous étions sans argent; la Croix Rouge nous prit en charge et notre première nuit sarroise, la cinquième depuis notre départ, se passa dans ses baraquements. Je reviendrai sur les journées du vendredi et du samedi, nos premières journées sarroises et les expériences qu'elles nous apportèrent et qui préfigureraient bien la nouvelle vie que nous allions avoir à affronter. Je pense d'abord au dimanche 7 mars qui était l'anniversaire de la naissance d'Arnold. Repos dominical obligeant, aucune démarche n'étant possible, nous sommes allés dans la forêt toute proche où l'air était doux et annonçait le printemps. Une semaine tout juste s'était écoulée depuis notre départ de Magdebourg. Nous n'avions pas un centime devant nous. Nous ne possédions que le contenu de nos sacs à dos. Mais nous avions échappé à l'internement collectif et cette liberté reconquise justifiait l'effort qu'il nous faudrait soutenir pour vivre dans l'immédiat et voir venir. Dans cet espoir, assis dans une clairière en haut de la colline qui dominait la ville, nous nous sommes partagé équitablement 2 bananes. Nos moyens ne nous permettaient pas d'en acheter une troisième. Et nous avons eu raison d'avoir confiance en notre bonne étoile: quelques deux mois plus tard, je reçus au lycée un télégramme venant de Sarrebrück. Il m'annonçait l'arrivée du wagon contenant nos affaires et me demandait d'en prendre possession. C'était vrai: tout était là, sauf un grand tapis qui n'avait pu entrer dans une caisse. Autrement, rien ne manquait. Près de 3 mois après ce soir de février où j'avais cru les voir disparaître à jamais, ces mille choses familières auxquelles on tient tant, étaient bien là, amenées par un des derniers trains qui avaient pu quitter Berlin avant le blocus instauré par les Russes. A quelques jours près, tout cela aurait sans doute disparu, pendant ces mois où le monde occidental trembla pour Berlin. Mais revenons aux journées des 5 et 6 mars. Ma première visite avait été pour le lycée où j'avais à coeur d'annoncer immédiatement notre arrivée et je compris tout de suite que le pays commençait seulement à surmonter les suites de la guerre. La ville avait subi de gros dégâts au cours des bombardements répétés et, en particulier, le lycée de filles avait été complètement détruit. Les classes des deux lycées de filles et de garçons, indépendants l'un de l'autre, avaient lieu dans les bâtiment restés intacts du lycée de garçons suivant un rythme régulier: pendant une semaine, les garçons occupaient le terrain de 8 h à 13 heures (6 cours de 45 minutes + récréation). Les filles de 13.05 h à 18 heures. La semaine suivante, on intervertissait. Tout le monde y trouvant son compte, sauf les mères de famille ayant des enfants des deux sexes qui se succédaient à table, difficulté quelque peu accrue pour les mères de familles qui faisaient elles-mêmes partie du circuit. Cet état de chose devait durer jusqu'à l'achèvement du nouveau lycée de filles en 1953. La semaine de notre arrivée, c'était les garçons qui étaient du matin, donc il fallait attendre la relève. Pendant l'attente, j'allai à la mairie pour les formalités d'usage. L'accueil y fut plutôt glacial: dans cette petite Sarre, très éprouvée par la guerre, on voulait se préserver de l'immigration et les étrangers, surtout les étrangers comme nous qui venions de la zone russe, étaient reçus avec beaucoup de méfiance. Heureusement, tous nos papiers étaient en règle. Je pouvais justifier de notre présence et prouver que j'étais là pour servir la communauté. Question du logement très épineuse. Il nous fallait pourtant trouver un toit pour la prochaine nuit. Quelques adresses me furent données, mais il est probable que notre aspect extérieur n'inspirait pas confiance aux propriétaires de chambres à louer: nous avions passé 5 jours et 5 nuits sur les routes et le lavabo de la Croix-Rouge n'avait pu effacer les traces de ce vagabondage. Après plusieurs tentatives infructueuses, nous eûmes du succès auprès de la vieille mère d'un boulanger qui voulut bien mettre à notre disposition une chambre voisine de sa cuisine. Son petit appartement situé dans la cour de la boulangerie n'avait pas de chauffage, car il se trouvait, au-dessus du fournil qui en tièdissait l'atmosphère. Un escalier extérieur permettait aux habitants de l'appartement de se rendre aux toilettes situées dans la cour. La chambre contenait 2 lits, une armoire, une table et 2 chaises, une table de toilette avec une cuvette et un broc. L'eau coulait dans la cuisine de la vieille dame, qui mettait son poêle à notre disposition pour la préparation des repas. Après les refus que nous avions essuyés, nous fûmes très heureux de déposer nos sacs dans ce refuge et le fîmes d'autant plus volontiers que nous étions persuadés de trouver mieux au bout de quelques recherches. Bien mal nous en prit: ces recherches n'aboutirent que 11 mois plus tard, en février 1949, moment où la mairie nous permit enfin d'emménager dans un appartement peu confortable mais où nous avions enfin pu déballer les caisses de livres, monter les armoires et compléter ce mobilier plus que modeste par des achats chez un brocanteur et par un buffet de cuisine fabriqué par Hans-Jürgen (avec tiroir!) avec les caisses du déménagement. Dans l'intervalle, nos affaires avaient été entreposées dans des locaux d'une ancienne caserne où sévissaient des souris, heureusement sans grand dommage. Dans l'après-midi de ce même vendredi, je retournai au lycée où travaillait, cette fois, les filles, et où je fus reçue par une directrice d'un abord très direct, compréhensive, d'une grande générosité, avec laquelle le contact s'établit immédiatement, engendrant une sympathie qui ne se démentit jamais pendant les 33 années de notre amitié. Catholique très pratiquante, Maria Schwarz ne faisait jamais de prosélytisme et c'est incidemment que l'on s'apercevait de son assiduité à l'église où elle assistait quotidiennement à la messe, en toute saison, et quelque soit l'emploi du temps prévu pour la journée. Nous savions l'une et l'autre que nos convictions religieuses divergeaient totalement, mais nous nous accordions parfaitement sur les affaires terrestres et c'est peut-être cette dualité qui rendait notre commerce si agréable. D'entrée, elle me tendit sa carte de pain (là aussi le rationnement était encore de règle), mit à ma disposition une avance de 1.000 francs pour subvenir au plus pressé, et fit en sorte que j'aie le temps de m'acclimater, en s'arrangeant pour que mon travail effectif ne commence qu'après les vacances de Pâques. Jusque-là, je pourrais assister aux cours des collègues et, ainsi, me familiariser avec mon nouveau lieu de travail, si différent de celui que j'avais quitté. Le lendemain samedi, je suis allée à Sarrebrück pour échanger le reçu qu'on m'avait remis à la gare contre un capital d'accueil de 300 francs par personne. Ensuite, il faudrait attendre la première paye. Puis ce fut le tour des enfants de se faire inscrire aux lycées respectifs. Leur tâche allait être rude! Le système scolaire allemand comporte 13 années d'études (au lieu de 12 en France), 4 classes primaires et 9 classes secondaires. Hans-Jürgen se trouvait en fin de 11ème année, bien que, en réalité, la somme des absences successives dues aux événements que j'ai racontés, s'élève à plus de 2 ans 1/2. Il venait d'un lycée classique où les langues obligatoires étaient le grec, le latin et le russe. Dans son nouvel établissement, on pratiquait le français première langue depuis la classe 5, le latin et l'anglais, 2ème langue vivante depuis la classe 7. Il avait donc à rattraper: 7 ans de français et 5 ans d'anglais, alors qu'il se trouvait à 2 ans du bac! Pour Marlène qui fréquentait la classe 9, la situation était la même, sauf qu'elle avait 4 ans devant elle pour combler les lacunes en français et en anglais. Il fallut mettre les bouchées doubles ou même triples, avec des leçons particulières et une énorme bonne volonté de leur part. H.J. alla passer les vacances d'été de 48 à 49 en France; Marlène eut un congé de 3 mois pendant l'hiver 49/50, pendant lequel, sous l'égide de Monique, elle fréquenta l'école des Myrthes à Saint-Raphaël. Et le tour de force réussit, puisque l'un et l'autre obtinrent leur diplôme final (ABITUR) dans les délais prévus, H.J. en 1950, Marlène en 1952. Pour ma part, j'ai beaucoup travaillé à Hombourg et en ai ressenti de grandes satisfactions. Les élèves de ces années d'après-guerre étaient, en Sarre, comme à Magdebourg, avides de savoir, désireuses d'apprendre, prêtes à suivre toutes les impulsions qu'on pouvait leur donner pour préparer leur avenir sur des bases solides. D'autre part, la situation particulière de la Sarre présentait pour mon individualisme invétéré de grands avantages. L'administration locale, comme la population toute entière, était foncièrement allemande - et le résultat futur du référendum de 1956 n'a jamais fait de doute pour ceux qui connaissait le pays - mais l'économie française qui aspirait à la réunion, dans une seule main, du fer de Lorraine et du charbon sarrois, avait obtenu cette formation du petit Etat sarrois sous protectorat français. Il en résultait une dualité latente dans la conduite des affaires gouvernementales. La conséquence pour nous, enseignants, était que nous n'étions pas assujettis à un dogmatisme d'Etat qui nous aurait prescrit une méthode pédagogique conforme à son idéologie - comme ce fut le cas extrême dans la RDA et comme on en fait l'expérience même dans les démocraties occidentales quand un parti politique prend trop d'importance. Donc, dans le cadre des programmes établis pour les différentes matières et dont nous étions tenus de traiter le contenu, nous pouvions le faire en choisissant la méthode qui nous semblait la meilleure et qui pouvait différer d'une classe à l'autre. Car, surtout en mathématiques, il faut savoir s'adapter à la plus ou moins grande réceptivité des élèves. En français, la liberté était encore plus grande. Le but de l'enseignement était de faire acquérir aux élèves une bonne connaissance de la langue, de la littérature et de la civilisation française. Pour les petites classes et les classes moyennes, nous nous servions naturellement de manuels scolaires, mais dans les grandes classes nous avions tout loisir pour choisir nous-mêmes les écrivains et les oeuvres qui nous semblaient les mieux appropriés. Comme il s'agissait de ma langue maternelle, je me sentais à l'aise. Je donnais 24 heures de cours par semaine, soit six classes partagées entre mes deux matières qui, toutes deux, m'apportaient beaucoup de copies à corriger. Il arrivait souvent, en particulier dans les classes dont j'étais professeur principal, d'y enseigner les 2 matières ce qui me permettait, par le jeu des différences d'aptitudes que demandent ces deux disciplines d'avoir un contact plus pertinent avec les élèves. En dehors des heures de cours, nous avions l'occasion de mieux nous connaître au cours des excursions annuelles. Nous avons parcouru la Forêt-Noire, les vallées de la Sarre, de la Moselle, du Rhin, les magnifiques paysages trop peu connus du Luxembourg. Nous sommes allés à 2 reprises à Paris, aux floralies de Hambourg, avec la traversée vers l'île d'Helgoland. Nous avons visité l'Exposition Universelle de 1958 à Bruxelles et en cette même année 58, nous sommes allées à Berlin où le Mur n'existait pas encore. Les deux Etats allemands divergeaient de plus en plus. La ligne de démarcation devenait infranchissable. Le seul lien où les habitants de l'Est en mal de liberté, pouvaient espérer sortir de leur prison était cette ville où l'on pouvait encore passer d'un secteur à l'autre, mais où la suspicion régnait dans le métro et aux abords des gares. Nous sommes passés dans le secteur est pour visiter les musées qui contiennent les trésors d'art égyptien et babylonien. Non loin de là s'élevaient les cités-casernes nouvellement construites qui respiraient l'ennui et la médiocrité. Cette fissure que représentait Berlin dans la muraille élevée entre les puissances ennemies aurait continué à permettre l'exode vers l'ouest, donc à vider l'est de sa substance humaine. C'est pour cela que, 3 ans plus tard, fut élevé ce que l'on a appelé depuis "le Mur de la Honte". Si du point de vue travail et relations humaines, les années passées à Hombourg ont été une période faste de ma vie, il en fut tout autrement en ce qui concerne les problèmes financiers. Ceux-ci comportaient, comme tout ce qui touche à la finance, deux composantes: les recettes possibles, et les dépenses obligatoires. La seule source de revenu était mon traitement de professeur. Celui-ci n'était pas très élevé, car, outre que j'étais débutante dans le métier, je n'étais pas titulaire et ne pourrais le devenir qu'après avoir acquis la nationalité sarroise, réservée, en principe, aux autochtones. Il fallait multiplier les démarches avant d'atteindre le but en mai 1952. Je n'en restais pas moins à l'échelon le plus bas des salaires de la profession. Naturellement, celui-ci était supérieur à ce que gagnait, par exemple, un éboueur. Il était donc trop élevé pour que j'aie droit à une aide supplémentaire pour les 3 enfants. Côté dépenses: c'était bien simple, nous avions besoin, en dehors des nécessités journalières, de linge de maison, de vêtements, de chaussures, etc.., car nous sortions d'une période de pénurie qui avait duré 10 ans. J'avais confectionné les dernières robes des filles dans des rideaux. En calculant au plus juste nous avons acheté soit une paire de draps, soit un pyjama ou une paire de chaussures pour l'un de nous. Lorsque, en 1950, nous avons acheté à tempérament une bicyclette (qui peu de temps après, fut volée à Marlène dans une auberge de jeunesse!) j'ai cru faire une folie. Mon traitement augmenta, il est vrai, peu à peu; mais les dépenses firent de même, à mesure que les enfants continuaient leurs études hors des frontières de la Sarre, qu'ils se mariaient, que naissaient les premiers petits-enfants. Pendant cette période, qui dura jusqu'au début des années soixante, j'ai l'impression d'avoir navigué à vue, en contournant les écueils qui surgissaient en travers du courant. L'essentiel est que nous n'ayons pas coulé. En 1953, fut promulguée une loi qui rendait à tous les anciens fonctionnaires d'Etat, quelle que soit la province où ils avaient exercé, tous les droits que le bouleversement de l'après-guerre avait supprimé. C'était, certes, pour nous une bonne nouvelle, mais elle eut peu d'effet immédiat. Cette loi comportait une clause, interdisant un double revenu payé par l'Etat. Ceci voulait dire qu'il me fallait choisir: soit je conservais mon poste et la pension de veuve ne m'était pas payée, soit je recevais la pension après avoir quitté le service de l'Etat. Il y avait naturellement une possibilité à laquelle j'ai eu recours plus tard: quitter le service de l'Etat et tenter ma chance dans le secteur privé. J'aurais alors eu droit à toucher ma pension. Cette solution me sembla alors trop aléatoire: tant que j'avais la charge de la famille, la sécurité de l'emploi était ce qui importait le plus. Les enfants, eux, avaient droit à la leur. Malheureusement, les deux aînés n'en jouirent pas longtemps: Hans-Jürgen atteignit la limite d'âge le 1er décembre 1954, alors qu'il n'avait pas terminé ses études. Marlene ne perçut la sienne qu'un mois de plus car, en janvier 55 pensant à son prochain mariage, elle avait accepté un emploi rémunéré, à la suite de quoi, la somme que lui allouait l'Etat fut supprimée. Seule Renate en jouit pendant quelques années, jusqu'au moment de son mariage en 1960. Lorsqu'au cours des excursions familiales et scolaires, je sillonnais le territoire de la Sarre, je me rendis compte de la chance qui nous était échue en nous assignant comme but de notre exode, la ville de Hombourg. Située à l'est du pays au pied des collines plantées de vastes forêts, c'était en 48 une petite bourgade où certaines rues étaient des sentiers herbus qui longeaient des potagers. A part une brasserie (Karlsberg Brauerei) et une fonderie, je n'y remarquai alors aucune industrie. L'air y était pur et rien n'y annonçait l'enfer des houilleres de Neukirchen et l'atmosphère empoissée de la vallée de la Sarre, à Völklingen par exemple. Tout y était verdure et calme et les longues promenades dans les bois, la cueillette des myrtilles et des champignons ont été une véritable panacée contre les soucis quotidiens. En marchant ainsi par les sentiers déserts, je pensais souvent aux amis et aux parents que nous avions laissés derrière nous et, mentalement, je leur faisais part de nos expériences. Malheureusement, rentrée à la maison, je ne réussissais pas à m'astreindre à le leur écrire. Il y aurait eu trop de choses à dire et le temps aussi bien que l'énergie manquaient pour le faire. Ils ont alors peut-être pensé que je les avais oubliés et je leur demande aujourd'hui de m'en excuser.

Evénements familiaux : 1948-1964    #0_sommaire_france


Nous étions depuis peu à Hombourg lorsque mourut la grand-mère Hubin, la mère de mon père. Née en 1854, Henriette Cloris avait grandi chez ses parents, jardiniers maraîchers à Longuyon, une petite ville lorraine, située à l'ouest de Metz. Elle avait 16 ans lorsqu'éclata la guerre franco-allemande de 1870 et vécut ses remous en plein coeur de la bataille de Metz! Mariée en 1873 à Honoré Hubin, employé aux chemins de fer, elle eut d'abord une fille qui mourut peu après la naissance, puis 4 fils dont mon père était l'aîné. Son mari, emporté par une pneumonie en 1898, alors que mon père était au Tonkin, elle changea plusieurs fois de domicile et habitait Rethel, dans les Ardennes, quand, en 1914, elle dut s'enfuir devant l'incendie de la ville et la ruée des troupes allemandes vers la Marne. Elle se réfugia au Mans où elle vécut jusqu'à la fin des hostilités, après quoi elle reprit le chemin des Ardennes et s'installa à Charleville. En 1940, emportée par la panique générale de l'exode devant l'avance fulgurante des armées allemandes, elle avait déjà parcouru plusieurs kilomètres lorsqu'elle réalisa qu'à 86 ans elle n'avait plus grand-chose à perdre (ou à sauver?), de sorte qu'elle reprit le chemin de sa maison où elle passa tranquillement le reste de la guerre. Elle venait de s'éteindre doucement à l'âge de 94 ans, sans jamais avoir été malade.
 En 1950, après avoir passé son bac, Hans-Jürgen se mit en devoir de réaliser le projet qu'il avait conçu pendant son apprentissage agricole: devenir vétérinaire. Or aucune possibilité n'existait en Sarre. Pour entreprendre ses études, il fallait qu'il "s'expatrie", et choisir entre Munich et Lyon, les deux écoles les plus proches de nous, mais qui exigeaient l'une et l'autre des permissions spéciales pour y être admis, avec passeport obligé dans les 2 cas et pour Munich l'obligation de se procurer des devises. Le choix se porta sur Lyon pour plusieurs raisons. Tout d'abord, plusieurs Sarrois y avaient déjà été admis, et avaient reçu l'assurance que leur diplôme français serait également valable en Allemagne après un examen supplémentaire portant sur les questions juridiques de la profession. Le choix ne limitait donc en rien le champ futur de l'activité professionnelle, et il avait l'avantage de permettre l'acquisition totale du français. De plus, la situation de Lyon faciliterait les voyages vers la côte méditerranéenne, donc les rencontres avec tous les membres de la famille dont il avait été séparé pendant toute son enfance. Donc, après un an de préparation à la faculté de médecine humaine de Sarrebrück, H.J. entra à l'école vétérinaire de Lyon où il passa son diplôme en juillet 1955. Pendant sa dernière année d'études, il fit la connaissance d'une jeune fille, Annick Parsons, qui habitait à Lyon avec ses parents et ses 3 soeurs. Son père était anglais, sa mère française et elle-même possédait les 2 nationalités. Les jeunes gens sympathisèrent de telle sorte qu'il fut bientôt question de mariage. Annick allait-elle être amenée à adopter une troisième nationalité, une troisième langue, une troisième culture? Ce fut Hans-Jürgen qui décida de demander pour lui-même la nationalité française, pour ensuite, s'installer en France. A ce moment, il aurait pu se faire appeler Jean-Georges, la forme française de son nom que nous avions prévue à sa naissance. Mais l'habitude était prise, et il continua à s'appeler Hans. C'est ainsi que, petit-fils d'Arnold Jean-Baptiste Blondeau, intégralement français, fils de Karl-Arnold Blondeau, né français mais qui avait opté pour l'Allemagne à la suite des circonstances que j'ai relatées, Hans Blondeau, né allemand, recouvrait la nationalité française de ses ancêtres. Les fiançailles eurent lieu à Lyon à Noël 1955 et ce fut la dernière réunion familiale à laquelle prit part ma soeur Françoise. Malade depuis quelques mois, on devait, en janvier 56 diagnostiquer un cancer des reins auquel elle succomba au mois d'avril suivant. Elle avait 34 ans. Sa fille Marie-France qui avait alors 14 ans continua ses études dans un internat. Son fils Jean-Pierre, 7 ans 1/2, partagea dès lors la vie de ses cousins Jean-Claude et Yves près de ma soeur Monique à Saint-Raphaël. Le mariage d'Annick et Hans fut célébré à Lyon en avril 1957. Après quelques années de stage en Alsace, à Parthenay (Deux-Sèvres) et St. Gervais - Mont Blanc, ils s'installèrent en Haute-Savoie, à Annecy d'abord, puis en 1962 à Thônes où sont nés Frédérique en 1962 et Ludwig en 1967, alors que l'aîné Eric, était né pendant leur séjour à St. Gervais. Voici donc bientôt 30 ans que Hans exerce, dans ce merveilleux paysage de montagnes, le métier dont il avait rêvé dans son adolescence. Marlène passa son bac en 1952. Elle ne ressentait pas de vocation particulière et pensant que l'avenir la lui révèlerait, elle commença ses études de mathématiques et de sport à l'université de Freiburg. Au cours de l'été 1953, faisant une longue excursion avec son frère à travers la Forêt-Noire, elle rencontra au sommet du Ballon Badois (Belchen) un jeune professeur qui, suivant la ligne des crêtes, traversait à pied le massif du sud au nord. Les jeunes gens firent connaissance, marchèrent ensemble pendant plusieurs jours dans ce beau paysage de montagnes boisées et, sans doute, s'apprécièrent, car d'autres rencontres suivirent; les fiançailles eurent lieu en août 1954 et le mariage en août 1955. Karl-Friedrich Bartlewski enseignait le grec et le latin à Moers, ville située non loin de Düsseldorf, où le couple s'installa et où naquirent leurs deux filles, Ulrike en 1956 et Beate en 1957. En 1965, Karl-Friedrich devait être nommé proviseur du lycée classique de Soest (Archigymnasium) où il termina sa carrière en 1985. Soest est une cité très ancienne. Bâtie en grès vert des carrières locales, la vieille ville aux maisons à colombage est encore entourée de ses vieux remparts. Elle fit partie, avec Hambourg, Lübeck et bien d'autres villes, de la Hanse et fut, pendant plusieurs siècles la capitale de la Westphalie; cette Westphalie où, un siècle et demi auparavant Marie-Cornelie Aerden épousait Michel Blondeau. Marlène et sa famille rejoignaient les traces de ses arrière-arrière-grands-parents! Renate, qui était très douée pour les langues et toutes les activités artistiques, détestait les maths et la physique. Pensant qu'il n'était pas nécessaire de travailler ces matières barbares dans le seul but de passer un examen et de les oublier ensuite, nous convînmes qu'il était plus conforme à ses aptitudes de quitter le lycée à la fin du 2ème cycle, c'est-à-dire après la 10ème classe. Elle se présenta alors au Conservatoire d'art dramatique de Sarrebrück dont elle suivit les cours pendant 3 ans et d'où elle sortit en 1957 avec son diplôme de fin d'études. Ne se sentant pas encore prête à affronter la vie professionnelle, elle préféra compléter ses connaissances linguistiques. Elle alla passer un an à Oxford, en revint en été 58 avec une formation trilingue. C'est pour aller passer les fêtes de Pentecôte 58 avec elle à Londres et à Oxford que j'ai fait mon premier voyage en avion. L'aéroport de Luxembourg où je m'embarquais était alors une construction très sommaire en bois. Après un changement d'appareil à Bruxelles, nous avons survolé la Manche à altitude assez basse pour nous permettre de suivre des yeux le sillage des bateaux et de contempler à loisir le panorama de Londres au moment du crépuscule. Pendant l'année scolaire 58/59, elle s'inscrivit en Sorbonne et y passa le diplôme de Civilisation française. Pendant ces mois, passés à Paris, elle fit la connaissance de Pierre Motte, alors étudiant en biologie. La suite est classique: ils se marièrent en 1960 et vécurent dès lors à Paris. Renate possédait maintenant les deux nationalités allemande et française. Le mariage marqua le fin de ses ambitions personnelles. Leur première fille, Stéphane, naquit en 1961, la deuxième Valérie, en 1975. Pierre, qui avait renoncé à l'enseignement, changea de direction et devint par la suite chirurgien-dentiste, profession qu'il exerce aujourd'hui encore à Paris.

Changement de domicile - Triberg    #0_sommaire_france


La cellule familiale mère-enfants ayant éclaté, j'eus envie de changer d'horizon. Je n'avais pas vraiment pris racine à Hombourg. Les seuls liens qui m'y attachaient étaient ceux de quelques amitiés que j'y avais nouées. Mais l'amitié vraie résiste à l'éloignement et les facilités de communication que sont le téléphone et les visites réciproques nous ont montré qu'elles étaient vivaces puisqu'elles existent encore aujourd'hui. La ville avait changé, perdu son caractère bucolique qui m'avait tant plu à notre arrivée. Elle devenait cité moderne, industrielle et la nature environnante semblait avoir reculé. Cette évolution a d'ailleurs continué et lorsque je m'y rends maintenant, j'ai du mal à y retrouver mes repères. Donc, du point de vue affectif, rien ne s'opposait à un changement de lieu de résidence. Le point de vue économique ne m'offrait que des avantages. En effet, pour choisir en toute liberté mon nouveau domicile, j'allais donner ma démission de fonctionnaire. Mes droits à une pension à titre personnel allait être transférés à la caisse de retraite-vieillesse et le montant me serait payé à partir de mon soixantième anniversaire, c'est-à-dire en 1968. Personnellement, ne relevant plus de l'Etat, mes droits à une pension de veuve étaient réactivés et, les percevant j'avais tout loisir d'exercer une activité rémunérée dans un secteur privé.
 Nous étions en 1963, et plusieurs considérations allaient déterminer mon choix. Pensant à une activité pédagogique, je voulais rester en Allemagne pour ne pas être obligée une fois de plus, de changer de méthode. Il était essentiel de vivre dans un beau paysage, non seulement pour mon plaisir personnel quotidien, mais pour que la jeune génération en marche y trouve du plaisir et aime à y venir en vacances. L'endroit devait se trouver à distance à peu près égale du domicile de mes trois enfants: Westphalie, Haute-Savoie et Paris. Enfin, je désirais y trouver un lycée privé où un traitement de professeur me permettrait enfin d'accéder à un peu plus de confort, acheter de vrais lits, une vraie cuisine, une machine à laver, une télévision, toutes choses qui, 16 ans après notre départ de Magdebourg, m'étaient restées inaccessibles. Pour trouver ce lieu idéal, je commençai par déterminer le centre du cercle passant par les trois points Moers, Thônes et Paris et tombai aux environs de Strasbourg. Un petit décalage vers l'est me faisait passer la frontière et me rapprochait du massif de la Forêt-Noire. Un journal professionnel m'apprit que le "Lycée de la Forêt-Noire" (Schwarzwaldschule), un établissement privé qui devint, quelques années plus tard, lycée d'Etat, sis à Triberg cherchait un professeur de mathématiques. Je me mis sur les rangs, et c'est ainsi que je me suis installée à Triberg, petite ville blottie au creux de 3 vallées à une altitude de 600/800 mètres et dont le charme devait être bien réel, puisque le pays avait conquis, quelques temps auparavant, un jeune Français de 20 ans qui l'avait découvert fortuitement. Il s'agissait de François Léotard qui avait alors suggéré à son père, maire de Fréjus, de procéder au jumelage des 2 villes Triberg-Fréjus. L'affaire conclue, la première visite à Triberg d'un groupe d'adolescents de Fréjus, avait été fixée aux vacances de Noël de 1963. Naturellement, je ne savais rien de tout cela lorsque j'avais prévu mon arrivée à Triberg pour le 1er avril 1964. D'autre part, personne dans la famille n'était encore au courant de mes projets. Quelle ne fut pas ma stupéfaction lorsque ma soeur Monique, professeur de langues à Saint-Raphaël, m'apprit, vers la mi-décembre, qu'elle se préparait à conduire un groupe français de Fréjus dans la ville jumelle qu'elle ne connaissait pas et qui avait pour nom Triberg! Et quelle ne fut pas la sienne, en retour, lorsque je lui fis part de mes projets! J'ai plus tard fait partie du comité de jumelage, côté Triberg, comme elle l'était, côté Fréjus, et nous avons participé, elle et moi, à de nombreuses rencontres entre des groupes de jeunes ou de délégations municipales qui eurent lieu dans chacune des 2 villes et qui continuèrent lorsque François Léotard succéda à son père à la mairie de Fréjus. Le jumelage, vieux de près de trente ans, est toujours aussi actif. Les rencontres amicales entre les citoyens des deux villes ont conduit à plusieurs mariages et on trouve, à Fréjus, une rue de Triberg.

Evénements familiaux : 1964-1978    #0_sommaire_france


Mon installation à Triberg, situé à 50 km environ au nord-est de Fribourg me permit de renouer des contacts suivis avec le seul membre de la famille Knaur qui eût émigré à l'ouest, tous les autres étant restés derrière le Rideau de fer. Ilsemarie Schulz, née Schmedes, petite-fille d'Adolf Knaur, donc cousine d'Arnold, y vivait avec ses enfants. Je l'avais vue pour la dernière fois au mariage de Marguerite Kiessling et d'Ernst-Adolf Knaur, en octobre 1936, alors qu'elle avait 17 ans. Née à Breslau, elle avait vécu en Haute-Silésie, s'était mariée au début de la guerre et son fils Ulrich était né en 1941. Elle ne connut pas la vie de couple, car son mari, Herrmann Schulz, ne revint pas des champs de bataille russes, partageant le sort de son beau-frère, Hans Schmedes, frère de Ilsemarie qui disparut dans l'enfer de Stalingrad. Au mois de janvier 1945, elle dut fuir devant l'offensive des troupes russes, emmenant son petit garçon de 3 ans 1/2 et sa mère, très éprouvée mentalement de la perte de son fils et de son gendre. Après une longue odyssée, le petit groupe atteignit l'extrémité nord de l'Allemagne, la frontière du Danemark. Là, ils vécurent chichement pendant de longs mois, détachant des buissons la laine que les nombreux moutons y perdaient pour la filer et en tricoter des vêtements pour le petit et travaillant dans les champs en échange de leur subsistance. Lorsque la situation générale du pays commença à s'améliorer, les autorités s'occupèrent de répartir les millions de réfugiés venus des territoires de l'est devenus polonais entre les différents Länder. Ilsemarie choisit le pays de Bade, la ville de Fribourg, où la petite famille arriva au début des années cinquante. L'intégration dans une ville dont la majeure partie était encore en ruines et dont la population très catholique admettait les protestants de l'est avec une certaine réticence, était difficile. Elle crut trouver un protecteur, un compagnon avec lequel elle pourrait fonder un nouveau foyer, mais les circonstances la conduisirent à renoncer à cet espoir et à assumer seule l'existence de sa fille Almut, née en 1953. La grand-mère s'occupant des enfants, Ilsemarie travailla et fit vivre la petite communauté. Sa mère, née Herta Knaur mourut en 1964. Ilsemarie nous a quitté au mois de juillet dernier d'une insuffisance cardiaque. Elle était âgé de 72 ans. Son fils, Ulrich, professeur à l'université de Bielefeld, habite aux environs de cette ville, non loin de Soest et de la famille Bartlewski. Il a épousé Claudia Winz et le couple a 4 enfants, Inga (janvier 1979), Ursula (novembre 1979), Hans (1981) et Susanne (1986). Almut enseigne les mathématiques et la biologie dans un lycée de Fribourg.
 Ilsemarie, fille de Herta Knaur, était la nièce de Ernst-Adolf (!) Knaur et leurs rapports avaient été très étroits avant la guerre. Par la suite, les liens avaient subsisté, malgré la séparation des territoires. Elle me communiqua les nouvelles qu'elle en recevait et le contact que j'avais un peu négligé pendant toutes ces années fut rétabli. Les enfants de Marguerite et Ernst-Adolf s'étaient mariés. Ulrich, l'aîné avait eu une fille, Ulrike, d'un premier mariage. D'un second mariage, il eut deux filles, Beate et Juliane. Malheureusement, gravement malade, il avait succombé à une insuffisance rénale peu avant la naissance de cette dernière en 1967. Sigrid avait un fils, Torsten, puis une fille Inga. Christiane avait deux fils, Frank et Jens. En 1966, quelques mois après son soixantième anniversaire et un an avant son fils, Ernst-Adolf était mort d'un cancer. Depuis lors Marguerite vit seule à Quendlingbourg. Karl-Hermann Kiessling était et est toujours à Leipzig, ainsi que ses deux filles, toutes deux mariées, dont l'une a une autre fille Katrin. Kurt Kiessling et sa famille avaient quitté Quedlinburg pour s'installer au nord de Berlin, à Neu-Ruppin. Ses fils sont maintenant depuis longtemps pères de famille. Ekkehard est ingénieur à Berlin et a deux filles, Jeannette (1971) et Katrin (1973). Dietrich, biologiste à Halberstadt a également deux filles: Cornelia (1973) et Corina (1975). Kurt est décédé en 1970 et sa femme Dörte est restée à Neu-Ruppin. Je suis allée en RDA en 1969 et ai pu voir une partie de la famille. J'avais une autorisation officielle pour un séjour de 10 jours à Quedlinburg, avec permission de circuler dans un rayon de 50 km aux alentours. J'étais l'hôte de Marguerite, et Kurt nous a rejoint avec sa femme, et nous avons pu faire une courte excursion aux confins du Harz. Pour aller à Magdeburg - distance 65 km - il a fallu un laissez-passer spécial. Les brimades policières, à l'intérieur du pays, et en particulier, au passage de la frontière, l'atmosphère pesante, la grisaille de la vie, malgré les banderoles flamboyantes proclamant les réussites du pays, toute cela a fait que jamais plus je n'ai eu le courage de renouveler l'expérience. Je me suis contentée d'envoyer des paquets dont le contenu était strictement réglementé: pas de journaux, pas de livres pouvant être considérés comme subversifs, des quantités précises de thé, café, chocolat à quoi on ajoutait Nesquik et Nutella pour les enfants, et, pour les adultes, des denrées de haut luxe comme conserves de champignons et d'ananas, ou encore des produits introuvables là-bas comme savonnettes, shampooings, mousses de bain ou palmolive-vaisselle. Lorsque, passé l'âge de la retraite, les habitants de la RDA pouvaient venir nous voir - ce fut plusieurs fois le cas pour Marguerite - ils se sentaient projetés dans un monde auquel ils ne pouvaient pas vraiment accéder, leurs besoins, leurs désirs étant tellement grands et leurs moyens si réduits. Il faudra, je le crains, des années pour que les mentalités se rejoignent, le temps des différences a trop duré; il a absorbé une génération entière. Le choix de Triberg comme lieu de résidence combla mon attente. Le seul point noir fut la déception que me causa l'ambiance peu agréable de l'école qui contrastait avec l'atmosphère à laquelle j'étais habituée à Hombourg. Aussi n'y ai-je travaillé que le temps nécessaire pour atteindre l'âge de la retraite, c'est-à-dire jusqu'en 1968. J'eus alors tout loisir pour profiter des charmes de ce massif montagneux où, soit seule, soit avec les enfants et petits-enfants en vacances, j'ai fait d'innombrables randonnées pédestres dont tous ceux qui y ont pris part ont gardé de bons souvenirs. J'avais aussi plus de temps pour organiser les expéditions - vacances à la mer du Nord, aux plages de l'Atlantique ou de la Méditerranée, dans les montagnes de Haute-Savoie d'où j'essayais de mêler la germano et la francophilie. Ce fut pendant cette période d'une existence sereine que disparurent mes parents en 1965. Un jour du mois d'avril, Magdeleine partit, comme à son habitude, faire une longue promenade. Le soir, Georges attendit en vain son retour. Le lendemain matin, un groupe de scouts qui longeait la plage la découvrit, à 10 kilomètres environ de son domicile, au pied de la falaise du haut de laquelle elle avait glissé. Elle allait avoir 82 ans. Georges quitta Les Sablettes et alla s'installer chez Monique, à Saint-Raphaël. Jouissant d'une excellente santé, il y vivait des jours paisibles. Il eut une fin imprévisible. Au mois de novembre de cette même année 1965, il s'étrangla, à la fin d'un repas, avec un morceau de pomme. Les efforts qu'il fit pour s'en débarrasser provoquèrent sans doute une hémorragie interne dont il ne ressentit tout d'abord qu'une grande fatigue. Il se coucha, lut ses journaux quotidiens et s'éteignit doucement sans s'en apercevoir. Il aurait atteint, quelques semaines plus tard, ses 91 ans. L'union de nos parents avait duré 60 ans. Quelques années plus tard, ce fut à Thônes que le destin frappa. A Pâques 1970, Annick Blondeau, la femme de Hans, fut atteinte d'un cancer du sein. Sur sa demande expresse, elle connut le diagnostic dès le premier jour, et dès le premier jour elle entreprit de lutter à l'aide de tous les moyens qui sont à la disposition de la médecine. Ce combat héroïque dura 5 ans. Elle succomba au terrible mal le 27 janvier 1975. Elle avait 38 ans. Eric, son fils aîné, avait alors 15 ans, Frédérique avait 12 ans et Ludwig 7 ans. Par la suite, Hans a épousé en seconde noces Marie-Jo Paquier, issue d'une famille de soyeux lyonnais.

Installation à Freiburg    #0_sommaire_france


Les vallées, les forêts, les haut-plateaux gardaient pour moi leur attirance mais mon soixante-dixième anniversaire approchait; mon rayon d'action diminuait et la glace et la neige rendaient les rues pentues très glissantes pendant les 6 mois d'hiver. D'autre part, la petite ville changeait de caractère à cause de l'afflux croissant de touristes dont les autocars encombrent les rues et qui viennent admirer les cascades "les plus hautes d'Allemagne", orgueil de la cité. Aussi me suis-je décidée, au printemps 1978, à m'installer dans un lieu agréable et confortable, dans la ville de Fribourg en Brisgau. Située dans la plaine du Rhin, au fond d'une échancrure de la Forêt-Noire, Fribourg offre des agréments très divers. La vieille ville complètement détruite par un raid aérien en 1945 a été reconstruite avec beaucoup de sensibilité historique d'après les anciens plans et est un véritable joyau d'urbanisme. Enfermée dans son aréal d'autrefois, elle a laissé les quartiers modernes et industriels se développer tout autour, sans en être défigurée. Elle est une métropole artistique et universitaire et vient d'être choisie comme capitale européenne de l'écologie. Enfin, adossée au contrefort de la montagne, elle offre des possibilités de simples promenades ou de longues randonnées à tous les amoureux de la nature, quelles que soient leurs capacités sportives. C'est une ville où il fait bon vivre, et, là aussi, les enfants et les petits-enfants séjournent volontiers.

Evénements familiaux : 1978-1990    #0_sommaire_france


S'il est possible, dans une certaine mesure, de choisir son cadre de vie, on ne peut, par contre, échapper à la fatalité.
 Le drame qui éclata à Paris en 1985 fut double. Renate, qui souffrait depuis quelques temps d'un ulcère gastrique, dut subir, au début du mois de novembre, une gastrectomie totale. A quelques jours d'intervalle, sa belle-soeur, Claire Motte, danseuse étoile de l'Opéra de Paris, dut elle aussi se faire opérer. Il s'agissait d'un cancer des organes génitaux. Tandis que Renate reprenait des forces et allait avoir une rémission de presque 3 ans qui a pu nous faire croire à une véritable guérison, la maladie de Claire suivit inexorablement son cours et, avec nous tous, Renate eut la douleur d'assister à la disparition de celle à qui l'unissait une profonde amitié. Claire mourut le 16 juillet 1986, le jour anniversaire de la naissance de Renate. Elle avait 48 ans. Ses fils, Alexandre et Michael avaient respectivement 17 et 12 ans. En juin 1988, une évolution cancéreuse s'étant produite, Renate dut subir une seconde opération. En dépit des efforts de la médecine et de l'énergie qu'elle mit en oeuvre jusqu'à l'extrême limite, Renate succomba au bout de 4 longs mois, le 20 octobre 1988. Elle avait 51 ans. Sa fille aînée, Stéphane, avait 27 ans, la cadette, Valérie, en avait 13. Depuis les temps lointains de son séjour à Chotischau et Prague, et son retour en France, Monique est restée fidèle aux bords lumineux de la Méditerranée. Ayant épousé Marius Lovera en 1938 à Saint-Raphaël, c'est là qu'elle a élevé ses deux fils Jean-Claude (1941) et Yves (1945). Marius est mort en 1978. Avec son second mari, Paul Bapst, elle partage ses jours entre son appartement de Mandelieu qui lui procure les joies ensoleillées de la Côte et son nid d'aigle perché dans la montagne niçoise, à 1000 m d'altitude, Val-de-Blore, où elle va soit jouir de la fraîcheur, au plein coeur de l'été, soit profiter de la neige et des descentes à ski en hiver. Jean-Claude, qui a épousé Martine Boutoux, a deux enfants: Maurin né en 1974 et Estelle née en 1976. La famille séjourne depuis 4 ans en Martinique où Jean-Claude travaille pour la Compagnie des Eaux. Yves, marié à Marguerite Molina, a deux filles, Dominique, née en 1968 et Pascale en 1976. Leur vie ne manque pas de rebondissements. Après plusieurs années passées en Nouvelle-Calédonie, ils sont maintenant restaurateurs: en été, à Saint-Raphaël, en hiver à la Foux d'Allos. Entre les périodes de travail, ils peuvent satisfaire leur amour des voyages. Françoise n'a pas vu grandir ses enfants. Elle aurait maintenant 69 ans et serait depuis 2 an 1/2 déjà, arrière-grand-mère. Sa fille Marie-France (1942) a de son premier mariage avec Claude Asensi 4 enfants: Fabrice (1964), Caroline (1965), Renaud (1966) et Sophie (1969). Divorcée, elle a épousé en seconde noces Antoine Lortat-Jacob. Ils vivent à Paris ainsi que plusieurs de ses enfants. Jean-Pierre Stevens (1948) a épousé Françoise Bachet et ils ont 2 fils, Nicolas et Pierre-Emmanuel. Leur domicile se trouve à Oyonnax, mais Jean-Pierre y séjourne rarement, occupé qu'il est à vanter dans le monde entier, de Séoul à Los Angeles ou à Singapour, les mérites des lunettes de soleil jurassiennes et à les y vendre.

Conclusion
 
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Je termine ici ma chronique et vous la livre dans son état brut. Elle comporte sans doute des répétitions et certainement des lacunes que chacun comblera suivant ses propres expériences. La génération des petits-enfants écrira son histoire, si elle en a envie, quand elle l'aura vécue. Quelle que soit l'époque où l'un ou l'autre de nos descendants se penchera sur son passé et celui de ses proches, je crois que sur deux points au moins nos réflexions se rejoindront. La vie de l'intérieur de la famille est partout marquée par les mêmes joies à la naissance des enfants, les mêmes tristesses au départ des êtres qui nous sont chers. Partout aussi, chacun s'efforce d'atteindre un mieux-être, chacun lutte selon ses moyens pour améliorer les conditions de son existence et de celle de ces enfants.
 La qualité de la vie, cependant, dépend de l'entourage, du pays, des frontières qui le délimitent. Il est des frontières qui sont un simple tracé administratif et qu'on traverse sans presque s'en apercevoir. Les échanges s'y font librement, elles sont une ouverture sur un ailleurs enrichissant. Il en est malheureusement d'autres qui sont des barrières, et qui lorsqu'elles deviennent des barrières infranchissables, retiennent prisonniers ceux qu'elles enserrent et les retirent du commerce du monde extérieur. Notre passé le plus récent en est un exemple. Tout le monde a vu des images de la ligne de démarcation tracée entre l'Est et l'Ouest de l'Europe, cette zone de barbelés large de plusieurs centaines de mètres, surveillée du haut des miradors, gardée par des soldats en armes accompagnés de leurs chiens et qui coupait l'Allemagne en deux depuis la mer Baltique jusqu'aux Alpes. Tout le monde a entendu parlé des centaines de morts tombés en essayant de la franchir. Le Mur de Berlin en est devenu le symbole. Derrière cette barrière infranchissable vivaient des millions d'individus qui avaient eu jusqu'alors le même destin historique que les habitants de la RFA. Ils avaient les mêmes aptitudes, la même culture. Mais enfermés dans cette enceinte fortifiée et repliés sur eux-mêmes par le régime politique et économique insensé instauré par le parti unique S.E.D., garanti par l'armée russe, ils s'en sont éloignés extérieurement par la dégradation de la vie quotidienne, intérieurement par la résignation à un sort qui semblait inéluctable et ne laissait apercevoir aucune lueur d'espoir jusqu'aux jours de septembre 1989 où la chaudière explosa et fit s'écrouler le Mur de Berlin. Il fallut 45 ans pour en arriver là. Et cette rupture de près d'un demi-siècle laissera des séquelles que seul le temps pourra effacer. A présent, l'Est et l'Ouest peuvent communiquer librement, mais il faudra beaucoup de bonne volonté de part et d'autre pour retrouver la compréhension mutuelle dénaturée par une séparation de près d'un demi-siècle. Au point de vue familial, plus rien ne nous empêche de nous rencontrer, et le voyage que nous avons effectué cet automne et que j'ai mentionné au début de ce récit a été une pleine réussite. Après toutes les frontières, les interdits qui nous ont diversement séparés, nous vivons en ce moment une période de notre histoire où la famille Blondeau-Knaur n'est pas fissurée. Il y a tout lieu de croire que cet état de chose durera et c'est la tâche de chacun de nous d'oeuvrer dans ce sens. Les 33 descendants des deux couples qui sont à l'origine de cette chronique, sont dispersés entre Berlin-Brest-La Martinique, entre la mer Baltique et la Côte d'Azur en passant par l'Italie du Nord. Je me les représente comme autant de points d'ancrage de fils qui, entremêlés à tous ceux que créeront les hommes de bonne volonté, formeront la trame d'une Europe que le temps affermira.

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1 - Einleitung

Daß es eine Familie Knaur-Blondeau überhaupt gibt, ist nur der großen Geschichte zu verdanken. Ebenso wurde die Verwobenheit ihrer Generationen durch die Irrungen-Wirrungen der europäischen Geschichte der zwei letzten Jahrhunderte bestimmt. Warum ich mich entschlossen habe, den Versuch einer Darstellung der familiären Geschehnisse zu unternehmen, erklärt sich so: Ende September 1990 fuhren meine Tochter Marlene, ihr Mann Karl-Friedrich Bartlewski und ich nach Quedlinburg und Halberstadt, um unsere dortigen Verwandten zu besuchen. An einem Samstagabend (22.9.90) saßen wir drei mit Marguerite Knaur, geb. Kießling im Hause von Dietrich Kießling und seiner Frau Gisela in Halberstadt. Zeitpunkt und Ort dieses gemütlichen Zusammenseins scheinen mir eine Bestätigung dessen, was ich eingangs äußerte- Der Zeitpunkt: einige Tage später wurde die Vereinigung der beiden deutschen Staaten offiziell verkündet und somit ein historischerZustand beendet, der seit 1945 andauerte. Der Ort: An einem Sonntag im April 1945 saßen mein Mann, meine Tochter Marlene und ich im Keller einer befreundeten Familie in ebenderselben Stadt Halberstadt, als um uns diese Stadt durch einen amerikanischen Luftangriff zertrümmert wurde. Mein Sohn Hans-Jürgen und meine Tochter Renate standen zu derselben Zeit auf dem Dach eines Bauernhauses in Westerhausen und waren entsetzte Zuschauer des tödlichen Vorganges. Das Haus über uns wurde zur Hälfte zerstört. In der anderen Hälfte konnten wir das Feuer löschen, so daß uns persönlich nichts geschah. Es war aber keine Bleibe in der Stadt, weshalb wir uns am Nachmittag zu Fuß auf den Weg nach Schwanebeck aufmachten, wo wir einen Freund des Herrn Pfarrers Steinwachs hatten. Aber zurück in die Gegenwart: Im Verlauf der angeregten Unterhaltung wurden mir Fragen gestellt über unsere verwandschaftlichen Beziehungen zueinander. Die Antwort erschien mir so schwierig, daß ich die Anwesenden fragte, ob sie die Geduld hätten, einer längeren Erzählung zuzuhören. Da sie meine Frage bejahten, fing ich an, die Familiengeschichte an dem eigentlichen Knotenpunkt beginnen zu lassen: dem deutsch-französischen Krieg von 1870. Ich fing also an, aus dem Stehgreif zu erzählen und merkte bald, daß Dietrich eine Kassette aufgelegt hatte. Was so aufgezeichnet wurde, habe ich nicht wiedergehört; sicherlich war es nicht vollständig, vielleicht sogar fehlerhaft. Die kleine Gesellschaft schien mir trotzdem sehr interessiert, und somit bleibt mir nichts anderes übrig, als meinen damaligen mündlichen Bericht schriftlich zu vervollständigen und vor allem eine Übersicht zu geben über die Geschichte der Sippen Knaur und Blondeau vor ihrer Begegnung

2 - Vorgeschichte der Familie Knaur

Wir besitzen die von Anton Knaur (1790-1864) geschriebene Chronik, in der er von seinen Eltern, seinen Brüdern, seinem eigenen Leben erzählt, das durch schwere, sich schnell verändernde Umstände ein ewiger Kampf um die nackte Existenz war, und von seinen 15 Kindern, von denen nur 7 die Kinderkrankheiten überlebten. Diese Chronik lege ich meiner Erzählung bei. Ich werde sie wiederaufnehmen dort, wo sie von dem 13. Sohn des Anton Knaur, Karl-Anton, berichtet, wie er in Magdeburg die Beamtentochter Mathilde Mundt heiratet, wie er sich mit ihr in Burg b. Magdeburg niederläßt, wie dort ihre 4 Kinder zwischen 1852 und 1859 geboren werden. Karl-Anton besaß oder leitete eine Tuchfabrik und die Familie lebte in guten bürgerlichen Verhältnissen. Wir wissen, daß Frau Kaufmann Knaur zu Burg "in Anerkennung der freiwilligen Leistungen bei der Pflege Verwundeter und Kranker während des siegreichen Feldzuges 70/71" die Kriegsgedenkmünze von Stahl verliehen wurde. Soviel vorläufig über die Familien Knaur in Burg.

3 - Vorgeschichte der Familie Blondeau in Longwy

Longwy ist eine kleine Stadt des Départements Meurthe-et-Moselle, genau dort gelegen, wo Luxemburg, Belgien und Frankreich zusammenstoßen. Es ist eine Doppel-Stadt: Longwy-Haut, die Zitadelle, wurde als Festung in der zweiten Hälfte des 17. Jahrhunderts von Vauban erbaut; Longwy-Bas, die untere, offene Stadt, deren Bewohner bis in die Mitte des 19. Jahrhunderts von der Landwirtschaft lebten, wurde dann ein Zentrum der Stahlindustrie. Im 18. Jahrhundert war die Familie Blondeau eine der ca. 30 dort ansässigen. Jean Blondeau, geb. 1736, wird als "Laboureur et Bourgeois", also als "Bauer und Bürger" der Stadt Longwy bezeichnet. Er war es wohl, der das bescheidene Familienhaus erbaute, das noch jetzt, wenn auch verunstaltet, existiert. In diesem Hause wurde auch ich geboren, als letzte der Familie. Dort habe ich auch im August 1914 die fünf Tage der Beschießung durch die deutschen Truppen erlebt. Der Keller, mit der gewölbten Decke gleich einer Krypta und mit der Eisentür nach der Straße, bot einen guten Schutz, so daß wir uns dort einrichteten, um möglichst die Zerstörung des Hauses und der Stadt zu überleben. Das Haus ist, den Stadtplänen nach zu urteilen, das einzige aus früherer Zeit, das noch steht. Dort also lebte Jean Blondeau (1736-1792), verheiratet mit Cathérine Woircollier (1735-1803). Ihr zweiter Sohn Michel wurde 1776 geboren. Wie alle jungen Leute jener Zeit wurde er in die kriegerischen Geschehnisse hineingezogen. Genaues über seine Jugend wissen wir nicht. Fest steht, daß er mit den napoleonischen Truppen im damaligen Königreich Westfalen unter Jérôme Bonaparte als Lieutenant des Douanes, also Zolloffizier, weilte. Dort heiratete er Marie-Cornélie Aerden aus Wüstevest/Nethe und ihr beider Sohn Arnold Alexandre Theodor wurde 1812 in Vreden, Département Lippe geboren. Sein Geburtsschein wurde mitunterzeichnet von der Gräfin Fugger-Dietersheim Brandenburg, ehemals Äbtissin des Klosters Vreden. Wir besitzen eine französische Handschrift jener Gräfin, die im echt romantischen Stil dem Lieutenant Blondeau Anerkennung und Lob zollte für die Heldenhaftigkeit, mit der er und seine Leute den Brand der Stadt Vreden bekämpfte und schließlich das Kloster vor den Flammen rettete und 80 Menschen in Sicherheit brachte.Nach dem Kriegsende zog die Familie wieder nach Longwy, wo Michel und Marie-Cornelie auch starben. Arnold Alexandre Theodor wuchs dort auf und trat später in die Gendarmerie ein. Er heiratete Marie-Célestine Meffe (1823-1909) aus Montigny s/Chiers. Zwei Kinder wurden geboren: Arnold Jean Baptiste 1850 und Marie-Amélie 1861. Wie die Vorfahren lebte die Familie im alten Haus. 1866 jedoch starb Arnold A.Th., als seine Kinder 16 und 5 Jahre alt waren. Um den Lebensunterhalt zu bestreiten, errichtet Marie-Célestine in einem Teil des Hauses einen Spezereiladen, der bis etwa 1910 betrieben wurde. #0-Deutsch_Zusammenfassung

4 - Die erste Begegnung


Da kam das Jahr 1870, mit dem wir uns dem Knotenpunkt unserer Familiengeschichten nähern. Arnold Jean Baptiste war 20 Jahre alt und wurde Soldat. Ihm geschah nichts im Krieg; er kam heil zurück nach Hause und fuhr fort, seine Zukunft als Kaufmann vorzubereiten. Mehrere seiner Kameraden aus Longwy jedoch hatten weniger Glück als er: sie wurden gefangengenommen und nach Innerdeutschland abtransportiert. Ich weiß nicht, ob es damals allgemein üblich war oder ob es noch keine Kriegsgefangenen-Lager gab, - sie wurden nach Burg bei Magdeburg geschickt, wo sie bei Bürgern der Stadt einquartiert wurden. Einige von ihnen wurden in das Haus des Tuchfabrikanten Knaurs eingewiesen. Als sie nach Longwy zurückkehrten, waren sie voll des Lobes über die freundliche Behandlung, die sie erfahren hatten. Sie blieben in Verbindung mit der Burger Familie, und als der junge Blondeau beschloß, als Kaufmann sich für die Tuchbranche zu spezialisieren, rieten sie ihm, mit Burg Verbindung aufzunehmen. So entstand für Arnold J.B. der Plan, als angehender Kaufmann seine Kenntnisse im Ausland zu erweitern. Der Kaufmann aus Burg war einverstanden, im Jahre 1874 fuhr Arnold J.B. nach Burg und wurde für einige Monate Gast im Hause Knaur. Die Familie zählte vier Kinder: drei Söhne, zwischen 15 und 22 Jahre alt, und eine 17-jährige Tochter Minna. Minna war sehr schön und sittsam, sie sprach gut französisch. Arnold J.B. war 24. Die jungen Leute verliebten sich ineinander und schworen sich ewige Treue. Ich besitze die Photographie, die sie damals mit Widmung austauschten. Daß die Eltern nicht sofort mit dieser Bindung einverstanden waren, ist verständlich: eine so junge Tochter in ein weit entferntes Land, mit dem man soeben Krieg geführt hatte, ziehen zu lassen, war sicherlich ein schwerer Entschluß. So dauerte es bis 1877, ehe Minna und Arnold J.B. sich offiziell verlobten und noch zwei Jahre, bis sie 1879 heirateten. Das Paar ließ sich in Verviers (Belgien) nieder, wo am 7. März 1880 ihr Sohn Karl Arnold geboren wurde. Wahrscheinlich gingen die Geschäfte nicht so gut, wie sie erhofft hatten; denn wir finden sie in Tournay (Belgien) wieder, wo am 18.Mai 1881 ihre Tochter Marguerite zur Welt kam. Und dann das Drama: an einem Morgen des Winters 1882, als Minna erwachte, fand sie ihren Mann tot neben sich liegen. Herzschlag wurde vermutet. Er war 32 Jahre alt. Nun blieb die 25-jährige Frau mit zwei kleinen Kindern von 1 und zwei Jahren mittellos allein im fremden Landzurück; denn sie konnte das Geschäft sicherlich nicht alleine weiterbetreiben. Sie faßte den einzig möglichen Entschluß: sie zog mit ihren Kindern wieder zu ihren Eltern, die sich inzwischen in Magdeburg niedergelassen hatten. Mutter Mathilde sollte schon 1884 dort sterben, und von da an lebte Minna mit ihrem Vater und ihren Kindern in der großen Wohnung, die sie in eine Pension für auswärtige Schüler der Magdeburger höheren Schulen, besonders des Klosters Unserer lieben Frauen einrichtete, um so für den Unterhalt der Familie zu sorgen.
 Im Jahre 1880 war der älteste Bruder Minna's, Karl (geb. 1852) gestorben. In den Briefen aus der damaligen Zeit wird von seinem tragischen Geschick gesprochen. Näheres weiß ich jedoch darüber nicht. Der jüngste Bruder Robert (geb. 1859) hatte in Verviers und Tournay mit seinem Schwager Arnold gearbeitet und eine tiefe Freundschaft verband die beiden. Nach Auflösung des Geschäfts kam er wieder nach Magdeburg, wo er später Groß-Kaufmann wurde. Er heiratete Tante Gretel deren Mädchennamen mir unbekannt ist. Die erste Tochter, Susi, hatte zwei Töchter mit denen wir keine Verbindung haben. Die zweite Tochter, Irmgard, wurde Pianistin und hatte keine Kinder. Tante Gretel starb während des zweiten Weltkrieges im Jahre 1941 und das Wohnhaus fiel den Bomben zum Opfer. Robert, der immer in guten Verhältnissen gelebt hatte, fand Zuflucht im Hause eines früheren Dienstmädchens wo er 1946 starb.  #0-Deutsch_Zusammenfassung

5 - Familienereignisse zwischen den letzten Jahren des 19. Jahrhunderts und dem ersten Weltkrieg

In Longwy war die Zeit ebenfalls weitergeschritten. Die kleine Schwester von Arnold J.B., Marie-Amélie, hatte 18-jährig im Jahre 1879 Alexandre Paul Albert Claudel geheiratet. Er stammte aus La Bresse (Vogesen), einem Ort, wo heute noch eine große Anzahl von Claudel leben, eine Sippe, zu der auch der Dichter Paul Claudel und seine Schwester Camille gehören. Albert Claudel war Steuereinnehmer, d.h. er zog mit Pferd und Wagen durch die Ortschaften seines Bezirks, um bei den Geschäftsleuten und den Gastwirten Steuergelder für Tabak, Alkohol usw. zu kassieren. Dem Paar wurde 1883 eine Tochter Magdeleine und 1889 eine zweite Tochter Amélie geboren. A. Claudel übte seinen Beruf nicht sehr lange aus. Er wurde krank, und kein Arzt fand ein Mittel gegen den Verfall seiner Kräfte. Er quittierte den Dienst, und die 4-köpfige Familie zog nach Longwy zurück, wo sie von nun an im Hause der Großmutter Marie-Célestine lebten. Glücklicherweise wurde durch einen Zufall der Krankheitserreger gefunden: es war ein Parasit, wohlbekannt als Taenia-Bandwurm an den niemand gedacht hatte. Der Patient genaß vollständig und lebte danach noch mehr als 40 Jahre. Die Claudels blieben aber in Longwy, wo Albert eine Stelle bei der Bank fand. So wuchsen Magdeleine und Amélie Claudel in Longwy in dem Hause auf, wo die Magdeburger Kinder jedes Jahr ihre Ferien bei der gemeinsamen Großmutter verbrachten. Alle sprachen gut französisch, und es entwickelte sich eine sehr enge Freundschaft, vor allem zwischen den drei "Großen" K.Arnold, Marguerite und Magdeleine und dies trotz des Gegensatzes ihrer jeweiligen Umwelt. In Magdeburg, der Großstadt, wurden die Kinder von ihrer Mutter Minna protestantisch-puritanisch erzogen. Arnold trat 1889 in die Sexta des Klosters Unserer lieben Frauen ein, wo er 1898 das Abitur bestand. Danach studierte er Klassische Philologie in Marburg und Bonn und wurde Oberlehrer. Marguerite lebte wie alle bürgerlichen Mädchen dieser Zeit bei ihrer Mutter: Schule, Hauswirtschaft, Vorbereitung zu einem späteren Eheleben. In Longwy, einer ausschließlich katholischen Kleinstadt, besuchte Magdeleine die Schwesternschule. Sehr fromm, hatte sie das Lebensziel, Examen zu machen, um ihrerseits Unterrichtsschwester zu werden. Als sie 18 Jahre wurde, überwand sie den Widerstand ihrer Eltern und trat in das Noviziat ein. Die Erfahrungen jedoch, die sie dort machte, die Methoden, die angewandt wurden, um jede eigene innere Regung bei den Postulanten zu unterdrücken, konnte sie auf die Dauer nicht ertragen. Sehr niedergeschlagen von ihrem vermeintlichen Versagen, trat sie nach 6 Monaten aus dem Noviziat aus und kehrte zu ihren Eltern zurück. Da bot sich ihr eine Gelegenheit, ein echtes monastisches Leben kennenzulernen und sie griff zu; vielleicht war dort die Erfüllung ihrer Wünsche zu finden: in Böhmen, nahe Pilsen, in Choteschau, ein Kloster des Ordens, in dem die Nonnen, die in Klausur lebten, eine Sprachschule für "höhere" Töchter unterhielten. Sie suchten gerade zu dieser Zeit ein französisches und ein englisches Mädchen, die als Lektorinnen die praktische Anwendung ihrer jeweiligen Sprache leiten sollten. Magdeleine nahm das Angebot freudig an und fuhr für zwei Jahre dahin, gleichzeitig mit einer jungen Engländerin, die später in ein ähnliches Kloster eintrat. Die Schülerinnen waren Töchter der gutsituierten Bürger Böhmens, damals eine Provinz K.u.k. Österreichs. Die offizielle Sprache war deutsch, und den Mädchen war es verboten, ihre Muttersprache Tschechisch zu benutzen, was sie jedoch, sobald sie sich unbeobachtet fühlten, taten. Die ausländischen Erzieherinnen ließen es zu; sie versuchten nicht, diese schwere Sprache zu üben. Magdeleine lernte dort gut deutsch, etwas Englisch und vertiefte dort ihre Musikkenntnisse. Nach zwei Jahren, im Sommer 1904, fuhr sie nach Longwy zurück und besuchte unterwegs zum ersten Mal ihren Vetter/Cousin in Magdeburg. Es war das letzte Mal, daß die jungen Leute, noch frei von Bindungen, zusammentrafen. Sie genossen die gemeinsam verlebten Wochen sehr. Im Herbst 1904 kam Magdeleine nach Longwy, immer noch von dem Wunsch beseelt, Nonne zu werden. Zu derselben Zeit weilte, ebenfalls in Longwy, ein junger Mann bei seiner Mutter. Es war Georges Hubin, der uns die Geschichte seines Lebens in einem Manuskript von 1000 Seiten hinterlassen hat. Diese Memoiren existieren in mehreren Exemplaren. Eines davon ist in den Archiven der Stadt Nizza, ein anderes wird in der Bibliothek der Invaliden in Paris aufbewahrt. Um die weiteren Ausführungen verständlich zu machen, muß ich kurz über das Leben Georges bis 1904 berichten: Georges Hubin, in Longuyon einer kleinen Stadt nicht weit von Longwy 1875 geboren, kam schon mit 11 Jahren für sein letztes Schuljahr nach Longwy, wo sein Vater Bahnbeamter war. Damals, als Knabe, hat er öfter im Laden der M. Célestine Blondeau für seine Mutter eingekauft. Mit 12 Jahren trat er als Lehrling in die Bank ein, wo Albert Claudel einer seiner Mentoren wurde. Die Familie Hubin und Claudel kannten sich also gut, wie es in einer kleinen Stadt üblich ist. Georges hatte von jeher nur eins im Sinn: die Welt bereisen, möglichst viele Abenteuer erleben. Mit 18 Jahren meldete er sich zum Militär, trat bei der ersten Gelegenheit, die sich bot, in die Fremdenlegion ein, mit der er in Algerien kämpfte und zu den Truppen zählte, die danach Madagaskar eroberten. Für kurze Zeit als Zivilist nach Frankreich zurückgekehrt, trat er in die Marineinfanterie ein, mit der er in Indochina (Tonking) und Süd-China kämpfte. Zu der Zeit starb sein Vater an einer Lungenentzündung. Es zog ihn zu seiner Mutter zurück, aber er konnte das Leben in den engen Verhältnissen einer französischen Kleinstadt nicht ertragen und fuhr als Kaufmann nach Afrika, wo er das ganze Land bereiste, das damals Afrique Occidentale Francaise hieß, also das Gebiet, das zwischen den Flüssen Senegal und Niger im Norden und dem Golf von Guinea im Süden liegt. Und nun war er eben (Herbst 1904) nach Longwy gekommen, um die finanzielle Gründung einer Gesellschaft zu betreiben, die es ihm ermöglichen sollte, einen großartigen Plan zu verwirklichen: er wollte im Mossi-Land, 80 km von der Stadt Ougadougou entfernt, eine Rinderzucht aufbauen, die sehr ertragreich werden sollte. Zwischen den finanziellen Besprechungen, die er mit den entsprechenden Instanzen führte, hatte er Zeit, mit seiner Mutter auch Besuche bei den Bekannten zu machen. So kamen sie beide zu den Claudels-Magdeleine war 21 Jahre alt, in der Blüte ihrer Jugend. Sie war soeben aus Böhmen heimgekehrt, was ihr in den Augen des jungen Mannes, der von der Ferne immer angelockt worden war, einen besonderen Reiz gab. Er war 29 Jahre alt, sah gut aus, konnte aus seinen weiten Reisen viel erzählen. Sie verliebten sich ineinander, machten lange Spaziergänge, die ihre gegenseitige Anziehung vertieften und kamen bald überein, daß sie heiraten und zusammen nach Afrika fahren wollten. Dort erwartete Magdeleine wohl kein Klosterleben, wie sie es seit Jahren erstrebte, aber ein leichtes Leben sollte es auch nicht sein! Sie heirateten im Mai 1905 und schifften sich bald darauf in Bordeaux ein. Die Reise von Bordeaux nach Dakar, dann von Dakar nach Kayes am Niger mit der Bahn, von da ab im Einbaum auf dem Niger bis Mopti, schließlich in Fußkaravanen mit 60 Gepäckstücken, die von ebensovielen Schwarzen getragen wurden, nach Mané dauerte 5 1/2 Monate. In Mané hatten die Eingeborenen noch nie eine weiße blonde Frau gesehen. Ihre Erlebnisse im innersten Teil Afrikas hat Magdeleine in einer Broschüre zusammengefaßt: "Die Farm des weißen Mannes" wie die Eingeborenen heute noch das Gelände nennen, wo einst die selbsterrichteten Gebäude standen. Yves Lovera, Enkel der damaligen Farmer besuchte im November 1990 das Dorf Mane und schenkte dem Dorflehrer ein Exemplar der lustigen Erzählung, die als Lese- und Diktatstoff dienen wird. Während ihres zweijährigen Aufenthaltes in Mané änderte sich das Familienleben sowohl in Longwy als auch in Magdeburg. Amélie Claudel, Magdeleines kleine Schwester, heiratete 17-jährig den Leutnant Henri Sohet, den seine militärische Karriere erst nach Annecy (Hte. Savoie), dann im Frühjahr 1914 nach Remiremont (Vosges) führte. In Magdeburg, im selben Jahre 1906, heiratete Marguerite Blondeau den Gartenbauamtmann Herrmann Kießling. Sie bezogen ein hübsches Haus, inmitten des Parks vom Herrenkrug, wo ihre drei Kinder Karl-Herrmann (1907), Marguerite (1909) und Kurt (1911) geboren wurden. 1907, zwei Jahre nach ihrer Abreise nach Afrika, war für Georges und Magdeleine die Zeit gekommen, eine Erholungsreise einzulegen und für kurze Zeit nach Europa zu fahren. Zu Pferde, in Begleitung von etwa 300 Rindern mit ihren Hirten zogen sie südwärts durch den Urwald, um die Tiere an der Dahomey-Küste (heute Benin) zu verkaufen und sich nach Frankreich einzuschiffen. Die Reise dauerte Monate, und eben in dieser Zeit stellte Magdeleine fest, daß sie schwanger war. Es war ausgeschlossen, daß sie in diesem Zustand die Rückreise mit ihrem Mann unternahm. Er fuhr also allein zurück , und Magdeleine sollte ihm folgen, sobald das erwartete Kind eine solche Reise ertragen konnte. Sie blieb im Hause der Eltern in Longwy, wo Suzanne am 21. Februar 1908 zur Welt kam. Als Georges, also mein Vater, das Telegramm bekam und ihm bewußt wurde, daß er nun eine kleine Tochter habe, fühlte er sofort, daß es frevelhaft wäre, ein so kleines Wesen nach Afrika, fern von jeder ärztlichen Hilfe zu bringen, und er beschloß auf der Stelle, alles aufzugeben und nach Frankreich zurückzukehren. Er verkaufte alles, was er dort aufgebaut hatte und versuchte, eine neue Existenz in Paris aufzubauen. Es gelang nicht gleich, weswegen er beschloß in Kanada sein Glück zu versuchen. Meine Mutter und ich zogen wieder nach Longwy, wo wir mit der Großmutter Marie-Célestine und dem Ehepaar Claudel lebten. Meine Mutter fand schnell Privatschüler, die sie in Deutsch und Musik unterrichtete, Amélie versorgte den Haushalt und mich. Lange sollte dieser Zustand nicht dauern. Marie-Célestine (der Laden war aufgegeben worden), seit mehreren Jahren gelähmt, starb 1909. Ein Jahr später zog sich Amélie eine böse Erkältung zu, der sie innerhalb einer Woche erlag. Sie war 49 Jahre alt geworden. Meine Mutter unterrichtete weiter, meinem Großvater Albert Claudel konnte man nicht zumuten, sich mit einem 2 1/2 jährigem Kind abzugeben; so wurde ich im Winter 1910 in die Schule geschickt. Es gab damals keinen Kindergarten: wer in die Schule kam, lernte sofort lesen, schreiben und rechnen. Weihnachten 1910 fand ein Familientreffen statt. Marie-Célestine hatte eine Schwester, deren Vornamen ich nie erfahren habe, weil sie allgemein die "marraine" "Patentante" genannt wurde. Sie war Witwe, kinderlos, über 80 Jahre alt und bewohnte ein großes, altes Haus auf dem Plateau von Longwy-Haut. Um ihren Erben nach ihrem Tod Steuergelder zu ersparen, berief sie alle Nichten und Neffen der 2. Generation, im eigenen und ihres verstorbenen Mannes Namen zu sich nach Villers-la-Chèvre und händigte jedem 10 000 Francs in Gold aus. Zu diesem Treffen kam auch K. Arnold aus Magdeburg, der auch seine Schwester Marguerite vertrat. Letzere war wegen ihrer Kinder unabkömmlich. Es sollte das letzte Mal sein, daß K.Arnold in Longwy weilte. 1913 heiratete er in Magdeburg Ilse Brinkmann, die Tochter eines Architekten und 1914 brach der erste Weltkrieg aus, wodurch die Verbindung zwische Ost u. West unterbrochen wurde. Mein Vater weilte seit 1908 in Kanada und bemühte sich dort, eine Existenzgrundlage für seine Familie zu schaffen. Als ihm das gelungen war, bat er seine Frau Magdeleine, mit mir dorthin zu fahren. Ein Jahr zuvor wäre sie sofort bereit gewesen, in dieses anziehende Land zu gehen. Jetzt aber war ihre Mutter gestorben, und sie wollte ihren Vater nicht einsam in Longwy zurücklassen. Die Pläne wurden geändert; mein Vater schloß seine Geschäfte ab und kam selber abermals nach Longwy zurück. Es war das Jahr 1911. Er modernisierte das alte Haus, ließ Elektrizität und Telefon legen, gründete darin eine Agentur der Versicherungsgesellschaft "La Paternelle" aus Paris und betrieb das Geschäft nach seiner vitalen Art. Er besuchte seine Kundschaft mit Hilfe eines Fahrrades, was ihm einen großen Vorteil gab gegenüber seinen Kollegen, die sich nur zu Fuß bewegten. Das Familienleben war nun in eine ruhige Bahn geraten, als im Sommer 1914 der erste Weltkrieg ausbrach.Von diesem Moment ab waren alle Beziehungen mit den Verwandten in Magdeburg abgebrochen. Die "marraine" strich sie aus ihrem Testament, und es sollten 12 Jahre vergehen, ehe wir wieder von ihnen hörten. #0-Deutsch_Zusammenfassung

6 - Der erste Weltkrieg und seine Folgen


Rufe ich die Erinnerungen an die letzten Juli- und ersten Augusttage des Jahres 1914 zurück, so treten drei Bilder in voller Klarheit vor meine Augen.
 Das erste: ein sechsjähriges Mädchen steht mit einer Schulfreundin auf der Außentreppe des Hauses und die beiden diskutieren sachkundig über die Chancen Frankreichs im bevorstehenden Kriege. Nach 4 Jahren Schule kennen sie die Geschichte ihres Landes, von Chlodwig über Jeanne d‘Arc und Napoleon bis zu der Eroberung Madagaskars schon gut, und meinen, daß die Alliierung mit Rußland und England den Sieg bringen kann. Das zweite: Von der Gartenterasse hinter dem Hause aus, beobachtet dasselbe Mädchen mit ihrem Vater und mit Hilfe des Fernglases die Kammlinie der Hügel im Osten, die damalige Grenze zwischen Deutschland und Frankreich (westlich Metz), wo eine Reihe Reiter sich abzeichnen. Es ist eine Abteilung Ulanen, die man klar an ihren Lanzen und den charakteristischen Helmen erkennen kann- Das dritte: Mutter und Vater füllen die Vorratskammern mit allerhand Waren, darunter einen Riesenschinken, der schwer unterzubringen scheint. Vom Abschied meines Vaters jedoch weiß ich nichts mehr. Er zog mit den anderen Männern fort, konnte in den ersten Wochen einige Nachrichten uns zukommen lassen. Nicht lange, denn bald wurde die Stadt mit der Zitadelle eingeschlossen und die Belagerung begann. Die deutschen Geschütze standen auf luxemburgischen Gebiet, außer Reichweite der alten Kanonen der Stadt. Wir richteten uns mit einigen Verwandten in unserem durch die gewölbten Decke ziemlich sicheren Kellers ein und verbrachten dort die 5 Tage und Nächte der Beschießung. Das Haus hielt gut stand, auch als ein Teil des Daches samt Schornstein abgerissen wurde. Meine Mutter verließ uns öfter, denn sie hatte regelmäßigen Dienst als Rote-Kreuz-Schwester im größten Hotel der Stadt. (Hotel des Recollet), das als Lazarett eingerichtet worden war und wohin die Verwundeten aus der ganzen Umgebung gebracht wurden. Nachdem die obere Stadt vollständig zertrümmert worden war, die untere Stadt viele abgerissene Häuser aufwies und der ganze Bombenvorrat der Zitadelle aufgebraucht worden war, hörte der Kanonenlärm auf, und wir konnten ein deutsches Auto mit einer weißen Fahne gekennzeichnet und von einer großen Abteilung Ulanen begleitet vor unserem Haus fahren sehen: es war die Delegation, die die Kapitulation der Zitadelle entgegennehmen sollte. Einer meiner Freundinnen, Marie-Louise Huguemin, die in der Straße unterhalb unseres Gartens wohnte, war von einem Granatsplitter, der durch das Kellerfenster gedrungen war, am Oberschenkel getroffen worden. Sie wurde in das Lazarett gebracht, wo sie amputiert werden mußte. Meine Mutter nahm mich mit und ich sehe heute noch deutlich das kleine Zimmer, wo sie lag und wo ich ihr die Puppe brachte, die sie in ihrem fiebrigen Wahn verlangte. Sie starb einige Tage später. Sie war, wie ich, sechs Jahre alt.- Es war meine erste Begegnung mit Schmerz und Tod. Longwy lag nun hinter der Front, und das Gebiet blieb bis zum Waffenstillstand von 1918 unter deutscher Besatzung. Das Leben organisierte sich. Meine Mutter wurde oft von den Nachbarn um Hilfe gebeten, wenn es hieß, sich auf Deutsch zu verständigen. Wir hatten, wie auch die meisten anderen Einwohner, Einquartierung von deutschen Soldaten, und die Lebensmittelrationen waren nicht üppig. Glück hatten wir mit einem unserer "Gäste". Es war ein Unteroffizier, dessen Frau in der Schweiz lebte. Durch sie bekamen wir kurze Mitteilungen aus dem nicht-besetzten Frankreich. So traf Anfang April 1915 die Nachricht ein, daß mein Vater schwer verwundet worden und sein Zustand sehr kritisch war. Meine Mutter überlegte nicht lange: am gleichen Morgen packte sie eine Tasche voll, nahm mich bei der Hand, und mit Hilfe eines Ortskundigen überquerten wir zu Fuß, durch dichte Wälder die Grenze nach Luxemburg. Von dort ab verstand es meine Mutter, über unzählige kleine oder große Bahnstrecken in 5 Tagen durch Trier, Koblenz, Mannheim, Karlsruhe, Appenweiher Basel zu erreichen, dann über Genf und Lyon nach Dijon, wo mein Vater im Lazarett lag. Es ging ihm sehr schlecht: ein Granatsplitter hatte seinen linken Oberschenkel zertrümmert, und zwar so nahe am Hüftgelenk, daß die damalige Chirurgie eine Amputation nicht durchführen konnte. Da er lange unversorgt auf dem Schlachtfeld gelegen hatte, war die Wunde brandig geworden, und die Hoffnung der Ärzte, ihn zu heilen, war sehr gering. Da wurde meine Mutter als Krankenschwester eingestellt. Sie versorgte die Verwundeten, die im gleichen Zimmer mit meinem Vater lagen, und es gelang ihr, ihn zu retten. Man flickte sein Bein so gut es ging und legte ihn in einen Gipsverband, der bis zur Taille reichte. Als er nach langen Monaten aufstand, war sein Bein um 7 cm kürzer geworden, und was viel schwerer zu ertragen war, Knie und Hüftgelenke waren steif. Von da an hat er sich nicht mehr bücken können; er konnte nur schwer sitzen und brauchte beim An- und Ausziehen eine Hilfe. Was dieser Zustand für ihn mit seiner Vitalität bedeutete, kann man sich vorstellen. Er hat ihn 50 Jahre ertragen, und ich habe ihn niemals klagen gehört. Während des Lazarettaufenthaltes der Eltern war ich in die Normandie geschickt worden. Dort, in der Stadt Le Mans, war meine Großmutter Hubin nach ihrer Flucht aus ihrer brennenden Stadt in den Ardennen gelandet. Sie blieb dort bis zum Kriegsende.Als mein Vater 1916 aus dem Lazarett entlassen ins Zivilleben zurückkehrte, war unsere Lage nicht sehr rosig. Wir gehörten nun zu der großen Masse der Flüchtlinge aus den Ost- und Nord-Gebieten, die nichts als ihre Kleider besaßen, denn alles andere lag unerreichbar jenseits der Kampflinie. Wir zogen nach Paris, wo wir in einem möbilierten Zimmer lebten und unsere Mahlzeiten mit unseren Leidensgenossen in einer Volksküche einnahmen. Mein Vater konnte am Hauptsitz der Versicherungsanstalt La Paternelle, für die er in Longwy gearbeitet hatte, eine Stelle finden und ich wurde in einer Volksschule untergebracht. Bald fand auch meine Mutter eine Büroarbeit und es wurde schwierig, ein 8 1/2 jähriges Mädchen außerhalb der Schulstunden in der großen Stadt allein zu lassen und so wurde für mich ein Internat gesucht. Ich kam nach Argenteuil (ein Ort in dem Pariser Banlieu) in ein Pensionat, das von früheren Ordensschwestern geleitet wurde. Ein Teil der Gebäude war in ein Lazarett verwandelt worden und ich fand dort die Atmosphäre, die ich in Longwy und in Dijon kennengelernt hatte wieder. Die genesenden Verwundetetn teilten den Hof und den kleinen Garten mit uns und ich werde den jungen Zouaven nie vergessen, der in seiner bunten Uniform im Rollstuhl saß und mit uns Ball spielte. Er hatte beide Beine verloren, und er erzählte uns lauter lustige Geschichten. In den Jahren danach hatte ich oft daran denken müssen und habe versucht, mir vorzustellen, wie es ihm wohl ergangen ist, nachdem er mit seiner bunten Uniform seine Heldenaura verloren hatte, um sein ganzes, späteres Leben als Krüppel in seinem Rollstuhl aushalten zu müssen. In diesen Jahren haben wir in Paris den Vorzug gehabt, die modernen Formen der Kriegsführung auszukosten. Die Front war verhältnismäßig nahe und die Flugzeuge konnten in kurzer Zeit von den deutschen Linien aufsteigen und die Hauptstadt mit Bomben belegen. Die Sirenen ertönten und wir wurden geweckt. Zuerst ging es in die Kapelle, wo wir den Himmel anflehten, uns zu verschonen, und beruhigt gingen wir in den Keller. Ich dachte mir: wenn wir erhört werden, so fallen die Bomben auf die Nachbarn; wenn aber die Nachbarn besser beten als wir, so werden sie verschont... Jedesmal freute ich mich, wenn es Alarm gab in den Nächten, die ich ab und zu in Paris bei den Eltern verlebte. Sie gingen nämlich nie in den Keller, und so konnte man aus dem Fenster das Schauspiel der leuchtenden Explosionen am Himmel genießen- Bald aber kam etwas Neues hinzu: Eines Tages fielen die Bomben, ohne daß Flugzeuge gemeldet worden waren. Die Leute suchten die Schutzräume auf, kamen wieder hervor, verschwanden bei dem nächsten Aufprall und die Unsicherheit war groß, bis bekannt wurde, daß die Bomben von einer Kanone abgefeuert wurden, die jenseits der Frontlinie stand. Sie wurde "die dicke Bertha" genannt, und da ihr Einsatz unberechenbar war, gewöhnte man sich bald daran und das Leben verlief wieder normal. Die dicke Bertha war ein Vorläufer der V1 und V2 Raketen, die im zweiten Weltkrieg über London abgefeuert wurden wie auch der Scudraketen, die im Augenblick auf Israel und Riad gesendet werden. In derselben Zeit mußte Amélie, die Schwester Magdeleines, sich einer Schilddrüsenoperation unterziehen, die zu jener Zeit noch ein Wagnis war. Sie starb kurz nach dem Eingriff im Alter von 28 Jahren. Die Wohnung, die sie und ihr Mann Henri Sohet im Frühjahr 1914 in Remiremont bezogen hatten, war nun leer, da Henri an der Front war. Die Leitung der "Paternelle" übertrug meinem Vater die Aufsicht über die Geschäfte der Gesellschaft im Bezirk Ostfrankreich, und wir zogen dorthin im Mai 1918 zur Zeit der letzten deutschen Offensive. Bei langen Spaziergängen in den Vogesenwäldern konnte meine Mutter und ich das Grollen der nahen Front immer hören. Es kam jedoch der Herbst 1918, der Krieg war zuende. Der Großvater, der die 52 Monate der deutschen Besatzung allein in Longwy erlebt hatte, stieß nun zu uns. Dort im Juni 1919, wurde meine erste kleine Schwester Monique geboren. Meine Eltern wollten nun nicht mehr nach Longwy zurück. Das Haus wurde verkauft, und somit endete die lange Familientradition. Es wurde ein Anwesen gekauft, 5 km von der Stadt Lunéville entfernt, ganz allein auf weiter Flur, ein geräumiges Haus (10 Zimmer) mit Nebengebäuden inmitten hoher Bäume, mit einem sehr großen Gemüsegarten, ein Obstgarten voller Mirabellen und etwa 1 1/2 ha Wiesen, wo Pilze in Hexenkreisen üppig wuchsen. Mein Vater, der seine Behinderung innerlich nicht wahrhaben wollte, hatte vor, besondere Sorten von Gemüsen zu pflanzen und Kaninchen zu züchten. Der Großvater und ein junger Knecht halfen ihm dabei. Etwa 2 Jahre bemühten sie sich redlich, aber der Erfolg blieb aus, und der Vater mußte einsehen, daß eine körperliche Betätigung nicht das Richtige für ihn war. Wie gesagt: das Haus war geräumig, es besaß jedoch keine Stromversorgung, da die nächste Anschlußstelle etwa 2 km entfernt war. Abends mußten Petroleumlampen angezündet werden. Eine handbetriebene Pumpe förderte Wasser für die Küche und die Waschküche. Die Zimmer wurden mit Holzfeuer geheizt, und das Holz und Briketts waren auch die einzigen Helfer beim Kochen auf dem Eisenherd. Bald ließ mein Vater aber Strom und Telefon bis in unser Haus bringen. Es war ein echtes Landleben. Der Großvater verließ uns, um sich im Altersheim in Chatel-sur-Moselle einzurichten. Er blieb dort, bis er Anfang 1932 an den Folgen einer Lungenentzündung starb. In dem Dorf Croismare, 2 km von unserem Hause entfernt, gab es eine Glasfabrik, der es damals wegen unkundiger Führung wirtschaftlich schlecht ging, obwohl ein Stamm guter Facharbeiter seit vielen Jahren dort wirkte. Mein Vater erbot sich, die Buchführung in Ordnung zu bringen. Das gelang ihm so gut, daß er bald kaufmännischer Direktor wurde. Mit seinem immer vorwärts gerichteten Geist meinte er bald, daß die Gebäude der alten Fabrik den modernen Ansprüchen nicht mehr genügten, und er ließ auf seinem eigenen Grund, nahe unserem Hause, eine neue Glasfabrik mit einem hohen Schornstein erbauen, und die Produktion lief gut an. Diese Entwicklung gefiel den altbekannten Glasfabrikanten aus Nancy- insbesondere Daum- nicht. Sie setzten ihre ganze Kraft ein, um den kleinen unliebsamen Konkurrenten aus dem Felde zu jagen. Nach dem Prozess gelang es ihnen, daß mein Vater ihnen Fabrik und Haus für eine lächerliche Summe überlassen mußte. Das war im Jahre 1927. Die Familie zog zuerst nach Lunéville, dann in die Nähe von Nancy, nach Bouxières-aux-Dames. Ich sage: die Familie; denn in Croismare sind im Jahre 1922 unsere zweite Schwester Francoise und 1924 der kleine Bruder Jean-Pierre geboren worden. Ich war in den zwei ersten Jahren unseres Landaufenthaltes zu Hause geblieben. Ich war 11 Jahre alt und konnte meiner Mutter in der Abgeschiedenheit unseres Lebens gut helfen. Die Schularbeit wurde mit Hilfen von Fernkursen fortgesetzt. Aber bald genügte es mir nicht mehr. Als ich 13 Jahre alt wurde, bat ich darum, nach Nancy aufs Gymnasium zu gehen. Dort blieb ich im Internat 5 Jahre, bis ich im Jahre 1926 das Abitur ablegte. Bis dahin hatte ich nicht weniger als 7 Schulen in 7 verschiedenen Städten besucht, zuzüglich der 2 Jahre Fernunterricht. Ich war 18 Jahre alt und wäre am liebsten, wie meine Eltern es getan hatten, in die weite Welt gezogen. Da es nicht einfach ging, beschloß ich Mathematik zu studieren und mich, nach Erringung meines Diploms, um einen Posten in Indochina oder Madagaskar zu bemühen. Ja, solche Pläne hatte ich damals! Die Verwirklichung war nicht einfach. Seit dem Verlust der Fabrik hatten meine Eltern als einzige Einnahme die Kriegsinvalidenrente des Vaters, und die Familie zählte außer mir drei kleine Kinder. Um finanziell unabhängig zu sein, bewarb ich mich um einen Posten als Volksschullehrerin. Damals gab es Ausbildungsanstalten für Volksschullehrer, in die die jungen Leute mit 15/16 Jahren eintraten und die sie, fertig ausgebildet, mit 18/19 Jahren verließen. Man durfte jedoch auch mit dem Abitur einen Posten bekommen. Man hatte zwar keine blasse Ahnung von Pädagogik, aber, so hieß es, wenn man schon vor einer Klasse stand, werde man sich zu helfen wissen. Ich wurde in ein Dorf Bertrambois, an den westlichen Ausläufern der Vogesen geschickt. Es gab da drei Klassen: eine Lehrerin unterrichtete die großen Mädchen (von 7 bis 13 Jahren), ein junger Mann hatte die entsprechenden Buben, und ich bekam alle Kleinen zwischen 4 und 7 Jahren. Es waren 40 bis 50 Schüler, die in drei Abteilungen, je nach dem Alter, gleichzeitig unterrichtet wurden, wobei am Ende des Schuljahres die größten nicht nur fließend lesen und schreiben sollten, sondern auch die einfachen Grammatikregeln und das vollständige 1x1 samt allen 4 Rechenarten beherrschen sollten. Alle anderen mußten ebenfalls entsprechend gefördert werden. Ich mußte wieder mit Petroleumlampen und Holzfeuer (auch im Klassenzimmer) umgehen; Wasser gab es am Dorfbrunnen, etwa 50 m von der Schule entfernt, was bei Glatteis ein besonderes Vergnügen war. Das Brennholz wurde von der Gemeinde zersägt geliefert. Das Spalten mußte ich selber besorgen. B. lag 5 km von der nächsten Bahnstation. Um diese Strecke zurückzulegen, besaß ich ein ganz modernes Fahrrad: es hieß "Hirondelle", d.h. "Schwalbe" und funktionierte nach einem ganz neuen Patent: bei ebenen Strecken trat man nach bekannter Art nach vorne in die Pedale. Stieg jedoch die Straße, so trat man rückwärts, und ein System von mehreren Zahnrädern ergab einen bequemeren Gang. So fuhr ich also jeden Mittwochabend (der Donnerstag war überall in Frankreich schulfrei) erst mit dem Rad, dann auf drei Talbahnstrecken nach Nancy, wo ich den Donnerstag auf der Universität weilte. Ich hörte die Vorlesungen, die es an diesem Tag gab, erkundigte mich bei den Kommilitonen über den Gang der Arbeit und fuhr dann zurück, mit dem wöchentlichen Pensum wohl beladen. Ganz einfach war diese Arbeitsweise nicht, aber es ging, und die laufenden Prüfungen habe ich auch bestanden. So spielte sich also meine Studienzeit zwischen 1926 und 29 ab.  #0-Deutsch_Zusammenfassung

7 - Die zweite Begegnung


Die Vorkriegsjahre in Magdeburg

Aber kommen wir wieder auf das Jahr 1926 zurück. 12 Jahre waren seit dem Kriegsausbruch vergangen. In dieser Zeit war für mich die Realität einer Verwandschaft in Deutschland verblaßt. Arnold, Marguerite waren für mich nur noch Namen der Sagenwelt, von der meine Mutter mir erzählte, wie von ihren Erfahrungen im Noviziat, im Kloster von Choteschau oder von Afrikaabenteuern. Und nun, an einem Augustmorgen 1926 bekam meine Mutter einen Brief, der sie aufwühlte. Arnold Bl. schrieb aus Magdeburg. Zum ersten Mal seit dem Kriege hatte er sich zusammengerafft, um den ersten Besuch in das Nachkriegsfrankreich zu wagen. Am Schluß seiner Reise war er in Longwy gewesen in der Hoffnung, die Familie zu finden. Er hatte nur die neue Adresse erfahren, und nun gab er einen Bericht über die Ereignisse jener schweren Jahre. Das Leben in der Familie war nicht betroffen worden. H. Kießling war schon 45 Jahre, und Arnold, der als Kind ein Auge verloren hatte, war nur als Dolmetscher für die französischen Kriegsgefangenen, die in der Magdeburger Festung untergebracht waren, sowie für den Zensurdienst ihrer Briefe verpflichtet worden. Von der Hungersnot und der Inflation schrieb er nicht viel. Zwei traurige Nachrichten enthielt sein Brief: seine Mutter Minna war einige Monate zuvor gestorben, nachdem sie nach einem Schlaganfall jahrelang gelähmt gewesen war. Dann berichtete er von seiner Frau Ilse, die krebsleidend, wenig Hoffnung auf eine Genesung hatte. Er stellte seinen Besuch für den nächsten Sommer, also den Sommer 1927 in Aussicht, worauf meine Mutter sich nun unbändig freute. Briefe wurden nun regelmäßig geschrieben und so erfuhren wir im April 1927 Ilse´s Tod. Sie war 42 Jahre alt. Sommer 1927- Onkel Arnold hat sich angemeldet. Magdeleine mit ihren 4 Kindern steht am Bahnhof von Luneville, um den lieben Vetter zu empfangen. Es war für beide ein sehr bewegtes Wiedersehen, und am Abend saßen sie lange zusammen, um die lange Trennung von 16 Jahren (seit dem Besuch Arnolds 1911) mit ihren aufwühlenden Ereignissen zu bewältigen. Ich hatte damals Ferien, und Onkel Arnold schlug mir ganz unerwartet vor, ihn nach Magdeburg zu begleiten. Schnell fuhr ich mit meinem Vater nach Paris (2 Nächte im Zuge, den Tag dazwischen auf den entsprechenden Ämtern), um ein Visum zu bekommen; dann fuhren wir ab, und bald sollte ich die Stadt und Menschen kennenlernen, von denen ich soviele Erzählungen gehört hatte. Die Stadt, den Strom mit der Badeanstalt auf der alten Elbe direkt vor dem Wohnhaus, die wunderschönen Radfahrwege in und außerhalb der Stadt, das Haus im Herrenkrug mit Tante, Onkel und den gleichaltrigen Vettern Karl-Herrmann (Bube), Marguerite (Julchen) und Kurt. Viel konnten wir uns nicht erzählen; denn sie konnten kein Französisch und ich nur sehr wenig Deutsch. Ich hatte Deutsch nur zwei Jahre als zweite Fremdsprache in der Schule gehabt und in den dazwischenliegenden Jahren gänzlich vergessen. Aber wir radelten durch die Wiesen, paddelten auf dem Strom und lernten uns etwas kennen. Mit Onkel Arnold gab es keine Sprachschwierigkeiten: Wir unterhielten uns, lasen miteinander und korrigierten die langen französischen Arbeiten der Kandidaten für den Mittelschullehrerberuf gemeinsam, kurz, wir verstanden uns ausgezeichnet, und als ich im September wieder nach Hause fuhr, entwickelte sich zwischen uns ein reger Briefwechsel, der das ganze Jahr andauerte und in uns den Wunsch weckte, den Sommer 1928 abermals zusammen zu erleben. So geschah es, und ein zweites Mal verließ ich Magdeburg, und erst während des zweiten Jahres unseres Briefwechsels dämmerte es bei mir, daß das Verhältnis zwischen uns sich wandelte. Arnold empfand es ebenso, wollte es jedoch verdrängen, weil der Altersunterschied ihm so groß vorkam, daß er die Verantwortung für mein noch so junges Leben nicht tragen konnte und wollte. In späteren Jahren habe ich seine damaligen Bedenken besser verstanden. Damals- und ich habe recht behalten- konnte ich ihm überzeugend versichern, daß die Harmonie einer Ehe nur sehr wenig vom unterschiedlichen Alter der Partner, vielmehr von dem gegenseitigen Verhältnis und Vertrauen der Partner abhängt und, was die erhoffte Dauer des Zusammenlebens betrifft, das Beispiel seiner eigenen Eltern zeigte ihm wohl, daß das Schicksal keine Rücksicht auch auf jugendliches Alter kennt. Nun also, während des dritten Sommers (1929), den ich im Hause Kießling im Herrenkrug verlebte, konnte ich ihn allmählich überzeugen, daß er jugendlich genug war, eine neue Ehe einzugehen und eine Familie zu gründen. So beschlossen wir zu heiraten. Die Feier fand Anfang Januar 1930 in dem Haus im Herrenkrug statt, und so wurde aus meinem Onkel Arnold mein Mann. Abermals hatte das Schicksal eigenmächtig gewirkt und die Mädchenträume grundlegend umgestaltet. Unsere Eheschließung war für uns der natürliche Abschluß einer Entwicklung, die sich beinahe von allein vollzogen hatte. Sie löste aber über die verwandschaftlichen Beziehungen einen Wirrwarr von Konsequenzen aus: Tante Marguerite war meine Schwägerin geworden, ihre Kinder meine Neffen und Nichten; meine Mutter wurde meine Cousine, und unseren späteren Kinder würden zu zwei Generationen gehören, d.h., sie würden meine Vettern werden und die Großneffen ihres Vaters. Sie und ich würden ein gemeinsames Urgroßelternpaar haben: Arnold A.TH. Blondeau und seine Gemahlin M. Célestine Meffe. Eine seltsame Fügung wollte es, daß ein Ereignis derselben Art sich vorbereitete. Im Jahre 1936 heiratete Marguerite Kießling, Enkelin Minna Knaurs, Ernst Adolf Knaur, Sohn des Adolf Knaur aus Breslau und Neffe derselben Minna. Also auch Marguerite wurde die Cousine ihrer Mutter, und ihre späteren Kinder würden mit ihr ein gemeinsames Urgroßelternpaar haben, diesmal:Karl Anton Knaur und seine Gemahlin Mathilde Mundt. So führen uns diese beiden Eheschließungen zu den Paaren zurück, die die Familientafel I anführen. Hiermit höre ich mit den Erläuterungen der Tafel I auf, und überlasse es jedem, mit den verwandschaftlichen Beziehungen Marguerite Kießling und Suzanne Hubin zu spielen. In den 30ger Jahren vollzogen sich viele Veränderungen sowohl in familiärer als auch in geschichtlicher Hinsicht. Zuerst bei den französischen Verwandten. Meine Eltern verließen ihre Heimat Lothringen, um sich am Mittelmeer niederzulassen. Mein Vater unternahm keine große Aktion mehr. Sie bezogen ein bescheidenes Haus direkt am Meer in Les Sablettes bei Toulon, einem damals noch idyllischen Ort und lebten von nun an ausschließlich von der Invalidenrente. Der Vater schrieb seine Memoiren, und die Mutter sorgte für die Familie, d.h. für den Mann und Françoise. Jean-Pierre bereitete sich vor, in die Handelsmarine einzutreten. Monique, die nach der mittleren Reife keine Lust hatte, sich weiterhin mit Mathematik zu plagen, war 1934 nach Choteschau gekommen, wo sie drei Jahre lang dieselbe Tätigkeit im Kloster ausübte wie unsere Mutter 30 Jahre zuvor. Sie lernte dort vorzüglich Deutsch und Englisch, hatte Gelegenheit, im souveränen tschecheslovakischen Staat Tschechisch zu sprechen und blieb anschließend noch 3 1/2 Jahre in Prag, um an der deutschen Universität Prüfungen abzulegen. Im Winter 1937 fuhr sie zu den Eltern zurück. Bald darauf machte sie die Bekanntschaft von Marius Lovera und sie heirateten im September 1938. In Magdeburg hatten die Eltern Kießling nach dem 65. Geburtstag von Hermann das Haus im Herrenkrug verlassen und eine Stadtwohnung in der Nähe des Doms bezogen. Karl-Hermann war Ingenieur geworden, arbeitete in Dessau bei den Junkers.Werken und hatte Herta Reigelt geheiratet. Kurt studierte Agronomie. Marguerite und Ernst-Adolf Knaur lebten in Schweidnitz, wo er seine Praxis als Nervenarzt eingerichtet hatte. Arnold und ich wohnten zuerst im Hause der Eltern Brinkmann, dann, als die Familie wuchs, bezogen wir eine größere Wohnung in der Wilhelmstadt. Denn die Familie wuchs: im Dezember 1930 wurde Hans-Jürgen geboren, dann im August 1932 Marlene, im Juli 1937 Renate. Im Februar 1931 kam Magdeleine nach 27 Jahren zum zweiten Male nach Magdeburg. Es war anläßlich der Taufe eines Knaben, der der Sohn ihres Vetters Arnold, der Neffe ihrer Cousine Marguerite und ihr eigener Enkelsohn war. Wir hatten ein überaus harmonisches Familienleben, und alles hätte gut sein können, wenn die Welt um uns nicht angefangen hätte, aus den Fugen zu geraten. Die Darlegung und Beurteilung der weltgeschichtlichen Ereignisse jener Jahre überlasse ich den kompetenteren Historikern. Ich berichte nur von dem, was ich und die Menschen meiner nächsten Umgebung erlebt haben. Die Machtergreifung Hitlers änderte nichts an unserem Alltag. Unser Haus lag in einem ruhigen Wohnviertel, wo wir niemals Zeugen von Gewaltakten waren. Und wenn die Kriegsspiele der ersten SA-Männer auf dem Anger beunruhigend wirkten, empfanden wir den Anblick von etwa 10 khaki-uniformierten Männern, die auf der Schrote-Brücke eine Fahne grüßten, mehr folkloristisch als gefährlich. Die Schule des Klosters Unserer lieben Frau war ein altsprachliches Gymnasium, dessen Schüler meistens aus den liberalen Bürgerkreisen stammten. Es gab viele Söhne von Pastoren, die selber die Schule besucht hatten. Bezeichnend für die allgemeine Stimmung des Klosters war, daß kein Lehrer in die Partei eintrat; und bei dem Ausscheiden Dr. Karl Weidels kein Kollege das Amt des Direktors übernehmen konnte. Höchst wahrscheinlich wäre es unter anderen Umständen Arnold als Dienstältester gewesen. So mußte ein Naturwissenschaftler aus Wernigerode, übrigens ein recht umgänglicher Mann, als Direktor des Vereinigten Dom- und Klostergymnasiums geholt werden. Meine erste Begegnung mit der anbrechenden Wirklichkeit machte ich im Sommer 1933. Ich fuhr vor dem Beginn der Sommerferien mit den beiden kleinen Kindern (2 1/2 Jahre und 10 Monate) nach Frankreich, wohin Arnold uns später folgen sollte. In Kehl hörte die Bahnfahrt auf. Der Zug fuhr nicht weiter. Ich mußte mit den Kindern und dem Gepäck über die Rheinbrücke bis zur Endhaltestelle der Straßburger Straßenbahn laufen. Ein Jahr später, also 1934, durften wir nur noch 10 RM pro Erwachsenen mit über die Grenze nehmen. Das taten wir denn auch, aber es war unsere letzte Fahrt dorthin, und für mich bedeutete es die Trennung von meinen Angehörigen, eine Trennung, die lange 13 Jahre dauern sollte. Die Bevölkerung des Landes wurde innerhalb der Grenzen festgehalten und sollte zu einem einzigen Block geschmiedet werden, zu einer Waffe zur Verwirklichung der Pläne eines größenwahnsinnigen Mannes. Dieses Ahnen von unausweichlichen Konflikten war es, das uns mit Angst erfüllte, Angst vor fürchterlichen Ereignissen, die wir nicht aufhalten konnten. Zu jener Zeit waren wir nicht, wie es jetzt der Fall ist, dauernd mit Nachrichten berieselt. Wir lasen Zeitungen, glaubten, was sie erzählten oder auch nicht, drückten mehrmals am Tage auf den Knopf eines Senders. Wir haben unseren ersten Radioapparat erst 1935 nach vielen Überlegungen gekauft, und der Zweck war nicht, die Nachrichten brühwarm zu erfahren. Im Gegenteil: wenn eine wichtige Rede angekündigt war oder wenn wir nur die ersten Töne aus dem Munde Goebbels hörten, drehten wir sofort ab, so unerträglich waren die Gedanken und das Pathos. Nein, wir wollten erproben, ob diese wunderbare Erfindung tatsächlich imstande war, echte Musik zu vermitteln. Bis dahin und es mag unglaubwürdig für den heutigen Menschen klingen, (abgesehen von den Großstadtbewohnern, die ein Konzert besuchen durften) hörte man nur die Musik, die man selber produzierte. Meine Mutter brachte mir sehr früh die ersten Klaviergriffe bei. Sie spielte und sang selber viel, und die großen Opernouvertüren und die Sinfonien Beethovens sind mir dadurch vertraut geworden, daß wir Sie stundenlang miteinander in der Bearbeitung für 4 Hände spielten. Den wahren Klang jedoch, den Klang der echten Instrumente im Orchester habe ich zum ersten Mal mit 18 Jahren gehört. Und nur um diesen Genuß zu Hause zu haben, haben wir den Apparat gekauft. Doch dieser Genuß war damals nicht vollkommen. So vergingen die dreißiger Jahre. Ein ruhiges, glückliches Familienleben mit den täglichen Verrichtungen, die Arbeit im Haus, in der Schule, die 1937 für Hans-Jürgen, 1939 für Marlene auch Wirklichkeit wurde, lange Wanderungen im Harz, Radtouren durch die Elbwiesen, auf den Dämmen am Strom, durch die Letzlinger Heide, Sommerferien an der Ostsee in Dierhagen und in Prerow, und draußen die immer schwerer lastende Angst vor der unerbittlich nahenden Katastrophe, der anscheinend niemand Einhalt gebieten konnte, weder wir, kleine, unbedeutende Individuen, noch die Staatsmänner der mächtigen Länder inner- und außerhalb Europas. Im Jahre 1938 brachte der Anschluß Österreichs die Westmächte England und Frankreich in große Unruhe. Dazu kamen die Unruhen in der Nordwest-Provinz der Tschecheslowakai, so daß eine akute Kriegsgefahr entstand. Die Mobilmachung war in Frankreich schon im Gange als die Zusammenkunft von München vereinbart wurde. Bei dieser Gelegenheit konnte Herr Hitler seinen Gesprächspartner Daladier und Chamberlain davon überzeugen, daß das Gebiet der Sudeten das allerletzte Territorium sein würde, das er je beanspruchen würde. Daraufhin trennten sich die Herren im besten Einverständnis und Duladier so wie Chamberlain wurden von ihren jeweiligen Völkern bei ihrer Rückkehr als Helden gefeiert, da sie den Frieden in Europa bewahrt hatten- Nun haben seitdem zahlreiche Historiker gemeint, wenn es damals zu keinem Kompromiß gekommen wäre, hätte ein damals ausbrechender Krieg wahrscheinlich weniger Verwüstungen verursacht. Das Jahr 1938-39 diente Hitler dazu, seine Kriegsvorbereitungen, sowohl militärisch als auch diplomatisch zu vollenden. Und so brach im Herbst 1939 die Katastrophe aus: der zweite Weltkrieg begann.  #0-Deutsch_Zusammenfassung

8 - Der zweite Weltkrieg


Es gab also Krieg zwischen Deutschland und Frankreich. Besonders schwer zu ertragen sind solche Zeiten, in denen man keinerlei Hoffnung hegen kann oder darf. Für mich waren diese beiden Heere, die sich gegenseitig vernichten sollten, nur ein einziges Heer, das Selbstmord beging. Welches Ende auch der Konflikt nehmen würde, ich konnte es nur als Niederlage empfinden. Es hieß also, durchhalten, im eigenen Kreis täglich verrichten, was die jeweilige Lage erforderte, Leid zu ertragen mit allen Bekannten, die schon Verluste erlitten, und durchzuhalten, bis die Weltgeschichte zu einem vorläufigen Schlußpunkt gelangt sein würde. Der Ausbruch des Krieges bedeutete für uns eine totale Unterbrechung der Familienbeziehungen zwischen Ost und West. Eine lange Zeit der Trennung brach an.
 Wenn wir in den ersten Kriegsjahren weitgehend von Luftangriffen verschont geblieben waren, so häuften sie sich 1943 so, daß man mit der Evakuierung der Kinder und der alten Leute aus der Großstadt begann. Die erste, die aus unserer kleinen Familie herausgerissen wurde, war Marlene, die im Dezember 1943 mit ihrer Klasse der Luisenschule nach Wernigerode zog, wo sie bis April 1945 blieb. Renate war erst 6 Jahre alt und um solche Kinder mußten die Eltern sich selber kümmern. Wir kamen überein, sie nach Halberstadt zu unseren Freunden Steinfatt zubringen, da die kleine Stadt uns sicher schien. Frau Steinfatt lebte dort mit ihren beiden Kindern: Ekkehard, 7 Jahre alt und Wiebke, 2 Jahre alt, während ihr Mann als Hauptmann im Afrikakorps kämpfte. Hans-Jürgen blieb zu Hause, denn er gehörte zu einem Jahrgang, der noch voll Unterricht und außerdem nachts Luftschutzdienst in der Schule hatte. So gewöhnte man sich daran, immer häufiger den Luftschutzraum aufzusuchen, und, wenn die Stadt das Angriffsziel gewesen war, die Brände, die durch die leichten Phosphorbomben meistens auf dem Dachboden oder in der Decke unserer Wohnung sich entzündeten, mit Hilfe unserer Wasserspritze zu löschen. Es ging so bis zum Großangriff vom Januar 1945, der die Stadt in einen Trümmerhaufen verwandelte, wie es 1631 die Kaiserlichen während des Dreißigjährigen Krieges schon einmal fertig gebracht hatten. Auch unser Wohnviertel wurde arg getroffen; wir löschten die Brände so gut wir konnten und hatten Glück, daß gerade unser Eckhaus stehen blieb. Ausgebombte Nachbarn zogen zu uns, und da der Schulbetrieb, wie das öffentliche Leben überhaupt, aufgehört hatte, bemühten wir uns, auch Hans-Jürgen auszuquartieren. Durch den Pastor von Westerhausen, der ein früherer Schüler des Klosters war, konnte Hans-Jürgen von Herrn Gustav Hartmann, Bauer in Westerhausen, einen Vertrag als landwirtschaftlicher Lehrling für eine Grunddauer von 3 Jahren bekommen, jedoch mit einer Klausel, die ihm ermöglichen sollte, falls nach 1 Jahr die Verhältnisse wieder normal wären, entlassen zu werden, um die Schule weiter zu besuchen. Als 14-jähriger Bub kam also Hans-Jürgen nach Westerhausen, wo er einige Wochen später konfirmiert wurde. Die Familie seines Lehrherren richtete die Feier aus, zu der wir mit dem Rade fuhren, als ob es dem eigenen Sohne galt. Es gab Gänsebraten und Zwiebelkuchen, wie in üppigsten Friedenszeiten.. Da unsere Kinder sehr nahe beieinander waren: Wernigerode, Westerhausen, Halberstadt, und die Lage sich weiter verschlimmerte, fingen wir an, uns ein Mansardenzimmer im Hause Steinfatt notdürftig einzurichten und fuhren so oft wie möglich mit Gebrauchsgegenständen und etwaigen Vorräten mit der Bahn nach Halberstadt. So kam es, daß wir an jenem April Sonnabend in dem Bahnhof gerade zu der Zeit ankamen, als ein Munitionszug, der dort abgestellt war, von amerikanischen Flugzeugen angegriffen wurde und in die Luft flog. Wir lagen flach auf dem Bahnhofsvorplatz und es passierte uns nichts, so daß wir zu Frau Steinfatt gehen konnten. Dort erfuhren wir, daß Marlene, deren Lager plötzlich aufgelöst worden war, an demselben Morgen eingetroffen und zum Bahnhof gelaufen sei, um uns dort abzuholen. Wir erschraken bei dem Gedanken an die Szene, die wir eben erlebt hatten. Bald darauf kam sie jedoch zurück, nachdem sie den Angriff in der Unterführung des Bahnhofes heil überstanden hatte. Renate war am Vormittag von Hans-Jürgen abgeholt worden, um das Wochenende auf dem Lande in Westerhausen zu verbringen, so daß wir zu dritt den Abend mit Frau Steinfatt und ihren Kindern verbrachten. Am Sonntag vormittag heulten die Sirenen zu einer ungewohnten Zeit, und kaum hatten wir den Schutzraum erreicht, als die amerikanischen Flugzeuge ihre Bombenlast fallen ließen, so daß die bis dahin friedlich intakte Stadt in einen wüsten Trümmerhaufen verwandelt wurde. Wie wir in den Tagen darauf hörten, hatte sich der tragische Vorgang so abgespielt: die Führung der amerikanischen Truppen, die noch im Westen der Stadt standen und nach Osten drangen, hatte die lokalen Behörden um freien Durchgang gebeten. Jene Ortsgewaltige jedoch, in ihrem fanatischen Glauben an den Endsieg und in einer Zeit, wo der geringste lautgewordene Zweifel daran zu einer Erschießung führen konnte, hatten das Anliegen zurückgewiesen und stattdessen die Buben der Hitlerjugend und die alten Männer zu Straßenarbeiten zusammengetrieben, um Barrikaden und Panzerfallen zu errichten. Der soeben erfolgte Luftangriff war nun die Antwort darauf. Wie es damals hieß, so soll die aufgebrachte Menge den für die Katastrophe verantwortlichen Bürgermeister kurzerhand erhängt haben. Was uns betraf, war auf den Vorderteil des Hauses eine Bombe gefallen, ohne die hinteren Räume, worunter sich der Luftschutzraum befand, zu zerstören, und wir konnten sogar die Haustreppe bis zur Wohnung benutzen. Alle Türen, Fenster, Schränke standen offen und wir mußten schnell mehrere kleine Brände löschen, ehe man überlegen konnte, was nun zu tun sei. Hans-Jürgen erschien plötzlich mit Renate. Sie hatten das Schauspiel vom Dach ihres Hauses in Westerhausen miterlebt und wollten wissen, was aus uns geworden war. Wir schickten sie gleich wieder zurück; Frau Steinfatt und Arnold blieben, um zu retten, was aus der verwüsteten Woh-nung zu retten war, und, mit einem Rad, um die beiden Kinder Steinfatts zu befördern, machten sich Marlene und ich ü-ber die Bombentrichter, die die Straßen aufgewiesen hatten, zu Fuß auf den Weg nach Schwanbeck, zu dem Haus des mit Steinfatts befreundeten Pastors des Ortes, Herrn Steinwachs, wo uns das Unterrichtszimmer zur Verfügung gestellt wurde. Darauf folgt eine Reihe sehr erregter Tage: ich holte Renate aus Westerhausen, wir fuhren nach Wernigerode, um Marlenes Sachen zu holen; wir trafen mehrmals auf die amerikanischen Kolonnen, die bald auch in Richtung Magdeburgs weiterzogen und uns den Weg dahin versperrten. So blieben wir 6 Wochen in Schwanebeck, wo wir das Ende des Krieges erlebten. Dort war es, daß wir aus den Lautsprechern von den Ungeheuerlichkeiten der Konzentrationslager hörten. Unsere erste Reaktion war, diese Enthüllungen für Propaganda zu halten. Bald jedoch mußten wir ihre Realität anerkennen. Wir wußten natürlich, daß es Lager gab, wo die aktiven Gegner der Partei eingesperrt wurden. Wir wußten, daß die Juden nach dem Osten in moderne Ghettos gebracht wurden. Was aber dort geschehen war, entzog sich dem Wissen aller, die es nicht am eigenen Leib oder als Täter selber erlebt hatten. Zu allen waren die blutige Repression nach dem Attentat vom 20. Juli 44 und die erzwungenen Selbstmorde von Rommel und anderen hohen Offizieren durchgedrungen. So ungeheuerlich diese Taten waren, so waren sie nur die Spitze des Eisberges; der Horror der darunter in seiner ganzen Dimension verborgen war, wurde uns plötzlich enthüllt und wir erschraken. 6 Wochen blieben wir also in Schwanebeck, wo die arbeitsfähige Bevölkerung sofort für den Wiederaufbau eingesetzt wurde. Wir haben Rüben verzogen, zarte Kohlpflänzchen gesetzt, von den Polen geräumte Wohnungen gesäubert, bis wir endlich eine Möglichkeit fanden, nach Magdeburg zurückzukehren. Dort standen sich die amerikanische und russische Armee, je auf einem Ufer der Elbe gegenüber. Die Stadt hatte bei den letzten Kämpfen noch mehr gelitten; aber unser Haus stand noch, in unserer Wohnung lebten weiter die Nachbarn, die wir nach dem Großangriff aufgenommen hatten; und man konnte daran gehen, das Familienleben wieder einzurichten.  #0-Deutsch_Zusammenfassung

9 - Die Nachkriegszeit 1945 - 1948


Während der Kriegsjahre hatte ich nur spärliche Nachrichten von meiner französischen Familie erhalten. Sie lebten in Süd-Frankreich, d.h. in dem von den deutschen Truppen zuerst nicht besetzten Gebiet und somit bis 1943 ohne Kontaktmöglichkeit mit Deutschland. Ein Jahr später erfolgte bei ihnen, im Sommer 44, die erste Landung der Alliierten, wodurch deren Kontakt unmöglich wurde. Erst im Frühjahr 1946 bekam ich ausführliche Nachrichten und ich werde davon erzählen, wenn die Zeit gekommen ist .Zuerst möchte ich, so gut wie ich es vermag, von dem Ergehen der Verwandten in Deutschland berichten. So ausführlich wie von meinen Erlebnissen wird es wohl nicht sein. Ich hoffe nur, daß der eine oder der andere von ihnen das bei mir Fehlende irgendwann ergänzen wird.
 Karl-Herrmann war als Ingenieur im Flugzeugbau für die Industrie unabkömmlich und blieb die ganzen Kriegsjahre bei den Junker-Werken in Dessau, wo er schon vorher mit seiner Frau, Herta Reigelt, und seinen beiden Töchtern, Helga und Magrit, gewohnt hatte. Bei Kriegsende wurde er im Verlauf der Demontage der Junker-Werke nach Russland gebracht, von wo er jedoch bald zurückkehrte. Er zog nach Leipzig wo er heute noch wohnt. Ernst-Adolf Knaur und seine Frau Marguerite hatten sich in Schweidnitz niedergelassen, wo ihr Sohn Ullrich 1938 geboren wurde. Ernst-Adolf wurde gleich zu Beginn des Krieges als Militärarzt eingezogen. Als er nach einigen Jahren in Griechenland an Ruhr erkrankte, wurde er entlassen und kam nach Schweidnitz zurück, wo inzwischen die beiden Töchter, Sigrid im Jahre 1940 und Christiane 1942, zur Welt gekommen waren. Als Ende Januar 1945 die russischen Truppen Schlesien erreicht hatten, blieb E.A. in Schweidnitz, während Marguerite mit den 3 Kindern flüchtete, um sich, wie sie meinte, nach Magdeburg in Sicherheit zu bringen. Sie war in Dresden am Tage vor dem vernichtenden Angriff, konnte nur vom Zufall begünstigt die Stadt vor dem Abend verlassen und blieb so vor dem Inferno verschont . Sie kam nach Magdeburg. Der Zustand des Bahnhofes genügte, um ihr klar zu machen, daß die Stadt keine Zuflucht mehr bot und sie entschloß sich kurzerhand, weiterzufahren. So kam sie nach Quedlinburg, wo es ihr gelang, eine Wohnmöglichkeit zu finden. Ihre Eltern, Hermann und Marguerite Kießling, deren eigene Wohnung bei dem Großangriff sehr beschädigt worden war, und die sich die von deren Mieterin verlassene Parterre-Wohnung ihres Hauses notdürftig eingerichtet hatten, nutzten die Gelegenheit, die ihnen die Anwesenheit ihrer Tochter in Quedlinburg bot, selbst auch dorthin zu fahren. Marguerite bereitete auch alles vor, damit ihr Mann bald nach Beendigung des Krieges dort eine Anstellung als Bezirksnervenarzt bekam. So wurde das Zentrum der Familie Kießling nunmehr Quedlinburg, wohin auch bald Kurt und seine Familie hinzustoßen würden. Kurt war vor dem Kriege Verwalter eines Gutes im Nordosten Berlins. Soviel ich weiß, wurde er nicht gleich eingezogen und verwaltete in den 40er Jahren ein Gut in Oberschlesien. Die Beziehungen zu der Familie des ersten Gutes waren dadurch nicht unterbrochen worden, denn 1942 heiratete er die Tochter jenes Gutsherren, Dorothea Arndt. Irgendwann wurde er noch eingezogen und Dörte blieb bei ihren Eltern. Als 1945 die russischen Truppen die Ostgrenze Deutschlands überschritten, verwüsteten sie das Land und vertrieben die Bewohner nach dem Osten. Dörte wurde mit ihrer Mutter und ihrer Schwester bis nach Sibirien verschleppt. Was sie dort erlebte, kann nur geahnt werden. Eines Tages, es muß Anfang 1945 gewesen sein, stand Dörte vor unserer Wohnungstür in Magdeburg, dem einzigen Ort, wo sie hoffen konnte, Auskunft über die Familie zu bekommen. Sie war allein zurückgekommen. Mutter und Schwester hatten nicht überlebt. Dörte fuhr weiter nach Quedlinburg, wo sie sich mit ihrem Mann einrichtete und wo ihre Kinder geboren werden sollten, Ekkehard im Jahre 1947 und Dietrich 1949. Wir hatten das Glück gehabt, unsere Wohnung zu behalten, nur, in welchem Zustand! Die Hälfte des Daches war weg und der Regen hatte freien Zugang zu unseren unter dem Dachboden liegenden Wohnräumen, durch die Löcher, die die Brandbomben in den Zimmerdecken (und auch den Fußboden) hinterlassen hatten. Die Glasscheiben der Fenster waren unter der Wucht der Explosionen zertrümmert. Und um nur die Schäden zu beseitigen, gab es keinerlei Material außer den Funden, die man aus den benachbarten Räumen herausziehen konnte. So war Marlene maßgebend an dem Neudecken des Daches beteiligt, während ich gut die Hälfte der Fenster mit Holzbrettern vernagelte. Die andere Hälfte wurde mit Ölpapier dicht gemacht, wodurch die Lichtverhältnisse für anhaltende Korrigierarbeit nicht sehr begünstigt wurden. Decken und Fußböden wurden auch notdürftig repariert. Wir waren damit beschäftigt als, an einem Sonntag morgen, Ende Juli, die Nachricht sich verbreitete: die Amerikaner ziehen ab, die Russen sind da und sind im Begriff, das Land zu besetzen, das ihnen in Yalta zugesprochen worden war, also bis zu der Linie, die uns allen nur zu gut bekannt ist und die Trennungswand zwischen Ost und West werden sollte. Die Bedeutung des Vorgangs war uns sofort in ihrer ganzen Tragik klar. Wir saßen in einer Falle, hatten von nun an keine Verbindungsmöglichkeiten mehr mit dem Westen. Für mich bedeutete es eine völlige Trennung von meiner Familie, von der ich übrigens noch keine Nachrichten bekommen hatte. Außerdem waren nun die Russen unsere Herren und sie machten sich gleich daran, uns die Wohltaten ihrer Lebensanschauung teilen zu lassen, in dem sie bei uns ihre Vorstellung von Gleichheit und Gerechtigkeit einführten. Die Gerechtigkeit bestand darin, daß die gesellschaftliche Ordnung auf den Kopf gestellt werden sollte. Die bis dahin unterjochten Arbeiter und ihre Kinder sollten die Führungsschicht bilden, während die Nachkommen der akademisch gebildeten Kreise so früh wie möglich die Schulen verlassen sollten, um nun, wie übrigens auch ihre Eltern, ein richtiges Arbeitsleben kennenzulernen. Die Gleichheit äußerte sich unter anderem darin, daß 7 Klassen von Lebensmittelempfängern gebildet wurden, wobei zu der untersten Klasse die Nur-Hausfrauen mit Kindern über 6 Jahren gehörten, die also gezwungen waren, entweder zuzusehen wie ihre Familien besser aßen als sie selbst oder die Rationen ihrer Kinder schmälern mußten. Das Bestreben war natürlich, daß alle arbeiten sollten. Wir bekamen Karten, worauf jeden Monat abgestempelt wurde, ob wir "unsere Arbeitspflicht und unsere Pflichtarbeit" geleistet hatten (diese Karte besitze ich noch) und wonach Lebensmittelkarten genehmigt wurden. Schwierig war jedoch, Arbeit zu finden. Abgesehen von Enttrümmern und Flicken der beschädigten Wohnungen gab es kaum etwas zu tun. Man sah überall vor allem Frauen, die mit bloßen Händen die Steine aus den Hausruinen herausholten und mit einem kleinen Hammer beklopften, von altem Zement reinigten und so wieder verwendungsfähig machten. Das öffentliche Leben mußte neu entstehen. Die durch ihre politische Vergangenheit belasteten Beamten mußten ihre Posten verlassen und die Lücken durch neue Kräfte ausgefüllt werden. Es muß bei der Justiz sehr schwierig gewesen sein, denn alle Richter und Anwälte waren in den vergangenen 12 Jahren gezwungen worden, in die Partei einzutreten, wenn sie ihre Stellung behalten wollten. Im Schulwesen war die Lage nicht so schwierig, weil der Parteidruck sich weniger stark erwiesen hatte. Als Beispiel kann ich anführen, daß am Dom-Kloster-Gymnasium kein Kollege in der Partei war. Trotzdem fehlten überall geeignete Lehrkräfte und die Schulbehörden versuchten diesen Mangel durch neue Einstellungen zu beheben. Es wurden also für die Grund- und die höheren Schulen Bewerber gesucht, die die entsprechenden Kenntnisse nachweisen konnten und mittels einer Ausleseprüfung zu einer pädagogischen Ausbildung für den Schuldienst vorbereitet werden sollten. Es war für mich die Rettung. Nicht nur um den richtigen Stempel auf meine Arbeitskarte zu bekommen, suchte ich dringend eine Verdienstmöglichkeit. Arnold war nämlich schon 65 Jahre alt. Und wenn es keine Altersgrenze für eine aktive Arbeit gab und wenn er seiner Stellung sicher war, so konnte man nicht wissen, wie lange, bei den dürftigen Ernährungsverhältnissen seine Kraft ausreichen würde. Nun bekam jeder Rentner, ganz gleich, was er für eine Arbeit vorher verrichtet hatte, monatlich 90 RM, ein Betrag, mit dem schwerlich eine Familie von 5 Personen hätte auskommen können. Ich meldete mich also bei der neu eingerichteten Suchkommission, wies meine in Frankreich erworbenen mathematischen Diplome vor, wodurch ich meine Kenntnisse in den beiden Fächern Französisch und Mathematik nachwies, bestand die Ausleseprüfung- wobei ich den ersten deutschen Aufsatz meines Lebens schrieb!- und wurde ab Februar 1946 als "wissenschaftliche Hilfslehrerin" eingestellt, d.h. wir waren Referendare in der pädagogischen Ausbildung, gaben jedoch ab sofort 18 Unterrichtsstunden wöchentlich. Am Ende der Ausbildung sollten wir eine Prüfung ablegen, um den vollen Unterrichtsdienst zu leisten. Diese Prüfung erfolgte für mich im August 1947 in Halle. Da der Schulbetrieb sich normalisiert hatte, kam Hans-Jürgen Ostern 1946 wieder nach Hause. Wie es vereinbart worden war, gab ihn sein Lehrherr frei und er gesellte sich wieder zu seinen alten Kameraden des Dom-Kloster-Gymnasiums. Er wußte nun genau, was er wollte: er wollte Tierarzt werden, und die praktischen Kenntnisse und die Erfahrungen dieses einen landwirtschaftlichen Lehrjahrs sollten ihm während der späteren langen Berufsjahre von großem Nutzen sein. Um diese Zeit etwa bekam ich den langersehnten Brief aus Frankreich, der anscheinend sehr lange unterwegs gewesen war. Die Eltern, die direkt am Rande des Kriegshafen Toulon lebten, hatten nach dem Einmarsch der deutschen Truppen im Jahre 1943 ihre Wohnung verlassen müssen, denn sie lag nun auf militärischem Gebiet. Nachdem im Sommer 1944 die Kämpfe mit dem Abzug der deutschen Armeen vorbei waren, waren sie wieder heimgekehrt. Monique hatte den ganzen Krieg in St. Raphael mit ihrem Mann Marius Lovera verbracht, und sie hatte nun 2 Söhne: Jean-Claude geboren 1941 und Yves geboren 1945. Ihre Sprachkenntnisse waren ihr sehr nützlich gewesen. Die Gemeindeverwaltung hatte sie oft um ihre Hilfe gebeten, zuerst bei der deutschen Besatzung, dann bei den amerikanischen Truppen, die dort gelandet waren. Sie wurde gebeten, den jeweiligen Offizieren Französischunterricht zu erteilen und so wurde sie durch die Umstände zu dem Beruf geführt, den sie von da ab ihr ganzes Leben ausübte. Sie wurde Lehrerin für Englisch und Deutsch, nachdem sie trotz Mann und Kindern alle erforderlichen Prüfungen, zu allererst das Abitur, vorbereitete und bestand. Francoise, verheiratet, mit einer Tochter Marie-France, geboren 1942, lebte in Paris. Sie war jedoch dabei, sich scheiden zu lassen. Und nun kam, zögernd, die Erzählung von dem Schicksal von unseres kleinen Bruders Jean-Pierre: Am Anfang des Krieges war er erst 15 Jahre alt und seinem Wunsch gemäß, heuerte er als Schiffsjunge bei der Handelsmarine an. Mehrere Jahre ging alles gut und er kam regelmäßig nach Hause. Im Jahre 1941 jedoch, bei dem Kriegseintritt der USA war er mit seinem Schiff an der Ostküste Nord-Amerikas und konnte nicht zurück. Er meldete sich nun 17 -jährig bei der französischen Luftwaffe, die dort gegründet wurde und wurde als Flugzeugführer ausgebildet. Anfang 1944 flog er mit seinen Kameraden über den Atlantik nach Agadir (Marokko), um sich für weitere Verwendung bereitzuhalten. Bei einer Tiefflugübung wurde seine Maschine von einer hohen Welle erfaßt und versank im Meer. Seine Kameraden konnten sich retten. Er, als Pilot, konnte sich von seinem Sitz nicht befreien und so endete sein kurzes Leben, das nicht ganz 20 Jahre gedauert hatte. Die Kameraden, die an diesem Tag mit ihm geflogen waren, gehörten einige Monate später zu den Einheiten, die die Landung in der Nähe von St. Raphael begleiteten. Sie besuchten Monique und erzählten ihr den tragischen Vorgang in allen Einzelheiten. Einige Tage später erfuhr Monique, daß diese Kameraden, die in Agadir gerettet worden waren, von einem Flug über das Mittelmeer nicht zurückgekehrt waren. Es wurde mir schwer, auf diesen Brief zu antworten. Dies hatte sich beinahe 2 Jahre zuvor ereignet. Wann würde mein Brief sie erreichen? Wie sollte ein Kontakt nach so langer Zeit und zwischen endgültig getrennten Lebensbereichen sich jemals wieder herstellen lassen? Es war gut, daß die Arbeit und die Sorgen im Beruf, zu Hause, bei der Suche nach Lebensmitteln nicht abriß und kaum Zeit ließ, sich über die Zukunft zu sorgen. Man wäre sonst der Verzweiflung nahe gewesen. Und doch sollte es noch viel schlimmer werden. Das Schuljahr 1945/46 ging zu Ende und Hans-Jürgen fuhr für die Ferien nach Westerhausen, wo sein Lehrherr ihm Arbeit und Unterkunft für die Sommerwochen bot. Der Junge fuhr freudig hin, denn er liebte das Leben und die Arbeit auf dem Lande und außerdem versprach er sich eine bessere Verpflegung als die, die ich ihm zu Hause bieten konnte. Er fuhr also freudig hin. Anders war es bei seiner Rückkehr. An einem gewittrigen Tag, nämlich nachdem er mit den anderen bei dem Einbringen der Ernte schwer gearbeitet hatte, wurden sie von einem Platzregen überrascht. Das Zusammentreffen von körperlicher Müdigkeit und plötzlicher Abkühlung hatte zur Folge, daß er am nächsten Morgen nicht aufstehen konnte: es war der Ausbruch der gefürchteten Kinderlähmung, die zu jener Zeit nicht gar selten war und wogegen es noch kein Mittel gab. Nach Magdeburg zurückgekehrt, kam Hans-Jürgen in die Klinik, wo er von September 46 bis Ostern 47 stationär blieb. Klinisch war wohl nicht viel zu tun. Sehr schnell jedoch setzte er seine ganze Energie ein, um gegen die Krankheit zu kämpfen. Während mehrere Leidensgenossen sich gehen ließen und in der Folge Invaliden wurden, versuchte er sehr schnell aufzustehen, machte Gymnastikübungen, half bei der Pflege der anderen und so konnte er 8 Monate nach Beginn seiner Erkrankung wieder in die Schule gehen. Das heißt, er fuhr mit dem Rade hin, denn das Laufen war nur mit Hilfe von Krücken möglich. Auf dieselbe Weise fuhr er im Sommer 47 so oft wie er konnte an die Elbe, wo er im Ruderboot ca 1000 km zurücklegte und dabei die Muskeln trainierte, die die alten unbrauchbar gewordenen ersetzen sollten. So hatte er diese schlimme Krankheit so weit überwunden, daß er seit nun 44 Jahren neben seiner körperlichen Arbeit, viele große Touren zu Fuß, mit dem Rad, auf Langlauf- und Pistenskiern unternehmen und somit viel von der Welt sehen konnte. Zur selben Zeit, im Februar 1947, schlug das Schicksal zu und zerstörte unser Familienleben. Arnold hatte nicht nur seine volle Tätigkeit in der Schule fortgesetzt, er war Mitglied der Prüfungskommission bei der Ausbildung der Referendare und auch der wissenschaftlichen Hilfslehrer, hatte viele Korrekturen zu erledigen und öfter Jahresarbeiten der Kandidaten zu begutachten, die meistens Handschriften waren. Die Lichtverhältnisse hatten sich in der Wohnung nicht gebessert, da Glas nach wie vor Mangelware war. Dazu kam, daß Arnold als Kind ein Auge verloren hatte, so daß sein gutes Auge sehr viel zu leisten hatte und bei den derzeitigen Verhältnissen überanstrengt wurde. Die Störung, die ihm plötzlich auffiel, wurde als Netzhautablösung diagnostiziert und nur eine Operation konnte Abhilfe schaffen. Arnold kam in die gleiche Klinik, in der Hans-Jürgen behandelt wurde, und wurde operiert. Die damalige chirurgische Technik kannte natürlich nicht den Einsatz von Laserstrahlen. Nach dem Eingriff mußte der Patient volle 3 Wochen vollständig bewegungslos liegen, denn jede Änderung der Kopflage konnte die Bemühungen der Ärzte zunichte machen und also in seinem speziellen Fall zur vollen Blindheit führen. Infolge des festen Liegens, das eine Befreiung der Bronchien durch Husten oder Räuspern verbot, entwickelte sich eine Lungenentzündung. Antibiotika waren damals bei uns noch unbekannt. Dazu kam durch die jahrelange schlechte Ernährung eine körperliche Schwäche bei einem Mann, der bis dahin sich einer blühenden Gesundheit erfreut hatte. 3 Wochen nach der Operation erlag Arnold der Krankheit. Es war der 27.Februar 1947. Das Leben erlaubt selten eine Atempause. Mitte März mußte ich als Prüfer für das Fach Französisch mein erstes deutsches Abitur erleben Einige Tage danach wurde Marlene von Pastor Martin im Remter des Domes konfirmiert. Die Kirche selbst war noch unbetretbar. In jenen Wochen stieg in mir der unwiderstehliche Drang auf, meine Eltern und Geschwister nach einer 13-jährigen Trennung wiederzusehen. Sollte es eine legale Möglichkeit geben, diesen Wunsch zu realisieren? Es war klar, daß ich es nur tun würde, wenn ich auch legal zurückkommen konnte. An ein Durchschlüpfen durch die Demarkationslinie, wie es damals noch durchaus möglich war, war nicht zu denken. Auch dachte ich keineswegs an ein Auswandern. Das Leben in Magdeburg war zwar nicht einfach und die Zukunft unserer von ihren akademisch gebildeten Eltern schwer belasteten Kinder würde schwer zu meistern sein. Wir hatten dafür eine sichere Bleibe und ein Versuch auf gut Glück, wie viele es damals auch taten, mit 3 Kindern einen neuen Anfang ohne jede Grundlage im Westen zu suchen, war einfach undenkbar. Wenn ich einen Besuch in Frankreich verwirklichen konnte, so wollte ich nur Renate, die damals 10 Jahre alt war, mitnehmen. Die beiden Großen, Hans-Jürgen beinahe 17, Marlene 15, waren damit einverstanden, einige Wochen alleine zu bleiben. Ich wußte, daß ich mich auf sie verlassen konnte und das Durchkommen würde ihnen dadurch leichter gemacht, daß sie 4 statt 2 Lebensmittelkarten zur Verfügung hatten. Außerdem hatten wir genug Freunde, bei denen sie eine Hilfe finden würden, falls es nötig sei. Ich ging zur Polizei, um mich zu erkundigen und stieß dort auf verdutzte Beamte, die einer solchen Frage nicht gewachsen waren. "Nein", meinten sie, sowas war nicht vorgesehen. Ich sollte ruhig probieren, und wenn es mir gelänge, so würden sie gern erfahren, wie ich es angestellt habe. Ich fuhr also ein erstes mal nach Berlin, um Kontakt mit irgendwelchen französischen Militärbehörden aufzunehmen. Die Demontage der technischen Einrichtungen waren damals voll im Gange. Alle doppelten Geleise waren entfernt und nach Rußland transportiert worden. Um die Strecke Magdeburg-Berlin zurückzulegen, brauchte der fensterlose übervolle Personenzug, dessen Wichtigkeit zweitrangig war, so daß er dem Militär oder Gütertransporten Platz machen mußte, volle 6 Stunden. Ich sollte genügend Gelegenheit bekommen, solche Fahrten zu genießen, denn im Laufe der Frühlings- und Sommermonate bin ich 7 mal in Berlin gewesen, zuerst bei den Franzosen, dann bei den Amerikanern, den Engländern, den Russen. Oft mußte ich regelrecht kämpfen, um überhaupt die Außentore passieren zu dürfen. Ich habe Briefe geschrieben, Fragebogen ausgefüllt, politische Verhöre durchgestanden. Von den deutschen Behörden (10 an der Zahl) mußte ich mir Unterschriften geben lassen- und ein Wunder geschah: nach sechsmonatigem Kampf, Mitte September, erhielt ich die Nachricht, mein Paß sei angefertigt und ich könne ihn abholen. Ich durfte mit dem Segen der 4 Besatzungsmilitärregierungen eine einmalige Reise nach Frankreich unternehmen. Daraufhin bat ich um unbezahlten Urlaub, was ich auch sofort bekam. Seit den Frühlingstagen und meinem ersten Versuch, eine Ausreisegenehmigung zu bekommen, hatte sich einiges verändert. Anfang August hatte ich in Halle die Abschlußprüfung bestanden. Kurz darauf machte ich bei meiner Nachbarin die zufällige Bekanntschaft eines saarländischen Ehepaares, das gekommen war, um sich zu verabschieden. Es gehörte zu einer Gruppe von Ingenieuren und Technikern, die während des Krieges aus dem westlichen Teil Deutschlands in unsere Gegend umgesiedelt worden waren. Da das Saarland, als ein Teil Deutschlands, das ökonomisch von Frankreich übernommen worden war, eine Sonderstellung einnahm, war mit den Russen eine Vereinbarung getroffen worden, wonach die gebürtigen Saarländer die Erlaubnis bekommen hatten, mit ihrer ganzen Habe, und mittels französischer Militärzüge über Berlin nach Hause zu fahren. Urplötzlich schoß durch meinen Kopf ein Gedanke. Ich fragte, ob auch nichtgebürtige Saarländer dorthin gelangen konnten. Die Antwort: man müsse nur eine Arbeit vorweisen können. Wie benommen lief ich hinaus, ging durch die Straßen und Anlagen unseres Viertels, ohne etwas zu sehen, mit dem einen Gedanken beschäftigt: Sollte sich da eine Tür öffnen? Nach Hause zurückgekehrt, setzte ich sofort eine Schrift auf, in der ich meine Angelegenheit darstellte und schickte sie an das Kulturministerium nach Saarbrücken. 5 Wochen später, am 15.September, bekam ich eine wohlwollende Antwort mit dem Fragebogen, dessen Beantwortung eventuell zu einer Einstellung führen könnte. Am nächsten Tag, am 16.September, kam die oben erwähnte Nachricht, daß mein Paß nach Frankreich bereitlag. Die Teile des Puzzles konnten nicht besser zueinander passen, denn der französische Militärzug Berlin-Paris, den wir eine Woche später bestiegen, fuhr über Saarbrücken, wo wir sowieso aussteigen mußten, um unsere Reise nach Süd-Frankreich fortzusetzen. Wir blieben einige Tage in der Stadt, wo ich mich persönlich bei dem Dezernat für die Höheren Schulen vorstellen konnte. Alles verlief gut. Natürlich konnte ich nicht sofort eine bindende Antwort bekommen. Es schien jedoch, daß weder die saarländischen Stellen, noch die Militärregierung, also der General Gouverneur Grandval etwas gegen meine Anstellung vorbringen würden. Ich sollte bei meiner Rückreise wieder vorsprechen, um endgültig Bescheid zu bekommen. Wir fuhren über Straßburg und Lyon zur Mittelmeerküste, einer Gegend, die Renate ebenso wie mir noch ganz unbekannt war. Die Eltern und Monique waren am Bahnhof, als wir in Toulon ankamen, und es ist wohl nicht nötig, länger über die Gefühle zu berichten, die uns nach den langen schweren Jahren der Trennung bewegten. Auch das Land, die milde Luft, die üppigen Gärten, das Meer mit dem menschenleeren Strand überwältigten uns, die wir aus der grauen Großstadt kamen und in Saarbrücken schon Rauhreif am Morgen erlebt hatten. So üppig war dort das Leben auch noch nicht, denn es gab noch Lebensmittelkarten für einige Erzeugnisse.Für Renate war es ein Paradies: sie durfte zum Beispiel ganz allein ein ganzes Ei essen, während wir zu Hause die anfallenden Eier hart kochten, um sie in dünnen Scheiben besser unter uns teilen zu können. Mir erklärte Renate sehr bald: "Ich fahre nie wieder nach Magdeburg zurück!" Wir besuchten Monique und ihre Familie in St. Raphael und genossen den wunderbaren, südlichen Herbst einige Wochen zusammen. Da ich berechtigte Hoffnung hatte, irgendwie und irgendwann ins Saarland berufen zu werden, beschlossen wir, daß Renate bei den Großeltern bleiben solle. Sie kam in die Grundschule, wo sie zuerst die unterste Klasse besuchte. Sie mußte ja die Sprache erst lernen. Es ging damit sehr schnell voran, jeden Monat wechselte sie die Klasse, bis sie ihre Alterskameradinnen eingeholt hatte. Als sie am Ende des Schuljahres 47/48 wieder zu uns kam, hatte sie zuerst mit der deutschen Sprache Mühe, und sie mußte den Sommer über sich darin üben, bevor sie die deutsche Schule besuchen konnte. Von da an war sie vollkommen zweisprachig. Ende Oktober verließ ich den Süden, fuhr nach Paris, wo ich meine Schwester Francoise wiedersah. Sie, die bei unserem letzten Beisammensein 12 Jahre alt war, lebte nun, nach ihrer Scheidung, mit ihrer Tochter Marie-France und ihrem zweiten Mann Jacques Stevens in jener Stadt, die mir von früheren Zeiten so bekannt war. Ihr Sohn Jean-Pierre sollte ein Jahr später zur Welt kommen. Dann beladen mit vielen bei uns unauffindbaren Dingen, machte ich kurz Halt in Saarbrücken, wo alles zum Besten lief und traf Anfang November in Magdeburg wieder ein, wo meine beiden Großen sehr gut mit ihrer Lage fertig geworden waren. Sie erfuhren alles über meine Reise und über die Pläne, die es jetzt zu realisieren galt. Sie waren sofort einverstanden, obwohl der bevorstehende Bruch mit ihrem derzeitigen Leben ihnen nicht ganz leicht gefallen sein mußte. Nun hatten wir ein großes Ziel vor uns. Zwar war die offizielle Bestätigung noch nicht da, wir mußten trotzdem sofort handeln.  #0-Deutsch_Zusammenfassung

10 - Die Umsiedlung und das Leben im Saarland


Das Unternehmen war nicht ganz einfach, denn kein vorgeschriebener Weg führte von Magdeburg nach dem Saarland, und es galt für uns irgendwie das Rote Meer möglichst leicht zu überqueren. Vor meiner Reise hatte ich einen unbezahlten und unbefristeten Urlaub erhalten. Ich meldete mich nicht zurück, und obwohl alle Bekannten und Kollegen genau wußten, daß ich eigentlich hätte arbeiten müssen, blieb ich unbehelligt und Herr meiner Zeit. Die Kinder gingen wieder bis Weihnachten in die Schule und keiner schien zu bemerken, daß Renate nicht zurückgekommen war. Die Reise, die mich nach St. Raphael und Paris geführt hatte, erwies sich als höchst hilfreich. Bei meinem Besuch in St. Raphael hatte ich durch Monique die Bekanntschaft einer Familie gemacht, deren Sohn als Offizier im Hauptquartier der französischen Besatzungstruppen in Berlin Dienst tat. Ich nahm meine Reisen nach Berlin wieder auf, meldete mich bei ihm und stellte ihm mein Problem dar. Zweierlei Auskünfte konnte er mir geben. Für unsere Personen könne er nichts tun, da wir Bewohner der russischen Zone waren. Falls wir jedoch Umzugsgut mitnehmen wollten- und dies war es gerade, was wir wollten- lag die Sache anders. Wenn ich es erreichen könnte, unsere Sachen nach dem französischen Sektor Berlins bringen zu lassen, und wenn ich ihm den Beweis meiner Ernennung im Saarland geben könne, so sei es ihm möglich, unser Umzugsgut- nicht zu umfangreich- in einen Militärzug nach Saarbrücken aufladen zu lassen. Mir oblag es also, das notwendigste Mobiliar nach Berlin zu schaffen. Möglichst wenig sollte es sein. Wir fingen also mit den Vorbereitungen an und entschlossen uns, die Klappbetten der Kinder, ein Sofa für mich, Bücherschränke und Schreibtische mitzunehmen. Das Wichtigste war den Inhalt der Schränke, das bewegliche Gut, die Andenken aller Art und vor allem die Bücher einzupacken. Und da erwies sich Paris als Helfer, denn von dort hatte ich einen Vorrat an Nägeln mitgebracht. Dieser Schatz, zuzüglich meiner Wodkazuteilung, machte es möglich, daß zu Schwarzmarktpreisen 10 Kisten von je 1m3 angefertigt wurden in die wir Wäsche, Vasen, Bettzeug, usw... einpacken konnten. Mit allen auffindbaren Brettern fabrizierte Hans-Jürgen kleine Bücherkisten, 28 an der Zahl. Alles andere; Eßzimmer, Schlafzimmer, Küche, Klavier usw. verkauften wir an ausgebombte Mitbürger und sammelten so das nötige Geld, um den illegalen Transport zu finanzieren. Hans-Jürgen fuhr nach Quedlinburg, um sich in seinem und in unserem Namen zu verabschieden und machte dabei die Bekanntschaft des Babys Ekkehard Kießling. Anfang Februar bekam ich die letzten Dokumente samt Erlaubnis der Militärregierung des Saarlandes, und es konnte losgehen. Ende Februar, kurz nach meinem 40. Geburtstag, wurden abends unsere Sachen auf ein Pferdefuhrwerk aufgeladen und als es um die Ecke verschwand, zweifelte ich sehr, sie jemals wiederzusehen. Irgendwann, irgendwie sollte der Inhalt der Fuhrwerke, möglichst nachts, in den russischenSektor Berlins gebracht werden und so lange untergestellt, bis eine Möglichkeit für die Überführung in den französischen Sektor sich ergab. Und dort sollte es wiederum untergestellt werden, bis ein Zug sie mit nach Saarbrücken befördern würde. Wie man sieht, Zweifel an ein Gelingen waren wohl angebracht! Wir blieben eine Nacht in der leeren Wohnung und am 29. Februar 1948- es war ein Sonntag- verliessen wir Magdeburg. Es hieß nun, auf eigene Gefahr, und jeder von uns mit den notwendigsten Sachen und etwas Proviant in einem Rucksack, die Grenze zwischen Ost und West zu überwinden. Diese Zonengrenze war damals nicht, was sie später wurde: der eiserne Vorhang. Es gab keinen Stacheldraht und keine Wachtürme. Nur, alle Straßen und alle Eisenbahnlinien, die nicht international von den Besatzungstruppen benutzt wurden, waren unterbrochen. Die Schienen waren von den Bahndämmen entfernt worden, und ein Graben zog sich der Demarkationslinie entlang. Es gab noch keine DDR, demnach auch nicht den Begriff von "Republikflucht" und kein deutsches Gesetz verbot den Übergang. Nur, die Russen sicherten ihre Westgrenze und bewaffnete russische Posten und Streifen teilten sich den Wachdienst mit deutschen Beamten. Dazwischen gab es natürlich Lücken, die entweder von Ausreisekandidaten wie uns, oder von Schwarzhändlern benutzt wurden. Der Westen war noch nicht der "goldene Westen", man konnte dort trotzdem schon Dinge finden, die es bei uns nicht gab. Ich weiß noch, daß ich einige Monate zuvor aus solcher Quelle eine Rolle Nähgarn für 50 Mark hatte. Verglichen mit den Summen, die ich für den Verkauf unserer Möbel bekommen habe, könnte man es mathematisch so ausdrücken: 1 Klavier (1000 M) = 20g Wolle! Wurde man bei dem Versuch, über die Grenze zu gelangen ertappt, so war man der Willkür ausgeliefert und die Behandlung hing davon ab, von wem man aufgehalten wurde. Wir sollten unsere Erfahrungen selbst machen. Hans-Jürgen, der damals noch nicht lange Zeit laufen konnte, fuhr mit dem Rade davon. Ein Mitschüler, der nördlich Magdeburgs nahe an der Grenze wohnte, zeigte ihm einen sicheren Weg und er kam unbehelligt nach Helmstedt, wo wir uns bei unseren dorthin geflüchteten Freunden Böckelmann aus Ottersleben treffen sollten. Marlene und ich bestiegen den Zug in Richtung Halberstadt, um von Niederhagen aus mit der Kleinbahn, die nördlich des Harzes nach Westen fuhr, an die Endstation am Rande des Niemandslandes zu gelangen. Zu Fuß liefen wir westwärts, wurden jedoch von russischen Soldaten erspäht und eingeholt, die uns zu ihrem "Kommandanten" führten und in einen Keller einsperrten. Die Nacht war ungemütlich, denn Wanderkarten des Saarlandes waren in meinem Rucksack entdeckt worden, weshalb der "Kommandant" in mir eine gefährliche Spionin sah. Er war sehr erbost, daß ich ihm auf eben dieser Karte den Standort seiner "Kommandantur" nicht zeigen wollte. Wir hatten jedoch Glück, denn am nächsten Morgen wurden wir mit „Davai, Davai samt unserer nach Fisch stinkenden Mitarrestanten hinausgeworfen und zurück nach Osten geschickt. Teils zu Fuß, teils mit der Bahn kamen wir wieder nach Nienhagen, wo wir die zweite Nacht auf den Tischen des düsteren Bahnhofes liegend verbrachten. Am Dienstag früh fuhren wir mit Leidensgenossen nach Oschersleben, von wo aus ebenfalls eine an der Grenze abgeschnittene Kleinbahn abfuhr. Dort war die Grenze von deutschen Posten besetzt und meine Papiere mit dem saarländischen Siegel imponierten ihnen so, daß sie uns durchließen. Weiter ging es zu Fuß bis zum nächstgelegenen westlichen Bahnhof. Dort fanden wir einen Zug, der uns abends nach Helmstedt brachte. Es war so spät, daß wir uns nicht mehr nach unseren Freunden erkundigen konnten, so daß wir unsere dritte Nacht im Bahnhofasyl blieben. Am Mittwoch früh trafen wir nun zusammen mit Hans-Jürgen, der, von Unruhe geplagt, gerade im Begriff war, nach Magdeburg zurückzufahren, um uns zu suchen. Am Mittwoch abend fuhren wir von Helmstedt ab, um stehend in einem überfüllten Zug die Nacht hindurch fahrend, am Donnerstag früh in Frankfurt anzukommen. Dort aßen wir unser letztes Brot und die Kinder blieben am Bahnhof, während ich die nächste französische Militärstelle suchte, denn nur da konnte ich die Einreisegenehmigung für das Saarland bekommen. Denn, Arbeitsvertrag hin, Arbeitsvertrag her, die Genehmigung war unerlässlich. Einen sehr gepflegten Eindruck werde ich wohl bei dem dort sitzenden Offizier nicht gemacht haben .Er hörte mir zu, besah sich die Papiere und als ich etwas kleinlaut erklärte, ich sei illegal aus dem Osten gekommen, entgegnete er nun: "Ihr Glück! Hätten Sie die Erlaubnis von den Russen erhalten hier her zukommen, so würden wir Sie auf keinen Fall durchlassen." Der kalte Krieg war voll im Gange. So schrieb er mir in den Paß, den ich von der allerersten Stelle für meine Frankreichreise erhalten hatte, eine formlose Erklärung, die uns das Tor in das gelobte Land öffnete. Noch einen Tag verbrachten wir in verschiedenen Zügen, und am Donnerstag abend stiegen wir am Bahnhof von Homburg (Saar) aus. Wir waren am Ziel. Es war die Ostgrenze des Saarlandes und wir mußten dort das deutsche Geld abgeben, denn hier galt die französische Währung. Die Nacht schliefen wir in der Roten-Kreuz Baracke und, am Freitag morgen betraten wir ohne einen Pfennig oder einen Centime in der Tasche zum ersten Male den Boden der Stadt Homburg. Wir fanden Zuflucht in einem Lokal, dessen Besitzer, dem ich unsere Lage schilderte, uns erlaubte, an einem Tisch zu sitzen. Verzehren konnten wir natürlich nichts, solange wir nicht zahlen konnten! Ich ließ also die Kinder bei unserem kargen Gepäck sitzen und machte mich auf den Weg, die Schule zu suchen. Dort wurde ich von einer warmherzigen Direktorin empfangen, die sich sofort im praktischen Sinn höchst hilfreich zeigte. Ehe ich Zeit hatte von unserer mißlichen Lage zu sprechen, stellte sie mir Geld zur Verfügung, damit wir leben konnten bis mir von der Regierung eine Vorauszahlung auf mein Gehalt überwiesen wurde. Dann überreichte sie mir eine Brotkarte, ohne die wir im wahrsten Sinne des Wortes brotlos gewesen wären. Der Kontakt zwischen uns war so gut gewesen, daß ich voller Zuversicht der menschlich, beruflichen Zukunft entgegensehen konnte. Mit der kleinen Summe, die nun in meiner Tasche war, kehrte ich zu den Kindern zurück, um die erste, ersehnte und schwerumkämpfte saarländische Mahlzeit einzunehmen. Danach hieß es, ein Dach für die nächste Nacht zu finden. Auf dem Wohnungsamt wurden wir mehr als unfreundlich empfangen. Die Stadt wie das ganze Land hatte während des Krieges sehr gelitten, so daß der Wohnraum sehr knapp war und die "Fremden" sollten möglichst außerhalb der Landesgrenzen bleiben. Nun waren wir da; wir bekamen mehrere Adressen von möblierten Zimmern. Sei es, daß die Wohnungsbesitzer wie die Behörden Fremden nicht gern aufnahmen, sei es, daß unser Aussehen nach der zurückliegenden Reise nicht vertrauenserweckend war, erst beim fünften Versuch hatten wir Erfolg. Die alte Mutter eines Bäckers stellte uns in ihrer Wohnung in einem Hinterhof und über der Backstube ein Zimmer zur Verfügung. Darin waren 2 Betten, ein Tisch mit 4 Stühlen, 1 Schrank, 1 Waschtisch mit Schüssel und Wasserkanne. Es gab keine Heizung, das Wasser wurde aus der Wohnungsküche, in der wir auch kochen durften, geholt. Eine Außentreppe führte zum Hof und zur Toilette. Na, für einige Tage würde es schon gehen, meinten wir. Und erleichtert stellten wir unsere Rucksäcke ab. Die Stimmung wäre sicherlich nicht so gut gewesen, wenn wir damals gewußt hätten, daß wir erst zu dritt, dann mit Renate zu viert, 11 Monate, bis wir endlich im Februar 1949 eine Wohnung fanden und auch beziehen durften, darin leben sollten. Der Samstag war mit Anmeldungen bei Behörden und wichtigen Besorgungen ausgefüllt und dann kam der Sonntag, der 7.März, Arnolds Geburtstag. Der Frühling war fühlbar; wir zogen in den Wald und auf einer Hanglichtung oberhalb der Stadt teilten wir zwischen uns drei die zwei Bananen- für eine dritte hatte das Tagegeld nicht gereicht!, die herrlich schmeckten. Wir besaßen nichts außer dem Inhalt unserer Rucksäcke, wir hatten sogar schon Schulden, aber, genau 8 Tage nach unserem Auszug aus Magdeburg hatten wir heil das Ziel erreicht und wir feierten still unsere gewonnene Freiheit. Die Kinder wurden in ihren Schulen angemeldet,, während ich eine Atempause erhielt. Maria Schwarz, die Direktorin des Mädchengymnasius meldete zwar sofort mein Eintreffen nach Saarbrücken, damit ich so schnell wie möglich ein Anrecht auf Bezahlung bekam, sie ließ mich aber bis zu den bevorstehenden Osterferien überall, wo es mir beliebte bei den anderen Kollegen hospitieren und wollte erst nach den Ferien den Stundenplan neu aufstellen. Die mir vergönnte Frist nutzte ich aus, um mit der Stadt und deren Umgebung Bekanntschaft zu machen. Homburg war damals eine kleine Stadt mit einer Brauerei und zwei oder drei Fabriken, die am Fuße eines bewaldeten, vorspringenden Hügels lag und eine gewisse entfernte Ähnlichkeit mit Freiburgs Lage am Fuße des Schwarzwaldes hatte. Viele Bombentrichter zeugten noch von der jüngsten Vergangenheit. Da, wo jetzt eine vornehm-ausgestattete Einkaufsstraße sich hinzieht, schlängelte sich ein grasbewachsener Pfad zwischen Gemüse- und Obstgärten einem Bächlein entlang. Verkehr gab es kaum, denn wir befanden uns dicht an der Ortsgrenze, die das Saarland vom übrigen Deutschland trennte. Wir waren am Ende der dortigen Welt. Über der Stadt, im Walde versteckt , lagen die Reste der Befestigungsanlagen, die einst Vauban, wie die in Longwy oder auch in Freiburg und Neuf-Brisach hatte errichten lassen. Dahinter zogen sich weite Wälder, die uns in unserer Heimatlosigkeit oft eine willkommene Zuflucht boten. Endlose Spaziergänge haben wir dort gemacht, Pfifferlinge und Heidelbeeren gesammelt. Nach den Osterferien fing der neue Abschnitt unseres Lebens vollends an. Mehrere Wochen nach Schulbeginn, es muß Anfang Mai gewesen sein, erhielt ich in der Schule ein Telegramm, wonach unser Umzugsgut in Saarbrücken eingetroffen sei und wir gebeten wurden, es abholen zu lassen! Beinahe 3 Monate waren vergangen seit der Pferdewagen unsere Habe mitgenommen hatte. Ich hatte die Hoffnung, sie wieder zu sehen, beinahe aufgegeben. Und nun war alles da. Es fehlte nur ein großer Teppich, der in keine Kiste gepasst hatte. Und eine Tatsache ist interessant, die wir später erfuhren und die die wundersame Wirkung des Schicksals noch erhöhte: Die Sachen hatten Berlin mit einem der letzten Züge verlassen, die damals vor der Blockade aus der Hauptstadt fahren konnten. Eine Verzögerung von wenigen Tagen hätte genügt, das für uns so wertvolle Gut für immer verschwinden zu lassen. Wir ließen die Kisten und Möbelteile in einem Verschlag einer früheren Kaserne aufstapeln, bis wir eine Wohnung und also Platz zum Auspacken gefunden hatten, was wie schon erwähnt, erst im Februar des nächsten Jahres geschah. Das Schulleben hatte also begonnen. Es bereitete beiden Kindern große Schwierigkeiten. Im Saarland wurde damals in der Sexta, also Klasse 5, mit Französisch und Latein begonnen, in der 7. Klasse kam Englisch hinzu und das Abitur fand am Ende der 13. Klasse statt. Hans-Jürgen, der vom humanistischen Gymnasium kam, hatte während seiner oft unterbrochenen Schulzeit Latein und Griechisch, dann seit Kriegsende Russisch. Er trat in die 11. Klasse ein, im letzten Vierteljahr des Schuljahres, hatte also noch genau 2 Jahre bis zur Schlußprüfung. In diesen 2 Jahren mußte er 7 Jahre Französisch und 5 Jahre Englisch nachholen. Die Schulsituation Marlenes war ähnlich, aber sie hatte 4 Jahre, um die Lücken zu schließen und in allen Fächern den Kenntnisstand ihrer Alterskameradinnen zu erwerben. Wir machten uns an die Arbeit. Hans-Jürgen verbrachte die Sommerferien 48 und 49 bei den Großeltern in Frankreich; Marlene bekam im Winter 49 einen 3-monatigen Urlaub, um in St. Raphael die Schule zu besuchen, in der Monique unterrichtete. Einige Privatstunden kamen hinzu, und durch emsige Arbeit und viel Energie gelang das Unternehmen. Beide erreichten das vorgesehene Ziel. Das Abitur bestand Hans-Jürgen im Sommer 1950 und Marlene machte ihres im Sommer 52 . Auch für mich waren die Jahre in Homburg reich an Arbeit. Ich erwähne nur die Mühe der täglichen Hausarbeit: alles das mußte nebenbei geschehen, wie zum Beispiel die Waschnächte (nicht die Waschtage), wenn Marlene und ich um 4 Uhr früh in die gemeinsame Waschküche gingen (mit Handbetrieb: Waschmaschinen gab es da noch nicht) damit wir nach verrichteter Arbeit pünktlich um 8 Uhr in der Schule sein konnten. Nein. Ich meine die berufliche Arbeit. Es war für mich nach der geleiteten Ausbildung in Magdeburg ein Neubeginn. Der aber wurde mir durch die verständnisvolle Großzügigkeit von unserer Leiterin sehr erleichtert. Maria Schwarz war eine überzeugte Katholikin, die die religiöse Grundlage ihrer Persönlichkeit tief im Inneren verbarg. Nur durch Zufall erfuhr man, daß sie jeden Morgen in die Kirche ging und einer Messe beiwohnte, und dies bei jedem Wetter und ohne Rücksicht auf die Fülle der Arbeit, die tagsüber auf sie wartete. Ohne je darüber debattiert zu haben, wußten wir beide, daß wir in religiöser Hinsicht gänzlich getrennte Wege gingen. In der Beurteilung täglicher Dinge und auch der Politik verstanden wir uns überaus gut. Und ich glaube beinahe, daß diese Dualität zwischen unserer metaphysischen und der Gleichheit unserer irdischen Anschauungen zu der Festigkeit der Freundschaft beigetragen hat, die bis zu ihrem Tode im Jahre 1981 gedauert hat. In zweiter Linie muß ich die angenehmen Beziehungen, die zwischen der Schülerschaft und uns herrschte, betonen. Es waren kleine Klassen, die Oberprima zählte je nach den Jahren 5, 7, höchstens 12 Schülerinnen, die in jener Nachkriegszeit voller Eifer waren. Sie waren dankbar für alle Kenntnisse und Impulse, die wir ihnen geben konnten, forderten aber eben deshalb von uns auch die besten Leistungen. Es waren darunter viele Töchter aus Bergarbeiter-Familien und ich wurde zum ersten Mal in meinem Leben mit den schweren Berufskrankheiten wie Staublunge konfrontiert, ein Leiden, das im benachbarten Kohlebergwerk viel Unheil anrichtete. Ich gab 24 Unterrichtsstunden wöchentlich, also waren es 6 Klassen, in denen ich entweder Französisch oder Mathematik, oft aber beide Fächer unterrichtete. Es war immer der Fall, wenn ich Klassenlehrerin war, und ich empfand es als besonders reizvoll, denn dadurch konnte ich die Verschiedenheit der Begabungen beobachten und kam dadurch zu einer gerechteren Bewertung der einzelnen Schüler, als es der Fall gewesen wäre, hätte ich nur eines der Fächer behandelt. In dritter Linie muß ich die Zeit erwähnen, in der wir damals lebten. Das Saarland war ein Sonderfall. Die Bevölkerung war hundertprozentig deutsch, und der Ausgang des Referendums im Jahre 1956, für oder wider der Zugehörigkeit zur BRD konnte nie bezweifelt werden. Die Wirtschaftszugehörigkeit und die geographische Nähe Frankreichs jedoch brachten es mit sich, daß Annäherungsversuche in verschiedenen Bereichen unternommen wurden, besonders im Schulwesen, wo Bemühungen angestellt wurden, das französische System den deutschen Pädagogen schmackhaft zu machen. Es entstand dadurch eine gewisse Mobilität, die den einzelnen Lehrern viel Freiheit ließ. Die Programme waren natürlich für alle bindend und der Unterrichtsstoff jeder Klasse klar definiert. Die pädagogischen und didaktischen Methoden jedoch, die anzuwenden waren, konnte jeder Lehrer wählen. In Mathematik ist es sehr wichtig, daß man die Darstellung des manchmal spröden Stoffes der jeweiligen Klasse anpaßt und man kann erstaunliche Erfahrungen machen. Im Französischunterricht be-nutzten wir in der Unter-und Mittelstufe die empfohlenen Lehrbücher. In der Oberstufe herrschte dafür völlige Freiheit. Beim Abitur wurde von den Kandidaten eine gute Kenntnis der Sprache, der Literatur und der Kultur Frankreichs verlangt, um das Ziel zu erreichen, konnten wir frei zwischen allen Autoren und allen Werken wählen, was wir für das geeigneteste hielten. Da es sich um meine Muttersprache handelte, empfand ich diese Freiheit als besonders wohltuend. So bedeutete die Schule viel Arbeit, viele Korrekturen, viele abwägenden Lektüren, es war aber eine reizvolle Arbeit, wie ich sie mir nicht besser hätte wünschen können. Andere schöne Erinnerungen an diese Zeit habe ich auch: die vielen Klassenwanderungen und Reisen, die wir unternommen haben, mehrtägige Fußwanderungen durch das Saarland, Luxemburg, Belgien, Überquerungen von der Eifel und des Taunus, Mosel- und Rheinfahrten. Wir zogen durch den Schwarzwald und die Vogesen. Wir fuhren nach Brüssel zur Weltausstellung 1958, mehrmals nach Paris, nach Hamburg und Helgoland. 1958 fuhren wir auch nach Berlin, als es noch keine Mauer gab. Der Zugang zum Ostsektor war noch möglich, aber schon durch Kontrollen erschwert, und man spürte vor allem in den S-Bahnen oder in der Nähe der Bahnhöfe die mißtrauischen Blicke, die die Menschen sich gegenseitig zuwarfen. Wir haben auch das Museum der Antike besucht und einer sehr schönen Aufführung von Minna von Barnhelm beigewohnt. Zu diesem positiven Bild meines Lebens in Homburg kamen die wertvollen Freundschaften hinzu, die ich knüpfen konnte und die bis zum heutigen Tage andauern. Diese in menschlicher und beruflicher Hinsicht erfreuliche Gestaltung der Dinge war mir bei der Überwindung der finanziellen Schwierigkeiten eine große Hilfe. In der Tat, die Geldlage war nicht leicht zu meistern. Ich wurde in Homburg als Assessorin mit Anfangsgehalt angestellt und die Bezahlung war nicht hoch, und sie mußte für 4 Personen reichen. Erschwerend war, daß wir uns wirtschaftlich auf dem Nullpunkt befanden. Nach 9 Kriegs- und Nachkriegsjahren mit 3 heranwachsenden Kindern hatten wir keinerlei Textilreserven mehr. Die letzten Kleider, die ich 1946 für die Mädchen genäht hatte (sie tragen sie auf dem Bild) bestanden aus Gardinenstoffen. Es fehlte an Wäsche, Kleidern, Schuhen, Hauswäsche. Und als wir endlich eine Wohnung beziehen konnten, mußte, zu den vorhandenen Klappbetten, Arbeitstischen und Bücherschränken allerhand Hausrat hinzukommen. Im Februar 1949 zu meinem Geburtstag zimmerte mir Hans-Jürgen aus dem Umzugskasten einen sogenannten Küchenschrank (mit einer Schublade). Für alles übrige stöberten wir im Trödlerladen. Von den damals erworbenen Dingen besitze ich heute noch 2 Hocker, höchst widerstandsfähig, die den Stempel vom Arbeitsdienst tragen. Eine Geldgrundlage gab es auch nicht, da wir bei Null angefangen hatten. Bei knapper Berechnung der täglichen Bedürfnisse konnten wir jeden Monat entweder Bettwäsche oder 1 Paar Schuhe oder einen Schlafanzug für einen von uns zusätzlich kaufen. Als wir 1950 ein Damenfahrrad auf Raten kauften, glaubte ich den Gipfel des Leichtsinns erreicht zu haben. Ich verdiente also wenig, was jedoch verglichen mit einem Straßenkehrer viel war, so daß ich keinerlei Anrecht auf eine schulische Beihilfe hatte. Schulgeld mußte man damals für das Gymnasium zahlen und Schulbücher mußte man selbst anschaffen. Eine Aufbesserung meines Gehaltes wäre möglich gewesen, wenn mir eine Planstelle angeboten worden wäre. Dafür mußte man aber die saarländische Staatsangehörigkeit besitzen, was nicht der Fall war. Also galt der nächste Kampf dem Erwerb jener kurzweiligen Nationalität. 1952 wurden wir offiziell saarländische Bürger und 1953 wurde ich als Beamtin angestellt. In demselben Jahr wurden auch im Saarland die früheren , in allen Teilen des alten Deutschlands erworbenen Beamtenrechte wieder gültig. Wir als Hinterbliebene wurden offiziell in Kenntnis gesetzt. Was mich betraf, mußte ich mich entscheiden: Da der Staat nicht zweierlei Bezahlungen an eine Person leisten kann, mußte ich entweder meine Beamtenposition aufgeben, um die Witwenpension zu bekommen, oder Beamtin bleiben und auf die Pension, wenigstens vorläufig, verzichten. Da die Sicherheit des Arbeitsplatzes für mich damals das Wichtigste war, wählte ich die zweite Möglichkeit und wie man so schön sagt, die Pension ruhte. Die Kinder bezogen ab 1953 Waisengeld. Für die beiden Großen dauerte die Zuwendung nicht lange: Für Hans-Jürgen hörte sie im Dezember 54 mit seinem 24. Geburtstag und vor Beendigung seines Studiums auf. Für Marlene wurde sie im Januar 55 gestrichen, weil sie im Hinblick auf ihre geplante Heirat und die damit verbundenen Anschaffungen eine schlecht bezahlte Büroarbeit übernommen hatte. Allein Renate blieb länger im Genuß dieser Waisenrente, die sie bis 1960, bis zu ihrer Hochzeit beziehen konnte. Im Laufe der Zeit war mein Anfangsgehalt natürlich verbessert worden. Nur, die Ausgaben waren auch gestiegen: Auswärtsstudium, Hochzeiten, die ersten Enkelkinder, lauter an sich sehr erfreuliche Dinge trugen dazu bei, daß ich bis in die 60er Jahre nicht von den Geldsorgen frei wurde. Diese Homburger Jahre waren also mit Freuden, mit Arbeit ausgefüllt. Man wurde von den täglichen Anforderungen vorwärts getrieben und am Ende ist für mich die Bilanz positiv. Eines habe ich nicht geschafft: gleichzeitig briefliche Berichte zu schreiben. Mit meinen Verwandten in Süd-Frankreich und in Paris gab es Begegenungen, sei es im Sommer am Meer, sei es bei uns, wo sie mehrmals zu Besuch weilten. Sie wußten über uns Bescheid und erwarteten nichts als kurze Grußworte. Nach Ostern lagen die Dinge anders. Ich hatte damals nicht die Kraft, ihnen schriftlich auseinanderzusetzen, was ich eben berichtet habe. So können sie geglaubt haben, daß ich einen Strich zwischen dem alten und dem neuen Leben gezogen hatte. Sie können versichert sein, daß es niemals der Fall war, und daß meine Gedanken oft bei ihnen waren. Ich hoffe, sie tragen es mir nicht zu sehr nach, daß ich sie so lange ohne Nachrichten ließ.  #0-Deutsch_Zusammenfassung

11 - Familienereignisse 1948 - 1964


Im Sommer 1948, also nicht lange nach unserer Ankunft in Homburg, starb die Mutter meines Vaters, die Großmutter Hubin. Geboren im Jahre 1854 als Henriette Cloris, Tochter eines Gärtners, erlebte sie als 16 jährige den Krieg zwischen Preußen und Frankreich in ihrer Heimatstadt Longuyon, im Vorfeld von Metz, das heißt in einer Gegend, die die heißesten Kämpfe erlebte. Sie heiratete Honoré Hubin, von dessen Abstammung ich nichts weiß, außer daß seine Familie aus Belgien kam. Er war Eisenbahnbeamter und starb 1898 an einer Lungenentzündung. Sie hatten 4 Söhne und mein Vater war der Älteste. Als der Krieg 1914 ausbrach, wohnte Henriette in der Stadt Rethel in den Ardennen und floh mit dem größten Teil der Bevölkerung vor dem Brand der Stadt, als die deutschen Truppen durch das Land in Richtung der Marne zogen. Sie fand Zuflucht in der Stadt Le Mans in der Normandie, wo ich ihre Einzimmerwohnung länger als ein Jahr teilte und wo sie bis Ende des Krieges blieb. Nach dem Krieg baute sie sich ein neues Heim (vom alten war nichts übrig geblieben) wiederum in den Ardennen, diesmal in Charleville. Im Mai 1940 rollten wie schon zweimal in ihrem Leben die deutschen Armeen durch das Land. Zuerst mitgerissen von der allgemeinen Panik, flüchtete sie mit den Nachbarn aus der Stadt. Bald jedoch überlegte sie, daß sie nun im Alter von 86 Jahren nicht mehr viel zu verlieren habe, machte kehrt und ging wieder nach Hause, wo sie auch blieb und wo sie jetzt 94-jährig, ohne jemals krank gewesen zu sein, friedlich eingeschlafen war.
 Ich möchte jetzt von den Wegen berichten, die meine Kinder bis zu ihrer jeweiligen selbständigen Existenz gegangen sind. Seit seiner Lehrzeit in Westerhausen war Hans-Jürgen fest entschlossen, Tierarzt zu werden. Nur, es gab in unserem Ländchen keine entsprechende Ausbildungsmöglichkeit. Er mußte sein Glück im "Ausland" versuchen, das heißt, entweder in München oder in Lyon. Seine Wahl fiel auf Lyon, weil er dort gleichzeitig die französische Sprache gründlich lernen konnte, weil er von dort aus für kurze Ferien schnell zu den Großeltern ans Mittelmeer fahren konnte und weil ein dort abgelegtes Examen ihm erlaubte, sowohl auf französischem Gebiet (als auch nach Übersee) als auch in Deutschland zu praktizieren. Nach einem Vorbereitungsjahr auf der neugegründeten saarländischen Medizinfakultät, trat er im Herbst 1951 in die Veterinärschule von Lyon ein. Während des 4. und letzten Studienjahres lernte er Annik Parsons kennen. Ihre Mutter war Französin, ihr Vater Engländer, und sie selbst besaß beide Nationalitäten. Als Hans-Jürgen im Sommer 1955 sein Enddiplom erhielt, wurde die Verlobung auf Weihnachten desselben Jahres festgesetzt. Diese Familienfeier war die letzte, an der auch Francoise teilnahm. Seit kurzer Zeit leidend, sollte sie im Januar operiert werden. Der Befund war unzweideutig: es war Nierenkrebs, dessen Fortschreiten so explosiv wurde, daß sie schon 3 Monate später, im April 1956, starb. Sie war 34 Jahre alt. Ihre Tochter,Marie-France, 14 Jahre alt, verbrachte ihre weiteren Schuljahre in einem Internat. Ihr Sohn Jean-Pierre, 7 Jahre alt, teilte von da ab das Leben seiner Vetter n Jean-Claude und Yves in St. Raphael bei Monique, wo er 3 Jahre blieb, bis sein Vater Jacques Stevens wieder heiratete. Vor der Hochzeit mußte eine Frage grundsätzlich beantwortet werden: wo wollten sich die jungen Leute niederlassen? Annik verspürte wenig Neigung, zu ihren zwei Heimatländern noch ein drittes hinzuzufügen; so war es Hans-Jürgen, der sich entschloß, die französische Nationalität zu beantragen, um sich in Frankreich niederzulassen. Seinem Gesuch wurde entsprochen und so schloß sich ein Kreis: nach seinem Großvater Arnold Jean Baptiste, der Franzose, nach seinem Vater Karl-Arnold, der als Franzose geboren durch seine Lebensumstände ein Deutscher geworden war, kehrte er, Hans-Jürgen, damals als Deutscher geboren, nun ebenfalls durch seine Lebensumstände zu dem Ursprungsland Frankreich zurück. Die Hochzeit fand im April 1957 statt und nach einigen Jahren als Assistent übernahm Hans-Jürgen eine Praxis im Hochgebirgsland der Alpen, in der Nähe der Stadt Annecy, in Thones (Haute-Savoie). Eric wurde 1959 geboren, Frederique 1962 und Ludwig 1967.Als Marlene 1952 das Abitur machte, hatte sie keine festen Zukunftspläne. Sie fing an, in Freiburg Mathematik und Sport zu studieren. Als sie in Begleitung ihres Bruders im Sommer 1953 eine große Fußwanderung durch den Schwarzwald unternahm, traf sie auf dem Gipfel des Belchens einen einsamen jungen Mann, der ebenfalls zu Fuß von Basel aus nach Norden unterwegs war. Karl-Friedrich Bartlewski, ein junger Lehrer mit den Fächern Latein und Griechisch schloß sich dem Geschwisterpaar an. Nach dieser ersten gemeinsamen Wanderung folgten andere. 1954 gab es Verlobung und im August 1955 feierten sie Hochzeit. Karl-Friedrich war damals Lehrer in seiner Geburtsstadt Moers in der Nähe von Düsseldorf, wo das Paar eine Wohnung bezog und wo ihre Töchter Ulrike im Jahre 1956 und Beate 1957 geboren wurden. Im Jahre 1965 wurdeKarl-Friedrich als Leiter des Archisgymnasiums nach Soest berufen, wo er bis zu seiner Pensionierung 1985 blieb. Die Familie lebt jetzt noch weiter in diesem Westfalen-Land, nicht weit entfernt von der Gegend, wo hereinst unser Ururgroßvater Michel Blondeau seine Frau Marie-Cornélie holte, nicht weit von der Stadt Verden, wo unser Urgroßvater 1812 geboren wurde! Renate, die für Sprachen, Sport und künstlerische Darstellung sehr begabt war, hatte keinerlei Interesse für Mathematik und Physik. Ich sah nicht ein, warum man sie zwingen müsse, sich 3 Jahre lang Kenntnisse anzueignen, die sie danach sofort vergessen würde. Nach der 10. Klasse, also mit der mittleren Reife, wurde sie in die Schauspielklasse des Saarbrücker Konservatoriums aufgenommen, wo sie nach 3-jährigem Studium ihr Enddiplom erwarb. Da sie sich nicht reif genug fand, fuhr sie für das Studienjahr 1957/58 nach Oxford, wonach sie Englisch ebenso gut sprach wie Französisch und Deutsch. Pfingsten 58 besuchte ich sie dort und unternahm dabei meine erste Flugreise. Wir flogen von Luxemburg ab, wo die Gebäude des Flughafens einfache Holzbuden waren. Nach einem Umstieg in Brüssel brachte uns die Propellermaschine tief genug über den Kanal, daß wir daß Kielwasser der Fischerboote sehen konnten. Das Panorama von London im Abendlicht werde ich nie vergessen. Für das Studienjahr 1958/59 schrieb sich Renate in Paris bei der Sorbonne ein, wo sie ein Diplom über französische Kultur erwarb. Diese Zeit in Paris sollte die Entscheidung über ihr weiteres Leben bringen. Gleich in den ersten Tagen nach ihrer Ankunft in der Metropole machte sie die Bekanntschaft von Pierre Motte, einem Biologiestudenten, der später umsatteln sollte, um Zahnarzt zu werden. Liebe, Verlobung, Hochzeit im Jahre 1960 und damit waren die früheren Berufsträume für immer dahin. Von da ab lebten sie in Paris, wo ihre erste Tochter Stéphane im Jahre 1961 und die zweite, Valérie 1975 zur Welt kamen.
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12 - Wohnortwechsel - Triberg


Die Kinder waren ihre eigenen Wege gegangen und ich brauchte einen Tapetenwechsel. Ich hatte in Homburg keine Wurzeln geschlagen. Wo sollte es mir altem Wandervogel wohl jemals gelingen? Die einzige Bindung waren die Freundschaften, die ich während all der Jahre geknüpft hatte. Sie sollten bestehen bleiben, denn eine örtliche Trennung hat keinen Einfluß auf ihre Fortdauer, und heute sind sie noch genau so lebendig wie damals, vor 25 Jahren. Mein Plan sah so aus: ich quittierte den Staatsdienst und mein Anspruch auf Altersruhegeld aufgrund meiner bisherigen Arbeit wurde der Angestelltenversicherungsanstalt übertragen, wonach ich ab meinem 60. Geburtstage eine eigene Altersrente bekommen sollte. Zur Zeit, also Ostern 64, wurde meine Witwenpension reaktiviert und ich durfte nebenbei eine Arbeit annehmen , wenn deren Entgelt unabhängig von der Staatskasse geleistet wurde. Die Wahl meines neuen Heimatortes hing von den Bedingungen ab. Er sollte in Deutschland sein, möglichst gleich weit entfernt von dem Wohnsitz meiner Kinder und in einer schönen Landschaft liegen und mir die Möglichkeit bieten, in einer Privatschule einige Jahre noch zu unterrichten. Auf der Landkarte stellte ich den Mittelpunkt des Kreises fest, auf dem Thones, Moers und Paris lagen. Damit kam ich in die Nähe von Straßburg. Etwas östlich davon floß der Rhein und dahinter lag der Schwarzwald. Beim Lesen von Fachzeitungen fand ich, daß mitten in der Landschaft, in der Stadt Triberg, eine private Lehranstalt mit Internat, die Schwarzwaldschule, Lehrer für verschiedene Fächer, vor allem Mathematik, suchte. Ich bewarb mich und wurde angenommen. Somit verließ ich Homburg (Saar) und bezog eine sehr angenehme Wohnung in der Mitte des Bergstädtchens, das in etwa 800 Meter Höhe inmitten üppiger Waldungen liegt. Ich verdiente genauso viel wie in Homburg, bezog aber nebenbei meine bislang ruhende Witwenpension. Und damit konnte ich mir endlich 16 Jahre nach unserem Auszug aus Magdeburg richtige Betten, eine Küche, Waschmaschine, Fernsehapparat usw. kaufen, einen nicht luxuriösen, dennoch modernen Hausstand gründen. Der Schulbetrieb gefiel mir weit weniger als ich es erhofft hatte, und die Atmosphäre war weit weniger herzlich als in Homburg, so daß ich mit der Arbeit aufhörte, so bald die finanzielle Lage es erlaubte, das heißt sobald meine neuen Anschaffungen bezahlt waren. Von da an genoß ich die Landschaft, wo Kinder und Enkel oft zu Besuch kamen, wo wir tagelang in den waldigen Tälern oder durch die sonnigen Höhen im Sommer Beeren und Pilze sammelten, im Winter durch tiefverschneite Dickichte wateten.Ich hatte nun auch Zeit, die Sommerferien vorzubereiten, die eine gute Gelegenheit boten, die Kinder aus Soest, Thônes und Paris so zu mischen, daß sie trotz der Entfernungen, der Lebensumstände (Westfalen, Hochgebirge, Paris) der 2 Sprachen fühlten, daß sie immer zu-sammengehörten. In neuen Gruppierungen haben wir an der Nordsee, am Kanal, auf den Inseln der Atlantikküste, am Mittelmeer und in den Alpen Sommerwochen verlebt, die unsere gemeinsamen Erinnerungen bleiben werden.
 Triberg liegt ungefähr 50 km nordöstlich von Freiburg i. Breisgau. Mein Wohnungswechsel hatte mich in die Nähe von Ilsemarie Schulzgebracht, die seit mehreren Jahren mit ihren Kindern dort wohnte. Ilsemarie, geborene Schmedes, war die Tochter Herta Knaurs, der Enkelin Adolf Knaurs. Sie war 1918 in Breslau geboren und hatte den größten Teil ihrer Kindheit und Jugend dort und in Oberschlesien verbracht. 1940 hatte sie Hermann Schulz geheiratet, der bald an die Front geschickt wurde. Zeit zu einem Eheleben hatten sie nicht gehabt. 1941 kam ihr Sohn Ulrich zur Welt, aber der junge Vater kehrte nicht heim. Er fiel in Rußland, ebenso wie Ilsemaries Bruder Hans Schmedes. Im Januar 1945 als die russischen Truppen sich Schlesien näherten, flüchtete Ilsemarie mit ihrem kleinen Sohn und nahm ihre Mutter Herta, die den Verlust von Sohn und Schwiegersohn schwer ertrug , mit sich. Nach mühevollen Wochen wurden sie in den äußersten Norden Deutschlands, nahe der dänischen Grenze verschlagen. Das Leben dort war äußerst schwer. Sie wohnten bei einer bäuerlichen Familie, die ihnen als Entgelt für landwirtschaftliche Arbeit Nahrung gab. Sie sammelten die an den Hecken hängengebliebene Wolle der weidenden Schafe und strickten daraus Kinderpullover. Als nach einigen Jahren eine gewisse Ordnung in der Verteilung der entwurzelten Flüchtlinge aus den Ostgebieten etabliert werden sollte, konnten die Betroffenen zwischen mehreren Möglichkeiten wählen. Ilsemarie entschied sich für Freiburg, wo sie bald mit Mutter und Sohn in dem Flüchtlingslager eintraf. Ein neues Leben mußte aufgebaut werden. Ilsemarie, die vor ihrer Verheiratung ein Studium angefangen hatte, wäre gern Lehrerin geworden. In der damals beinahe 100 prozentig katholischen Stadt hatte sie leider keine Chance. Sie mußte lange Zeit Fabrikarbeit verrichten, ehe sie eine Vertrauensstelle beim mathematischen Institut fand. In den ersten Zeiten nach ihrer Ankunft, als sie mit Behörden und Vermietern zu kämpfen hatte, war ihr ein Mann begegnet, der ihr tatkräftig half und in dem sie bald hoffte, einen guten Gefährten für das Leben gefunden zu haben. Sie schreckte am Ende vor einer endgültigen Bindung zurück und entschloß sich, für ihre kleine Tochter Almut, 1953 geboren, alleine zu sorgen. Ihre Mutter half ihr im Haushalt bis sie 1964 verstarb. Ilsemaries Lebensaufgabe war die Erziehung ihrer Kinder, die Sorge um die bestmögliche Ausbildung. Ulrich ist Mathematiker in Bielefeld. Mit seiner Frau Claudia Winz und den 4 Kindern Inga (Januar 1979), Ursula (November 1979), Hans (1981) und Susanne (1986) lebt er in Halle (Westfalen). Almut ist Lehrerin für Biologie und Mathematik in einer Freiburger Schule. Ilsemarie hat uns im vergangenen Sommer an den Folgen eines Herzversagens verlassen. Sie war 72 Jahre alt. Ilsemarie hatte von jeher eine tiefe innere Bindung mit ihrem Onkel Ernst-Adolf Knaur, dem jungen Bruder ihrer Mutter Herta. Langezeit hatten sie beide in Breslau gewohnt, und als Ernst-Adolf geheiratet und sich in Schweidnitz niedergelassen hatte, waren die Beziehungen zu ihm, zu seiner Frau Marguerite und später zu seinen Kindern eng geblieben. Die Nachkriegszeit und die Trennung zwischen Ost und West hatten daran nichts geändert. Und durch meinen Umgang mit Ilsemarie knüpften sich die lose gewordenen Fäden mit den Verwandten wieder fest. Ich wußte von nun an, wie es ihnen ergangen war, was ihnen geschah und konnte auch die Freude haben, Marguerite wieder zu sehen, als sie ihren Besuch im Westen zwischen Freiburg und Triberg aufteilte. Wie war es ihnen also ergangen? Karl-Hermann und seine Frau Herta waren in Leipzig geblieben. Ihre Töchter, beide verheiratet, lebten ebenfalls dort und die Enkelin sollte später kommen. Kurt, Dörte und ihre Söhne Ekkehard und Dietrich hatten Quedlinburg verlassen und lebten in Neu-Ruppin. In Quedlinburg, wo die Eltern Kießling 1952 und 1954 gestorben waren, blieben Ernst-Adolf, Marguerite und ihre Kinder, die alle 3 geheiratet hatten. Sie hatten sogar alle 3 zur selben Zeit, 1961, ihr erstes Kind bekommen. Ulrich mit seiner ersten Frau Monika, eine Tochter, Ulrike; Sigrid mit ihrem ersten Mann einen Sohn, Torsten, und Christiane ebenfalls einen Sohn, Frank, dem ein zweiter, Jens, bald folgen sollte. Ernst-Adolf, der in seinem ärztlichen Beruf immer viel zu tun gehabt hatte, wurde krank. Er konnte noch seinen 60. Geburtstag 1966 mit seiner Familie feiern. Der Krebs, der ihn befallen hatte, konnte nicht aufgehalten werden und er starb noch im gleichen Jahr. Der Sohn Ulrich, der nach der Scheidung seiner Ehe mit Monika wieder geheiratet hatte, bekam mit seiner Frau Luise Uppleger aus Doberan eine zweite Tochter, Beate. Leider wurden die Sorgen um seine Gesundheit immer größer. Im Jahr 1967, ein Jahr nach seinem Vater, erlag er einem Nierenversagen. Nach gebar Luise ihre zweite Tochter, Juliane. Sigrid Knaur hat ebenfalls nach ihrer Scheidung wieder geheiratet und ihre Tochter Inga ist 1974 geboren. In der Zwischenzeit, im Jahre 1969, fuhr ich nach Quedlinburg und das Wiedersehen war gut und herzlich. Kurt und Dörte kamen aus Neu-Ruppin, und mit ihnen mit Marguerite, ihren Töchtern und Enkeln verbrachten wir einen wunderschönen Tag im Vorfeld des Harzgebiges. Man fühlte sich wohl, entweder in der freien Natur oder abgeschirmt in den eigenen 4 Wänden. Sobald man jedoch die öffentliche Luft einatmete, glaubte man zu ersticken. Die Verlogenheit der Zeitungen, die Absurdität der Parolen, die allenthalben auf den Plakaten verkündet wurden, die schroffe Behandlung, die Westleute von den Grenzbeamten oder bei den unvermeidbaren Besuchen auf den Polizeirevieren erfuhren, waren so bedrückend, die Ohnmacht vor einer so verfahrenen Lage so schmerzlich, daß ich den Mut nicht aufbrachte, den Besuch zu wiederholen. Erst im vorigen Herbst trafen wir uns wieder. Und wieder war der menschliche Kontakt gleich wieder hergestellt. Wir konnten jedoch ermessen, wie hart die Arbeit sein würde, bis die 45-jährige Trennung im alltäglichen und im historischen Bewußtsein der Menschen überwunden wird. Nicht nur der gute, sondern der beste Willen aller wird dazu nötig sein. Kurz nach meinem Besuch in Quedlinburg erreichte uns die traurige Nachricht vom Tode Kurt Kießlings, Dörte blieb in Neu-Ruppin, wo sie heute noch wohnt. Ihr Sohn Ekkehard ist Ingenieur in Berlin und lebt in Berlin mit seiner Frau Ingrid Kaiser und den beiden Töchtern, Jeannette (1971) und Katrin (1973). Ihr zweiter Sohn, Dietrich, Pflanzenbiologe, wohnt in Halberstadt mit seiner Frau Gisela Feldberg und den Töchtern Corina (geb. 1973) und Cornelia (geb. 1975).  #0-Deutsch_Zusammenfassung

13 - Familienereignisse 1964 - 1978


Ich bin in meiner Erzählung schneller weiter gegangen als es die Zeit selber tat. Das Jahr 1965 war für uns ein Schicksalsjahr, denn innerhalb weniger Monate mußten wir von den Großeltern Abschied nehmen. Magdeleine und Georges Hubin wohnten nun beinahe 30 Jahre in dem Häuschen dicht am Meer. Magdeleine, die auch im Alter gerne lange Fußmärsche unternahm, kam an einem Aprilabend nicht nach Hause. Ihr Mann alarmierte die Polizei. Aber erst am folgenden Tage wurde sie von einer Gruppe Wanderer gefunden. Sie lag auf dem Strand, unterhalb einer Klippe, deren Rand sie wohl übersehen hatte, so daß sie hinuntergestürzt war. Der Ort lag 10 km entfernt von ihrem Haus. Einige Tage später wäre sie 82 Jahre alt geworden. Georges verließ Les Sablettes und bezog ein Zimmer in Moniques Wohnung in St. Raphael. Er ging zwar nicht mehr aus, war dafür geistig sehr rege geblieben und beschäftigte sich mit dem eifrigen Studium von mehreren Zeitschriften und Zeitungen. An einem Novembertag verschluckte er sich am Ende des Mittagessens an einem Stück Apfel. Da es ihm anscheinend sehr mitgenommen hatte, ließ Monique einen Arzt kommen, der sie beruhigte und ihrem Vater Ruhe empfahl. Er las zuerst eine Zeitung weiter im Bett; und ohne daß er es gewahr wurde entschlief er, wahrscheinlich infolge einer inneren Blutung. Er stand kurz vor seinem 91. Geburtstag. Die Ehe unserer Eltern hatte 60 Jahre gedauert.
 Der Tod betagter Eltern hinterläßt eine schmerzliche Leere. Ein Trost jedoch entspringt dem Bewußtsein, daß sie ihre Zeit erfüllt, daß sie ihr Leben im wahrsten Sinne des Wortes vollendet haben. Härter trifft das Schicksal, wenn Menschen aus ihren aktiven Jahren herausgerissen werden, wenn sie ihre Lebensaufgabe nicht zu Ende führen dürfen. Mehrmals schon mußte ich in dieser Chronik von Familiendramen berichten. Im Jahre 1970 geschah es in Thones. An-fang Mai erfuhr Annik, weil sie darauf bestand, die Wahrheit zu erfahren, daß sie an Krebs erkrankt war. Sie setzte ihre ganze Energie ein, um die Krankheit zu bekämpfen und unterzog sich allen Behandlungen, so schmerzhaft sie auch waren. Beinahe 5 Jahre lang kämpfte sie mit äußerstem Mut gegen die Krankheit und erlag ihr am 27 Januar 1975. Sie war 38 Jahre alt. Eric, ihr erster Sohn, war 15 Jahre alt, Frederique 12 Jahre und der kleine Ludwig, der bei Ausbruch der Krankheit nicht einmal 3 Jahre alt gewesen war, 7 Jahre. Später heiratete Hans-Jürgen eine Jugendfreundin Anniks,
Marie-Jo Paquier, Tochter aus einer Seidenfabrikantenfamilie aus Lyon.
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14 - Familienereignisse 1978 - 1991


Wohnortwechsel - Freiburg Br.

Die Zeit schritt voran- die kleine Stadt Triberg zog immer mehr Touristen an. Marktplatz und Hauptstraße füllten sich mit Omnibussen aus aller Herren Länder und die Menschen strömten immer zahlreicher zu den berühmten Wasserfällen. Damit fühlte ich mich in meiner Beschaulichkeit etwas gestört. Dazu kam, daß die Zeit ebenfalls bei mir voranschritt, daß ich meine Spaziergänge etwas einschränken mußte, vor allem in den langen Wintermonaten, wenn alle Straßen und Wege durch Schnee und Eis gefährlich wurden: So entschloß ich mich einmal mehr meinen Wohnsitz zu verlegen und bemühte mich um eine Wohnung in Freiburg, der Stadt in der Ebene und doch dicht am Gebirge gelegen. Seit Ende März 1978 lebe ich also in Freiburg und freue mich immer wieder über die Lebensqualität, die diese Stadt bietet. Die im Krieg vollständig zerstörte Altstadt wurde nach den alten Plänen wieder aufgebaut. Lustige Bäche fließen durch die Straßen. Der Wald steht vor der Tür und genau wie in Triberg kommen Kinder und Enkel gerne hierher zu Besuch. Die Verkehrslage ist auch sehr günstig. Die Stadt liegt mitten auf der direkten Strecke Soest-Thones, und über den Flughafen Basel kann man Paris oder Nizza in einer Stunde erreichen. Außerdem ist die schöne Bodenseelandschaft ganz in der Nähe. 10 Jahre nach Anniks Tod schlug das Schicksal wieder zu und gleich zweimal. Renate litt seit einiger Zeit an Magengeschwüren und eine totale Gastrektomie erwies sich als notwendig. Der Eingriff erfolgte Anfang November 1985, einige Tage bevor ihre Schwägerin Claire Motte, Primaballerina an der Pariser Oper, in einer anderen Pariser Klinik sich einer gynäkologischen Operation unterzog. Während sich Renate nach den ersten schweren Wochen allmählich erholte, mußte sie miterleben, wie der Zustand Claires sich verschlimmerte und sich als hoffnungslos erwies. Eine tiefe Freundschaft band verband beide Frauen miteinander und für Renate war es ein tiefer Schmerz als Claire am 16. Juli 1986, Renates Geburtstag, verschied. Sie war 48 Jahre alt. Ihre Söhne Alexandre und Michael waren 17 und 12 Jahre alt. Zu jener Zeit hatte sich Renate so weit erholt, daß man mit guten Gründen auf eine Genesung hoffen konnte. Bald jedoch setzte eine bösartige Evolution ein. Im Juni 1988 mußte sie zum zweiten Mal operiert werden, wonach sie tapfer gegen den Verfall der Kräfte kämpfte und doch nach 4 Monaten, am 20. Oktober der Krankheit erlag. Sie war 51 Jahre alt. Ihre Tochter Stéphane war 27 Jahre, und Valérie 13 Jahre alt. Seit ihrer Rückkehr aus Prag im Herbst 1937 und ihrer Vermählung mit Marius Lovera ein Jahr später, lebte Monique im sonnigen Süden, in St. Raphael. Marius starb 1979. Monique lebt nun mit ihrem zweiten Mann, Paul Bapst, in Mandelieu, in der Nähe von Cannes, in einer hübschen Wohnung dicht am Meer, die sie jedoch in der warmen Jahreszeit gegen eine kühle Zuflucht tauscht, in einem Gebirgsdorf in 1000 m Höhe, etwa 50 km nördlich von Nizza gelegen. Da und dort, und je nachdem, spielt sie Tennis, läuft Ski und sammelt wilde Beeren. Ihr Sohn Jean-Claude, verheiratet mit Martine Bontoux, hat zwei Kinder, Maurin (1974) und Estelle (1976). Er arbeitet seit Jahrzehnten in einer Gesellschaft für die Wasserversorgung, die ihn vor 4 Jahren in die Karibik auf die Insel Martinique entsandt hat. Wahrscheinlich kommt er nächstes Jahr nach Frankreich zurück. Moniques zweiter Sohn, Yves, verheiratet mit Marguerite Molina, hat zwei Töchter, Dominique (1968) und Pascale (1977). Sie teilen sich ihre Zeit zwischen St. Raphael im Sommer und La Foux, einem Wintersportzentrum, wo sie jeweils ein Restaurant betreiben. Dieser Lebensplan erlaubt ihnen generell zweimal jährlich, im Frühjahr und im Herbst, mehrere Wochen Ferien einzuschieben, die sie zu schönen Reisen nutzen. Francoise wäre schon seit mehr als zwei Jahren Urgroßmutter. Ihre Tochter Marie-France heiratete 1963 Claude Asensi und die 4 Kinder, Fabrice (1964), Caroline (1965), Renaud (1966) und Sophie (1969) wurden alle in Paris geboren. Nach ihrer Scheidung heiratete Marie-France Antoine Lortat-Jacob und lebte weiterhin in Paris. Francoises Sohn Jean-Pierre Stevens ist verheiratet mit Francoise Bachet. Sie haben zwei Söhne, Nicolas und Pierre-Emmanuel. Jean-Pierre bereist als Kaufmann die ganze Welt, Seoul und Los Angeles, Singapur und Bagdad, wo er für seine Firma im französischen Jura große Mengen Sonnenbrillen verkauft.
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Schlußwort

Hiermit schließe ich diese Chronik, die naturgemäß nur ein Überfliegen der vergangenen Ereignisse sein kann. Sie weist Lücken auf, die jeder nach seinen persönlichen Erfahrungen ausfüllen wird. Für die eventuelle Fortsetzung sind die Jüngeren zuständig, die später rückblickend das erzählen werden, was ihnen noch bevorsteht. Wo auch immer und wie sie leben werden, werden sie innerhalb der Familie über Freude und Leid zu berichten haben, Freude über die Geburt und das Heranwachsens der Kinder, Leid um den Tod der Menschen, die wir geliebt haben. Sie werden von dem ewigen Kampf um eine Verbesserung der eigenen Lebensumstände, um eine sichere Zukunft ihrer Kinder berichten. Sie werden auch von dem Leben außerhalb der Familie erzählen, dessen Qualität von dem Grad der ihnen zugebilligten äußeren und inneren Freiheit abhängig sein wird. Je durchlässiger die Grenzen zwischen Menschen und zwischen Staaten sind, desto größer sind die Chancen für ein reiches erfülltes Leben. Die 33 Nachkommen der zwei Ahnenpaare Knaur und Blondeau, die die unterste Linie der Tafel bilden, sind zwischen Berlin und der Bretagne (sogar in der Karibik) ,zwischen dem Ostseestrand und der Mittelmeerküste verstreut. Zwischen Ost und West, zwischen Nord und Süd sind sie an sich winzige Punkte, die jedoch trotz ihrer Winzigkeit eine Rolle bei der Festigung der Beziehungen zwischen Menschen verschiedener Herkunft zu spielen haben, denn sie wissen, daß sie, wenn auch ihre Lebensumstände, ihre Zukunftspläne sehr mannigfaltig sind, zu einem und demselben Stamm gehören.

Freiburg in Breisgau

Winter 1990 / 91



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